Nouvelle rencontre [Pv ~> Marine]

Le soleil était sortit depuis un long moment lorsque un bruit se fit entendre dans la chambre. Un bruit d’étirement pour être précis, suivit d’un bâillement. L’ange se releva et s’assit sur son lit, les yeux à demi ouvert. Après de longues minutes, il sortit de son lit et ouvrit la fenêtre pour aérer la pièce. Un sourire apparut lorsqu’une légère brise vint caresser son visage : un peu d’entrainement lui ferait le plus grand bien. Il se dirigea en direction de la salle de bain et fit ce qu’il avait à faire, puis prit une serviette avant d’en sortir. Il se vêtit d’un simple jogging et enfila ses tennis. Une fois dehors, il fit quelques étirements puis partit …

Sur le chemin, il croisa plusieurs adolescents, tous accompagnés de leur copine. Enfin, il n’en était pas vraiment sûr, mais comment cela aurait pu en être autrement ? Quoi de plus normal à cet âge ? Seul lui avancé encore dans la vie, seul. Souvent, il entendait les personnes de sa classe dire que les anges étaient les créatures les plus belles. Il souriait souvent. Mais son sourire ne restait jamais trop longtemps. Les anges étaient considérés comme de la fiction dans le monde humain, comme les dieux, les vampires, ou toutes sortes de créatures. Si seulement ils savaient. Voilà depuis près de deux siècles que Kei vivait parmi eux. Quelques fois, il devait changer de ville : comment aurait réagit les gens s’ils voyaient dans les archives un jeune homme vivant ici depuis plus de cent ans ? Et qui plus est avec la même apparence physique ? Quoi qu’il en soit, ça ne servait à rien de ressasser le passé. Il était ce qu’il était, et rien ni personne ne pourra y faire quelque chose. Il décida donc de rentrer, sentant que l’envie de se dégourdir les jambes venait de partir comme elle était venue …

Une fois chez lui, il remplit une casserole et mit de l’eau à chauffer et prit cette fois un bon bain. Il se laissa couler au fond de la baignoire et attendit patiemment que l’eau monte. Qu’est ce que c’était relaxant ! Il ferma doucement les yeux et commença lentement à s’endormir lorsqu’un léger bruit le sortit de son état  de stase. Un bruit métallique … La casserole ! Il sortit rapidement de la salle de bain et se dirigea dans la cuisine, là où le drame se passait : il y en avait partout. Quelle journée de merde ! Là oui il pouvait le dire. Il éteint donc le gaz et repartit finir son bain : aujourd’hui, il mangerait au centre commercial.

La cuisinière nettoyé, il était fin prêt à aller manger. Vêtu d’un simple jean et d’un sweat-shirt, il se dirigea en direction du fast food le plus proche. Lui qui pensait que la journée avait bien commençait avec ce beau soleil s’était magnifiquement trompé. Trop de monde, et une queue immense dans tous les magasins: voilà à quoi ressemblait le centre commercial en plein week-end. Après avoir passé près d’un quart d’heure dans la file d’attente, il put enfin passer commande. Il alla s’assoir, seul à une table et repartit lorsqu’il eut fini : à quoi bon s’éterniser dans un endroit si bruyant ?  Marchant le long des magasins, il regardait d’un œil distrait si quelque chose pouvait l’intéresser, mais il n’y avait rien à faire. Il risquait de passer encore une triste journée. Il prit le chemin du retour, les yeux perdus dans le vague. Ce qu’il n’aurait pas du faire. Il percuta une personne dans les escaliers qui lâcha un petit cri : pas de doutes, au son de la voix, il s’agissait d’une fille. Instinctivement, il lui attrapa le poignet et l’attira vers lui.

« Je suis sincèrement désolé … Je ne regardais pas devant moi, milles excuses ! »

Quel idiot. A quoi pensait-il ? Surpris de toujours la tenir, il finit par la lâcher puisqu’il n’y avait plus aucuns dangers. D’un coup d’œil rapide, il jugea qu’elle ne devait avoir rien de cassé, mais on ne savait jamais. Son regard remonta alors vers son visage où il put apercevoir un magnifique visage. Une peau très claire, ressortant très bien avec ses habits noirs. Mais quelque chose à l’intérieur de lui lui disait de se méfier … Peu d’humaines pouvaient se vanter d’avoir un si joli minois …

Mais qu’est-ce qui lui avait pris de venir ici en plein week-end ? Marine se posait la question. La foule, le bruit tout ce qu’elle détestait. Pourquoi était-elle venue d’ailleurs ? Ah oui, elle était venue chercher un livre. D’habitude elle se servait à la bibliothèque mais cette dernière était fermée pour quelques jours. Elle en avait emprunté quelques uns mais la jeune femme les avait dévorés en deux jours. En même temps, la lecture comblait ses longues heures d’insomnie. En ce moment, c’était une catastrophe. Elle avait toujours fait des crises d’insomnie mais là, ça faisait presque une semaine qu’elle n’avait pas ou si peu fermée l’œil. Et rester à tourner dans sa chambre la nuit, la rendait folle.

Elle s’était donc résolue, bon gré, mal gré, à se traîner jusqu’à la librairie du centre commercial un samedi après-midi. Elle préférait affronter la foule plutôt que de passer ses prochaines nuits à tourner comme un lion en cage.

Elle finit par atteindre la librairie et après s’être faite bousculée un certain nombre de fois, elle finit par atteindre la caisse et repartir avec son sac de livres qui devrait la faire tenir deux ou trois jours jusqu’à la réouverture de sa chère bibliothèque.

Son moral n’était pas au beau fixe. La fatigue ne l’aidait pas. Avant de partir, elle décida de faire un saut au premier étage pour voir ce qu’il y avait. Elle commença à monter les escaliers quand soudain une énième personne lui rentra dedans. Elle se sentit basculer en arrière mais une main ferme lui rattrapa le poignet lui évitant la chute. Un jeune homme la ramena vers lui.

« Je suis sincèrement désolé … Je ne regardais pas devant moi, milles excuses ! »

En temps ordinaires, Marine lui aurait dit de faire plus attention. Mais là, elle n’en avait pas le courage. Elle se dit qu’elle essaierait peut-être de dormir en rentrant à son hôtel. Elle regarda le jeune homme, celui-ci semblait inquiet pour elle.
 
« Ce n’est pas grave. Je vais bien, ne vous inquiétez pas »

Le visage grave, elle se dit que le premier étage du centre commercial attendrait. Elle soupira et s’en faire plus cas de la personne qui l’avait rattrapée, elle se retourna et entreprit de redescendre les escaliers en se frayant un passage dans le flot humain. Alors qu’elle arrivait en bas, une autre personne la bouscula mais cette fois ne la rattrapa pas. Elle tomba sur le sol. Heureusement, sa chute était d’une faible hauteur, deux marches.

Elle se retrouva à moitié allongée sur le sol. Une ou deux personnes lui demandèrent si ça allait, elle hocha la tête. Elle avait connu pire. Par contre, elle s’était mal reçue et elle avait mal à son poignée. Il était probablement foulé. Elle se releva et prit la direction de la sortie portant son sac avec l’autre main. Vivement qu’elle se retrouve dans sa chambre, au calme.

La jeune fille semblait être tout aussi dépité que lui. La preuve, elle ne réagit presque pas à cette bousculade. En général, il se serait fait rembarré illico presto. La jeune fille lui dit donc que ce n'était pas grave et repartit dans le sens inverse. Kei la regardait toujours lorsqu'elle se fit renverser une seconde fois. Quel était le problème avec cette fille? Elle se releva et l'ange remarqua qu'elle se tenait le poignet. Vu le regard qu'elle avait, elle se l'était surement tordu, ou quelque chose dans le genre. Et ce qui le lui confirma était le fait qu'elle change de main la place de son sac. Tout de même, ça ne semblait pas bien grave. Mais quand même ... Il se sentait en partie responsable de ce deuxième accident. Il entreprit de descendre les marches pour lui soigner le poignet, mais elle était déjà partit. Et il ne la reverrait sans doutes plus. D'ailleurs comment aurait-il pu dans une si grande ville? N'ayant plus rien à faire non plus en ces lieux, il décida qu'il était aussi temps pour lui de se retirer, jusqu'à ce qu'il s'aperçoive qu'il marchait sur quelque chose. Levant lentement, il remarqua qu'il ne s'agissait là que d'un porte-monnaie ... Celui de la fille surement ...

" Tssss ... Franchement ... "

De façon machinale, il passa sa main dans ses cheveux en se disant qu'il valait mieux lui rendre le plus vite possible. Lorsqu'il regarda une nouvelle fois en bas de l'escalier, la jeune fille avait disparut. Qu'elle galère. Il entreprit donc de partir à sa recherche, cherchant dans un premier temps autour du centre commercial. Il aurait pu aller bien plus vite en usant de ses pouvoirs, mais cela ne servirait à rien ...

Revenant à son point de départ, il du se rendre à l'évidence: elle lui avait filé entre les doigts. Il ferait mieux de chercher ailleurs. Il partit donc à sa recherche, demandant à quelques personnes qui passaient par là s'ils n'avaient pas vu une jeune fille répondant à la description qu'il leur faisait. Quelque fois, on lui disait qu'elle était partit par ici, d'autres par là. Mais d'une personne à l'autre, rien ne concordait, et s'il les écoutait, il finirait par se perdre. Il s'assit sur un banc, en ayant plus que marre de tourner en rond. Il aurait pu garder le porte monnaie et tout ce qu'il contenait pour lui, sans rien dire à personne. Qui aurait pu dire que c'était lui en même temps? Mais voilà, ce n'était pas son genre. D'ailleurs, quel était vraiment son genre?

Se relevant, il décida enfin de recourir à ses pouvoirs. Ça n'allait certainement pas lui révéler la position exacte de la jeune fille, mais ce serait déjà un bon début pour commencer. Regardant à droite à gauche, il s'aperçut que la rue était déserte, donc qu'il pouvait le faire sans être vu. Fermant les yeux, il récita quelques phrases incompréhensible et les doigts qui tenaient le porte-monnaie semblèrent luire faiblement. Lorsqu'il les rouvrit, il savait vers où il devrait se diriger. Il se remit donc en chemin, fermant quelque fois les yeux en réitérant l'opération une nouvelle fois.

Et qu'allait-il bien pouvoir lui dire? "Salut c'est encore moi? T'as laissé tomber ton porte-monnaie et je suis venu te le rendre bien que je ne sache pas à tu habites" ? Ça allait être ça? Pathétique. Relevant la tête, il s'aperçut que la jeune fille était en face de lui. Le reconnaissait-elle? Qu'est ce que ça changerait si c'était le cas? Il agita le bras tenant le bien de la jeune fille vers elle.

" Yô ! C'est encore moi. Tu as fais tomber ça tout à l'heure. "

Il s'empressa donc d'aller à sa rencontre. Et se promit d'une certaine manière de ne plus aller au centre commercial les jours de beau temps. Il lui tendit donc ce qui lui appartenait et regarda la main tremblante qu'elle lui tendait. S'était donc fait tant mal que ça? Il allait la soigner lorsqu'il pensa aux conséquences. Comment réagirait-elle? Une personne lui soignant le poignet d'une autre comme ça, comme par enchantement? M'enfin, quelles preuves aurait-elle? Il suffirait juste de le nier.

" Encore désolé pour ça ... Je vais faire mon possible pour te l'arranger le plus vite possible sans avoir trop mal ... "

Il posa donc ses mains sur son poignets de façon à ce qu'elle ne voie pas ce qu'il se passe à l'intérieur. Inspirant profondément, il se concentra sur la blessure, puis retira ses mains. Ça devrait être bon maintenant. Il reporta son attention sur la jeune fille, lui disant en souriant.

" Ça devrait aller là, non? "

Marine avançait presque au radar. Son poignet lui faisait vraiment très mal. Vivement qu’elle se retrouve dans sa chambre. Mais la douleur la tenait au moins un peu alerte. Elle ne faisait pas attention aux gens autour d’elle. Mais, tout à coup, elle entendit quelqu’un qui l’interpellait.

« Yô ! C'est encore moi. Tu as fais tomber ça tout à l'heure »

Elle reconnut le jeune homme qui l’avait bousculé et rattrapé. Il tenait son portefeuille à la main. Elle avait dû le perdre en tombant. Elle tendit la main pour le reprendre. Un geste qui lui coûta beaucoup mais elle en avait vu d’autres. C’était douloureux mais supportable.

« Encore désolé pour ça ... Je vais faire mon possible pour te l'arranger le plus vite possible sans avoir trop mal ... »

Sans attendre sa réponse, il tendit les mains vers son poignet en mauvais état et, sans qu’elle sache comment, il fit disparaître la douleur. Elle en fut surprise mais ne chercha pas à comprendre plus que ça. Elle n’en avait pas le courage.

« Ça devrait aller là, non? »

Le jeune homme lui souriait. Marine lui rendit son sourire, chose très rare chez elle. Elle fit bouger son poignet pour s’assurer qu’elle n’avait plus mal. Impressionnant ! Elle ne ressentait plus aucune douleur, comme si rien ne s’était produit !

« Vous avez de doigts de magicien, monsieur – elle lui sourit de plus belle – Si vous avez une recette miracle aidant à dormir, je suis preneuse. Mais permettez-moi de vous remercier, monsieur, pour m’avoir rendu mon bien. Cela a du vous embêter de venir jusqu’ici. J’imagine que vous avez trouvé l’adresse de l’hôtel à l’intérieur. Heureusement, que vous me l’avez ramené car la carte ouvrant la porte de ma chambre se trouve à l’intérieur. Si vous ne l’aviez pas trouvé, je dormais dehors ce soir ! Enfin, dans la mesure où j’arrive à dormir, bien sûr »

La jeune femme se demandait comment elle pourrait le remercier d’être venue lui rapporter son portefeuille. Malheureusement, à part ses remerciements, elle ne pouvait pas faire grand-chose.
 
« Merci encore. Si je peux vous être utile en quoi que se soit, n’hésitez pas, monsieur… Monsieur comment ? Moi, je m’appelle Marine »

Comme il s'y attendait, elle ne l'avait pas reconnut. Mais quoi de plus normal? Il n'était pas bête au point de lui en vouloir à ce point. Lorsqu'il l'eut soigné, la jeune fille bougea son poignet pour s'assurer qu'il n'avait rien de grave et parut satisfaite, et il eu même droit à un sourire en compassassion.  Et quel sourire !

« Vous avez de doigts de magicien, monsieur – elle lui sourit de plus belle – Si vous avez une recette miracle aidant à dormir, je suis preneuse. Mais permettez-moi de vous remercier, monsieur, pour m’avoir rendu mon bien. Cela a du vous embêter de venir jusqu’ici. J’imagine que vous avez trouvé l’adresse de l’hôtel à l’intérieur. Heureusement, que vous me l’avez ramené car la carte ouvrant la porte de ma chambre se trouve à l’intérieur. Si vous ne l’aviez pas trouvé, je dormais dehors ce soir ! Enfin, dans la mesure où j’arrive à dormir, bien sûr »

Des doigts de magicien, lui? Certainement pas. Plutôt des doigts d'ange, mais ça, elle n'était pas censé le savoir. Qui le pourrait? Mais à trop vouloir bien faire, il n'avait même pas remarqué que la carte d'hôtel de la jeune fille se trouvait à l'intérieur de son porte monnaie. Si seulement il s'était contenté de l'ouvrir, il n'aurait pas passé toute l'après midi à chercher pour rien. Quelle tête en l'air il était. M'enfin ...

" Hé bien je m'y connais un peu magie, oui, on peut dire ça. Mais je ne pense pas pouvoir vous faire passer une bonne nuit avec ce genre de pouvoir "

Il lui avait dit ça en rigolant. Non pas pour se moquer, mais parce qu'il l'aimait bien, tout simplement. Il aurait bien aimé rester avec elle pour parler, mais elle avait certainement d'autres choses à faire. Et à quoi l'ennuyer? Depuis sa plus tendre enfance, il avait toujours été seul. Cela avait été plutôt dur au début, mais au fil des années, il avait réussi à oublier cet étrange sentiment.

« Merci encore. Si je peux vous être utile en quoi que se soit, n’hésitez pas, monsieur… Monsieur comment ? Moi, je m’appelle Marine »

Marine ... Alors elle s'appelait comme ça ... Et d'ailleurs, c'était quoi ce "Monsieur"? Il paraissait si vieux que ça? Surement pas, encore une autre forme de politesse des humains. Quoi qu'il en soit, cela ne lui plaisait pas trop d'être appelé comme ça, et il lui dit en rigolant.

" Tu peux m'appeler Kei si tu veux, c'est plus court et plus joli que "Monsieur" ..."

Quoi qu'il en soit, il commençait à se faire tard et la jeune fille voulait surement rentrer chez elle. Donc poliment, il lui dit au revoir, en espérant tout de même qu'ils allaient se revoir. Il se retourna pour rebrousser chemin et c'est cet instant que choisit son ventre pour gargouiller. Quelle chance !  Il se retourna une nouvelle fois, d'abord honteux, puis avec quand même un peu de résolution au fond des yeux. Quitte à ne plus jamais se revoir, autant en profiter au maximum ! Timidement, il lui demanda.

" Accepterais-tu de manger avec moi ce soir? Ne te sens pas obligé, réponds moi honnêtement "

Elle allait repartir pour son hôtel quand Kei revint vers elle.

« Accepterais-tu de manger avec moi ce soir ? Ne te sens pas obligé, réponds moi honnêtement »

Marine fut surprise par son invitation. Lui semblait un peu gêné. Elle aussi mais elle lui devait bien ça. En plus, vu comment elle était partit, ça risquait d’être encore une nuit blanche. Autant faire quelque chose et puis elle commençait à avoir faim. Pour une fois, elle ne serait pas seule.

« D’accord. Je veux bien. Au fait Kei, ne vous… ne te formalise pas en ce qui concerne le vouvoiement. Je fais ça avec tout le monde. Ce n’est pas spécifique à vous… à toi. Désolé, je risque d’avoir un peu de mal à te tutoyer. N’hésites pas à me reprendre. Tu as une préférence pour le restaurant et c’est moi qui paie. C’est la moindre des choses »

Elle avait toujours le sourire aux lèvres. Etrange ! Cela n’arrivait jamais. C’était bizarre mais la présence de Kei lui faisait du bien. Pourquoi ? Comment ? Elle n’en savait rien. Elle voulait juste en profiter un peu.

« D’accord. Je veux bien. Au fait Kei, ne vous… ne te formalise pas en ce qui concerne le vouvoiement. Je fais ça avec tout le monde. Ce n’est pas spécifique à vous… à toi. Désolé, je risque d’avoir un peu de mal à te tutoyer. N’hésites pas à me reprendre. »

Kei sentit un poids de moins s'envoler. Elle avait accepté, et il en était content. Au moins ce soir, il mangerait en compagnie d'une personne qu'il apprécierait, et pas tout seul comme à son habitude. Ça allait un peu le changer.

« Tu as une préférence pour le restaurant et c’est moi qui paie. C’est la moindre des choses »

Comment ça c'est elle qui va payer? Dans aucuns des cas il n'avait l'intention de la faire payer. C'est lui qui invitait et ce devrait être à elle de payer? Alors là, pas question. Et puis, un peu de galanterie tout de même. Ce n'était pas un brute épaisse sans cerveau et sans manières ... Mais c'est vrai qu'il n'avait pas de cerveau ...

" Pas moyen ! C'est moi qui paye, et je te laisse choisir le restaurant. Je te dois au moins ça, c'est toi qui va devoir me supporter toute la soirée. "

Il lui avait dit ça en lui faisant un petit clin d'oeil. En fin de compte, la soirée se finirait bien mieux que ce qu'elle avait commencé ...

Visiblement, Kei voulait se la jouer gentleman. Pourquoi pas ? Décidément, elle se comportait de manière bien étrange. Elle avait perdu son habituelle réserve auprès du jeune homme. Elle sourit à son clin d’œil.

« Très bien. Comme vous voudrez, monsieur »

Elle avait volontairement dit monsieur, juste pour l’embêter. La fatigue avait sur elle de bien étrange effets secondaires.

« Il y a restaurant italien un peu plus bas dans la rue. Ça te convient ? »

Elle était déjà allée là-bas. La nourriture était bonne, l’ambiance agréable et les prix très corrects. Elle commença à descendre la rue. Elle espérait que la soirée se passerait bien. Elle n’avait tellement pas l’habitude de manger avec quelqu’un. Elle croisa les doigts dans sa tête.

C’était curieux, elle avait presque l’impression d’être quelqu’un d’autre. Elle espérait que Kei passerait une bonne soirée avec elle.

« Très bien. Comme vous voudrez, monsieur »

Kei sursauta en entendant ce mot. Mais il comprit que c'était juste une taquinerie en la voyant sourire. Certes, ce n'était pas un rendez-vous galant, en aurait-il seulement un un jour? Mais au moins, il se considérait chanceux de passer la soirée avec elle. Il ne l'a connaissait pas vraiment, mais le peu qu'il avait pu voir d'elle lui donna l'impression que c'était réellement une personne avec un grand coeur.

« Il y a restaurant italien un peu plus bas dans la rue. Ça te convient ? »

Il hocha la tête en signe d'approbation. En fait, il se fichait bien d'où il pourrait aller manger. Tout ce qu'il voulait c'était passer du temps avec elle, apprendre à la connaitre. Et secrètement, il souhaitait que ce serait réciproque ...

Continuant donc leur chemin, ils finirent enfin par arriver en vue du restaurant. Ils pénétrèrent à l'intérieur et Kei remarqua que la majorité des personnes présentes étaient des adultes, et qui plus est, qui les regardaient. Comme disait sa mère autrefois, la honte ne tue pas. Mais quand même, tant de regards ... Ils s'assirent donc à une table et commandèrent leur repas.

Ils descendirent la rue silencieusement pour ne pas dire religieusement. Marine ne savait trop quoi dire au jeune homme vu qu’elle n’avait pas l’habitude de parler plus que le strict nécessaire aux gens. Pour les passants qui les croisaient, ils devaient passer pour un jeune couple en balade ou quelque chose comme ça. Par chance, le restaurant ne se trouvait qu’à quelques minutes d’eux.

Marine poussa la porte et une multitude de paire d’yeux se tournèrent vers eux. La jeune femme n’en fit pas cas. Se faire dévisager, elle en avait l’habitude. Sa tenue vestimentaire atypique ou son visage de marbre faisait souvent converger les regards sur elle, mais cette dernière s’en fichait éperdument. Alors que la serveuse les conduisait vers une petite table sur le côté, un coup d’œil à Kei l’informa que lui, en revanche, n’avait guère l’habitude de se faire examiner de la sorte.

Elle s’assit à la table indiquée. Celle-ci de bois, était recouverte d’une nappe à carreaux rouge et blanc dans le plus pur style italien. Une bougie, une bouteille d’huile pimentée et quelques gressins dans un petit pot complétaient le décor de la table. Kei s’assit en face d’elle toujours sans un mot ce qui ne dérangeait pas la jeune femme plus que ça.

Après avoir consulté la carte et passé commande, elle regarda le jeune homme en face d’elle. Une nouvelle fois, le sourire lui vint aux lèvres.

« Alors Kei, de quoi voulez-vous… veux-tu parler ? »

Elle se mordit la lèvre pour son lapsus. Marine secoua légèrement la tête. Vraiment, tutoyer les gens, elle aurait toujours du mal à le faire.

« Alors Kei, de quoi voulez-vous… veux-tu parler ? »

L’ange fut tiré de sa rêverie, le sourire aux lèvres en l’entendant se reprendre. Certes, elle l’avait prévenu, mais il ne pensait pas que ça arriverait aussi vite. Quoi qu’il en soit, il se moquait bien de la manière dont elle l’appelait, même s’il lui avait dit un peu plus tôt ne pas aimer le vouvoiement …

De quoi allaient-ils parler ? Pour être honnête, il n’en avait pas la moindre idée …

« Hé bien … Très bonne question … »

Il avait répondu du tac au tac en souriant, l’air un peu gêné. Depuis combien de temps ne s’était-il plus retrouvé ainsi, seul à seul, avec une fille ? Dans son cas, il ne comptait plus le temps qui se comptait en années. A ses yeux, il devait passer pour un débile. Donc de quoi pourrait bien parler deux ados de leur âge ? Des cours ? Non, ce serait quelque chose qui risquait de lâcher un froid, vaudrait mieux ne pas tenter.

« Voyons voir … Ça fait longtemps que tu vis ici ? »

Bon d’accord, c’était pas le top du top, mais au moins, c’était un bon début qui pouvait déboucher sur quelque chose de plus … Constructible. En effet, il se voyait pas trop lui dire si elle avait un petit copain ou si elle vivait seule, ce qui devait être surement le cas en repensant à ce qu’elle lui avait dit un peu plus tôt au sujet de sa carte d’hôtel. Il trouvait ce genre de questions un peu déplacées envers une personne qu’on ne « connaissait » que depuis quelques minutes. Et puis, même s’il n’en avait pas l’air, Kei était quelqu’un d’assez timide, même de renfermé. On ne pouvait pas dire qu’il avait beaucoup d’amis non plus. Cette question était donc un des moyens les plus simples afin de faire connaissance avec Marine.

Kei semblait aussi peu à l’aise qu’elle dans ce rendez-vous. Ça l’étonnait. Il était jeune, visiblement lycéen, et beau garçon, les jeunes filles devaient se précipiter sur lui. Pourtant de se retrouver avec elle pour dîner semblait lui être difficile. Elle se dit que ça devait venir d’elle. C’était elle qui avait du mal avec les rapports humains, certainement pas lui.

Puisqu’il avait amorcé la conversation, à elle de faire un effort pour aller dans son sens.

« Non, cela fait assez peu de temps que je suis arrivée en ville »

Elle hésita à poursuivre. Elle se demandait si c’était bien utile de parler de son arrivé en ville et surtout du pourquoi de sa venue ici. Cela l’obligerait à parler de son passé et elle n’y tenait pas vraiment. Ses yeux se voilèrent un instant comme à chaque qu’elle repensait à son passé. Mais elle chassa bien vite les images qui lui venaient à l’esprit pour éviter de plomber le dîner.

« Mon installation est plus que récente. Tu l’as vu par toi-même, j’habite à l’hôtel pour l’instant – elle sourit de ce fait évident – Et toi ? Tu vis ici depuis longtemps ? Tu vas toujours au lycée ? »

Il s’agissait de questions banales mais elle ne savait pas trop quoi dire d’autres au vu de son inexpérience. Elle choisit de rebondir sur la propre question de Kei.

« Non, cela fait assez peu de temps que je suis arrivée en ville »

Puis au lieu de continuer sur sa lancée, elle sembla perturbée par quelque chose. Etais ce lui la cause de tout cela ? A cette pensée, le rouge lui monta un peu aux joues. Mais il se rendit très vite compte qu’il y avait peu de chances que ce soit en rapport avec lui. Elle avait les yeux dénués d’expression, un regard sombre posé sur un point dont elle était la seule personne à pouvoir voir. Quelque chose de lourd la tourmentait, c’était évident. Pas besoin d’avoir recours à de la magie pour s’en rendre compte. Il sourit donc tristement, conscient qu’il venait de toucher une corde sensible.

« Mon installation est plus que récente. Tu l’as vu par toi-même, j’habite à l’hôtel pour l’instant. Et toi ? Tu vis ici depuis longtemps ? Tu vas toujours au lycée ? »

Malgré tout, elle arrivait encore à sourire. Cette fille était tout simplement étonnante … Par ailleurs, que pouvait-on dire de lui ? Pas grand-chose, malheureusement. Il vivait juste sa vie en suivant le chemin qu’il se traçait, sans pour autant avoir de certaines attentes. A son grand bonheur, il avait pour lui l’éternité pour réfléchir à tout ça, chose dont les humains étaient dépourvus.

« Ça va bien faire 4 ou 5 ans que je suis là, et que je traine mes fesses au lycée tout les jours … »

Il lui fit un petit sourire afin de la détendre un peu : apparemment, elle semblait aussi nerveuse que lui.

« Et toi ? Tu y vas ? Et excuse moi d’être aussi direct pour une première fois, mais as-tu un petit copain ? »

Au fil du temps qu’il passait avec elle, sa timidité se brisait petit à petit. Et cela se voyait sans grand peine dans ses phrases.

Elle avait raison, il était toujours bien lycéen. Par contre sa question suivante la déstabilisa complètement.

« Et toi ? Tu y vas ? Et excuse moi d’être aussi direct pour une première fois, mais as-tu un petit copain ? »

La première comme la seconde question était des plus inattendues pour elle et pire, elle ne savait pas quoi répondre ou comment répondre.

« Euh… un petit ami ? – elle faillit lui dire c’est quoi ça ? Mais elle se reprit – non, je… je n’en ai pas »

Elle rougit. Elle ne s’attendait vraiment pas à cette question. Elle n’avait même jamais prononcé ces mots de toute sa vie. Quand au lycée, ça ne l’arrangeait pas non plus comme question. Comment expliquer les choses ?

« Non, je ne vais pas au lycée. Je n’y suis jamais allée – elle se mordit la lèvre, elle n’aurait pas du dire ça – C’est compliqué à expliquer. Mon… passé est compliqué »

Elle tenta, maladroitement certainement, de changer de conversation.

« Et toi ? Tu as quelqu’un ? »

Elle lui retourna simplement sa question. Ce n’était pas vraiment par curiosité, pour savoir s’il avait quelqu’un mais plus pour faire repartir la conversation sur quelqu’un d’autre qu’elle.

« Euh… un petit ami ? Non, je… je n’en ai pas… Non, je ne vais pas au lycée. Je n’y suis jamais allée »

Numéro un au niveau des gourdes. Voilà comment en deux questions déstabiliser une jeune fille. Au moins, il était premier quelque part, même si c’était dans quelque chose d’aussi nul que ça … Etais-ce vraiment une bonne chose ? Quoi qu’il en soit, elle n’avait pas de petits copains, et cette question lui avait fait venir le rouge aux joues. Au moins il était fixé : les choses trop personnelles étaient proscrites avec Marine. Mais il n’était pas à l’abri d’une nouvelle gaffe, bien au contraire. Son aisance partit comme elle était venue et cela jeta en quelque sorte un genre de froid entre eux …

Puis, autre chose d’étrange, elle n’allait pas au lycée et n’y était jamais allée. Et cela semblait la gêner grandement d’avoir dis une telle chose. Enfin, chacun avait son propre passé, plus ou moins lourd à porter. Qui mieux que lui pouvait le savoir ? 4 ou 5 ans qu’il était ici ? En rajoutant un 0 derrière chaque chiffre, là oui ce serait plausible.

« C’est compliqué à expliquer. Mon… passé est compliqué. Et toi ? Tu as quelqu’un ? »

Et voilà, comme il s’y attendait. Il devrait peut-être se reconvertir dans la divination, là il arriverait à faire quelque chose. Ce fut à son tour de broyer du noir. Son regard se posa sur un des carreaux de la nappe où il y posa un doigt en suivant ses contours. Malgré les années, il pouvait empêcher de ressasser le passé, se disant que s’il avait été un peu plus fort, sa famille n’aurait pas eu à mourir …

« Désolé, je n’aurai pas dû … On a tous quelque chose de gros sur la conscience, je comprends … - il releva le visage vers elle, se cachant derrière un faux sourire – Non, je n’ai personne. Je pense avoir toujours été seul, d’une certaine manière. »

Il ne cherchait pas à ce qu’elle éprouve de la peine pour lui, loin de là. Mais il avait trop de choses sur la conscience, et c’est à cet instant que ça sortit.