Choupinette [pv Shad][Abandon]

Maintenant que son bataillon est bien installé à Nexus, le commandant a vu sa charge de travail fondre comme neige au soleil. On peut reconnaître un bon chef lorsque ses subordonnés peuvent se passer de lui, disait jadis son mentor. Il apprécie donc à leur juste valeur ces journées tranquilles, trop tranquilles. À vrai dire, même la paperasse commence à lui manquer, c'est dire à quel point il ne supporte pas l'ennui. Un hobby, il lui faut de quoi s'occuper l'esprit et les mains. Neliel, son assistante, rentre dans le bureau et se met à rire en voyant son supérieur la regarder avec l'espoir qu'elle lui apporte un peu de travail.

« Désolée Commandant, toujours rien. Vous avez déjà pensé à prendre un animal de compagnie ? C'est mignon, ça fait une présence, il faut s'occuper de lui, jouer avec. Je suis sûre que vous seriez un bon maître. »

Takael prit quelques secondes pour y penser, l'idée est plutôt bonne, la présence d'un animal ne le gênerait pas dans son travail tout en l'occupant pendant les temps morts. S'il ne peut pas s'en occuper lui-même, il y aura toujours une présence ici pour le faire à sa place, que ce soit Neliel ou l'un de ses hommes. Et effectivement, un animal apporte une présence agréable, des jeux divers, etc. Repoussant sa chaise en arrière, il se lève et répond :

« C'est une bonne idée Neliel ! Une excellente idée ! Je sors en ville ! »
« Amusez-vous bien Commandant. »

Lui répondit-elle avec un sourire bienveillant, en le regardant s'éloigner. L'elfe fit un bref détour par sa chambre pour enfiler des vêtements civils, une tunique blanche tissée d'argent aux extrémités, avec un pantalon de même couleur et une paire de bottes en cuir. Il passe une ceinture autour de sa taille, y accroche sa bourse et se dirige vers la cour. Direction l'animalerie !

Après quelques temps, le voici en plein cœur de Nexus, paradis des marchands et des acheteurs. Ici, tout peut être acheté, la seule limite étant la taille de votre bourse. La garde est plus fournie à cet endroit de la ville, incitant les éventuels voleurs à se tenir tranquilles. Tout est fait pour que l'acheteur puisse s'y promener en toute quiétude et y dépenser le plus possible. Au fil des échoppes, Takael fini par repérer les animaux de compagnie qui l’intéressent, enfermés dans des cages ou attachés : des esclaves terranides. Il y a de tout, des mâles, des femelles, des petits, des grands, des musclés, des chétifs, prédisposés au travail ou prédestinés à servir d'esclave sexuel. L'elfe s'éloigna vite de la partie réservée aux mâles, pour rejoindre ce petit bout de paradis qu'est la partie réservé aux femelles. Il y en a de toutes les espèces, de toutes les corpulences, dociles ou rebelles. Ah oui, il a un faible pour les rebelles, il aime qu'on lui résiste au début la suite n'en est que meilleure. Il y a aussi l'acte de l'achat en lui-même, acheter une esclave n'est pas la même chose que de la capturer en pleine nature. Par cet acte on achète littéralement sa vie en la réduisant à l'état de marchandise, alors l'être n'est plus qu'un vulgaire objet à qui son maître peut rendre un peu de liberté et de dignité. Il apprécie ce sentiment de toute puissance, bien qu'il ai l'habitude de ne pas en abuser.

Au fil des présentoirs et des cages, plusieurs terranides attirent son regard, mais il lui manque le coup de foudre, la petite chose en plus qui le fera craquer. Soudain, du coin de l’œil, un bleu vif attire son regard, des mèches de cheveux bleus. Elles appartiennent à une terranide louve exposée là en haillons, à son cou un collier auquel est accrochée une pancarte mentionnant : DELINQUANTE SANS SCRUPULES. Attachée mains dans le dos à un poteau, le marchand a eu la cruelle idée de l'attacher trop bas pour qu'elle puisse se mettre debout et trop haut pour qu'elle puisse s'agenouiller. Takael ne sait pas depuis combien de temps elle tient cette posture, mais il n'aime pas ce genre de méthodes consistant à faire mal pour faire mal. La pauvre créature semble complètement perdue, en proie à la confusion, à côté d'elle, tout un équipement, dont trois épées. S'il s'agit du sien, c'est qu'elle n'est pas du genre à se laisser faire, on ne porte pas une épée sans être prêt à tuer pour se protéger. L'elfe l'observe de plus près, sans dire un mot, il ne doit pas être le premier à le faire de toute façon. De jolis yeux bleus, des oreilles et une queue de louve, une peau claire, marquée de cicatrices si on y regarde de plus près. Tortures ou combats ? À première vue il ne le sait pas, mais il est persuadé qu'elle n'a pas eu une vie calme. Il se tourne vers le marchand, curieux de savoir le pourquoi de cette posture et de cette pancarte :

« Bonjour. Qu'a-t-elle fait ? »
« Ah bonjour messire, une saleté de voleuse, toujours pareil avec ces sauvageons. Pas d'éducation, pas de valeurs morales, des nuisibles ! Pourtant, elle a l'air de s'être déjà faite corriger, mais ça n'apprend jamais rien ces saloperies ! »
« Vous pourriez la redresser que je l'inspecte un peu mieux ? »

Un mensonge, il l'a déjà suffisamment inspectée, il souhaite seulement soulager ses genoux, les jouets cassés n'amusent personne. Et puis, elle ne lui a rien fait pour l'instant, il n'a aucune raison de la laisser souffrir pour rien. Quoi qu'elle ait pu faire, elle a suffisamment été punie comme ça.

« Vous avez l’œil messire, elle n'a rien dans le crâne, mais joli corps, bien musclé. Elle est plus robuste qu'elle en a l'air. Ah, par contre, je ne connais pas son nom, on va dire Choupinette pour les papiers. Vous ne passeriez pas à côté de cette affaire, uh ? »

Le vendeur perd son temps et sa salive, l'elfe a déjà l'intention de l'acheter. Il consent toutefois à rentrer dans son jeu, pour lui faire plaisir. Il sait très bien que montrer son intérêt fera augmenter le prix, mais il n'est pas là pour négocier. Il a autre chose à faire et il n'est pas bon négociant de toute façon, Neliel est bien plus à l'aise avec ce genre de choses.

« Vous avez raison, c'est une belle affaire. Combien ? »
« Oh, vous m'êtes sympathique messire, je vous fait un prix d'ami ! »

Tss, menteur, pense Takael, sachant qu'il a probablement dit la même chose à tous les clients qu'il a croisé auparavant. Discrétion oblige, le marchand inscrit le prix sur un papier et le montre à l'elfe. Normalement cela vient des enchères, pour éviter les envolées abusives, mais c'est devenu une sorte de tradition, même pour les ventes classiques. Une façon de faire en sorte que le client se sente important et spécial, sans doute. Il regarde le papier et acquiesce, le prix semble correct. Il verse la somme demandée, signe quelques papiers de propriété, coince son exemplaire dans sa ceinture et se relève, serrant la main du commerçant.

« Un plaisir de faire affaire avec vous, je vous prépare la sauvageonne ! »

Une petite minute plus tard, la pancarte toujours accrochée au cou, mains enchaînées dans le dos, une laisse reliant son collier à la main du marchand, la louve lui est présentée. Avec un rire gras, ce dernier tend la laisse à son client, bien content d'être débarrassé et de pouvoir revendre ses affaires. L'elfe se met à marcher, suffisamment lentement pour que la louve puisse suivre sans forcer, cherchant à quitter la place pour être un peu plus au calme, loin du brouhaha. Il s'enfonce dans une petite ruelle non loin, une impasse qui n’intéresse guère les passants.

« Ne bouge pas. »

Ordonne-t-il d'une voix calme et chaude. Il approche ses mains de son cou et défait la pancarte avant de la poser contre un mur. Il n'a aucune raison de la balader en ville avec ça, elle ne lui a rien volé à lui. Si Takael peut être parfois brutal, il essaye aussi d'être juste. Avec un petit sourire moqueur, il demande :

« Alors ? Choupinette. As-tu un véritable nom ? Je m’appelle Takael. Je vais te détacher les mains et je te déconseille d'essayer de t'enfuir, tu n'y arriveras pas de toute façon. »

Sur ces mots, il se pencha pour défaire les chaînes retenant les poignets de la terranide. Il ne bluffe pas lorsqu'il dit qu'elle n'arrivera pas à le semer, il est rapide et habitué aux poursuites. Une terranide qui est resté des heures avec les genoux à demi-pliés ne pourra pas le distancer. Il jette la chaîne au sol à côté de la pancarte, ce n'est pas très civique, mais la voirie s'en occupera. Il n'a pas envie de se trimballer avec tout ça, en revanche il apprécie la laisse et compte bien la garder.

« Tant que nous sommes en ville, nous allons aller t'acheter des vêtements un peu plus jolis. Ces haillons ne te vont pas. Ça va aller, pour tes jambes ? »

Ça tire….Cette position est loin, très loin d’être agréable. Les bras accrochées au poteau dans son dos sont légèrement surélevés ce qui provoque une sensation de tiraillement au niveau des épaules, quant à ses genoux et cette chaleur qui l’accablait…Bon sang, elle donnerait tout pour pouvoir se relever ou simplement les poser à même le sol. Voilà plusieurs heures que la Terranide tenait cette posture et qu’elle ne disait mot. Son regard se levait de temps en temps vers la foule, mais elle le rabaissait rapidement, cherchant dans son esprit à comprendre pourquoi une telle chose été arrivée. Pourquoi elle n’avait pas réussi à utiliser la moindre de ses capacités. Ha ! Elle avait eu l’air maligne quand elle avait claqué des doigts et que rien, pas la moindre flammèche n’en était sortie !  La Lycane avait donc misé sur la potentielle présence d’un sort d’anti-magie, chose rare mais possible et s’était tenue prête à se défendre l’arme au poing. Mais là aussi, elle n’avait pas réussi. Une puissante fatigue l’avait terrassé.  C’était comme si on venait tout simplement de la vider de toute ses forces.  Un autre sort ? Non à bien y réfléchir, le groupe qui l’avait attaqué ne possédait pas de mages, alors pourquoi ? Pourquoi une telle chose était arrivée ? Et pourquoi se sentait-elle si faible ?

On parlait à ses côtés, une de ses oreilles bougea quand on l’a traita de voleuse. Ce n’était pas vrai, mais…les Terranides mentaient toujours n’est-ce pas ? Elle aurait voulue répondre, rétorquer, mais, la Lycane n’en avait pas la force. Il lui arrivait parfois de se mettre –volontairement – en tant que marchandise au sein des marchés d’esclaves et en fonction du maître qu’elle recevait, ele agissait en conséquence. Et ces fois-là, son air farouche et sa non-soumission attirait souvent l’attention, mais cette fois, la Louve  ne bougeait pas, perdue dans ses pensées.  Tellement perdue qu’elle ne prêta pas attentions à la demande d’un acheteur potentiel. Et ce fut seulement que lorsqu’elle fut légèrement redressée qu’elle put enfin sentir un poids s’envoler. Ce n’était pas grand-chose, mais après être restée tant d’heures dans cette posture pour le moins inconfortable, ils ‘agissait là d’une délivrance ! Tiens encore des insultes. Bha ! Ce vendeur n’en était pas à une prêt !

Choupinette ? ! Pour quoi la prenait-il un animal ? Question rhétorique, bien sûr qu’il la prenait pour un vulgaire animal ! Mais…Etait-elle en train d’être vendue ? La Louve releva brièvement son regard et observa son futur acquéreur. Un elfe, tiens à y réfléchir, c’était la première fois qu’elle en voyait un, du moins un mâle. Quelle dommage que ce soit dans de telle circonstance ! Etrangement, elle ne chercha pas à riposter, préférant sur le coup  être vendue et pouvoir s’enfuir le moment venue. Ce n’était pas la première fois que cela lui arrivait et ce ne serait sans doute pas la dernière, mais si cet elfe pensait qu’il allait l’éduquer à sa manière, il se mettait le doigt dans l’œil. La vente établit, le nouveau bien de l’elfe lui fut apporté et tous deux quittèrent assez rapidement la place publique. Tiens ? Marchait-il plus doucement pour l’aider à récupérer ? C’était…bienveillant, mais mieux valait se méfier et la Terranide avait déjà des séances de tortures bien plus horribles que cela ! Pour ainsi dire, son rythme de pas, accélérait petit à petit, preuve qu’elle commençait déjà à récupérer, jusqu’à ce qu’il s’arrête dans une ruelle annexe.

« Ne bouges pas »

Et…L’Okami s’exécuta, elle ne bougea pas, le laissant faire, jetant un dernier regard à la pancarte, tissu de mensonges, qui trônait à présent contre un mur d’une ruelle délabrée. Elle ne fit également aucun geste quand il vint défaire ses liens, du moins ceux de ses poignets, se contentant simplement de les remettre face à elle et de les masser, ces derniers étant un poil endoloris. La marque de la corde se lisait également sur l’épiderme.

« Merci. » souffla-t-elle tout simplement avant de reprendre – Shad pour le prénom »

S’enfuir ? Oh elle le pourrait, du moins elle aurait pu dans d’autres circonstances, mais actuellement son état ne le lui permettait pas.  A l’énonciation des vêtements, la Terranide regarda par-dessus son épaule, en direction du supposer stand où elle venait d’être vendue.

« Mes affaires sont là-bas…. »

A ces mots, elle tourna son visage pour croiser le regard de Takael. Bien que son regard trahisse une fatigue et unE certain confusion quant aux éléments passés, une lueur de sincérité brûlait au fond de ses prunelles. La Terranide ne mentait pas en disant que tout l’équipement qui se trouvait à ses côtés lui appartenait bel et bien, mais encore fallait-il qu’on la croit ! Et elle doutait fortement que ce soit le cas, autant faire une croix dessus. Pour l’instant. Ha  Quel moment comique ce serait que de voir que le prochain porteur se retrouve d’un coup sans arme ni armure ! Mais pour cela, il lui fallait une once de magie pour que toutes ses affaires lui reviennent de qui de droit. Chaque chose en son temps. Pour l’heure, la Louve ne voulait pas jouer les esclaves farouches, elle n’en voyait pas l’utilité. Ou du moins elle n’en avait également pas la force.

« Sinon…-entama t’elle en sous-entendu qu’il ne la croirait pas concernant l’armure et les armes - A deux ruelles d’ici, on peut y trouver un atelier de couture, l’endroit est modeste et les prix sont assez bas, je pense que l’on trouvera un vêtement adéquat là-bas.... Et oui…_ça va aller…»

Et puis, se changer n’allait pas lui déplaire ! Se balader en haillons ? Merci, mais non merci ! Il ne restait plus qu’à espérer qu’il lui prenne des vêtements un poil décent car tout pouvait encore arriver. Son regard se posa sur la laisse à son cou et ses doigts vinrent en effleurer l’extrémité attachée à son collier. Dommage, il ne lui avait pas retiré également avec ses liens aux poignets….Mais bon c’était un peu logique ! Une esclave en laisse était toujours un symbole de puissance et d’humiliation pour l’autre. Une question cependant taraudait l’esprit de la Terranide à présent : Qu’est ce qui allait réellement lui arriver ? Bien qu’il pouvait avoir l’air sympathique et bienveillant, la méfiance restait de mise. Ces êtres qui jouent sur la confiance d’autrui, c’était bien là les pires qui puissent exister.

Plutôt coopérative, pense Takael en écoutant la louve. A-t-elle le choix cependant ? Probablement pas et ce n'est pas amusant ainsi. Un être trop contraint n'est qu'un pantin sans âme, il n'y a rien de plus triste à voir que ça. Ce n'est pas ce qu'il désire, sauf peut-être pour un ennemi, mais Shad n'est pas une ennemie. Ni une amie d'ailleurs, quelle est leur relation au juste ? S'interroge-t-il intérieurement. Techniquement, elle est une marchandise dont il a fait acquisition, ce qui est plutôt neutre. L'attitude du Commandant est bienveillante jusqu'alors, donc il suppose que leur relation actuelle est celle de deux êtres qui se jaugent mutuellement. Raison pour laquelle l'elfe ne souhaite pas la tromper, il n'est pas parfait et il lui fera faire des choses qui ne lui plairont pas. La vraie question c'est : où se trouve la juste balance entre ses désirs et les siens ? Entre sa bienveillance et son autorité ? Il ne le sait pas encore, mais son esclave va lui apporter la réponse sur un plateau. La principale qualité d'un chef militaire, comme tout chef, est de savoir bien s'entourer. Savoir jauger ses subordonnés, deviner quand ils mentent ou disent la vérité, est une compétence essentielle. C'est un petit jeu dans lequel l'elfe excelle, tant grâce à son sens de l'observation, qu'à son sens de l'analyse.

« Mes affaires sont là-bas…. »

Les yeux de la louve se tournèrent pour rencontrer les siens, le regard de celui qui vient de subir une injustice. De plus, les menteurs ont généralement tendance à éviter le regard de l'autre plutôt que de le chercher volontairement. Ce ne sont pas les seuls détails qui vont dans le sens de sa version qui plus est. Soit elle joue très bien la comédie, soit elle est sincère. Il la laisse finir, écoutant attentivement, l'observant de son regard inquisiteur, un regard neutre, attentif au moindre détail. Lorsqu'elle cesse de parler, Takael reste un instant muet, se tenant le menton pour réfléchir, puis commence à réfléchir à voix haute :

« Une chose me dérange … Quatre épées, ça fait beaucoup de poids à porter, mais ce n'est pas irréaliste. Surtout si elles correspondent à un style de combat où le changement d'arme est nécessaire. Des armes de jet, bon choix, rapide et efficace, facile à dissimuler. Cependant, ça ne ressemble pas à du matériel d'assassin, plutôt une sorte d'option supplémentaire en combat. Quant à la tenue, elle semble faite sur mesure, il n'y a aucun intérêt à voler ça, à moins de déjà connaître un acheteur à qui elle ira parfaitement. Improbable. Ah, aussi, l'amulette et le bracelet, non-retirés alors que le marchand a probablement essayé. Magiques, je suppose ? Pas volés en tout cas. »

Il approche sa tête de la peau de Shad, regardant de plus près son corps, continuant à parler en même temps :

« Les cicatrices, la musculature, beaucoup de combats j'imagine. Pourtant la tenue est comme neuve et ne semble pas avoir été réparée. Généralement on préfère garder son équipement quand on y est habitué. Alors pourquoi est-il en si bon état malgré les blessures ? Une propriété magique peut-être ? »

C'est ce qui est le plus terrifiant pour ses ennemis, sa faculté à deviner les choses à partir de peu d'éléments. Il déteste les détails irrésolus, il n'aime pas ne pas comprendre ou quand quelque chose lui paraît illogique. Puis, sans prévenir, il s'est mis à sourire à Schad en éloignant un peu sa tête, détournant légèrement son regard, pensif :

« Hum, je te crois, c'est ton équipement ! Je ne comprends pas tout à ce sujet, mais je te crois. »

Son regard revient sur Shad, il est différent de tout à l'heure, c'est un regard joueur, amusé. L'elfe vient d'avoir une idée. Un esclave sans choix n'est qu'une machine sans âme, un pantin, un objet froid, c'est un être ennuyant et triste. La louve vient de se servir elle-même sur un plateau son premier choix de leur relation :

« Pourquoi veux-tu récupérer cet équipement ? Tu y es attachée ? Tu en as besoin ? Pour quoi faire ? Pourquoi ma louve aurait besoin d'armes et d'une tenue de combat ? »

Ces questions n'en sont pas vraiment, Takael n'attend aucune réponse de sa part et enchaîne dans la foulée :

« Passons un marché, ce sera l'occasion de voir si ta parole a une valeur ou non. Je peux récupérer ton équipement pour toi, à une condition, une seule ! Que tu acceptes de porter tous les vêtements que je te dirais de porter. Ces termes ne sont pas négociables. Tu peux refuser bien sûr, tu peux même essayer d'aller chercher ton équipement toi-même, je ne t'en empêcherais pas. Par contre, si tu te fais prendre je serais obligé de le restituer au marchand et de te punir en public. »

N'ayant pas l'intention de la brusquer plus que nécessaire, l'elfe lui laisse le temps de réfléchir, sans parler. Il n'a aucune intention de la tromper, il respectera sa part du marché si elle l'accepte. Il veut être témoin de ses choix et s'en amuser, voir de quoi elle est faite et les risques qu'elle est prête à prendre ou non. D'une certaine manière, il cherche déjà à mieux la connaître à sa façon.

Perspicace. Très perspicace. En prenant le temps d’observer et non de juger à la va-vite, l’elfe avait en effet compris que la Louve ne mentait pas.  Et elle ne pouvait nier qu’il avait le sens du détail ! Après quelques réflexions, il avait  trouvé sans mal que l’armure était magique. Il était vrai que son apparence toute neuve, n’avait guère joué à la faveur de la Terranide quand on la trraita ni plus ni moins de voleuse. Quant au bracelet à son bras, à moins de couper directement ce dernier, il ne pouvait être retiré. Une propriété magique ? En quelque sorte, il la liait à son corbeau de l’effroi.

Mais encore une fois, sans once de magie, il était dur d’utiliser ce lien et de l’appeler. Elle pourrait essayer, mais la Louve doutait fortement qu’on la laisse faire  et surtout…Rien ne lui garantissait que cela allait fonctionner. Quant au médaillon, oh un avait bien essayé de l’enlever, mais ce dernier avait  sa propre volonté, et l’araignée en son centre ne s’était pas gênée pour prendre vie et mordre l’imprudent, le poison injecté le menant rapidement de vie à trépas. Tiens, est-ce que Takael oserait y toucher ? Pour l’heure, elle n’avait aucune raison de lui faire part des capacités de ces deux objets qu’elle portait. Ni même de ses réelles capacités même s’il avait pu facilement déduire qu’elle était rodée au combat.

"Pourquoi veux-tu récupérer cet équipement ? Tu y es attachée ? Tu en as besoin ? Pour quoi faire ? Pourquoi ma louve aurait besoin d'armes et d'une tenue de combat ? Passons un marché, ce sera l'occasion de voir si ta parole a une valeur ou non. Je peux récupérer ton équipement pour toi, à une condition, une seule ! Que tu acceptes de porter tous les vêtements que je te dirais de porter. Ces termes ne sont pas négociables. Tu peux refuser bien sûr, tu peux même essayer d'aller chercher ton équipement toi-même, je ne t'en empêcherais pas. Par contre, si tu te fais prendre je serais obligé de le restituer au marchand et de te punir en public ».

Etait-il en train de la tester ? Oh pas de doute, il la testait bel et bien ! Pour quel raison ? Pour voir à quel point elle serait prête à accepter un marché pour retrouver ce qui lui ait dû ? Et cette proposition qui lui tendait…la Lycane plissa des yeux et agita sa queue d’un coup bref et nerveux, cela ne lui plaisait pas. Les tenues vestimentaires pouvaient être de toutes forces et se sentir forcée à en porter une plutôt qu’une autre, n’était pas réellement ce que l’Okami appréciait le plus au monde. D’autant plus que cette histoire de marché n’était que pour la Lycane une façade, une grosse blague.

« Tu l’as dit toi-même, à quoi me serviraient mes affaires à présent que je suis «  ta » louve ? A rien. .Cette armure et ces armes m’appartiennent et me reviendront en temps et en heures. Ce n’est qu’un vulgaire chantage que tu me propose à cet instant, un chantage qui te permettrait de commencer à poser ton contrôle sur moi. Hors on sait tous que si tu veux me faire porter un habit quelconque, rien ne t’empêchera de le faire, marché ou non.  Je décline donc ta proposition mais je te remercie de l'avoir proposé.»

Pas de vouvoiement.  Il était vrai qu’elle devrait l’utiliser, mais la Louve n’en voyait pas l’utilité. Sur le papier, il avait beau être son » maître », elle ne le considérait pas ainsi. De plus, malgré son tutoiement, elle  ne venait pas l’insulter et garder un langage des plus corrects. Elle avait également écoutée attentivement ses paroles, décelant bien qu’il  y’ avait anguille sous roche.  Serait-il satisfait oui non de sa réponse ? Ca, elle allait bientôt le savoir ! A présent, vu qu’elle avait décliné son offre, il ne restait qu’une solution : partir chercher d’autres vêtements et…être amenée à son lieu de résidence.

La Lycane porta soudainement  une main à son crâne et vacilla quelques instant sur place avant de lâcher un juron et de porter cette fois sa main contre le mur à côté d’elle pour s’en servir d’appui. Encore une fois, le doute et l’incompréhension pouvait se lire dans son regard. Qu’est ce qui se passait bon sang ? Elle releva son regard vers Takael et semblait attendre qu’il se décide pour la suite.

Le maître écoute attentivement son esclave. Sa façon de le tutoyer l'embête un peu, non pas qu'il soit particulièrement à cheval là-dessus, mais plutôt qu'il ne veut pas de ça en public. Il n'a pas envie de passer pour un maître laxiste, même si se faire tutoyer lorsqu'ils sont seuls l’indiffère. Depuis qu'il est arrivé à Nexus, son cercle de connaissances s'est élargit et certains ne lui veulent pas que du bien. Il ne souhaite pas leur tendre le bâton pour se faire battre. Il a bien conscience que le vrai respect ne s'impose pas par la force brute, mais par l'admiration, on respecte ce que l'on admire. Cependant, il ne peut pas se permettre d'attendre d'en arriver là avec sa louve.

En tout cas, il apprend beaucoup de choses sur Shad avec ce choix donné, il ne regrette absolument pas sa proposition, bien que celle-ci soit refusée. La première information, c'est que la louve n'abandonne pas son équipement à regret. Elle ne lui en tiendra donc pas rigueur si son équipement reste sur place, ce qui l'arrange. La seconde information, à prendre avec des pincettes toutefois, c'est qu'elle semble sûre de le retrouver un jour ou l'autre. Cela renforce son hypothèse d'un équipement aux propriétés magiques, ce qui expliquerait quelques incohérences observées. La troisième information, c'est que Shad est méfiante, ce qui n'est pas le cas de tous les esclaves. Il ne serait pas étonnant qu'elle ait déjà été esclave par le passé et que cela se soit mal passé pour elle. En revanche, elle ne semble pas avoir peur de lui, ce qui est un bon point. Car, s'il est sain qu'il y ai un peu de peur dans une relation dominant / dominée, il est trop tôt pour cela entre-eux. Partir d'une situation neutre dans ce domaine est une bonne chose. Takael répond avec un sourire, visiblement totalement indifférent à son refus :

« Ah ah, j'aime les réponses franches ! Effectivement, je pourrais te forcer à porter ce que je veux, tu as raison. En revanche, le but n'a jamais été de te faire chanter, j'aime jouer. Un jeu n'est amusant que si on peut perdre, se refaire, gagner, perdre à nouveau. C'est ce qui fait tout le piquant, tout l'intérêt, ma proposition n'était pas un piège ou une basse tactique. En tout cas, tu ne me fait vraiment pas confiance. »

Son ton changea quelque peu, redevenant plus sérieux :

« Néanmoins, confiance ou pas, tu vas devoir faire un effort pour me vouvoyer. Je ne peux pas me permettre de passer pour un maître laxiste en public ... »

Subitement, la louve porte sa main à son crâne, perd l'équilibre et s'appuie sur le mur en pestant. En voyant la confusion sur son visage, l'elfe sait que lui demander ce qu'elle a ne sert à rien. Le problème ne vient pas de ses genoux à priori, elle semble plutôt avoir eu une sorte de vertige. Il tend sa main vers elle, repoussant sa frange en arrière avant de coller le dos de son autre main sur son front. Il cherche à savoir si elle a de la fièvre ou non. Une fois rassuré, il retire sa main du front de la terranide, utilisant l'autre pour caresser ses cheveux entre ses deux oreilles de louve.

« Préviens moi si ça se reproduit, d'accord ? Attends, une précaution. »

Du bout du doigt, il effleure son collier d'esclave, une sorte de pierre verte s'y accrochant par magie. Shad l'ignore, mais il s'agit d'un bout du slime que son maître peut invoquer, ses consignes étant de protéger la terranide et de l'empêcher de s'enfuir au cas où. Puis, Takael sort sa bourse, en sort quelques pièces et les tend à sa louve.

« Prends ça, ça devrait largement suffire pour te payer un ensemble de vêtements. Prends ce qui te plaît, j'ai quelque chose à faire de mon côté. Je te retrouve là-bas. »

Il a prévu de faire deux surprises à la terranide, deux surprises qu'il doit aller chercher le temps qu'elle choisit ce qu'il lui plaît. Il ne devrait pas en avoir pour long, mais il tenait à laisser à la louve un moyen de protection et un moyen de l'empêcher de s'enfuir au cas où. D'une pierre deux coups. Finalement, il défait sa laisse et lui fait un signe de la main en s'éloignant.

Oh bien sûr que non elle ne lui faisait pas confiance ! Ne venait-il juste pas de l’acheter telle une vulgaire marchandise que l’on peut jeter quand bon nous sembles ? Par chance cependant, il ne prit pas la mouche quand elle refusa sa proposition et même s’il était en train de la juger, l’inverse était de mise La Terranide observait avec la plus grande attention toute les réactions de son –maître-  tout comme il jugeait les siennes.  Quant au vouvoiement, elle émit un léger grognement à cela. Elle détestait l’utilisait, surtout dans une telle relation, car le vouvoiement marquait bien la position de dominé dans une relation maître à esclave. Oh, la Terranide était loin d’être indiscipliné ! Selon la personne, il lui arrivait de l’utiliser, mais en temps normal, le tutoiement était de mise. Sauf que…cet instant n’avait rien d’un –temps normal – et Shad sentait qu’elle devrait rapidement se plier à  cette satanée règle. Bien, elle ferait un effort. Finalement à bien y réfléchir, un vouvoiement, ce n’était pas ce qui allait la tuer !

Surprise, voilà ce qu’elle fut quand il posa le dos de sa main sur son front.  D’un côté, avoir une esclave malade dès le début, ce n’était pas ce qui y’avait de plus glorieux. Etrangement…il parut  compatissant, et face à sa demande de le prévenir si cela devrait de nouveau arriver, la Louve eut un sourire narquois,  comment diable était-elle censée prévoir ses futures vertiges ?  Elle hocha cependant la tête en signe d’affirmation avant de porter son index et son majeur contre la pierre verte incrustée à son collier. Elle n’était pas noire, donc, l’obsidienne pouvait être mise de côté, donc…à quoi servait-elle ? Les réponses à ses questions devront attendre !  Car au même instant l’elfe sortit quelques pièces d’une bourse et les tendit à la Terranide, avec une règle simple : Chercher de quoi se vêtir et en plus de cela il venait tout juste de défaire sa laisse et de partir de son côté !

Etrange…La Lycane le suivit du regard, se demandant ce qu’il avait derrière la tête. Une chose dont elle été sûre c’est qu’il ne la laisserait pas autant libre de ses mouvements s’il avait de quoi l’empêcher de fuir ou la retrouver rapidement. Etait-ce cette fameuse pierre ? La Louve l’effleura de nouveau. Plausible, mais vieux ne valait pas tenter le diable. Elle jeta un coup d’œil aux pièces et nota rapidement le montant, c’était peu, mais largement suffisant pour trouver des vêtements plus élaborés que  ces fichus haillons. Poussant un soupir et se mettant en  marche, la Terranide parvint rapidement à l’atelier de coutures qu’elle avait mentionné quelques temps plus tôt. Après tout, elle lui en avait fait part et juger bon de se rendre en ces lieux qu’elle avait elle-même proposé quelques instants plus tôt.

L’atelier était modeste mais de nombreux choix d’articles étaient disponibles à la vente. La Louve salua le marchand, après tout, ce dernier ne lui avait rien fait, et commença sa recherche, prenant en compte le budget qu’elle possédait. Notant la présence du collier autours du coup de la Lycane, le tailleur ne fit aucune remarque mais se garda bien de la surveiller du coin de l’œil, après tout, c’était la même qui avait eu une pancarte plus tôt qui la nommait de « délinquante sans scrupule ». La Louve quant à elle l’ignorait simplement, cherchant rapidement ses nouveaux habits. Elle jeta sur dévolu sur un simple ensemble de pantalon en cuir, d’un haut blanc en lin, et d’une ceinture de cuir à la taille. Au vue de la somme qu’elle possédait, c’était là bien assez !  En plus de cela, la Terranide n’avait pas utilisé tout l’argent, songeant que le reste pourrait être utile pour plus tard. Et s’il pensait qu’elle viendrait à acheter une robe, il se trompait lourdement, plus habituée à porter des tenues de combats, la conclusion de cet achat coulait  comme de l’eau de source.

Payant le tailleur, la Terranide sortie par la suite, regardant à droite et à gauche. Personne. Haa la tentation de fuir était grande ! Mais non ! Elle ne tomberait pas de ce fichu piège ! Elle s’asseya ainsi sur les marches devant l’atelier, jouant avec une pièce d’or dans l’une de ses mains, la faisant passer sur chacun de ses doigts avant de l’attraper dans sa paume. Toujours en haillons, n’ayant pu se changer dans la boutique, certains passant la regardait avant de continuer leurs chemins. La queue de la louve se mis à taper sur les marches d’escaliers tandis qu’elle patientait. Arrêtant son petit jeu avec la pièce, elle ouvrit la paume de sa main vers le haut et…se concentra. Rien. Toujours rien.  Poussant un autre soupir, elle reprit son petit jeu avec la pièce doré, n’ayant d’autres choix que de tuer le temps en attendant qu’il arrive.

Parti de son côté, Takael laisse son esclave vaquer à ses occupations. Il sait que le petit bout de slime qu'il a laissé sur son collier suffi amplement à prévenir toute tentative de s'en prendre à sa protégée. De plus, elle reste dans une zone où beaucoup de gardes se trouvent, voler ou abîmer l'esclave de quelqu'un d'autre est sévèrement puni. Il part donc l'esprit tranquille, apte à se concentrer sur sa tâche. Il imagine déjà la tête que fera la louve en voyant ce qu'il a prévu de lui rapporter, elle ne va pas du tout aimer vu son caractère.

Il entre dans une animalerie, une vraie cette fois, avec plein d'articles pour animaux. Paniers, os à ronger, cages, cordes, balles, tout le nécessaire pour rendre son animal heureux. Car, il va falloir que la louve prenne pleinement conscience de son nouveau statut, celui d'animal de compagnie. Ce sera probablement dur à accepter au début, c'est pour cela qu'il compte y aller en douceur, commencer petit. Il imagine déjà tout un tas de jeux avec ce qu'il voit là, mais ça attendra, il va aller à l'essentiel. Takael commence par se rendre au rayon des colliers, il en cherche un beau, un qui ira bien à la terranide. C'est alors qu'il voit une laisse accompagnée de son collier de cuir rouge, avec un médaillon en forme d'os à faire graver, parfait ! Il ira bien avec le reste de son équipement quand elle l'aura récupéré, pense-t-il avec délectation. Il prend le collier et l'amène au vendeur pour le faire graver, à l'avant « Shad » entouré de deux petits cœurs et à l'arrière, en plus petit : « Mon maître chéri : Takael Nerimor ». Très satisfait, il paye le vendeur pour la gravure et le collier, avant de sortir de la boutique.

Fredonnant joyeusement, il se rend ensuite dans l'une de ses boutiques préférées de la ville, un sex-shop un peu particulier, spécialisé dans les articles SM. Il parcours les rayons, à la recherche d'un article qu'il a déjà vu ici, une balle. Oui, bon, dit comme ça, ça a l'air nul et en plus, c'est une balle tout à fait normale. Sans aucune particularité, pour l'instant ! Tout l'intérêt à cet achat à cet endroit, vient de ce qu'il se passe en arrière boutique. Takael connaît déjà le personnel, il est en mesure de leur demander de petits à côtés, comme de s'occuper aussi du collier. Ils enchantent des objets, dans le cadre du dressage d'esclaves et autres passe-temps du genre. Il passe donc commande pour trois enchantements : un pour la balle, deux pour le collier. La balle reçoit un enchantement permettant d'attirer les terranides canins, ils ressentent une irrésistible envie de jouer avec lorsqu'ils se trouvent à proximité. Un jouet tout à fait innocent, qui a surtout pour but de dérider sa louve, elle est probablement plus mignonne en jouant que constamment sur ses gardes. À vrai dire, il n'a même pas l'intention de s'en servir pour son dressage, c'est davantage une sorte de caprice, un petit cadeau, éventuellement une récompense. Pour le collier en revanche, c'est un peu plus vicieux, il est enchanté de manière à ne pas pouvoir être retiré par quelqu'un d'autre que Takael. Ainsi, il a l'assurance que Shad le portera aussi longtemps qu'il le souhaitera. Le second enchantement est probablement assez proche de celui de l'équipement de la louve, permettant au collier de se reconstituer autour du cou de son esclave en cas de destruction. Bien sûr, il ne compte pas la mettre au courant avant de le lui passer autour du cou. En tout cas, comme tout cela lui a coûté affreusement cher, il a bien l'intention d'en profiter.

Fredonnant toujours, il se met sur le chemin du retour, marchant avec la balle et le collier en main. Si bien que Shad peut tout à fait les discerner en le voyant arriver. Cette dernière est en train de jouer avec une pièce en l'attendant. Il a été plus long que prévu, mais Shad a dû choisir ses vêtements rapidement elle aussi. Préférant commencer par quelque chose d'agréable, il pose sa main sur sa tête une fois arrivé à sa hauteur, ébouriffant ses cheveux.

« Désolé, ça a été plus long que prévu. J'ai deux cadeaux pour toi ! Un jouet et un collier plus élégant que celui que tu portes actuellement. »

Il commence par lui donner la balle, gardant le collier en main. L'enchantement du jouet est suffisamment léger pour ne pas être aisément détectable et suffisamment fort pour rendre cette balle très attrayante. Bien plus attrayante que la pièce avec laquelle elle joue depuis tout à l'heure. Ensuite, il lui présente le collier, avec le médaillon en forme d'os gravé à son nom, voilà qui doit moins lui plaire par contre. Même si c'est beaucoup mieux que la pancarte qu'elle se coltinait auparavant. Il se plaça à côté de Shad, relevant ses cheveux pour accéder à son collier actuel, prêt à retirer le dernier objet issu de sa vente encore sur elle. Après un cliquetis métallique, cette disgracieuse relique fut enfin ôtée de son cou. Laissant la place libre pour le nouveau, plus personnel, plus beau et plus difficile à ôter que le précédent. Il ne lui demande pas son avis avant de lui passer le collier autour du cou. Même si elle n'aime pas ça, il sait qu'elle n'a aucune raison de se rebeller maintenant. Et puis, il se peut aussi qu'elle soit trop occupée avec sa nouvelle balle pour faire attention au reste. Après quelques manipulations, le collier est en place autour du cou de la louve, le médaillon en forme d'os à son nom pendouillant dessous.

« Il est temps de te présenter ta nouvelle maison. Tu verras, c'est un peu … particulier. Sinon, que penses-tu de tes nouveaux accessoires ? »

Dit-il en tirant doucement sur la laisse pour l'inciter à le suivre tout en répondant. Ils marchèrent un petit moment, jusqu'à un endroit plus calme, plus dégagé. L'elfe lui a alors dit, sur un ton se voulant rassurant :

« N'ai pas peur, la créature qui va apparaître est une simple invocation. »

Sur ces mots, un énorme griffon blanc est apparut. La bête fait facilement dans les 3 mètres de haut sans compter les cornes. C'est une monture faite pour la guerre, intimidante et disposant de serres meurtrières. Cette créature se couche alors devant son invocateur, pour lui permettre de monter plus facilement. Si Shad ne le suspectait pas déjà, elle a maintenant l'assurance que celui qui l'a acheté n'est pas un elfe comme les autres. Ce dernier lâche la laisse et monte comme si ne rien était, tendant ensuite sa main en direction de la louve pour qu'elle monte derrière lui.

« Ce n'est pas un véritable animal, il ne fera rien d'imprévu. N'hésite pas à t’accrocher à ses poils ou ses plumes, il ne ressent pas la douleur comme nous. »

Sitôt Shad montée, ils partiront en direction du fort abritant les hommes de Takael. Elle ne sait pas encore qu'il est Commandant, celui-ci a l'intention de le lui dire en route, suffisamment tard pour qu'elle n’appréhende pas et suffisamment tôt pour qu'elle se fasse à l'idée.

S’occupant du mieux qu’elle le pouvait avec sa pièce d’or, la Lycane continuait d’attendre le retour de Takael, se demandant où tous cela allait la mener. Elle entendit soudain des bruits de pas venant vers sa direction et put voir l’elfe qui revenait de ses achats. Tiens, qu’est-ce qu’il tenait ainsi dans ses mains et qui lui faisait naître un sourire plus que satisfait sur le visage ? Méfiante, la Louve émit un grognement sourd qui…disparu soudain quand il déposa une balle au creux de ses mains. Ses pupilles de dilatèrent et sa queue se mis à battre plus joyeusement derrière son dos, tandis que la balle roulait entre ses mains. Ce simple objet venait de faire baisser la garde de la Terranide, si bien qu’elle ne nota pas de suite le changement de collier qui s’opérer autours de son cou. Et ce ne fut que quand elle fut forcée de se lever et que la balle lui fut prise, qu’elle revint rapidement à la réalité, notant la présence du collier, cependant encore un peu sous l’emprise de l’enchantement du jouet, sa phrase fut assez atypique en comparaison à son caractère habituel :

« Je sais pas pourquoi, j’aime bien la balle et… - ellle revint subitement à la réalité, s’exclamant – je ne suis pas un animal ! Et puis ce quoi ce collier ? Un os ? Un médaillon en forme d’os, franchement ?  C’est quoi la suite ? Que je fasse «  wouf, wouf ?  et…oh balle ! »

S’exclama-t-elle tandis que le sournois objet lui était redonné. Elle marcha ainsi donc plus tranquillement, jetant la balle en l’air avant de la rattraper jusqu’à ce qu’encore une fois, elle lui fut dérobée.  Une nouvelle phrase, une mise en garde et…une créature qui venait d’arriver. Loin d’en avoir peur, la Lycane regarda le griffon  avec admiration.

« Un griffon ! A bien y réfléchir…C’est la première fois que j’en vois un….dommage que ce ne soit pas un vrai cependant… »

On ne pouvait pas tout avoir après tout ! La colère qu’elle portait précédemment envers Takael, semblait s’être un peu apaisée, du moins pour l’instant. Cependant, elle ne pouvait nier que cette invocation était une sacrée surprise et elle commençait à se demander ce que l’elfe cachait d’autres dans sa manche. Elle monta sur le griffon blanc sans la moindre hésitation, démontrant indirectement qu’elle avait déjà eu affaire à des créatures ailées. Positionnée derrière  Takael, elle nota rapidement que les prises  au niveau des poils et des plumes n’étaient pas les plus optimales et…à contre-cœur posa ses mains contre ses hanches.

L’animal fantastique prit son envol et loin d’être gênée par la hauteur, la Lycane profitait pleinement du vol. Un léger sourire s’affichant sur son visage ainsi qu’une expression de mélancolie. Etrangement…le vol lui manquait également et elle doutait pouvoir de nouveau battre de ses propres ailes. Certes, elle appelait que rarement son corbeau de l’effroi, ou se transformer mais savoir que cela ne serait peut-être plus possible, accabla la Louve. Vivement que tous ces problèmes prennent fin ! Chaque mouvement du griffon était accompagné par la Terranide, elle ne restait pas droite comme un i, elle suivait l’invocation de son corps pour l’accompagner dans son vol, ce qui rendait certaines manœuvre bien plus aisé.

Puis soudain, une déclaration de la part de l’elfe : il était commandant !  Tout en lui avouant cela, la Louve put voir au loin le fort où se trouvaient ses hommes. Aie. Un autre problème, dans un tel endroit, s’échapper était un objectif bien plus ardu que dans une simple demeure. Mais…elle avait déjà vu pire ! La curiosité prenant cependant le pas dans le silence dans lequel elle s’était muée depuis leur envol,  la Terranide demanda :

« Commandant ? Vous servez la couronne royale de Nexus ? Et quels ont été vos derniers combats ? »

Entre temps, le griffon venait d’entamer sa descente et parvint rapidement à son objectif, se posant au centre d’une cour  au sein du fort. Descendant de l’animal invoqué, la Terranide dû rapidement faire face aux hommes de Takael.  Elle nota  leurs armes et armures, tous portant le signe du croisé, servaient-ils l’Eglise Immaculée ? Joie. Elle qui espérait ne jamais en croiser. Des bruits d’épées s’entrechoquant attirèrent par la suite son attention, elle observa les mouvements de l’un et de l’autre avec attention, murmurant :
« Son appuie est trop bancal...Gagné, le voilà à terre… »
Elle reporta par la suite son regard  sur le reste de la foule et de pousser un profond soupir. Et maintenant ?

Sans hésiter, la louve monte sur le griffon avec aisance et entrain. Elle y adopte très vite une bonne position et opte pour les hanches de son maître plutôt que pour une touffe de poil. La bête poussa alors sur ses pattes, déployant ses ailes pour battre vigoureusement l'air alentour. Malgré la masse conséquente de l'invocation, elle s'arrache du sol avec fluidité et gagne rapidement en altitude. Sitôt le niveau du toit de la plupart des habitations dépassé, le griffon change l'angle de ses ailes et se met à avancer à vive allure vers la sortie de la ville. Toujours attentif aux réactions de sa nouvelle esclave, Takael note la facilité avec laquelle elle comprend de quoi l'invocation a besoin pour bouger efficacement, plaisantant à ce sujet :

« On dirait que je n'ai rien à t'apprendre en matière de vol à dos de griffon. Tu te débrouilles très bien Shad. »

Il s'en suivi un vol somme toute assez banal. Jusqu'à ce que l'elfe se décide enfin à prévenir sa louve au sujet de sa nouvelle maison. Un peu tard, ils sont déjà presque arrivés.

« Au fait Shad, ta nouvelle maison ne sera pas vraiment une maison. Tu vas habiter au milieu d'un fort militaire abritant 1200 chevaliers-mages, j'en suis le commandant. »

Surprise, la terranide posa diverses questions, auxquelles il répondit volontiers :

« Mon bataillon est sous commandement conjoint, je reçois prioritairement mes ordres de mon général, mais en temps normal je me met à la disposition des autorités nexusiennes oui. Un de mes derniers combats était censé n'être qu'une banale reconnaissance de nuit, nous n'étions qu'une dizaine. L'endroit où nous devions passer la nuit était déjà occupé par une cinquantaine de soldats ashnardiens, Nous les avons criblés de projectiles magiques dans leur sommeil, nous avons enquêtés sur eux, fait une prisonnière qui avait survécu et nous sommes repartis. »

Peu après, le griffon touche le sol, soulevant un peu de poussière et s'incline à nouveau pour faciliter la descente de ses passagers. Shad fait des observations plutôt pertinentes et le soldat se vautre comme un débutant pour lui donner raison. C'est un peu normal cela dit, il s'agit d'une recrue du 11ème escadron qui sert d'escadron-école.

« Bien vu Shad, mais tu ne regarde pas au bon endroit. Rien ne te paraît bizarre de l'autre côté ? »

Un groupe de soldats s'est isolé à l'écart d'un groupe plus grand, l'un d'entre-eux porte des signes distinctifs laissant penser qu'il s'agit d'un officier. Dans ses mains, deux lances. Dans le groupe plus large en revanche, un soldat n'a pas de lance.

« On dirait que quelqu'un va se faire engueuler. Ah, ces recrues … Désespérant ! »

Affirma Takael en soupirant à son tour, il n'aime pas les soldats qui se donnent en spectacle de la sorte par négligence. L'officier s'avance d'un pas soutenu vers la recrue sans arme, se plante devant lui, un silence de mort tombant tout à coup sur le groupe. D'une voix forte et peu amicale, il demande :

« Où est ton arme recrue ! »
« Heu, dans votre main, chef. »
« C'est pas chef, c'est Capitaine ! Alors ! Où est ton arme recrue ? »
« Je sais pas, Capitaine. J'l'ai perdu. »
« C'EST UNE LANCE ! ON FAIT DES CHARGES DE CAVALERIE AVEC ! C'EST UNE ARME DE GUERRE CONNARD !!! ALORS TU LA PRENDS ! »

Il frappa la poitrine de la recrue en lui redonnant sa lance, le faisant reculer de quelques centimètres.

« ET TU LA GARDE ! »
« Oui Capitaine ! »

Sitôt le spectacle terminé, Takael tire gentiment sur la laisse de Shad pour lui signifier qu'ils vont aller ailleurs à présent. Tout en marchant, il commente la scène, visiblement agacé :

« Tu imagines la même situation sur un champ de bataille ? Un imbécile qui se retrouve sans arme, qui l'a oublié ? L'ennemi ne la lui rendra pas lui. »

L'elfe pénètre dans ce qui semble être un ensemble de bureaux, le bâtiment est entièrement en pierre, principalement pour éviter les incendies en cas d'attaque. Cependant, quelques gravures, sculptures et tapisseries égayent tout de même l'intérieur. Le commandant emprunte un escalier vers les étages supérieurs et monte jusqu'en haut pour emprunter un couloir, avant de pousser la porte de son bureau. Neliel est toujours là, s'occupant de classer des factures, pour interrompre immédiatement. L'ange garde la bouche ouverte face à Shad, comme si elle avait voulu dire « Bon retour Commandant », la surprise lui ayant coupé le sifflet.

« Quand je parlais de vous prendre un animal de compagnie Commandant … Je ne m'attendais pas à une terranide. »

Sentant que Shad allait protester en sachant d'où vient son envie soudaine d'esclave, il lui tendit la balle, l'air de rien. Très pratique ce jouet, très pratique.

« Maintenant qu'elle est là, je garde Shad ! »
« Ce n'est pas ça Commandant, c'est juste que … Je suis surprise. »
« Bref ! Shad, voici Neliel, mon assistante. N'hésite pas à lui demander si tu as besoin de quelque chose. »

Il lui retire alors la balle, pour qu'elle soit apte à répondre dans son état normal. Puis, il se dirige vers son bureau, plus précisément vers la fenêtre qui se trouve derrière. Après quelques temps, des griffons passent juste devant la fenêtre, chevauchés par leurs chevaliers-mages. Le Commandant a désormais le prétexte parfait pour changer de sujet et montrer quelque chose de plaisant à sa louve.

« Au fait Shad, tu voulais voir de vrais griffons ? Neliel peut t’emmener voir ceux du premier escadron, ils sont bien dressés. Je vous rejoins plus tard, j'ai quelque chose à faire. »

L'écurie du premier escadron se trouve avec les autres, dans un renfoncement du fort à l'écart de la cours. Elle pourra sans problème voir les griffons, leur donner à manger, les caresser et surtout faire connaissance avec Neliel, qu'elle sera amenée à côtoyer de toute façon.

La Louve observe avec attention et sans un mot la scène qui est en train de se passer à quelques pas de là. Certes, le haut gradé haussait la voix avec force mais il avait bien raison ! Un soldant sans son arme n’était rien. Ou du moins si, il devenait une cible facile pour l’ennemi. Par chance le «  spectacle » ne dura qu’un temps et sentant la laisse être légèrement tirée, la Terranide se remis en marche, découvrant pour débuter la cour principale du fort.

« Oh si l’ennemi pourrait la lui rendre…Mais d’une manière qu’il ne risquerait pas d’apprécier… » commenta la Lycane au commentaire du Commandant.

Ils pénètrent un bâtiment et tout en le suivant, la Terranide observe les gravures, tapisseries et sculptures, au moins, le lieu n’était pas terne et sans vie !  Un escalier plus tard et une porte ouverte, le regard de la Lycane se posa sur l’assistante de Takael qui n’était ni plus ni moins qu’un ange ! Tout comme son interlocutrice, une certaine stupeur pouvait se lire sur son regard et quand cette dernière vint à faire une remarque vis-à-vis d’un «  animal domestique », la  Louve faillit sortir de ses gonds. Mais son ire fut rapidement éteinte grâce à la balle enchantée sur laquelle elle referma ses mains quand l’elfe la posa au creux de ces dernières. La faisant rouler entre ses mains, elle n’entendit que des bribes de la conversation…jusqu’à la dernière phrase où son « jouet » lui fut retiré.

« Hein ? Euh…D’accord… »

 Elle sourit en retour à l’ange. Après tout, elle ne lui avait encore rien fait.  Un petit silence dans la pièce s’installa jusqu’à l’évocation des griffons.  Tiens ? Cet endroit en regorgeait ? Et des vrais ? Bien sûr qu’elle serait ravie de les voir ! Certes, en d’autres circonstance, surtout sans collier immonde autour du cou, cette expérience aurait été plus plaisante, mais il valait mieux cela que se retrouver à se faire saillir par tout un bataillon non ? Agitant sa queue de gauche à droite, la Louve répondu donc par l’affirmative :

« Avec plaisir ! »

Et puis…Cela lui permettra de se changer les idées. La laisse fut passée à l’ange qui arborant encore une mine déconcertée fini par sortir au dehors avec la Terranide et se diriger vers les écuries. Entre temps, la Louve continuait ses observations, notant la présence de différents types de soldats et…se doutant que les chevaucheurs de griffons n’auraient aucun mal à la voir faire le mur en pleine nuit. Une surveillance aérienne, il fallait qu’il y ait une surveillance aérienne ! Elle se stoppa un instant, portant une main à sa tête et émettant un grognement avant de relever sa tête :

« Oh désolé, ce n’est rien…Enfin, je ne sais pas. Hem…Vous…êtes bien une  ange c’est cela ? Et vous travaillez pour lui depuis longtemps ? »

Pouvait-elle sentir qu’elle était en lien avec un clan démoniaque ? Sur le coup, La Louve espérait que ses doutes apportent une réponse négative. Avec tous ces croisés…Mieux valait éviter de crier haut et fort son lien avec les créatures des enfers.  Continuant sa route et écoutant la réponse de l’assistante, la Louve arriva bien vite aux niveaux des écuries. Elle s’approcha doucement d’un d’entre eux et le flatta au niveau de l’encolure sans la moindre hésitation au niveau de ses gestes.

« Magnifique vraiment. Je peux avoir son seau de nourriture ? »
Une question donnée au palefrenier  en charge de l’écurie à cet instant.  Au premier abord hésitant, il finit par donner l'objet contenant quelques victuailles à la Terranide qui  versa le contenu approprié dans la mangeoire de l’animal.  Et elle se chargea également du reste, flattant les montures de guerre en même temps. Reposant le seau, elle poussa un long soupir avant de se tourner vers  Neliel.

« Il a bien dit que je pouvais vous faire des requêtes ? – elle hésita un instant avant de reprendre – Trouvez-moi des tâches à faire. Je ne supporterais pas de rester avachie toute la journée.  Évitons cependant le récurage des latrines….Et au vue de l’endroit où nous somme si vous avez peur qu’une petite Terranide arrive à s’enfuir…. »

Et elle était sérieuse !  Shad était réellement prête à effectuer quelques tâches pour tuer le temps et surtout garder la forme.  Hors de question de perdre sa stature actuelle ! Agitant ses oreilles, la Lycane reconnu sans mal le bruit des bottes qui approchaient des écuries, elle fit volte-face, son petit médaillon en forme d'os venant frapper contre son cou.  Maudit médaillon en forme d’os…. Elle ne prononça cependant pas de mots, attendant de voir quelle serait la suite de cette journée chargée en nouveauté. Et également pour ne pas couper la parole, la politesse, c'est une marque de respect !  
 

Neliel descend avec Shad jusqu'aux écuries, tenant la terranide en laisse tout en se demandant quelle sera la prochaine lubie du Commandant. Toutefois, elle sent quelque chose d'étrange chez la louve, une sorte d'aura qu'une esclave ne devrait pas avoir. C'est diffus, une vague impression, à vrai dire elle ne sait pas vraiment quoi en penser. Elle lui paraît bien vive, volontaire et forte mentalement pour un simple animal de compagnie. L'ange ne comprend pas pourquoi, quitte à prendre une esclave, son supérieur n'en a pas choisi une plus docile. Enfin si, elle a bien peur de comprendre pourquoi, elle est même sûre de savoir ce qu'il a pensé sur le coup. En revanche, Shad n'en a probablement pas conscience et cela la dérange un peu. Tout à coup, la louve semble avoir un malaise, tirant l'ange de ses pensées. Avant qu'elle ne puisse réagir, la terranide semble déjà d'aplomb et lui pose quelques questions, auxquelles Neliel répond :

« Je suis une ange, oui. Je suis suis son assistante depuis une bonne dizaine d'années déjà. »

L'ange hésite à en dire plus, mais se tait, préférant seulement répondre à ses questions pour l'instant. Elle regarde la terranide caresser les griffons sans la moindre hésitation, elle ne ressemble vraiment pas à une esclave. Neliel a l'impression de voir plutôt une sorte d'aventurière intrépide et fière, à l'opposé exact de l'animal de compagnie qui dépend de son maître. Est-ce qu'elle arrivera vraiment à se plaire ici ? Est-ce qu'elle arrivera à rester en place ? Le Commandant doit déjà s'en douter et prévoir autre chose, l'ange sait qu'il est bon analyste, qu'il aime avoir trois coups d'avance sur tout le monde. L'ange reste pensive en regardant la louve nourrir le griffon, qui semble ravi des caresses et de la nourriture. Finalement, la louve s'adresse à nouveau à elle et comme prévu, elle ne supportera pas l’inactivité. Neliel sourit avec tendresse :

« Tu es vraiment pleine de vie Shad. Nous avons des règles assez strictes concernant les travailleurs extérieurs au bataillon, donc ne t'attends pas à des tâches importantes. Et puis, connaissant le Commandant, je pense qu'il a déjà prévu quelque chose pour toi. »

C'est à ce moment-là que Takael est entré dans l'écurie, vêtu d'une cotte de mailles, recouverte d'un tabard blanc à croix rouge. Il tient dans ses bras une sorte de tenue d’entraînement rembourrée et des épées en bois. Il pose le tout sur un tabouret et s'avance vers les deux femmes, mais avant qu'il ne puisse ouvrir la bouche, Neliel s'adresse à lui :

« Commandant ? Pourquoi avoir choisit Shad parmi toutes les esclaves du marché ? »
« J'aime les cheveux bleus. »
« Non, la vraie raison ! »

C'est la première fois que Takael semble embarrassé devant Shad, hésitant à répondre. Neliel soupire et pousse plus loin :

« Laissez-moi deviner, vous avez vite remarqué qu'elle a du potentiel, qu'elle a probablement déjà vécut pas mal d'aventures et que cela allait attirer des maîtres sadiques, prenant plaisir à détruire les fortes personnalités. Pour qu'elle ne prenne pas cela pour de la pitié, vous n'avez rien dit et là vous allez lui proposer un petit entraînement pour voir ce qu'elle vaut et lui donner des conseils pour lui éviter de se faire à nouveau attraper plus tard … J'ai bon ? »

L'elfe fronça les sourcils et haussa le ton, visiblement irrité :

« Ça suffi Neliel ! »

L'ange qui lui sert d'assistante est probablement la seule à le connaître suffisamment bien pour lire dans ses pensées de la sorte. Or, il déteste ça, il a toujours détesté ça chez elle, mais c'est aussi ce qui fait d'elle une bonne subordonnée. Guillerette, elle pose doucement sa main sur l'épaule de Shad avec un grand sourire :

« Bon courage avec ton maître Shad, n'hésites pas à venir discuter plus tard. Je vous laisse ! »

Puis, elle quitta l'écurie avec une satisfaction perceptible, laissant Shad et Takael seuls. Le Commandant ne fait aucun commentaire sur ce qui vient d'être dit et enchaîne comme si ne rien était en tournant les talons :

« Enfiles ça et rejoins moi dans la cours Shad. »

Il se dirige alors vers la sortie, pour rejoindre un terrain d’entraînement. Il attend patiemment que la louve se prépare en reprenant son calme habituel, faisant le vide dans ses pensées. Lorsqu'elle arrive, vêtue de la tenue rembourrée et en portant les épées en bois, il lui fait signe de venir devant lui. Il se met alors à expliquer les règles :

« Toi avec les épées, moi à mains nues, si tu arrives à me toucher avec, tu gagnes, si je te désarme, tu perds. Pas de magie, pour l'instant. Si je te fais mal ou que tu ne te sens pas bien, tape trois fois avec la paume de la main, sur moi ou au sol. Des questions ? »

   
   La Terranide écouta avec une attention toute particulière la discussion qui se tenait entre le Commandant et son assistante. Certes, il était vrai qu'une personne voulant une esclave docile avait plus tendance à en prendre une déjà soumise mais certains apprécier aussi briser aussi bien le physique que le moral de ces cibles afin d'en faire des petites chiennes obéissantes. Pour l'heure, la Louve ne savait que trop pensé de l'elfe. D'un côté, il l'affublait d'un collier des plus ridicules, marquant ainsi le fait qu'elle lui était inférieure, qu'elle lui appartenait, mais d'un autre...Il semblait ouvert à ce qu'elle garde une certaine liberté. Pourtant, ce n'était là que le début et la Terranide loin d'être dupe, préférait attendre de voir la suite des événements avant de tirer des conclusions hâtives pouvant mettre à mal son jugement.


«  Je le ferais si besoin, merci Neliel. » répondit simplement la Louve à l'invitation de l'ange à venir échanger quelques discussions si le cœur lui en dit.


La suite ? Aucun commentaire ne fut énoncé face à la discussion entre Takael et Neliel, non au contraire un ordre fut plutôt donné afin de changer rapidement de sujet. Hochant la tête en signe d'affirmation, la Terranide attrapa la tenue ainsi que les épées en bois.  Des épées en bois....Pas de doute, un entraînement comme l'avait suggéré l'assistante était bel et bien prévu. Allait-elle s'en plaindre ? Non, tout entraînement afin de pouvoir garder la forme était bon à prendre et non négligeable. La tenue rembourrée fut rapidement mise  et les deux épées en bois prises en main. Se rendant dans la cour extérieure, elle repère rapidement le Commandant qui l'attend et se rend à sa rencontre, se mettant face à lui.

« Toi avec les épées, moi à mains nues, si tu arrives à me toucher avec, tu gagnes, si je te désarme, tu perds. Pas de magie, pour l'instant. Si je te fais mal ou que tu ne te sens pas bien, tape trois fois avec la paume de la main, sur moi ou au sol. Des questions ? »


Pas de magie ? Pas de risques pour cela !  Shad ne pouvait plus utiliser aucune de ses magies pour l'instant ! Mais elle pouvait facilement déduire par cette phrase que l'elfe devait posséder quelques sorts dans son sac, autre que l'invocation de son griffon qui les avaient amené jusqu'ici. Un affrontement mêlant une personne armée à une désarmée...En l'occurrence on pourrait penser que celle qui se battait à main nue était la plus désavantagée mais...des erreurs de jugements de ce type ont déjà coûté la vie à pas mal de personne.

«  Pas de question, tout est clair. Mais je suppose que si vous proposez de vous battre à main nue c'est que vous savez déjà d'avance que vous parviendriez à me désarmer. Vous êtes un elfe, je présume donc que vous avez une bonne agilité et une bonne vitesse couplée à l'expérience du combat...Mais -elle se mis en position, ne lui montrant qu'une partie de son flanc afin de lui laisser le moins d'ouverture possible – je ne vais pas cracher contre un petit entraînement.... »


Elle s'élança par la suite, cherchant à le toucher avec ses épées en bois. La Terranide faisait toujours en sorte de se tenir à bonne distance de l'elfe, prenant garde à ce que ce dernier n'approche pas trop au risque que la prise des armes lui soit possible. Sa poigne sur ses armes étaient solides et fermes et les épées devenaient des extensions de ses propres membres, sifflant dans les airs tandis que les divers coups manquaient de peu Takael. Loin de prendre tout cela pour un jeu, l'Okami frappait dans l'objectif de tuer, chaque mouvement de son adversaire était analysé pour trouver rapidement son point faible. Une -danse – entre le maître et l'esclave pris rapidement place sur le terrain d'entraînement, chaque partie concentrée sur son objectif. Sentant à un moment l'elfe trop près d'elle,la Terranide usa de son appendice caudale pour soulever de la terre et la lui envoyée en pleins visage. Hey, tous les coups étaient permis dans un combat. En plus de cela sa queue lui servait de balancier et lui permettait de combattre sans perdre son équilibre. Elle recula d'un bond, remettant de la distance entre lui et elle avant de continuer ses assauts.


Une minute ? Cinq ? Dix ? La Terranide ne saurait le dire tant que le temps devenait abstrait en un tel instant. Coup d'estoc avec une épée, coup de taille avec l'autre, les enchaînements se succédaient. Parviendrait-elle à le toucher ? Oh quel plaisir ce serait que de réussir ! Mais elle n'en démordait pas, démontrant une bonne endurance et une certaine agilité dans son style de combat. Loin d'être parfait, car tout n'était pas parfait, il soulignait l'expérience de la Louve dans le combat à armes blanches et soulignaient une certaine expertise dans la matière. Mais un œil aguerri aura tôt de noter  qu'il manquait quelque chose à sa pratique, comme si une partie de sa façon de combattre n'était pas démontrée. Et pour cause ! En tant normal, la Louve alliée ses capacités de transformation, sa magie et ses armes afin d'être un redoutable adversaire sur le champs de bataille. Mais face à un ennemi qui pouvait bloquer sa magie, mieux valait également savoir comment se battre à l'épée afin de ne pas être pris au dépourvu.

Le temps continuait tandis que les deux se tournaient toujours autours, Aucun ne souhaitant laisser la moindre parcelle de terrain à l'autre. La Louve fronça les sourcils, trouvant que quelque chose n'allait pas. Il lui avait proposé un combat qui le mettait en apparence en désavantage mais esquivait sans souci tous ses coups, même si des fois, cela revenait à la demi-second près. Pourtant, elle était sûre d'une chose, il pouvait la désarmée quand bon lui semblerait, alors pourquoi ne le faisait-il pas ? Chassant ces pensées de son esprit afin de se concentrer à nouveau sur l'entraînement, la Louve repris le combat de plus belle


Une fraction de seconde, il lui fallut à peine une fraction de seconde avant de sentir son corps être projetée contre le sol et maintenu contre ce dernier,  les épées en bois ôtées de ses mains. Mince, elle ne l'avait pas vu venir ! Avait-elle trop réfléchi à un moment ? Avait-elle mal observé son jeu de jambes ainsi que la totalité de ses mouvements afin de prévoir sa prochaine frappe ? Ou était-il tout simplement trop rapide ?  Dans tous les cas, elle avait perdue. Loin d'avoir mal, sa main libre se leva et frappa  doucement trois le sol, en signe de défaite.


Quelques chuchotements parvinrent à ses oreilles et relevant un peu son visage, la Terranide put notée la présence de quelques soldats qui étaient venus observer le combat, notamment des jeunes recrues avant de repartir à leurs tâches respectives.

Bonne analyse, effectivement les elfes sont plus rapides et plus agiles que les humains, en contrepartie ils sont moins forts physiquement. Toutefois, la différence de force brute ne pèse pas tant que cela dans un combat entre deux adversaires expérimentés. Contrairement à Shad, Takael ne se met pas dans une position particulière, il la laisse venir, esquive au besoin, se déplace, la laisse faire. Il voit facilement des ouvertures dans son style de combat à l'épée et aurait pu l'envoyer mordre la poussière dès le départ. Il n'en fait rien, observant attentivement ses erreurs tout en continuant à éviter ses attaques. Au moins, il sent sa hargne, elle ne retient clairement pas ses coups, c'est bien. Il faut toujours frapper pour tuer, même à l’entraînement et ne s'arrêter qu'au dernier moment. Shad a une attitude qu'il a déjà vu de nombreuses fois, elle avance, frappe, recule, ça ne va pas. Ses postures sont bonnes, en revanche elle fait des gestes trop francs, elle devrait apprendre à feinter davantage pour tromper son adversaire. Le coup de la poussière ! Bien ! Très bien ! Mais pourquoi s'en servir pour reculer ? C'est à ce moment qu'elle aurait dû gagner ! Quelque chose d'autre ne va pas, elle a clairement de l'expérience, mais elle perd beaucoup d'opportunités. Un peu comme si son style de combat à l'épée n'était qu'une roue de secours.

Après quelques minutes, l'elfe en a vu assez, il profite d'un coup porté trop loin pour saisir son poignet et tirer brutalement dessus. Prise dans son propre élan et incapable de se redresser, la louve ne peut pas empêcher Takael de poser son autre main sur son épaule et de la plaquer au sol. Son autre bras se retrouve coincé sous son propre corps, celui saisi par le Commandant n'a plus qu'à subir une petite pression sur l'articulation du poignet pour forcer la terranide à laisser tomber son arme. S'il s'agissait d'un vrai combat, il ne resterait plus qu'à ramasser l'arme de Shad pour l'achever avec, elle vient de mourir. Son instructeur se fit d'ailleurs un plaisir de mimer le geste, son genou posé sur le bas de son dos pour l'immobiliser. Avant qu'elle ne tape au sol de son bras maintenant libre. Takael se relève et tend sa main à la louve, au cas où elle voudrait s'en aider pour se remettre debout.

« Ce n'est pas si mal, mais un bretteur expérimenté ne fera qu'une bouchée de toi. Tu hésites trop. Pourquoi avoir reculé quand j'avais de la poussière dans les yeux ? Tu aurais facilement pu me porter un coup. Pareil pour ton petit manège de j'avance, je tape, je recule. Je suis complètement désarmé, tu as un avantage énorme, dans ce genre de cas il faut avancer et écraser l'adversaire. C'est à moi de reculer, pas à toi, sinon tu me laisses trop de temps pour me concentrer sur mes esquives. Aussi, tu es trop franche, il faut tromper l'adversaire, lui faire des feintes, casser son rythme, créer de la confusion dans son esprit. Je vais aussi te montrer quelque chose qui aurait pu t'être utile, suis-moi. »

Il emmena la louve près d'une cible utilisée pour s’entraîner au lancement de certains sorts. Puis, il tendit sa main vers l'avant, ouverte, avant de prononcer :

« Deus Vult ! »

Une masse blanche s'accumula au creux de sa main, s'allongeant pour prendre la forme d'une épée. Cette-fois-ci, l'elfe maniait une véritable arme magique, faite pour tuer. Il recula son bras et frappa la cible d'un coup d'estoc puissant. Il mesura la profondeur de l'entaille avec son doigt et montra à Shad le résultat en disant :

« Mémorise bien cette longueur Shad. »

Il se retourne vers la cible et frappe de bas en haut cette fois, mais lâche l'épée pour la lancer comme une arme de jet, à bout portant. L'arme se plante dans la cible et le Commandant recommence son petit manège, faisant constater à Shad la différence, le second coup s'est bien plus profondément enfoncé.

« Nos corps sont optimisés pour le lancer, de plus, lors d'un coup tu vas naturellement retenir ta force, de peur d'être emportée par ton propre élan et de perdre ton équilibre. Lorsque tu lances, tu ne retiens rien du tout, tu donnes tout car l'arme va partir de toute façon, elle n'affectera pas autant ton équilibre qu'une arme que tu gardes en main. C'est contre-intuitif, mais lancer une arme à bout portant peut faire plus de dégâts que de porter un coup avec. Et ça va trop vite pour être esquivé. N'utilises ça que si tu as une arme de secours ou que tu es sur le point de mourir. Si tu m'avais lancé ton arme, je n'aurais probablement pas pu esquiver. »

L'elfe prend l'arme par la lame et la tend à la louve en toute confiance.

« Essaye Shad, il faut pratiquer un peu pour bien sentir le moment où tu peux lâcher et comment faire croire à l'ennemi que tu vas porter un coup normal. Il ne doit pas penser que tu vas lâcher ton arme sur lui ! Pour le reste, on se refera un petit combat un autre jour, garde mes conseils en tête. »

La Louve hésite quelques instants et accepte finalement la main tendue pour l’aider à se relever. A peine est elle debout sur ses pieds qu’elle a le droit à une analyse complète du combat et surtout de ses erreurs. Elle l’écoute avec attention, retenant chacun des conseils qu’il aura à lui donner.

« Je dois avouer, j’ai trop misé sur la défense, je me suis trop focalisée sur votre vitesse potentielle pour y aller franc jeu. Je ne referais plus la même erreur, merci pour les conseils. »

Direction une cible d’entraînement ! A cet instant, la Terranide peut également être témoin d’une autre capacité du Commandant : celle d’invoquer des armes et tout comme le griffon, même si ce n’est qu’une invocation, l’arme a la capacité de tuer. Lancer son épée…Elle avait hésité à le faire, se disant que cela devait être contre-productif, cette tâche étant plus allouée aux couteaux de lancer. Autant dire qu’elle fut quelque peu surprise d’entendre que si, cela était parfaitement réalisable et même conseillé ! Du moins si on avait encore une arme en réserve, ce qui était normal en soi, ou en cas d’extrême recours. Mais la différence de l’entaille était belle et bien là.  Elle recula d’un pas quand il lui tendit l’arme de lumière. Était-il sérieux ?  A en voir son regard, la réponse était plus que positive. Se saisissant du pommeau, la Terranide se tourna par la suite vers la cible et commença à s’entraîner dessus.

Frappe en haut, frappe en bas, coups d’estoc, feinte sur le côté avant de replonger vers le centre, ses coups étaient plus rapides plus directs et pendant qu’elle frappait, elle prenait note de tous conseils qu’on avait à lui donner, rectifiant la portée de ses coups, leur vitesse et même sa propre défense. Comme il lui avait conseillé, elle attendit le bon moment avant de se saisir de l’épée comme d’une arme de jet et de la lancer sur la cible. Le point d’impact se trouva en pleine tête et l’entaille ne laissait la place à aucun doute. En vrai, l’adversaire serait mort. Elle retira l’arme et reparti pour un second essai, également un troisième, variant l’instant où elle assignait le coup final. Finalement, elle rechercha de nouveau l’épée magique et la rendit à son propriétaire.

« Juste…..Pourquoi ?  Pourquoi me donnez ces conseils ?  Une esclave n’est pas censée savoir se battre mais…je ne vais pas m’en plaindre, je suis même ravie d’apprendre des nouvelles techniques de combat. Mais…j’avoue être confuse sur le coup. »

Que cherchait-il réellement à faire ? Neliel avait-elle vue juste ? Possible mais encore une fois ce n’était que le début. Tout pouvait encore arriver. Elle porta ses doigts à son médaillon et le souleva, le retournant entre ses dextres avant de le relâcher dans un petit cliquetis et soupirer. Diable, qu’elle détestait avoir un collier autour du cou !  Le silence s’installant ce dernier fut brisé par un bruit de gargouillis très reconnaissable entre mille. L’estomac de la Louve réclamait sa pitance et cela faisait également plusieurs heures qu’elle ne s’était rien mis sous la dent. Cependant, allait-il lui offrir de quoi se restaurer et s’hydrater ou aller il la laisser s’affaiblir afin de l’épuiser petit à petit ? Un autre en aurait été capable mais pour ce qui était de l’elfe…comment savoir ? Pensant subitement à un fait, la Louve repris la parole :

« Je viens de penser…Mon odorat me permet, si des ingrédients sont disponibles, de cuisiner de savoureux plats, je peux peut-être aller apporter mon aide en cuisine ? Ou bien…je dois rejoindre Neliel ? »

Elle n’aimait pas avoir à demander où elle devait se rendre, ce qu’elle devait faire. Et puis, le pouvait-elle vraiment ? Elle avait énoncé ses propositions sans prendre en compte qu’elle ne pourrait potentiellement pas avoir son mot à dire. Mais d’un côté, elle ne se considérait nullement comme une esclave et jugeait qu’à l’instant où une personne dictait toute action à une autre personne, cette dernière lui appartenait corps et âme. Et cela, elle le refusait catégoriquement. Joignant ses mains derrière son dos, elle fit balancer sa queue de gauche à droit en attente d’une réponse.

Le Commandant regarde Shad s’entraîner sur le mannequin, elle applique directement ses conseils, sans attendre. Bien, elle apprend vite et il semble qu'elle commence à lui faire confiance. La confiance est primordiale, c'est un facilitateur, elle apprendra encore plus vite si elle n'a pas besoin de se méfier constamment. D'ailleurs, l'elfe hésite en la regardant. Devrait-il forcer un peu les choses en manipulant son esprit ou bien attendre que les choses viennent naturellement ? Doit-il accélérer les choses artificiellement au risque qu'elle le remarque et perde toute confiance en lui ou bien parier sur le long terme ? Une question plus complexe qu'elle en a l'air, il est actuellement en congé, mais il n'aura pas toujours autant de temps libre à lui consacrer. Son seul moyen de se rapprocher d'elle, c'est de la garder au maximum à ses côtés, or il va régulièrement au-devant du danger. S'il compte l'emmener avec lui, il doit l’entraîner avant et gagner sa confiance de manière à ce qu'ils puissent se reposer l'un sur l'autre. Ensuite, les liens ont tendance à devenir plus forts lorsqu'on combat ensemble.

Shad ne le sais pas, mais ses questions tombent à pic, elles sont en accord avec les pensées du Commandant. Takael ne répondit pourtant rien, laissant le silence s'installer, avant qu'il ne soit rompu par le bruit du ventre de la louve criant famine. Pile au bon moment … L'elfe réfléchit, pourquoi l’entraîne-t-il ? Comment répondre le plus précisément et justement possible à cette question ? Alors qu'il pense à répondre aux premières, deux autres fusent. Il lève sa main pour aller caresser Shad entre ses deux oreilles et répond à la plus facile :

« J'apprécie que tu proposes ton aide Shad. Mais je ne peux pas te laisser travailler en cuisine, j'ai aussi des contraintes, des règles à respecter. Or, je n'ai pas le droit d'employer du personnel extérieur au bataillon pour des tâches critiques comme la préparation des repas. C'est une règle pour éviter les empoisonnements, elle s'applique à tous les Commandants. En revanche, ça ne concerne pas la nourriture des griffons. Ils chassent beaucoup de serpents à l'état naturel, ils ont des résistances naturelles aux poisons et toxines. Je pourrais te faire travailler dans l'équipe de soigneurs si tu veux, comme tu as l'air d'apprécier ces animaux. En attendant, nous allons déjà te nourrir toi, avant que tu ne me refasses un malaise. »

Il se dirige vers la cantine, toujours pensif, il est encore un peu tôt pour manger, les plats ne sont pas prêts. Heureusement, les cuisiniers ne refuseront pas une faveur à leur Commandant, Shad aura de quoi manger et boire. Avec un peu de chance il restera quelques restes du repas précédent à réchauffer. Une fois arrivé devant la cantine vide, Takael s'arrête, changeant de sujet :

« Shad, tu m'as demandé pourquoi je te forme, pourquoi apprendre à une esclave des techniques de combat. Une esclave est une marchandise, il n'y a effectivement aucun intérêt à apprendre à une marchandise à se battre. Tu as entendu Neliel au tout début ? Je n'ai pas acheté une esclave, j'ai acheté un animal de compagnie. La louve d'un commandant croisé doit savoir se défendre face à ceux qui pourraient attaquer son maître ou chercher à l'atteindre à travers elle. Car je doute que tu préfères une vie paisible à la maison. Pas vrai ? Quant au collier, je suis suffisamment connu à Nexus pour que n'importe quel marchand d'esclaves se chie dessus en lisant mon nom dessus. Par contre, si tu te fais capturer par Ashnard c'est différent, nous sommes ennemis, ils essayeront de t'utiliser contre moi. Dans les deux cas ils ne te feront rien, par peur dans le premier cas, par intérêt dans le second et dans les deux cas je viendrais te chercher. Si tu peux éviter de te faire capturer, c'est mieux. »

Takael s'attend à ce qu'elle râle pour avoir été qualifiée d'animal de compagnie et il a oublié sa balle dans le bureau. À moins qu'elle ne comprenne enfin que, du point de vue de son maître, être un esclave est pire que d'être un animal de compagnie. Car l'esclave n'est qu'une marchandise qu'on utilise, l'animal est un compagnon qu'on aime et qu'on protège. Comme l'a sous-entendu Neliel plus tôt, Takael aurait eu l'embarra du choix en cherchant une esclave déjà brisée ou soumise, il existe même des esclaves soumises et bonnes combattantes. Il s'est juste choisi un animal qui lui ressemble, d'une certaine façon. L'elfe entre dans la cantine, écoutant éventuellement la réponse de Shad ou bien ignorant ses reproches. Il se dirige vers les cuisines et demande :

« Chef, je sais qu'on est hors repas, mais vous pouvez préparer quelque chose pour ma louve et moi ? »
« Hum, je vous réchauffe des restes, revenez dans quelques minutes Commandant. »
« Merci Chef. »

Il prend un pichet d'eau, deux verres et se retourne pour aller s'asseoir, annonçant à la louve :

« Pommes de terre et côte de porc si je me souviens bien. Je mange avec toi, tu as mis tellement longtemps à ne pas me toucher que j'ai faim aussi maintenant à force d'esquiver. Essaye de me toucher plus vite la prochaine fois. »

Dit-il avec un sourire taquin, avant de s'asseoir face à Shad.