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Par-delà les lignes | Johnny, Mona

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Johnny Paso

Humain(e)

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    Un Argentin hypersexuel et passionné de culture physique, il cherche la célébrité au Japon, mais ce géant pourrait aussi bien tout casser ici aussi.

Par-delà les lignes | Johnny, Mona

lundi 04 janvier 2021, 21:52:49

Par-delà les lignes
Johnny Paso | Mona Duval

Johnny avait une chance de dingue ; le cul bordé de nouilles !
Il jouait rarement aux jeux par tirage au sort qu'on trouvait dans nombre de commerces, n'ayant accepté que quelques fois dans sa vie car il n'y avait pas d'obligation d'achat ou de coordonnées à donner, par exemple. Récemment, il avait gagné à un de ces jeux, cela dit, et il avait légèrement revu sa position. Sans se lancer dans tous les jeux qu'il voyait, il prenait le temps d'en considérer certains.
Alors, quand une chance de rencontrer Mona Duval, l'écrivaine de romans pornographiques, s'était présentée à la précommande de son nouvel ouvrage, il avait participé. Il allait de toute façon acheter le livre tôt ou tard.

Car oui, c'est une idée qu'on peut se faire facilement sur Johnny : celle qu'il ne lirait pas. Et c'était vrai qu'il n'était pas le lecteur le plus gourmand ou un féru de classiques, et qu'il préférait un bon film ou une série en compagnie d'amis à une lecture solitaire au son d'une musique d'ambiance, mais il lisait. D'abord, il fallait se dire qu'on ne se lançait pas dans la culture physique sans lire beaucoup sur le sport et la nutrition, du moins quand on n'avait pas des milliers de dollars à claquer dans des coachings. Ensuite, s'il se paluchait volontiers sur un porno au moins une fois par jour, il aimait laisser bruisser son imagination le long des lignes de romans coquins.
Ces dernières années, il avait acheté pas mal d'e-books et de livres de poche, érotiques ou pornographiques. Il y en avait de trop vieux, avec un langage et un goût trop passés pour lui, et des trop cérébraux pour ses désirs simples et envahissants ; mais il avait ses petits classiques, qu'il avait généralement acquis neuf et en format papier pour les garder près de lui. Parmi eux se trouvaient tous les livres délurés de Mona Duval, depuis son premier signé Charlie. Il avait trouvé dans sa plume quelque chose d'unique, ni pervers ni maniéré, qui avait parlé à son être et avait fait naître en lui un authentique amour pour ses écrits.

Alors, bien sûr qu'il allait précommander le prochain, grand format papier et édition luxe ! Il avait pris un boulot de plus et bossé du coup presque 36 heures d'affilée pour se payer largement ce petit cadeau.
A l'origine, voir Mona n'était pas dans ses plans ; juste un bonus potentiel fort improbable.
Et le voilà qui se présentait à l'accueil de sa maison d'édition, figé droit comme un i...

Quelques semaines plus tôt, il avait reçu le courrier de félicitations en recommandé, suivi le lendemain d'un coup de fil dont on l'avait prévenu dans celui-ci. Il n'avait pas encore tout à fait réalisé et avait répondu presque machinalement à la dame adorable qui lui parlait au bout du fil, pour arranger date et transport. Dans sa tête, c'était irréel : ce n'était pas possible qu'il puisse gagner deux jeux, comme ça, à la suite ? Le précédent avait été une surprise dépassant ses espérances, mais là ça devenait carrément bizarre. Il n'y croyait pas et n'enregistrait pas, comprenant qu'on lui enverrait détails et carton d'invitation par le prochain courrier.
Merde ! C'était surréaliste. Il avait lu et relu cent fois le premier courrier, ses mails pour la commande du livre et son enregistrement au jeu, et repassé dans sa tête des dizaines de fois ce qui avait été dit au téléphone. Il devait se rendre à l'évidence, mais il n'y arrivait pas vraiment.

Et puis, il y avait eu le coup de marteau : un message privé sur Instagram ; enfin, sur Messenger, Facebook ayant fusionné les messageries privées des deux services sans vraiment s'inquiéter de l'avis du monde en même temps qu'il forçait une mise à jour ridicule.
Le message était de Mona.
Il n'avait pas remarqué le moment où elle avait commencé à le suivre et n'en retrouvait pas la trace récente. Bien sûr, lui la suivait, espérant des indices croustillants sur son prochain tome ou un aperçu de ce que pondait son esprit au bénéfice de tous les amoureux de la petite mort ; mais qu'elle le suive, c'était inattendu ! Il ne se faisait pas d'idées transcendantale sur la qualité de son feed, qui mêlait selfies, salle de sport, fiestas avec bimbos, grosses bagnoles et
prétentions allant bien au-delà de ses moyens réels. Elle s'y était pourtant intéressé ! Pourquoi ?
Il décida qu'il préférait garder la réponse pour plus tard, lui demander en face. En fait, il se retrouva bloqué de façon inattendue face à ses quelques lignes de texte. Il lui venait soudain une peur : la peur de ne pas être intéressant et de ne pas savoir que dire.
Il aurait aimé lui demander pourquoi elle le suivait et lui parler de ses passages préférés de ses livres, et il aurait pu lui parler de sport et de l'Argentine, de son parcours atypique ; ils auraient pu parler de ce qui les poussait, elle à écrire du porno, lui à en lire avec entrain, et se faire de petites promesses sur le déroulement de la soirée... Quoique, là, c'était son excitation qui parlait. Mona était une très jolie femme et éveillait évidemment un fort désir en lui, qu'il devait à tout prix contenir pour ne pas froisser son idole.
Alors, leur correspondance avait été lente, un peu gauche, hésitante. A bien y repenser, Johnny était passé pour un type bizarre et ne ressemblait absolument pas au Johnny normal, ou même à celui des photos de shooters descendus du bout des lèvres entre les seins de bombes sexuelles. Elle devait l'avoir trouvé vraiment inquiétant, creepy à souhaits, et comme elle lui demandait de venir comme il était quelques jours avant leur rencontre, avant d'arrêter de répondre, il pensait qu'elle ne s'attendait à strictement rien.

Or, se montrer indigne même d'un sourire sincère de Mona était une perspective affreuse pour l'Argentin, qui s'était préparé à fond et s'était mis sur son 31 sans se dénaturer. Il avait bien dormi, avec un masque purifiant, et s'était levé tôt pour faire son sport, passer chez l'esthéticienne pour un check-up complet, passer se ravitailler de ce parfum musqué qu'il aimait, aller chez le coiffeur-barbier, vider son armoire, changer dix fois d'avis, choisir une tenue, puis en changer en même temps qu'il rangeait l'armoire, prendre sa douche, se faire tout beau...
Il s'était presque mis en retard et le taxi envoyé par la maison d'édition l'attendait depuis de longues minutes déjà lorsqu'il s'y précipita, tout fou. Il avait finalement opté pour un jean effet vieilli, un débardeur en coton uni et des baskets montantes confortables, et arborait sa meilleure chaîne et quelques bijoux en prime, dont un authentique diamant qui lui avait coûté des jours de travail au noir à l'oreille. Il avait décidé de venir comme il était, bien qu'à son avantage : le véritable Johnny, celui des photos avec le vrai caractère derrière. Bien apprêté, il avait moins peur, quoiqu'en arrivant à destination il se révélait terrifié.

Et quand on vint lui demander ce qu'on pouvait faire pour lui, il se sentait si gourd qu'il bafouilla un peu avant de tendre le carton d'invitation et de se prononcer le simplement du monde, pour ne plus risquer de s'emmêler :

" Paso, Juan Esteban. J'ai... rendez-vous avec Madame Duval. "
-

Mona Duval

Humain(e)

Re : Par-delà les lignes | Johnny, Mona

Réponse 1 samedi 30 janvier 2021, 00:51:55

« Je vois. »

Sayako n’a jamais été une femme très ouverte d’esprit. Élevée par des parents traditionnalistes, elle ne n’a jamais aimé Mona. Vieille fille, personne ne saura jamais si c’est parce qu’elle est excédée par ses manières outrancières ou simplement parce qu’elle l’envie d’être aussi libre.
Mais son âme de jeune femme à rosit et s’est réchauffé devant la montagne de muscles. Sayako est surtout habituée aux types à l’air intellectuel que possèdent certains écrivains. Ou alors aux extravagants maigrelets qui passent dans les couloirs, errant tels des fantômes. Elle ne supporte personne si ce n’est elle-même et encore. Mona dirait l’inverse.

« Veuillez me suivre. »

Il y a encore du monde, qu’ils croisent. Sayako a une démarche déterminée. Mais tandis qu’elle dirige les pas de Johnny, elle semble plus légère, presque…sensuelle. Cela ferait beaucoup rire notre écrivain.

« Vous avez gagné le concours ? Félicitation… »

Ce ton qui désapprouve tout ce qui porte la marque de Mona. Sayako attend que les portes de l’ascenseurs s’ouvrent sur le dernier étage. Elle tient le carton d’invitation que Johnny lui a tendu plus tôt, le serrant contre sa poitrine.

« Madame Duval n’est pas encore là… » Est-ce surprenant, a-t-elle envie d’ajouter. « Mais elle ne devrait pas tarder. » C’est dit comme à contre-cœur. « Installez-vous…la salle est à vous. » Sayako est presque gentille dans ses paroles. « Je vous souhaite une bonne soirée. »

Elle s’éclipse, laissant Johnny seul au dernier étage. Une vaste pièce, sous le toit du bâtiment. De hautes vitres en constituent les murs, avec un accès à une petite terrasse. L’immeuble, de style européen, ne plaît pas à tous les japonais qui vivent par ici. Une table est dressée près de la porte ouverte du balcon, pour deux personnes. Un coin est meublé confortablement, d’une causeuse et d’un fauteuil, avec une petite table où est déjà dressé l’apéritif. Tout est décoré de sorte à donner un avant-goût du prochain roman de Mona.

L’histoire d’une jeune aristocrate qui faute avec une domestique et se trouve abaissée au rang d’esclave. Et pour ce soir, l’écrivain est allé jusqu’à enfiler des vêtements qui rappellent l’héroïne dont un croquis a été posté sur son compte instagram.

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« Et donc toi, dans ta grande capacité à réfléchir, tu t’es dit qu’une rencontre avec un fan, était une bonne idée. Après TOUT…et je dis bien TOUT, ce qui t’es arrivé ces derniers temps ? Mais t’es malade Mona ? »
« Malade. Ce sont exactement les mots de ma psy. »
« Sérieux ?...Mona. Elle n’a pas le droit de…je suis un ami, mais elle, ce n’est pas très… »
« Professionnel ? Je déconnais. Elle ne l’a pas dit comme ça, mais à son ton, c’était comme si elle m’avait craché au visage. Je vais changer de psy. »
« Mona…est-ce qu’on peut revenir à notre conversation ? »
« C’était un monologue et tu avais terminé. Je te laisse. Bye. »

Je raccroche et lance mon portable dans le lit. J’ai envie de tous les envoyer chier en ce moment. Depuis l’agression, ils me traitent en victime. Ils me parlent comme si j’avais le cancer et qu’il ne me restait pas beaucoup de temps à vivre. Ou alors, comme si j’étais la seule survivante d’un genre de Massacre à la tronçonneuse. Je déteste la manière qu’ils ont d’arrêter de parler lorsque j’entre dans la pièce. Ces regards dégoulinant de compassion…et ils ne savent pas ce qu’ils veulent…

Je me redresse, jette un regard à la fille fatiguée qui me rend le mien. Elle est la seule à savoir que je dors peu en ce moment. La seule à savoir que je bois trop. La seule à savoir. Elle est aussi la seule à savoir qu’il m’arrive de pleurer la nuit et d’ouvrir la fenêtre en me demandant si sauter ne serait pas une solution. Je lui souris. Elle me sourit aussi. Mouchetée de laque séchée. Je dois vraiment laver ce miroir.

Mon entourage veut que je me remette. Ils m’ont fait chier tous les jours depuis que j’ai osé leur parler de ce qui m’est arrivé. J’ai dû leur faire promettre de ne pas en parler autour d’eux. Je ne veux pas passer à la télévision et dans les journaux et que la misère que je vois dans les yeux de mes amis, devienne celle que je recevrai des milliers, peut-être plus, potentiellement moins, de téléspectateurs qui regarderont si oui ou non « elle va enfin se mettre à pleurer ! ». Avides, immondes, des détails croustillants de l’agression. Les gens veulent rêver et pouvoir se dire que leur merde est moins grosse que celles des autres. C’est rassurant.

Mon entourage veut que je me remette, mais sous certaines conditions, qui changent en fonction de l’interlocuteur. Il y a ceux qui me disent de porter plainte et retrouver la personne qui m’a fait ça. Il y a les autres, qui pensent que je devrais faire l’autruche et recommencer à sortir. Qu’une femme ne doit pas avoir peur de sortir de chez elle sous prétexte qu’un jour, un homme, quelque part, l’a choisie elle plutôt qu’une autre. Et il y en a d’autres. Je pourrais en faire un livre.
Le Soleil se couche déjà. La conversation que j’ai eue avec mon ancien assistant me reste en travers de la gorge. J’ai été habituée à son soutien. Même lorsque je faisais de la merde, il était là. Il me soutenait. Pourtant, dés qu’est parue l’annonce du concours pour un repas avec moi, Jona à bondit sur son portable pour m’insulter à distance. Peut-être est-il simplement inquiet. Mais pour le moment, je suis bien trop déçue par ce manque de soutien pour m’en rendre compte.

Le manque de soutien. Il hurle aujourd’hui. Tout le monde désapprouvait cette idée. Absolument tout le monde. Ils ne veulent pas et ne peuvent pas comprendre que c’est ma façon de reprendre confiance. Je ne veux pas devenir comme ces victimes d’agression qui ne peuvent plus jamais sortir de chez elle. Qui ont si peur, qu’elles s’enferment à double tour et qu’aucun homme ne peut approcher. Je ne dis pas que je ne les comprends pas. Je dis simplement que je ne veux pas leur ressembler.

Ce soir, j’ai rendez-vous avec Johnny. Un jeune homme que j’ai contacté après que son nom soit sorti lors du concours. Je suis allé voir qui il est. Je ne veux pas de mauvaise surprise. J’ai beau être « malade », je ne suis pas inconsciente. J’ai fait les choses bien.

Quelques échanges sans plus d’importance que ça. Nous débattions en toute légèreté. C’était sans importance, mais moi, j’aimais ces petits moments dans la journée, parfois la soirée. Ou même la nuit, lorsque le sommeil refuse de venir me soulager. Je ne vais pas mentir et bien que je m’attarde sur la personnalité de quelqu’un, du moins en amitié, pour le reste, l’extérieur ne peut être ignorer. Et celui de Johnny, ce qui s’affiche sur ses photos, est terriblement alléchant.

« Tu es bientôt prête Mona ? »
« Oui… »
« Si tu ne veux plus…on peut annuler. »

Elle est belle Tamiko. Ses cheveux noirs, lisses. Un carré structuré, une frange épaisse au-dessus de deux yeux qu’elle habille de couleur au gré de ses envies. Aujourd’hui ils sont lavande.

« Non Tami. Et puis…regarde. »
« Mmm ? »

Elle s’approche dans un nuage de Jasmin. Tamiko est japonaise. Homosexuelle, rejetée par sa famille, ses amis, elle a atterri dans un bar que je fréquente régulièrement. Puis elle a atterri dans mon lit. Amantes, puis amies…avec quelques privilèges. Tamiko fait les meilleurs cocktails du monde. Et ce n’est pas ma bite qui parle !

« Mouais. Pas mal. Pas mal du tout dans son genre. Et puis il a des gros seins. »
« Idiote…sérieusement. Tu penses que c’est vraiment lui ? »

Tamiko se penche au-dessus de mon épaule et regarde l’écran de l’ordinateur. Je sens ses seins, faux, lourds, peser contre mes omoplates et j’ai beau être une femme, j’ai la sensation de me sentir à l’étroit dans mon short.

« Il a peu d’abonnement pour un tel physique. On ne voit pas forcément…son visage sur toutes les photos et…franchement Tami. Tu ne penses pas que ce pourrait être un montage ? »
« Si tu penses que ça craint Mona. N’y va pas. »

Ferme dans ses propos. Aussi ferme que ses seins ne sont moelleux et chauds contre moi. Ce doit être une maladie cette obsession. Je la sens croiser les bras en se redressant. Elle me prive de sa chaleur, car elle aussi, elle trouve qu’au fond, c’est stupide cette histoire. Toute cette histoire. Car Tamiko, ici présente, pense qu’il faut que j’engage un détective et fasse retrouver le monstre qui m’a fait du mal. Elle me l’a dit, la première fois, avec tant de fermeté dans la voix. Sans ciller. « Engage ensuite quelqu’un pour te débarrasser de tes cauchemars. » Et son sourcil droit se haussant disait « Si tu vois ce que je veux dire. » Je vois. Et je ne veux pas en arriver là. A quoi bon. Je déteste la violence et cela ne ferait qu’engendrer plus de violence. D’autant que mon agresseur est quelqu’un de dangereux. Ça, c’est quelque chose dont je suis sûre.

« Alors Mona ? Tu t’es décidée ? »
« Oui. Je vais y aller… »

Tamiko est totalement nue désormais. Allongée en travers de mon lit, les jambes écartées, elle me regarde me préparer. Je me lave les mains et les sèche lentement, tout en reprenant.

« Ce qui est fait est fait. Et puis…Johnny…nous avons discuté ces derniers temps. Je ne me vois pas…tu vois. »
« Lui poser un lapin ? »
« Tu imagines ? S’il aime vraiment ce que je fais, il va se dire que l’auteur de ses nuits est une petite arrogante qui pète plus haut que son cul. »

Je fouille dans ma penderie, essayant de ne pas laisser mes yeux errer sur le matelas. Car je sais qu’autrement, je serai en retard à mon rendez-vous.

« Et tu veux savoir si c’est un fake ? »
« Et…je veux savoir si c’est un fake. »
« Le manger comme un cake s’il est mignon ! »
« Tais-toi ! »

Elle reçoit la robe en plein visage et rit en retirant le morceau de satin blanc de sa tête. Du bout des doigts, elle la lève pour l’observer. La juger. Puis elle me regarde, avec un sourire amusé. Je me bats pour parer ma peau pâle d’or. De fines chaînettes que j’ai choisie pour une raison bien précise.

« Tu sais que c’est quand même vachement…sexy tes bijoux là ? »
« Tu ne trouves pas ça vulgaire ? Pour une fois… »
« Viens…tu sais bien que je dis souvent des bêtises. »

Insatiable Tamiko. Lorsque je la quitte enfin, il fait nuit et je suis en retard. Pour changer. Mon chauffeur m’attend. Il m’ouvre la portière. Deux mètres. Thaddeus est un géant d’ébène. Sa présence me rassure et bien qu’il se soit montré très froid et distant au début, nous avons fini par sympathiser. Je le sens, dans quelques mois, il me fera de vrai sourire.

Nous échangeons des banalités. Je n’arrive pas à suivre de toute manière. Mon cœur cavale et j’ai la boule au ventre. Lorsque la voiture s’arrête, Thaddeus à le temps de faire tout le tour de la voiture et m’ouvrir, avant que je ne me rende compte que nous sommes à l’arrêt. Le téléphone entre les doigts, que je sers un peu trop, je lève les yeux vers son visage rassurant.

« Mona. Si vous ne voulez pas y aller… »
« Thad…j’ai entendu ça toute ma vie. »

J’attrape ses doigts épais et je sors du véhicule. Je sens son regard sur mon dos jusqu’à ce que je ne disparaisse dans l’immeuble. Mon cœur reprend la cavalcade dés que la voiture démarre et que la porte qui se referme, tait le vrombissement de la Bentley. Je soupir. Un regard à mon portable.
Je suis en retard.

L’ascenseur est lent, alors je retire mes talons et monte les marches aussi rapidement que possible, sentant les bijoux tinter entre eux. Je sens à chaque effort, les chaînettes se resserrent autour de mes cuisses et se desserrent à chaque contraction musculaire. C’est à un étage de Johnny que je me rend à l’ascenseur. Je bouscule avec un « désolé » des moins sincère, Sayako. Lorsque les portes se referment dans leur grincement métallique, je me laisse aller contre le fond, profitant des quelques minutes qu’il me reste pour me recoiffer. Mis à part un léger voile de sueur et ma respiration courte, ce n’est pas catastrophique.

« Bonsoir Johnny ! »

Chaussures à la main, je m’avance.
J’aime beaucoup ce qu’ils ont fait de cette salle.

« Merci d’avoir patienté… »

J’arrive à sa hauteur, si petite et je me trouve stupide.
Je ne sais absolument pas ce que je dois faire. Lui tendre la main ?
Mais tandis que je réfléchis, mon corps s’avance, me trahit et je sens ma bouche se déposer contre sa joue.

« Hem…viens. Tu as soif ? Je t’avoue que moi oui… »

Fébrile, je n’ai même pas pris le temps de le détailler. Il faut que je me ressaisisse et un verre me fera le plus grand bien. Je tente de calmer ma main qui tremble lorsque je le sers, me tourne, les fesses en appui contre le canapé. Je me tourne.

« Je suis un peu nerveuse. »

Mes chaussures, que j’avais oubliée, décide de se rappeler à moi de la pire des manières. Elles se balancent à mon poignet et lorsque Johnny tend la main, le verre bascule. J’ai l’impression que tout se passe au ralenti et que lorsque je reviens à moi, c’est pour le voir avec de l’alcool sur ses beaux vêtements.

« Merde…putain. C’est un euphémisme visiblement… »

J’ai envie de rire et de pleurer en même temps. Il devait s’attendre à mieux de ma part. Le pauvre…

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Johnny Paso

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Re : Par-delà les lignes | Johnny, Mona

Réponse 2 jeudi 04 février 2021, 04:16:58

On en savait peu sur le nouveau roman. A bien y réfléchir, c'était dingue d'avoir acheté un livre dont seul un brin de synopsis et un croquis artistique avaient été fuités au public, mais c'était probablement tout l'intérêt de ce concours : Mona Duval ne voulait probablement avoir affaire qu'à des gens qui connaissaient, comprenaient et aimaient son écriture ; des gens capables de mettre une somme substantielle dans un bouquin par pur acte de foi et d'amour ; de vrais fans.

Et comme Johnny était laissé dans une vaste salle du dernier étage, il oubliait vite l'accueil frigide de celle qui l'avait mené là. Ce premier contact avait été étrange, l'Argentin sentant chez cette femme stricte une désapprobation si forte qu'il en venait à la plaindre : on ne pouvait vivre avec une telle colère sans en souffrir, et sans doute souffrait-elle de ne pas prendre les mêmes libertés que ceux contre qui elle la dirigeait. Il ne la connaissait pas mais il avait eu de la compassion pour elle, même s'il réalisait qu'elle n'en attendait aucune et ne s'attarderait pas sur les affaires scandaleuses de l'auteur à succès. Il avait bien du mal à rester dans les bornes quand il sentait un manque d'affection chez une femme, mais il était bien sûr assez futé pour savoir quand son implication n'était absolument pas désirée ; et il penserait peut-être encore à ces hanches roulant sur ces escarpins rigides un soir où il serait seul, se demandant si elles trouveraient jamais la fougue à laquelle elles aspiraient.

Mais il n'avait pas l'occasion d'y penser pour le moment. Le stress le dominait, stress qu'il ne pouvait laisser échapper qu'en faisant les cent pas et en tournant à travers les lieux. Il avait avisé les grandes baies vitrées et le balcon, loin des standards japonais et qui détonnaient autant ici que de l'autre côté, depuis la rue où l'immeuble se démarquait tant. Une table était mise, signe qu'elle s'attendait à manger dehors et à profiter de l'air nocturne, mais peut-être était-ce plus que ça ? Poussé par la bougeotte, il avait touché des yeux le petit salon très stylisé qui avait été installé dans un angle de la pièce, notant sa singularité ainsi que ses similitudes avec le thème de la tablée. Il devinait le lien entre cette mise en scène et le livre à paraître et se sentait privilégié, trouvant dans l'étude des lieux le moyen de se concentrer et de se détendre lentement, acceptant doucement sa chance et les cadeaux qui avaient été préparés pour lui tout seul. Il sentait qu'il en apprendrait beaucoup sur son achat compulsif tout en réalisant un rêve inadmissible : celui de rencontrer la femme dont le verbe avait éveillé son imagination et contenu sa libido lors des soirées solitaires.

Comment pouvait-il vraiment se sentir bien alors qu'ils savaient tous les deux, c'était évident, qu'il avait trouvé une délivrance dans ses lignes et connaissait d'abord les côtés sensuels de sa personne ? Allons ! Elle n'était pas une sainte et l'assumait ! Il n'avait pas à rougir de ces moments dont il était le seul à avoir la connaissance assurée. Et elle n'avait pas à craindre qu'il fuie devant la personne entière qu'elle lui présenterait sans doute ce soir. Enfin... Elle se présenterait sûrement.
L'heure avançait et Johnny songeait à nouveau à leur correspondance ; gauche, indélicate, inintéressante, courte. Avait-elle seulement encore l'envie d'aller jusqu'au bout ? Qu'était la blessure narcissique d'un homme douteux face à sa sécurité et à la masse des lecteurs impatients qui ne liraient que les critiques de leurs grands lecteurs favoris ? Avait-il ruiné sa chance en refusant de l'embrasser et d'assumer ce qui lui arrivait ?

" Bonsoir Johnny ! "

Il avait sursauté. Combien de temps avait-il passé, seul, à douter de tout ? Lui avait-il fallu cinq minutes ou cinq secondes pour commencer à perdre foi en son égérie romantique ? S'écartant du coin salon, il fit volte-face pour tomber sur une apparition fantasmagorique : elle se tenait à quelques mètres de lui, sublimée dans cette robe de satin blanc qui devait, sans aucun doute, participer à la mise en scène de la soirée. Il reconnut la référence au croquis figurant l'héroïne de ce nouveau roman encore mystérieux. En se mettant en scène comme l'héroïne, Mona endossait alors le rôle de cette aristocrate nubile dont la condamnation aux pires bassesses remplissait des pages et des pages de réactions et de suppositions sur Reddit. L'effet était sans appel et la suggestion de ce choix renforçait l'apparence divine et hautement érogène de la petite brune, dont la grandeur altière ne pouvait vraiment compenser la petitesse physique lorsqu'elle se fut avancée devant son invité chanceux.

L'Argentin la dévisagea sans un mot. Il nota les chaussures à sa main, la coiffure réarrangée au dernier moment, le rythme court de son souffle et la transpiration qui brillait dans son corsage plongeant. Elle avait accouru. Il s'en voulut immédiatement d'avoir songé qu'elle se déroberait à sa promesse et eut envers elle un élan de reconnaissance et de compassion contrastant d'autant plus avec son abattement précédent.

" Ce... C'est rien... " parvint-il à bafouiller en japonais avant d'être coupé par l'approche de l'auteur.

Instinctivement, il se pencha en avant pour ne pas la laisser s'étirer de tout son long sur ses jambes afin de l'atteindre. Le baiser fit frissonner sa joue avant de l'engourdir. Il était tellement intimidé par ce contact, lui, la montagne de muscles sûre d'elle, qu'il en fondait presque littéralement. Car Mona n'était pas n'importe quelle jolie fille croisée en soirée ou une amie dont il connaissait déjà les vices, mais un objet de culte qu'il fallait maintenant ramener à sa condition humaine ; un exercice plus difficile qu'il n'y paraissait, et son élocution approximative n'en était qu'un symptôme.
Il ne réalisait même pas à quel point son hôte était, elle aussi, dépassée par les événements. Et quand la flute vint se déverser sur son top dans un piaillement maladroit, le contenu imprégnant immédiatement le tissu pour venir piquer de sa fraîcheur le ventre de l'Argentin, le réveil fut brutal. Ramené à la réalité, Johnny ne put que constater la situation en revenant à lui, et le stress dans lequel était empêtré son idole.

En un seul tour, la réalisation le dégrisa. Il devait se montrer fort, pensait-il, pour soulager Mona. Aussi, il prit les verres de ses mains tremblantes, couvrant ses petites menottes tremblantes de ses paluches hésitantes et lui subtilisant le tout aussi délicatement que possible.

" On est deux à être perdus. Si tu savais comme je stresse ! Je ne pouvais même pas placer deux mots corrects quand on s'écrivait. Je... Laisse-moi faire. Assieds-toi. "

Posant les flutes sur la petite table, il la prit par les épaules avec douceur. Malgré sa prévenance, il lui semblait déplacer une poupée de porcelaine entre ses mains comme il la faisait reculer et s'asseoir sur la causeuse avec délicatesse.
L'anxiété suintait en lui, mais les efforts qu'il faisait pour ne pas se laisser déborder commençaient à payer, il pouvait le sentir. Son esprit n'était plus engourdi comme auparavant et retrouvait de son caractère, et comme il tirait sur le tissu trempé sur son ventre d'une main il examina l'autre pour voir qu'elle ne tremblait plus malgré sa lourdeur lasse. Il allait s'en sortir. Il avait pourri leurs conversations et allait réussir à mettre cette soirée sur les rails ! Et, avec un rien d'approximation, il parvint à servir deux flutes de champagne acceptables et à les amener jusqu'à la causeuse, en tendant un à la jolie brune avant de s'installer à côté d'elle.

" Alors... Euh... " hésita-t-il avec appréhension, " Tu es -euh- magnifique -bien plus que sur les photos !-. Je suis... Je me sens privilégié ; par ta présence, mais aussi par ce que tu as préparé pour moi. J'avais peur de t'avoir -euh-hahaha-hrm- refroidie. "
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