Cette situation avait l’air particulièrement humiliante pour Ishtar, qui exposait ses sentiments, sa fierté, son être le plus profond... Sous la perversion et la cruauté, Mélinda découvrait une nouvelle facette d’Ishtar, tout un pan de sa personnalité qu’elle ne pensait pas découvrir. Mais était-ce, fondamentalement, si surprenant que ça, venant d’elle ? Qui aurait cru que elle, Mélinda, se marierait un jour ? L’amour avait toujours été une chose dont la jeune vampire se moquait généreusement, en le voyant avant tout comme une dose de perversion supplémentaire, et ce dans la mesure où elle avait toujours adoré coucher avec des femmes ayant des petits amis, ou des hommes ayant des petites amies, le meilleur moyen étant de les prendre tous les deux. L’amour, elle s’en était moquée, jusqu’à se le prendre en pleine gueule. Mais elle n’irait pas jusqu’à dire que l’amour l’avait changé, car, après tout, Mélinda restait toujours la même. Elle avait juste rencontré son égale, tant sur un plan physique que psychologique, son égale, en plus d’être un moyen, pour elle, de recouvrer son ancien titre de noblesse. Et Ishtar venait de lui déclarer sa flamme, en la regardant avec des yeux suppliants, en lui expliquant qu’elle ne voulait pas se marier avec elle, mais juste qu’elle la possède.
*Et on dit que je suis compliquée ?*
En fait, Mélinda avait un peu du mal à savoir ce qu’Ishtar voulait, ce que la Dragonne souhaitait. Elle venait d’une autre culture, d’un pays différent, un pays où la soumission et la domination étaient profondément ancrées dans cette nation. Elle était une femme puissante, et cette puissance ne pouvait être ignorée par Mélinda, qui cherchait un moyen de se sortir de cette situation à son meilleur avantage, de préférence en évitant d’y laisser des plumes. Se mordillant les lèvres, la vampire répondit néanmoins assez rapidement à Ishtar :
« Pa tout de suite, Ishtar... Après, peut-être... Là, je... J’encaisse encore ce que tu m’apprends. Enfin... Non pas que ça ne me déplaît pas, bien sûr, mais je ne m’attendais pas à ce que tu ressentes une telle attirance pour moi. »
Ça, pour le moment, c’était vrai. Se pinçant encore les lèvres, elle se rapprocha d’Ishtar, et posa une main sur son épaule. Leurs seins vinrent à se frotter, et Mélinda lui sourit, puis l’embrassa un peu, pendant quelques secondes, avant de pousser ses mains, venant ainsi enlacer Ishtar autour de la nuque, son front tapant contre le sien.
« J’aime ce que tu es, Ishtar... J’aime ta férocité, ta force, ta détermination, ton autorité, ta perversion innée... J’aime ce que tu as fait à Theorem, j’aime la manière dont tu le traites... Il y a beaucoup de choses en toi que j’aime, Ishtar, et même ta cruauté est excitante... Sans compter le fait que tu sois une souveraine, ce qui m’émoustille encore plus. »
L’amour de Mélinda ne serait jamais totalement désintéressé... Elle avait au moins le mérite d’être honnête, tout comme elle l’avait été avec Vanillia. Elle lui avait dit qu’elle l’aimait profondément, mais que son titre de noblesse n’était qu’un élément en plus. Pour elle, c’était une question d’intégrité et d’honnêteté, car elle se refusait à mentir avec les gens auprès de qui elle tenait tout particulièrement. Elle se vendait comme elle était... Le cas échéant en choisissant les bons mots, ceux susceptibles de faire mouche par rapport à d’autres. Car, en effet, Mélinda ne savait pas que manier à la perfection les formes alléchantes de son corps, sa langue était aussi aiguisée que le tranchant d’une épée. Plus que ses bras, c’était ça qui lui avait permis de devenir la femme puissante qu’elle était maintenant... Sa langue, et ses hanches. Travailler comme matrone d’un harem vous amenait à accepter la vérité& avec simplicité, car, en travaillant dans un harem, on battait en brèche d’emblée le plus grand des mensonges hypocrites de la société : l’idée que les individus ne seraient pas, avant tout, des animaux sexuels. Dès qu’on admettait ce postulat, et les conséquences qui en résultaient, mentir perdait de sa valeur.
Là, blottie contre Ishtar, elle essayait d’être honnête, en jonglant avec différents enjeux et différents problèmes.
« J’aime ça, Ishtar... Je n’aurais jamais confié l’un de mes esclaves à quelqu’un, fusse malgré une prime si élevée, si je n’avais pas, fondamentalement, confiance en elle. Alors oui, Ishtar, je t’aime, mais ça ne me répond pas à la principale question que je me pose... »
Petite pause. Puis elle rajouta :
« Qu’attends-tu de moi, maintenant ? »