Je pense qu’on a fait une erreur en laissant partir Lucy... Plus j’en entends sur elle, et plus je me dis qu’elle est effectivement dangereuse.
Cette phrase... Nana pensait exactement le contraire. Plus elle apprenait de nouvelles choses sur sa sœur de race et plus elle était encline à lui faire confiance. Elle tenta d'ailleurs de protester, mais avant même qu'elle puisse ouvrir la bouche, l'agent Natalia répondit au policier qu'il fallait d'abord la trouver. Nana avait beau chercher une ouverture dans le dialogue, mais elle n'y arrivait pas. Et sa timidité n'aidait pas du tout. Elle était un peu perdue, ne se sentait pas à sa place dans cette conversation, surtout lorsqu'ils parlèrent de frontières. La jeune diclonius connaissait vaguement les différents pays importants de ce monde, mais n'étant allée à l'école qu'à peine plus d'une année, elle ne comprenait strictement rien de ce qu'ils disaient. Elle repensa à la raison de sa visite et regarda autour d'elle afin de trouver l'objet qu'elle recherchait, mais il ne semblait pas être ici. Peut-être que Lucy l'a pris... Dans tous les cas, la boite à musiques ne doit pas être perdue. C'est un symbole trop fort pour Kouta pour que Nana se permette de l'abandonner à des inconnus. Après tout, c'est sa nouvelle famille, famille où elle est la sœur de Lucy...
Le policier s'adressa ensuite à Nana directement, lui disant qu'ils connaissaient le passé houleux de la dangereuse diclonius ainsi que de l'existence du laboratoire, mais il semblait se tromper sur la réelle utilité. Il semblait penser qu'il s'agissait du lieu où s'entrainaient les diclonius. S'entrainer comment ? Non, elle sont juste regroupées là pour qu'elles ne fassent du mal à personne ! Si le laboratoire n'existait pas, il y aurait une trentaine de jeunes meurtrières mutantes dans les rues du Japon, détruisant tout sur leur passage ! Elle s'apprêtait à protester lorsque la suite de sa tirade la laissa sans voix :
Et nous sommes peu rassurés de savoir qu’il existe un tel laboratoire en plein cœur du Japon, prêt à nous péter à la gueule comme un gros furoncle planté dans le cul.
Elle avait ouvert la bouche lorsqu'il avait dit cela, et elle la laissa ouverte sans en sortir un seul son. Non pas qu'elle était choquée par sa vulgarité, mais qu'elle n'avait strictement rien compris de cette phrase. En effet, elle ne savait pas ce qu'était un furoncle, personne n'ayant jamais utilisé ce terme devant elle. Et il parle d'un laboratoire, de pétage de gueule, et d'un truc inconnu dans un cul. Ses yeux s'arrondirent et fixèrent le policier, cherchant vainement à saisir un brin de logique dans ce qu'il venait de raconter, avant de renoncer en baissant le regard, fermant la bouche et secouant rapidement la tête comme pour sortir cela de sa mémoire. Elle devait absolument rester concentrée pour pouvoir savoir ce qu'ils veulent vraiment. Heureusement pour elle, l'agent Natalia semblait plus compatissante envers elle, et elle se mit à lui expliquer correctement la situation. Et elle dit qu'ils pensaient que le laboratoire voulait utiliser les diclonius pour une invasion ?? Co... Comment ça ? Pourquoi feraient-ils ça ? Non, son père lui a dit que le laboratoire faisait des études sur les diclonius pour en apprendre plus sur elles et mieux les contrôler pour qu'il y ait encore moins de morts humains à cause d'elles ! Et même s'il était contre certaines pratiques, il faisait partie des scientifiques. Mieux même, c'est lui qui s'est occupé d'elle pendant les nombreuses années de son éducation. D'après lui, elle est la seule diclonius à comprendre que la vie humaine est importante et qu'il ne faut pas la détruire, alors que les autres pourraient tuer sans même l'ombre d'une hésitation ou d'un remord. Il n'y a qu'à voir le carnage provoqué par Lucy lors de sa fuite ! Non, pour la jeune diclonius, cela n'était pas possible. Et même ils veulent attaquer le laboratoire !? Non, elle ne peut pas laisser cela se produire.
Que peux-tu nous dire sur ce laboratoire ? Sais-tu ce que ces gens cherchent à faire ? Les autres diclonius sont-ils vraiment aussi sauvages que ce que Lucy prétend ? Serais-tu capable de nous indiquer l’emplacement précis de ce laboratoire, à quoi il ressemble ? Comment vous en êtes-vous évadées, toi et Lucy ?
Nana nota dans sa tête chacune des questions de l'agent Natalia et les étudia une à une, jugeant à quoi il était bon de répondre et ce qu'il fallait absolument cacher pour éviter que des humains meurent encore une fois à cause des diclonius. Elle se massa les tempes d'une seule mains, cachant ses yeux avec sa paume en réfléchissant intensément, ce qui lui prit pas moins de trente longues secondes, avant de poser ses mains sur ses jambes et de regarder la femme rousse d'un regard étrangement assuré, comme si cela lui avait donné confiance en elle.
Agent Natalia...
Sa voix ne tremblait plus du tout et était représentative de son état d'esprit.
Vous dites que vous ne voulez pas mettre les humains en danger, mais que vous songez à attaquer le laboratoire. Savez-vous ce que vous ferez des diclonius ? Comment vous les maîtriserez ? Comment vous les amènerez vers leur nouveau lieu de vie qui sera comme ce qu'il y a au laboratoire ? Toutes les diclonius sont emmenées au laboratoire peu avant leur naissance, moi y compris. Les autres ont dû êtres tuées car elles étaient incontrôlables. Lucy est la seule exception. Comment ferez-vous pour toutes les emmener alors qu'elles peuvent vous tuer avant même de pouvoir assez les approcher pour les porter ? Sans même bouger un doigt ? Je ne sais pas ce que Lucy vous a dit à propos des diclonius, mais ce sont des créatures bien plus dangereuses que tout ce que vous pouvez imaginer. Vous n'êtes pas capables de saisir l'étendue de nos pouvoirs, vous qui n'êtes pas habitués à nous. Et puis, imaginez qu'une race vous enferme et vous torture pendant toute votre vie. Si on vous donne l'occasion de sortir, n'essayerez-vous pas d'éradiquer la race qui vous a enfermée ?
Elle baissa la tête, regardant ses genoux.
C'est ce que toutes les autres diclonius pensent, que les humains nous enferme juste pour nous torturer. Mais comme le disait mon père, il y a du mauvais dès la naissance chez les diclonius. Dès qu'on découvre nos pouvoirs, on a besoin de tuer. C'est ce que j'ai ressenti aussi quand j'avais quatre ans, mais mon père m'a aidée. Il m'a éduquée, et cela a pris plusieurs années mais j'ai finalement compris. J'ai compris qu'il faisait ça parce qu'il avait peur, parce qu'il ne voulait pas nous voir tuer des humains. Il m'a enseignée que chaque vie humaine est très importante, et qu'il ne faut pas la détruire. Et il m'a aussi dit que j'étais la seule diclonius à l'avoir compris.
Elle laissa planer quelques secondes avant de relever la tête, son regard alternant du policier à l'agent Natalia.
Lucy s'est échappée en détruisant tout sur son passage, en tuant tous ceux qui étaient sur sa route. Moi, je... Je ne sais pas vraiment...
Sa voix commença à perdre significativement de l'assurance et de peps alors que son regard trahissait l'incompréhension qu'elle avait face à cet acte qu'elle raconta :
C'était après ma défaite contre Lucy. J'étais allongée sur une table, entièrement sous des bandages, et mon père m'a donné une pilule. Ensuite, je me suis endormie et je me suis réveillée sur la plage, dans une espèce de pilule géante. Il y avait une valise avec de l'argent, beaucoup d'argent, et un mot de mon père qui me demandait de vivre. Ensuite, la seule fois où j'ai revu mon père, c'est quand il est mort... Avec sa vraie fille dans les bras...
Son regard se baissa à nouveau tandis qu'une larme fit son apparition dans son œil gauche et commença à tracer une ligne saline sur sa joue.
Dé... Désolée... fit-elle la voix tremblotante. Ce n'est pas important...