Juliette restait prudente, évidemment. Elle avait beau être l’esclave de Décatis, et aimer cela, elle n’en restait pas moins une Beaumont, une femme qui avait le sens des responsabilités. Juliette savait qu’elle était la cinquième roue du carrosse au sein de sa famille, mais elle espérait bien ne pas leur faire honte. Pour cela, elle ne pouvait pas trop s’afficher en public. Décatis semblait toutefois avoir prévu ça, et sa Maîtresse lui ordonna d’aller louer une esclave, et de la ramener. Un peu surprise, Juliette acquiesça malgré tout, et fit demi-tour. Sans Mélinda et Décatis, elle rejoignit l’un des stands à l’entrée, tout en se demandant ce qu’elles lui réservaient, a fortiori avec les sœurs Gilien. Malgré leur jeune âge, ces adolescentes avaient déjà fait preuve d’une immense perversion, d’une lubricité sans limite, et Juliette était donc fondée à s’inquiéter pour son sort face à ces dames.
*
Enfin, ne pense pas à ce qu’elles peuvent se dire, concentre-toi sur l’instant présent, ma chérie...*
Elle évita de louer une esclave du stand Warren, et se dirigea vers un stand papuan. Papua était un grand royaume ashnardien, situé dans une région désertique. Les Papuannes étaient souvent très belles, et le marchand proposait des esclaves pour la location avec une option d’achat à la fin de la foire. Un grand classique. Les achats étaient toujours possible en foire et en salon, et ces achats bénéficiaient d’une législation particulière. Juliette observa donc les femmes devant elle. Elles dansaient sensuellement, avec des vêtements légers, des reliures dorées, de longs châles... Et son regard s’arrêta devant une femme, répondant au doux nom de
Nylla. Un sourire parfait, des yeux caramel... Juliette se pinça les lèvres devant elle. La femme portait
une cape sombre avec des bijoux dorés sur le corps, masquant son sexe, mais pas ses seins.
Nylla lui sourit tendrement, et Juliette acquiesça doucement, peinant à croire qu’elle allait acquérir une esclave. Elle signa un manuscrit de location, puis récupéra une laisse, reliée à un collier mis autour du cou de Nylla.
«
Tu... Tu parles la langue commune ? -
Bien sûr, Maîtresse. »
La guilde qui l’avait formé avait pensé à l’éduquer, afin de faire d’elle une esclave de luxe, une dame de compagnie pour plaire aux riches aristocrates de la capitale. Juliette hocha la tête, puis retourna voir sa Maîtresse, tenant nerveusement la laisse de Nylla. C’est ainsi que les deux femmes retournèrent devant le quatuor. Juliette entendit les deux sœurs glousser en parlant avec Mélinda, puis Décatis reporta son attention sur elle. Mélinda observa avec attention Nylla, et Décatis lui présenta ensuite d’étonnantes bracelets, capables d’envoyer son esprit dans le corps de l’autre personne qui la portait, et inversement.
«
Q-Quoi... ?! »
Les sœurs Gielen intervinrent alors, visiblement intriguées :
«
Oh... Ces bracelets sont très rares ! C’est une forme de télékinésie, non ? -
De la métempsycose, plus précisément. Mais... Vous les avez conçu vous-même, Décatis ? Ce genre de bracelets... Ils sont très rares et très dangereux. »
La métempsycose... Une discipline magique et spirituelle extrêmement rare, consistant à déplacer une âme d’un corps à un autre. Cultivée, Juliette en avait entendu parler, et savait donc que ces bracelets valaient une véritable fortune.
«
Oui, Maîtresse, mais... -
Il faut restreindre leur utilisation dans la durée et dans le temps pour éviter des problèmes d’harmonie entre le corps et l’esprit. »
Juliette acquiesça.
«
Je... Je veux bien, Maîtresse, mais... Je... Il faudrait demander l’accord de Nylla avant... -
Je ferais ce qui vous plaît, Maîtresse. Je connais la magie et ses différents usages... Même si je n’ai encore jamais fait ça. -
Mais... Ça veut dire que je vais confier mon corps à... »
Juliette avait encore du mal à y croire. Tout ça semblait hallucinant, mais elle avait confiance en sa Maîtresse.
«
La métempsycose est loin d’être une science exacte, intervint Mélinda.
Il y a tellement de critères possibles, j’ignore si vos esprits vont s’accepter l’un et l’autre... Mais vous ne perdez rien à essayer, n’est-ce pas ? »
Juliette ne s’attendait vraiment pas à ça, et était par conséquent toujours un peu confuse. Néanmoins, la volonté de sa Maîtresse faisait loi, et elle acquiesça.
«
Je... Je vais le faire, Maîtresse. »
Elle tendit alors son bras pour que Décatis lui mette le bracelet et procède au transfert...