Miya était surprise par la réaction de Marine. Avant, soit on se jetait à ses pieds, soit on l'évitait... Ce qui lui avait très bien convenu, même si elle avait toujours craché sur cette immortalité, et surtout, sur la divinité à cause de qui elle l'avait... Et la rouquine avait eu la même réaction qu'un certain inspecteur : de la compassion - Miya refusait d'y voir de la pitié. Elle eut un pauvre sourire avant de baisser les yeux, et haussa les épaules.
- Oui, l'immortalité est un supplice. Il existe des sorts qui peuvent entraver cet arrêt du vieillissement, mais seul mon frère jumeau les connaissait. Et il y a une faille dans mon immortalité, une seule manière de mourir. (Elle eut une grimace légèrement comique.) Je suis obligée de me la faire oublier à moi-même pour ne pas me fiche en l'air, en ce moment. Je ne me suis pas intégrée à cette société, en fait, je ne connais que ce bar et... un appartement, en ville. Je n'ai jamais pris le temps, et l'envie ne s'est jamais manifestée, d'aller ailleurs. Ce monde me fait peur... Comme vous, je ne comprends pas ce monde.
C'était sans doute parce qu'il y avait ici une forme de liberté qu'elle n'avait jamais connu dans son monde, une sorte de vertige vertical, à présent qu'elle vivait sans dôme au-dessus de la tête. Miya n'aimait pas la Terre, en fait, elle lui faisait presque regretter sa terre natale - qui était détruite, certes... Elle leva la tête vers Marine après leur avoir resservi une tasse de café chaud, et prit sa tasse par l'anse.
- Vous avez vraiment tout oublié ? Je ne vous envie pas... Je connais un sort d'oubli, mais je me raccroche à mes souvenirs - je n'ai plus que ça, en fait, pour essayer de trouver une raison de vivre... Je vous ai tout dit, ou presque, de moi. A votre tour, si vous voulez bien me faire confiance. Je pourrai peut-être vous aider...