Véritable arsenal ambulant, Ariman leur montra une sorte de gros pistolet, chargé de munitions spéciales, des «
psycannon ». Un terme qui ne signifiait pas grand-chose pour Sélène, mais qui choisit de s’en tenir là. Elle était un peu dépassée par cette technologie futuriste, qui allait largement au-delà de ce qu’elle-même connaissait. Serait-elle vraiment utile contre ce Gardien ? Elle l’espérait, se rappelant encore ce rude et âpre combat. Mythilène avait, fort heureusement, pour l’aider, un esprit très analytique, d’un point de vue magique. Car la magie, comme toute autre chose en ce monde, avait ses propres règles, sa propre logique, et, quand on la comprenait, quand on en saisissait les aspérités, on pouvait alors dérouler le fil. Face au Gardien, c’était une nécessité. La Princesse n’allait néanmoins pas laisser la peur l’étreindre, et reprit sa marche.
Les jardins du manoir étaient grands, et les monstres exotiques que le groupe avait combattu avant de rencontre le Gardien, les Ogrelins, étaient également tombés sur les croisés. Dans une cour, Sélène vit ainsi un corps découpé en deux, avec une longue traînée de sang menant jusqu’à son tronc, comprenant une série d’intestins sanguinolents. Le reste du spectacle était à cette image, et elle vit un Ogrelin dont le corps était transpercé de multiples flèches et carreaux d’arbalètes. Les chiens furieux des Ogrelins avaient également été tués, et, en grimpant des marches, Sélène vit également des cadavres d’ékinoppes, de redoutables plantes carnivores. Il y avait de multiples cadavres, et, sur certains, le sang était encore relativement frais.
«
Pendant qu’on se battait là-dessous, ça a sévèrement combattu ici... finit par commenter Sélène.
-
Ces hommes sont très bien armés. Un équipement de bonne facture, des élixirs, des armes enchantées... L’Ordre Immaculé sait à quoi ils ont affaire. »
C’était également ce que Sélène avait pu noter en observant les corps. Elles en avaient profité pour détrousser les cadavres, prenant quelques bourses, et des fioles. On pouvait s’offusquer contre une telle pratique, mais, dans le monde de l’aventure, elle était très fréquente. Après tout, ces morts n’auraient plus besoin de leurs pièces d’or ici, et les élixirs pouvaient servir. La configuration du jardin semblait, par ailleurs, avoir très étrangement évolué, se modifiant, comme si ce jardin était animé, vivant. Là où Sélène pensait jadis avoir des passages, elle voyait tout un ensemble de ronces, d’arbustes, et de feuilles.
En s’éloignant un peu, le trio rejoignit une
zone un peu plus sauvage, mais toujours aussi sombre, longeant des remparts vertigineux, le manoir étant situé à flanc de colline. En contrebas, on voyait une brume laissant néanmoins apercevoir de multiples arbres. Tout le marais était visible depuis cette zone, un spectacle sinistre et des plus glauques. En continuant à marcher, Sélène avisa la présence d’une espèce de plateforme d’observation en bois.
«
Par ici... »
Curieuse, elle se rapprocha, et constata la présence d’un trépied de peinture avec une toile blanche, légèrement poussiéreuse.
«
Hum... -
Iris était une peintre, non ? Je l’imagine très bien, assise là, observant le paysage, pour y trouver son imagination... »
Jadis, avant que les marais ne soient totalement corrompus par le Chaos, le spectacle devait en effet valoir le détour. Mais, ici, l’air était rance, nocif, agressif, et il y avait toujours, sur Tetsihéane, cette espèce de chape de plomb, de brume, qui noyait tout. Alors que Sélène observait silencieusement le décor, un hurlement venant du fond du jardin la fit tourner la tête.
«
Ça se bat encore... »
La route du trio les amena néanmoins à s’éloigner davantage, pour rejoindre une sorte de labyrinthe végétal. Un endroit également sinistre, qui n’inspira guère Sélène, qui avait l’impression que la végétation était vivante, et agressive. Et, plus le trio avançait, et plus ils purent entendre des bruits de mastication et des grognements. Ils arrivèrent ainsi au milieu du labyrinthe, comprenant une belle fontaine, et des cadavres supplémentaires... Ainsi que de sinistres créatures aux yeux brillants qui se redressèrent en les voyant : des
brumelins ! Ils grognèrent en les voyant, et Mythilène réagit rapidement, envoyant un cône de glace qui fusa vers l’un d’eux... Pour heurter la fontaine derrière, explosant contre le marbre.
Le monstre s’était en effet déplacé, en profitant pour devenir invisible.
«
’Chier, saloperies... Méfiez-vous, ils peuvent devenir invisibles ! »
On ne les appelait pas
brumelin pour rien. Ces monstres vivaient dans la brume, et étaient redoutables, car ils étaient capables de devenir invisibles. Pour autant, ils n’étaient pas intangibles, ce que l’un de ces monstres constata quand Sélène, en fermant les yeux, déploya son épée, en entendant un approcher, et lui trancha le poignet, le faisant hurler, la douleur le rendant de nouveau visible, suffisamment pour que Mythilène l’achève à l’aide d’arcs électriques qui crépitèrent de ses doigts pour frapper le monstre, le repoussant violemment au sol.
Mais il en restait encore d’autres...