Il était heureux pour elle. Une nouvelle opportunité qui s'offrait, et il n'avait pas eu à intervenir. Peut-être les événements derniers en avaient été la cause, ou peut-être pas. Peu importe. Il était ravi de voir qu'elle savait toujours être indépendante, et n'avait pas besoin de lui.
S'il était prêt ? Il avale sa salive, puis acquiesce. Bien sûr. Il en sourit même, sincèrement. Il se traîne vers elle, pieds nus comme à son habitude chez lui, pour choper la lettre de Takagi. Un type bien.
-Bioéthique. Les expérimentations sur personnes non-volontaires. Auschwitz. Toi. Un long fil étrange... Comme si... Hm. Je ne crois pas au destin, de toute façon.
Il embrasse son front en tenant sa nuque, puis s'éloigne de nouveau, pour rallumer Haendel. Ah, oui, la sonate. La troisième, il croit, mais il n'est pas sûr.
-Je vais tout de suite te faire une place dans mon armoire.
La cohabitation se passe... fort normalement. Siegfried s'absente de temps en temps pour des réunions. Il reçoit une fois quelques professeurs, auquel cas il demande à Akina de sortir ; hormis cela, il se montre adorable, bien loin du portrait qu'il a bien voulu décrire de lui. Les premiers jours, peu avant sa rentrée, il est souvent à son appartement, travaillant sur la petite table de la salle à manger ; de longs moments passés sur ses cours et quelques fiches, de nombreux livres empruntés autour de lui, une collation jamais loin. À heure régulière, matin et soir, il s'injecte ce dont il a besoin pour tenir le coup ; il expliquera à Akina que selon ce qu'on lui a dit, il pourrait mourir d'un jour à l'autre si il s'en privait trop longtemps. Il lui expliquera aussi que chaque piqûre est une torture mentale, à laquelle il ne s'est jamais vraiment fait. Le réveil de ses pulsions est comparable à une éruption volcanique, et dans ces moments-là, pour ne rien craindre, il valait mieux se tenir loin.
Il faisait du sport, souvent, pas tant pour se muscler que pour tuer l'ennui et bouger un peu. Il lui arrivait, lorsqu'il était réveillé très tôt par un léger mal-être, d'aller courir dans la rue. Midi et soir, il s'évertuait à faire la cuisine. À 5h, il n'était pas rare de le voir préparer une sucrerie. Maniaque, il se montrait sévère dans ses mots (mais clément dans l'attitude néanmoins) lorsqu'elle laissait traîner quelque chose, ou faisait une saleté. Une fois, un bruit la réveilla en pleine nuit. Il était trois heures du matin, Siegfried ne dormait déjà plus, il astiquait compulsivement le sol.
Il avait ses psychoses, comme ça. Il lui arrivait de chanter, en allemand, lorsqu'il travaillait, alors même qu'il rédigeait des notes en japonais. Il s'énervait toujours en écartant ses cols, lorsqu'il faisait chaud. Parfois, ses ongles battaient une mesure sur la table, des minutes durant, comme pour marquer un tempo sans la moindre musique. Il semblait mécanique quand il cuisinait : Les lamelles de légume avaient toujours le même gabarit, les doses étaient millimétrées, il se servait de la musique pour calculer des temps de cuisson. Ah, la musique. Souvent tournait en sourdine Bach, Beethoven, Schubert. Il n'était pas fan de Mozart, y préférait nettement Tchaikovsky. Un peu de musique française. Jamais du neuf, que du centenaire, au moins. Il lui précise que, le jour où ça la dérange, il mettra volontiers des écouteurs.
Il s'astreint à parler simplement allemand avec elle, la corrige parfois, et lui intime de ne pas attraper son accent noble, qui fait franchement méprisant en société. Il lui aura montré où sont ses armes, qu'elle puisse s'en servir en cas de problème.
C'est le deuxième jour que l'incident arriva. Enfin, l'incident. Le sermon. Ils n'avaient pas fait l'amour depuis qu'ils étaient partis de chez Jack. Siegfried revenait d'une réunion au lycée qui s'était éternisé, sur les programmes d'histoire.
-Cet après-midi j'ai eu envie de toi. J'ai cherché à me réfugier dans les toilettes du lycée pour m'y soulager et je me suis rendu compte que je n'avais toujours pas la vidéo que je t'ai demandé. J'ai dû faire marcher mon imagination. Je me suis branlé en pensant à la façon dont j'allais te punir. Encore.
Abstinence. Pour Akina sonne le glas. Sept jours à compter d'aujourd'hui. Le repentir devra être consommé au bout, mais peu importe toute la bonne volonté qu'elle pourra y mettre, il précise volontiers qu'elle n'aura rien d'ici-là. Lui non plus, du coup... Sauf qu'elle est bien sûr astreinte à la non-masturbation. Lui peut se le permettre en revanche.
Hormis ça, tout se passera relativement bien. Ils sortiront quelque fois, lorsque le besoin de s'aérer après manger se faisait sentir, pour aller voir un cinéma ou gérer l'exception d'un petit restaurant loin du centre.
Il s'était complu à marquer sur le calendrier accroché dans la cuisine « J-... » suivi du nombre de jours restant pour sa sanction. Au « jour J », un dimanche, elle sera réveillée sur le coup des dix heures après une longue nuit où ils étaient sortis dans un club.
-Debout. Ta journée sera consacrée à ta punition.
Oh-oh. Elle ne l'avait pas vu aussi autoritaire depuis un bail. Il la prend violemment par le collier, qu'elle porte désormais en permanence, et la traîne nue (et si elle ne l'est pas, pyjama ou nuisette, il se fera un devoir de l'en débarrasser) pour la mettre au milieu du salon, à genoux. Un coussin soutient ses genoux. Deux menottes en cuir entraveront ses poignets dans son dos. Il lui ordonne ainsi de ne plus bouger. Elle a contrevenu à un ordre, ordre qu'il a répété et qu'il n'a pas puni pour autant. Il lui explique qu'il doit marquer le coup. Si elle n'est pas capable d'exécuter quelque chose de si simple, il est contraint (contraint!) d'en venir à une telle extrémité.
Là, elle ne bouge pas. Il fera des crêpes, la pâte ayant été préparée la veille. Délicat fumet qui émane de la cuisine. Il mange à sa faim, dans le salon, non-loin d'elle. Il lui ordonne de regarder devant elle, et de se taire, de ne pas bouger quoi qu'il arrive.
Il lui raconte ensuite à quel point il a envie d'elle. Il ira jusqu'à s'agenouiller, lui aussi nu par ailleurs, devant elle, une fort belle érection déformant (ou, au contraire, donnant toute sa forme à) sa queue. Il caresse sa joue, lui dit que la baiser lui manque, que c'est une torture pour lui. Ainsi, tout en lui racontant ça, il se masturbe. Fourre deux doigts dans sa bouche, la frappe quelque peu. Il ne lui faudra pas longtemps pour jouir sur le plancher, juste devant elle. Il lui précise qu'il lui est toujours interdit de bouger. Il va prendre une douche.
Vers 13h, il se prépare une assiette. Elle-même en aura une, petite, sa faim doit le tirailler, ainsi qu'un verre d'eau. Il pose le tout au sol. Il lui ordonne de manger. Elle n'a d'autre choix, comme une chienne, de pencher son corps en avant jusqu'à y basculer, s'appuyant sur son menton et ses épaules pour parvenir à enfourner la nourriture entre ses lèvres. Siegfried lui colle alors un plug en métal, acquisition toute neuve, entre les fesses, après l'avoir largement lubrifiée et préparée. Il lui dit qu'elle le gardera, même si elle a mal, même si c'est désagréable.
Il travaillera ensuite. Les cours reprennent le lendemain, il doit être prêt. Dans son dos, elle ne peut le voir, mais lui la voit parfaitement lorsqu'il lève l'oeil de sa copie. Il voit qu'elle fatigue, et lui dit d'ailleurs. Il sait qu'elle a envie d'aller aux toilettes, qu'elle a peut-être faim, qu'elle voudrait bouger. Il sait d'ailleurs qu'elle détend ses muscles et ses articulations dès qu'il a le dos tourné, mais il s'en fout : Elle n'a jamais été réellement punie. Si elle veut rester dans cet appartement, autant qu'elle sache à quoi s'attendre. Il finira même par lui bander les yeux, lui entraver la bouche avec sa ceinture, resserrer son collier.
Il aura fait des allers-retours dans sa chambre, aux toilettes, dans la cuisine, de quoi permettre à Akina de tenir le coup dans son humiliation. L'alarme de son téléphone sonne, passé 17h. Il l'arrête, vient défaire ses menottes. Son calvaire est terminé.
-Frei.
Il ne se contente pas de la laisser, il la prend dans ses bras et la soulève, par les genoux et la nuque. Il va ainsi la poser sur le lit. Il s'absente dans la cuisine, et en revient avec une copieuse assiette de crêpes et d'un thé.
-Mange. Restaure-toi. Tu en as besoin.
Il lui caresse les cheveux à maintes reprises, collé à elle. Cette affection particulière lui semble nécessaire.
-Je veux cette vidéo. Je veux te voir te déshabiller pour moi. J'en veux d'autres, beaucoup d'autres. Je veux te voir te toucher en prononçant mon nom, je veux me voir te baiser, encore et encore, de toutes les façons possibles. Quand j'aurais envie de toi, quel que soit l'endroit où le moment, je saurais quoi regarder.
Il s'assurera qu'elle va bien. Ils feront l'amour. Presque normalement, bien qu'il fasse preuve d'un peu de colère dans l'acte. Il a terriblement besoin d'elle, et lui dit qu'il ne veut pas recommencer ça. Il lui dit qu'il l'aime, aussi, et que c'était difficile de la voir ainsi, même s'il trouvait terriblement excitant qu'elle souffre ainsi. Il la baisera une fois, puis une deuxième après un léger temps de repos. Exténué, il se serrera un long moment avec elle, l'embrassera compulsivement, et finira par s'échapper pour retourner travailler. Il a du retard.
Il espère qu'elle a compris la punition – sa nécessité, son but, et qu'elle ne recommencera pas.