French Touch [pv Ulrique]

- Décidemment, les Japonaises sont toutes des anorexiques…

C’était la conclusion qu’avait eu Lucie, notre rondouillette française, en regardant les vêtements dans un simple magasin de mode, de fringues, dans le centre commercial. Un simple magasin parmi tant d’autres dans cette immense galerie marchande, et pourtant, Lucie n’avait rien trouvé à sa taille. Elle soupira longuement, fermant ses yeux noisette. Déjà en France, elle avait bien du mal à s’habiller dans les grandes enseignes. Enfin, du moins, s’habiller sans que ça fasse « mamie » et que cela la vieillisse. Après, elle ne se souciait guère d’être à la pointe de la mode. Elle voulait juste ne pas se trimballer nue, c’est tout. Un autre long soupir s’échappa d’entre ses lèvres. Elle ne pouvait en vouloir aux filles nipponnes après tout. Être de petite taille, fine et svelte était dans leurs caractéristiques physiques, comme Lucie avait les siennes de caucasienne.

Elle sortit d’un ultime magasin de fringues, lassée de ne rien trouver à sa taille. Cela ne faisait pas longtemps qu’elle s’était installée près de Seikusu, ou plutôt aux abords. Elle ne connaissait encore personne dans cette ville, bien loin de sa Provence natale. Alors il n’y avait personne pour la guider dans cette ville inconnue encore pour elle. Mais ce n’était pas grave. Un peu d’aventure dans la vie de tous les jours, ça ne fait de mal à personne.

Habillée d’un simple jean, des bottes noires, un fin pull vert laissant découvert ses épaules, elle arpentait les allées carrelées de la galerie, à l’abri du froid de l’hiver. Elle savait parfaitement où elle allait, un peu dans le fond du centre d’ailleurs. Il y avait là un magasin spécialisé dans les vêtements grandes tailles, et surtout sur mesure. Elle y trouverait peut-être enfin quelque chose à sa taille. Car c’est vrai, chez elle, enfin dans son nouveau chez elle près des sous-bois, elle n’avait pas pu ramener beaucoup d’habits de France, de son ancien appartement ou de la maison familiale. C’est pourquoi elle devait faire avec jusqu’à en trouver ici à Seikusu, en fonction des saisons aussi.

Arrivée devant la fameuse boutique, elle entra doucement, saluant les personnes déjà présentes dans le magasin. Elle ne vint pas directement voir le spécialiste pour se faire faire un habit sur mesure. Elle préférait faire le tour de la boutique, remuait et passait les mains dans les vêtements déjà présents sur les étagères. Et malchanceuse qu’elle est, encore une fois, les choses qui lui plaisaient été soit trop chères, soit pas à sa taille. Un nouveau soupir s’envola de ses lèvres, las de faire les boutiques.

- Non mais quelle poisse…Ce n’est pas possible…

Elle s’exprima dans sa langue maternelle, ne voulant pas se faire entendre et comprendre des personnes présentes dans la boutique…

D'après vous, quand on fait 2,15 mètres, que l'on affiche 130 Kg à la balance et qu'on est "plutôt carré" où fait-on ses courses vestimentaires ? Si vous pensez au rayon vêtement d'un quelconque centre commercial style "Auchan", "Carrefour" ou encore "E.Leclerc", vous avez tout faux. Ce genre d'établissement ne vendent finalement que des tailles standards, pour des gens de tailles standards avec des carrures standards. Ce n'est évidemment absolument pas le cas d'Ulrique qui ne tient pas dans du XL ... Ce que vend probablement au maximum les grandes galeries de Seikusu.

Une grande chaîne spécialisée dans le prêt-à-porter ? Belle tentative mais tout aussi infructueuse. Même si la gamme de tailles est souvent plus large que les grandes surfaces, c'est rarement suffisent pour notre géant. Si certaines enseignes sont spécialisées dans le prêt-à-porter pour "personne larges d'épaules", les modèles sont rarement prévus pour les grandes hauteurs et sont automatiquement trop courts en laissant le nombril à l'air.

Que faire alors pour trouver à coup sûr chaussure à son pied (au propre comme au figurer) ? La troisième est la bonne comme on dit si vous pensez à un tailleur. Si c'est à autres choses et bah ... Aucune idée de ce qui peut vous passer par la tête. La coupe que vous voulez, aux mesures que vous voulez, avec le style et le motif que vous souhaitez. En contre partie d'un coût nettement plus élevé, les "mensurations inhabituelles" obtiennent se dont ils ont besoin, comme on s'en doute c'est le cas d'Ulrique.

Cet après-midi là, la cloche de la boutique sonne alors qu'une ombre masque la lumière des spots de la galerie. Même si au fond l'arrivant n'a rien de méchant, l'effet et garanti sur le commercent qui n'en mène pas trop large. Ulrique ne s'en formalise pas plus que ça et fait un petit tour de la boutique pour ce faire une idée de la qualité du travail de l'attisent.

Une jeune fille semble faire de même, trop absorbée par son étude pour faire attention à son arrivée. Relativement grande bien que nettement en dessous d'Ulrique, elle affiche une silhouette très différente du standard en vigueurs dans la localité japonaise comme dans beaucoup d'autres endroits dans le monde. Mais un autre détail fini de brosser le portrait rapide mais atypique, une expression très ... Française, exprimé dans la langue de Molière qui s'avère être la sienne aussi.

Vous aussi, vous avez des problèmes de tailles ?

Un ton tout a fait anodin, comme on pourrait parler de l'absence de sucre dans un rayon. Peut-être un peu maladroit malgré tout, mais comme c'est aussi manifestement son cas la jeune fille n'en tiendrait peut-être pas compte.

Lucie était lasse de chercher des vêtements sans rien trouver à sa taille. C’est pourquoi elle était rentrée dans une boutique spécialisée, mais là encore, elle ne trouvait pas son bonheur dans les vêtements déjà présents sur les étagères du petit magasin. Elle en déprimerait presque, mais ce n’était pas son genre. Une voix assez rauque vient la sortir de ses pensées et lui retirer ses soupirs.

- Oui, on peut dire ça.

Elle avait répondu instinctivement en français. Après tout, cette voix avait répondu en français également…Une petite minute ! Français, français ! Elle se retourna en direction de cette voix, un homme assurément.

- Vous êtes franç…Oh…Wouaaaaaah…

Elle ne put terminer sa phrase, bien trop impressionnée par la taille de cet homme. Vraiment bien trop grand pour être un asiatique. Alors était-il vraiment français ? Néanmoins, elle restait scotchée face à lui, se sentant ridiculement petite à côté de lui. Et puis cette stature…Elle était là, ses petits yeux bien ronds de fascination, et la bouche juste un peu ouverte. Elle se secoua le visage, se sentant bête de sa propre réaction face à la montagne de muscles qu’elle avait devant elle.

- Oups…Je suis désolée de ma réaction…Non mais quelle idiote je fais. Pardonnez-moi si je vous ai vexé par mon comportement.

Elle posa sa main sur sa tête, se sentant bien godiche encore. Puis la posa sur son ventre, légèrement bombé par rapport à la moyenne. Oui, si pour le jeune homme s’était sûrement une question de taille, pour Lucie, ses soucis étaient tout autre.

- Disons que pour moi, c’est un autre problème que le votre.

Elle se mit à sourire doucement, fermant ses yeux. Bah, ce n’est pas la première fois qu’elle avait des soucis quotidiens à cause de son poids. M’enfin, elle passait encore ses mains dans les fringues pour voir si elle trouvait quelque chose.

Oui, on peut dire ça.

Dans le mile. La conversation se poursuit donc en français. D'ailleurs il note ce qu'il reconnaît comme l'accent du sud. Il ne saurait dire d'où exactement, tout comme elle ne pourra peut-être pas localiser précisément son accent qui sent bon les rillettes. Ça ne semble pas la choquer sur le moment ... Du moins jusqu'à ce qu'elle se retourne.

Vous êtes franç…Oh…Wouaaaaaah…

La phrase se retrouve interrompue par la réaction classique, bien qu'un peu plus expressive chez elle, qu'il provoque en règle général au premier contacte. Il y a de quoi il faut admettre, la jeune femme reste en arrêt un instant devant le spectacle qu'il offre plus ou moins sans le vouloir avec son éternel t-shirt rouge, sa veste ouverte et son pantalon noir.

Çais ? Oui effectivement, vous aussi j'ai l'impression non ?

Manifestement il ne se formalise pas sur cette réaction qu'il voit de toute façon trop régulièrement pour qu'il s'en vexe. D'ailleurs les excuses de Lucie visiblement confuse devant son propre comportement le font sourire sans qu'il ne commente.

Ne vous inquiétez pas pour ça, j'ai l'habitude. Ce n'est pas comme si j'étais discret.

La fin de sa phrase s'accompagne d'un rire, histoire de détendre l'atmosphère. Il en profite pour observer plus en détail son interlocutrice qui aborde un physique atypique dans ce pays, avec une silhouette toute en rondeur qui exprime celon lui le simple plaisir de bien manger en se foutant des recommandations des médecins. Évidemment il ne pouvait deviner que les formes de Lucie sont liées à un problème plus grave ... Ce n'est pas comme si elle avait une étiquette à ce sujet sur le front.

Au fond c'est un peu la même chose, quand on sort du standard quel qu'en soit la raison, magiquement il n'y a plus rien en rayon.

Sans doute qu'elle a reçue des moqueries dans le passé, peut-être même encore aujourd'hui. Mais il n'y en aura manifestement pas de la part d'Ulrique. Ce serait d'ailleurs mal placé compte tenu de son propre physique et de son "petit secret". Quoi qu'il en soit il l'imite et se penche sur le rayon "grandes tailles homme" qui se trouve juste derrière Lucie. Son exploration finie par l'amener à proximité d'un mannequin d'exemple placé là, réglé sur ses butés en affichant environ 1m90. Avec un peu d'imagination, l'image d'Ulrique qui tente d'enfiler ce qu'il y a sur l'homme de plastique et de fer pourrait être comique, nul doute que veste et chemise supporteraient pas la pression tandis que le pantalon lui opposerait des réticences à l'enfilage. Il faut voir plus grand encore ...

Ça fait longtemps que vous êtes dans le coin ?

Lucie, encore sous la surprise, avait alors bien un Français en face d’elle. Ca lui faisait un peu bizarre tout de même. Malgré que cela ne fasse que peu de temps qu’elle était arrivée à Seikusu, c’était bien la première fois qu’elle entendait quelqu’un parler dans sa langue maternelle. Apparemment, il ne venait pas du même coin de France que la rouquine. Elle n’avait pourtant que peu l’accent provençal mais lui semblait venir d’un peu plus du nord, son accent manquant de soleil. La jeune rousse s’excusait encore devant le jeune homme qui malgré cela, prenait cela avec le sourire. Après tout, comme Lucie, il devait avoir l’habitude de ce genre de réactions. Après, selon les personnes, on peut le prendre bien ou mal, la rondouillette le savait, c’est pourquoi elle avait les joues un peu rouges de honte d’avoir réagi ainsi. Elle s’était remise à fouiller dans les vêtements pendus devant elle avant d’avoir précisé que son problème de taille n’était pas vraiment le même que le jeune homme. Tout ça dit avec le sourire bien sûr.

- Au fond c'est un peu la même chose, quand on sort du standard quel qu'en soit la raison, magiquement il n'y a plus rien en rayon.

- Ha ha, oui c’est vrai. C’était déjà difficile de trouver des choses à notre taille en France, c’est mille fois plus compliqué dans ce coin du monde ! On n’a pas choisi le bon endroit !

Lucie s’était mise à rire doucement. Oui, mais quelle idée d’être venue dans un pays si typé, et en aucun cas caucasien. Que voulez-vous ? L’envie de voir ailleurs, explorer le monde, profiter tout simplement. Le jeune homme se mit également à fouiller dans les vêtements pour trouver quelque chose qui puisse lui aller. Apparemment, la tâche est bien difficile aussi bien pour Lucie que pour lui.

- Ça fait longtemps que vous êtes dans le coin ?

- Oh non. Peut-être un mois, pas plus en tout cas. Je me suis installée un peu à l’extérieur de la ville. Et vous, votre arrivée est récente dans cette ville ?

Lucie n’aimait pas l’ambiance des villes. Pression, stress, pollution, cris…Le silence, cela n’existait pas dans les villes, même la nuit. La rondouillette aimait la nature de toute façon. Adieu béton, bonjour plantes vertes ! Rien ne valait un bon bol d’air frais, entourée de sa ménagerie, au chaud dans sa petite maison. Oui, un vrai paradis. Bon, après, y’en a qui aiment la ville. Ces citadins, la rousse ne savait pas comment ils pouvaient apprécier tout cela. Enfin, bref, là n’est pas la question. Lucie arrêta de fouiller un instant, ne trouvant rien, et se retourna vers le jeune homme, se présentant à lui.

- Moi, c’est Lucie.

Elle lui fit un grand sourire, formant une sorte de petites pommes rouges au niveau de ses joues. Elle est rondouillette après tout. Elle l’avait dit d’une façon si enfantine. On aurait dit une gamine de maternelle, se présentant à un autre enfant, dans l’unique but de jouer. Lucie était comme ça encore, une grande enfant.

Ha ha, oui c'est vrai. C'était déjà difficile de trouver des choses à notre taille en France, c'est mille fois plus compliqué dans ce coin du monde ! On n'a pas choisi le bon endroit !

Oui c'est vrai, quelle idée d'être un peuple de nain maigrichon aussi.

À prendre avec une bonne dose d'humour et de bonne humeur évidemment. La nature à parfois des goûts étranges quand il s'agit d'attribuer les caractères physiques de chacun, mais un peu de différence ça fait du bien dans la monotonie de l'environnement. Si tout le monde se ressemblait trait pour trait ça deviendrait rapidement triste à en mourir.

Oh non. Peut-être un mois, pas plus en tout cas. Je me suis installée un peu à l'extérieur de la ville. Et vous, votre arrivée est récente dans cette ville ?

Ça fait trois semaines que je suis installé en ville, j'ai un petit appartement proche du centre. C'est plus pratique compte tenu de mon travail.

Ce n'est pas qu'il ait réellement besoin de travailler, la plupart des distributeurs lui fournissant autant de billets qu'il veut sans rien lui demander en retour. Mais en plus de lui fournir une "couverture" si on peut dire, ça lui occupe ses journées. Et vu qu'il n'a pas encore de voiture, bien qu'étant titulaire du permis, il est plus simple de jongler avec les transports en commun depuis la ville elle-même plutôt que d'un point éloigné et mal desservie. Malgré tout, il pourrait être facile de l'imaginer avec un vieux pantalon et une chemise en train de pélter la paille dans une ferme, il n'y ferait pas tache ... Bien au contraire.

Finalement la jeune fille s'approche à nouveau de lui, dans le but manifeste de se présenter un minimum. Lucie, tel est le nom de ce petit bout de femme qui en a peut-être mare de chercher dans les piles de vêtements. En même temps il n'y avait pas grand-chose, après tout le commerçant fait sans doute plus de sur-mesure que de prêt-à-porter, sinon il ne tiendrait pas devant les grandes enseignes de la galerie.

Ulrique Chevalier, le paladin qui vient vous délivrer des méchants bugs et sombre panne.

Un jeu de mot facile sur son nom et son activité professionnelle. Une façon sympathique de dire qu'il travaille dans le dépannage informatique. C'est aussi une invitation déguisée à se présenter plus en détails pour Lucie.

Je ne trouve rien, je vous paye un verre ?

Les paroles se faisaient plus amusantes, des pointes d’humour par-ci, par-là. Leurs différences donnaient l’impression qu’ils étaient proches. D’un côté, c’est un peu vrai car ils pouvaient très bien comprendre les malheurs de l’autre. Ils sont passés par les railleries, les brimades et j’en passe. Pour elle, venir dans ce pays était un nouveau départ, et il était récent. Apparemment, il était de même pour le jeune homme. Mais alors que Lucie avait préféré de vivre un peu éloigné, lui avait choisi de prendre possession de la ville. C’est peut-être plus pratique, c’est vrai. Si en plus il travaille en ville, les transports en commun aident beaucoup. Lucie, loin des citadins, préférait le vélo pour bouger. Si elle avait vraiment de longues distances à faire, alors elle prendrait sa moto. C’était une vieille bécane qui restait dans un coin de la grange, près des animaux. Vieille, mais qui roule encore, et c’était le principal.

Lucie avait arrêté de fouiller dans les fringues sur les présentoirs, lasse de ne rien trouver, avant de finalement se présenter –à moitié- au jeune homme. Celui-ci fit de même dans un magnifique jeu de mot qui fit bien sourire la jeune femme. Ulrique, ce n’est pas d’origine celtique par hasard ?

- Vous faîtes donc dans l’informatique ?

Lucie se sentait un peu mal de n’avoir dit que son prénom pour se présenter. C’est pour cela qu’elle rectifia le tir. Avec son humour à elle. Les mains formant une sorte d’arme à feu, elle se dévoila.

- My name is Moreau. Lucie Moreau. Et je travaille à la crèche de Seikusu.

Réplique piquée sur des films d’une longue série. Vous vous doutez du quel ! Elle baissa finalement ses mains. Ouais, cela a moins d’allure que pour Ulrique. Elle fit d’ailleurs une petite mine boudeuse.

- Ca en claque moins que vous.

Ulrique, ne trouvant rien de son côté, invita finalement la jeune femme à prendre un verre. Pourquoi pas. Elle accepta donc son invitation, accompagnée d’un sourire. Notre rondouillette n’avait plus rien à faire dans ce magasin de toute manière. Et si elle savait qu’elle ne trouverait plus rien d’autre à s’acheter pour elle, au moins, elle aurait de la compagnie, et pas des plus mauvaises !

My name is Moreau. Lucie Moreau. Et je travaille à la crèche de Seikusu.

Faut au moins faire partie du MI-6 pour maîtriser ses petits monstres j'imagine, au moins les processeurs ne s'amusent pas à faire la polka à l'heure de la sieste.

S'il y en a qui regardent, ils doivent certainement se poser des questions quant à la teneur de leur conversation. Mais au moins Ulrique a compris la référence et ce n'est déjà pas si mal pour quelque chose qui ne "claque pas terrible".

Comme ils ne trouvent rien d'intéressant, ils sortent donc ensemble ... De la boutique, bande de déformateur de sens ! Après l'habituelle "je me penche pour ne pas me prendre le cadre de la porte standard qui est trop basse pour moi", Ulrique se dirige donc vers le petit bar qui donne sur la galerie, le genre qui ne paye pas de mine en imitant autant que possible un établissement comme on en avait dans les villes européennes, mais dont l'ambiance est cassée par le bruit du centre commercial et l'air un peu à côté de ses pompes du barman. Enfin on fera avec.

Leurs arrivées sort d'ailleurs le jeune japonais de son apparente léthargie. Probablement un étudiant qui prend se travaille pour payer ses études pendant ses heures creuses. Ulrique se pose à l'une des tables un peu en retrait et passe commande d'une bière à la pression, même en sachant qu'elle n'aura sans doute pas le goût de son équivalent vendu en France. Quant à Lucie, que commandera-t-elle ? Un café ? Un Pepsy ? Un whisky ? Une carafe d'eau ? La suite au prochain épisode !

Allez. Lucie et Ulrique avaient décidé d’arrêter de se prendre la tête à chercher des fringues à leur taille. Tout était trop petit dans ce monde de jaunes ! Le jeune homme invita notre rondouillette à prendre un verre avec lui, chose qu’elle accepta avec plaisir. Sortant de la boutique l’un à côté de l’autre, le reste des gens présents dans le centre commercial avait une vue sur un couple peu commun : deux caucasiens, l’un immense, l’autre ayant de l’embonpoint. Un vrai spectacle pour ces asiatiques. Ils n’avaient pas à faire beaucoup de chemin pour arriver dans un petit bar à la décoration et structure des bars européens. Il n’y avait que peu de monde et cela était parfait. Ils n’attireraient pas l’attention ainsi. Ulrique décida de s’installer tout de même sur une table un peu en retrait, Lucie prit justement place à côté de lui. Là, un jeune homme, sûrement étudiant, vint prendre leur commande. Si Ulrique décida de prendre une bière, la rondouillette allait être plus gourmande, commandant gentiment un milkshake à la framboise. En attendant que leurs boissons arrivent, Lucie décida de reparler de la petite remarque gentille qu’avait eu Ulrique sur le métier de la rouquine.

- Les enfants ne sont pas tous des turbulents, vous savez. Ils sont généralement sages avec moi. Il faut juste savoir être patient, comme dans votre métier j’imagine…

Lucie souria, s’installant un peu mieux sur sa chaise. Croisant ses jambes comme toute femme, elle eut un frisson quand elle sentit de l’air venant de la galerie. Dans le bar, il faisait particulièrement chaud, encore plus que dans la galerie, pourtant chauffée à cause du froid de l’hiver. En même temps, avec ses épaules à l’air, elle ne pouvait que frissonner. Quelle pintade…Ses joues commençaient à rougir sous le chauffage abusif du bar, mais Lucie se mit à sourire davantage quand enfin, le serveur amena leur commande : une bière pression avec plein de mousse, et un graaaaand verre de milkshake framboise, paille avec.

- Merci beaucoup pour le verre !

C’est vrai après tout, Ulrique n’était pas obligé de payer la boisson de la rondouillette. S’affalant un peu sur la table, les deux coudes dessus et le verre entre ses bras, elle prit délicatement la paille entre ses lèvres et commença à prendre quelques gorgées de son milkshake. Lâchant la paille, elle expira longuement d’aise, ses pommettes un peu pivoine.

- Haaaaa…Que ça fait du bien…

Elle observa un peu aux alentours ce qu’il se passait, pas grand-chose d’intéressant faut dire. Ravalant une dernière gorgée du fameux breuvage, elle approcha son verre du jeune homme qui l’avait gentiment invitée.

- Vous voulez goûter ? C’est délicieux !

Et tout ça, avec le sourire, made by Lulu…

Depuis longtemps Ulrique avait appris à ignorer les regards curieux que son passage ne manque pas de provoquer. Que ça soit de la part d'un Anglais, d'un Français, d'un Javanais de l'extrême sud-ouest à lunette ou d'un Japonais ça ne change pas grand-chose. On peut supposer la même chose de la jeune fille qui l'accompagne.

Une fois installés, ils reprennent la conversation très banale qu'ils avaient un peu plus tôt dans la boutique alors que leur commande est prise. D'ailleurs chose amusante, Ulrique a un petit temps d'arrêt quand il faut passer du français au japonais et inversement, ce qui confirme si son accent n'est pas suffisant que la langue nippone n'est pas sa langue maternelle. Enfin maternelle, c'est vite dit compte tenu de ses origines, mais ce n'est pas le sujet.

Les enfants ne sont pas tous des turbulents, vous savez. Ils sont généralement sages avec moi. Il faut juste savoir être patient, comme dans votre métier j'imagine...

Pour être tout à fait exacte, un ordinateur fera toujours ce qu'on lui demande sans poser de questions ... Pas de "comment on fait les bébés" ou de "pourquoi-ci, pourquoi-ça" en perspective entre autres.

Lucie a-t-elle chaud ou es que c'est lui qui la fait rougir ? Difficile à dite. Pour sa part il ne réagit pas ou peu au courant d'air surchauffé du bar, comme à tout ce qui a rapport de près ou de loin à la chaleur en fait. Il faut dire qu'entre son père et sa mère, il a été blindé autant contre le gel que la surchauffe.

Malgré tout elle se met à l'aise et lui offre un grand sourire quand la commande revient, une bière bien fraîche pour monsieur et un grand verre d'une boisson à base de glace et de lait pour la demoiselle rondouillarde qui ne devait attendre que ça pour éclater de joie.

Merci beaucoup pour le verre !

De-rien. Ce n'est pas tous les jours que je croise une compatriote en ses terres

Un peu comme si elle était écrasée par la chaleur, Lucie s'étale sur la table comme du beurre fondu jusqu'à attraper la paille qui lui donne accès à sa boisson qui lui arrache un soupir d'aise une fois la première gorgé ingurgité. Ulrique lui se contente de boire son verre de façon plus classique. En même temps, vu sa taille la position de Lucie lui donnerait un air des plus ridicule ... Sans compter que le meuble ne supporterait peut-être pas une surcharge de ce genre.

Visiblement le Milkshake doit avoir bon goût, on ne peut pas en dire autant de la bière d'Ulrique. Ça suffit pour se désaltérer, mais ce n'est manifestement pas du haut de gamme ... À moins que les Japonais aient des "goûts de chiottes" à ce sujet. À leur éventuelle décharge le Saké est sans doute nettement plus courant et demandé. Quoi qu'il en soit Lucie l'invite à tester la différence, ce qu'il fait en avalant une petite gorgée du liquide lacté qui semble la ravir.

Ce n'est pas mauvais, mais ce n'est pas trop ma tasse de thé à vrai dire. Quitte à choisir je préfère un bon chocolat chaud avec des biscuits personnellement.