Les dernières semaines n’avaient pas été de tout repos. Depuis que
Mélinda s’était mariée, sa vie avait connu de sacrés changements. Maintenant qu’elle était mariée, elle avait pu retrouver un titre de noblesse, et, grâce à ce titre, avait formé un clan. Et,
quand elle avait réussi à s’enticher des services du duc de Castlevania, elle ne s’était pas attendue à ce qu’il y ait autant de conséquences. Venant de l’Empire d’Ashnard, elle savait que les autres clans vampiriques étaient des clans puissants, dont certains rêvaient depuis des siècles d’avoir comme allié le puissant duc de Castlevania. Mélinda savait que certains clans grinceraient des dents à l’idée de se faire coiffer au poteau par une tenancière de bordel, et il s’était avéré qu’elle avait sous-estimé la haine qu’on lui portait. Pour certains clans, cette alliance avait été l’ultime affront qu’une pimbêche pouvait leur apporter. Castlevania, ce n’était pas juste un noble qui avait besoin de soulager sa queue, c’était un véritable domaine, un immense château, idéalement placé, et avec des gisements naturels très intéressants. Le clan Warren s’était ainsi heurté à l’un des plus grands clans de l’Empire, le clan Nefarius, et l’un des ténors du clan, le fils du Patriarche,
Robert Nefarius, avait été chargé de mettre fin au règne (déjà trop long) du clan Warren. Or, les Nefarius ne se risqueraient pas à agir sur le territoire de l’Empire, car aucun clan vampirique ne chercherait à se mettre à dos le Conseil et à avoir la justice impériale aux fesses. Concrètement, les Nefarius avaient fait appel à des chasseurs de vampires situés sur Terre. Leur première attaque avait ébranlé le clan, car elle avait eu pour effet de
rendre Mélinda amnésique.
Pendant plusieurs jours, son manoir n’avait plus eu de Maîtresse à domicile, et le personnel avait commencé à s’inquiéter... Notamment son grand-frère, Bran, et sa fille,
Akira. En enquêtant, ces derniers avaient remonté la piste des chasseurs de vampires, donnant lieu à plusieurs affrontements sanglants... Et c’était suite à l’un de ces affrontements que Mélinda se tenait dans ce petit et tranquille quartier résidentiel, en reniflant l’air, ce qui ne manquait pas de surprendre certains piétons.
«
C’est ici... »
Une voiture la suivait de près, abritant sa fille, Akira, qui était résolue à la suivre, se sentant coupable pour ce qui avait eu lieu il y a quelques jours. Entre l’amnésie de sa mère, et la lutte contre les chasseurs de Nefarius, elles n’avaient pas eu le temps de se préoccuper de ce dommage collatéral, et Mélinda espérait bien qu’elles n’arriveraient pas trop tard.
Pour remonter la piste, il avait fallu faire une potion spéciale. Impossible de pister le sang de cette femme dans une ville aussi riche, et les magiciennes proches de Mélinda avaient conçu un élixir qui lui permettrait de pister ce sang. L’élixir comprenait le sang de Mélinda, et avait pour but d’utiliser les capacités extrasensorielles des vampires, liées à leur perception du sang, pour remonter la piste. Comme il ne s’était écoulé que quelques jours, la piste était encore relativement fraîche.
Mélinda était donc venue au lieu de l’affrontement, tout en rassurant Akira.
«
On va la retrouver, ma puce, ne t’en fais pas... -
J’espère surtout qu’on la retrouvera avant eux... »
Les tueurs de Robert Nefarius... Un autre problème dont il allait falloir s’occuper, mais, pour l’heure, Mélinda pistait une vampire... Et, plus elle se rapprochait, et plus la piste devenait bonne, signe que la femme devait effectivement habiter dans le coin. La vampire s’avança donc, jusqu’à s’approcher de l’interphone, et observa les différents numéros. C’était un immeuble résidentiel, dans un endroit où on trouvait souvent des étudiants. Elle observa la liste, en se demandant sur quel bouton appuyer.
Akira n’avait pas chômé, et Mélinda vit sur l’interphone un nom correspondant à celui figurant sur sa liste :
Tsukuda Kanjo.
*
Se pourrait-il que... ?*
Au pire, elle irait voir tout le monde... En l’état, il fallait juste qu’elle rentre, et qu’elle s’approche des portes, jusqu’à sentir la bonne odeur. Si sa théorie était bonne, la jeune vampire devait être cloîtrée chez elle. Elle appuya donc sur la sonnette, attendit un peu, et parla rapidement :
«
Bonjour, Madame ! J’ai une annonce très importante à vous faire. Pourriez-vous m’ouvrir, s’il-vous-plaît ? »
Elle était prête à sortir le premier bobard lui venant à l’esprit, mais, visiblement, sa phrase suffit à happer la curiosité de la lycéenne, qui débloqua la grille. Mélinda l’ouvrit, et s’avança, puis regarda autour d’elle. Ses sens ne la trompaient pas.
*
Elle est ici...*
Outre le fait de renifler en l’air, ce qui avait aussi attiré le regard des passants, c’était son accoutrement. Mélinda était sortie avec sa longue robe dorée. Mélinda s’avança vers la porte, et tapa dessus... Cette dernière s’ouvrit rapidement, et, dès que son regard croisa celui de la femme, elle
sut. Elle le sut, et ce sans aucun doute possible. Portant un masque médical, la femme lui expliqua être malade, et Mélinda hocha la tête.
«
Ce n’est rien, ne vous en faites pas... Merci à vous de m’ouvrir. »
Cette femme était hospitalière... Et visiblement naïve pour laisser quelqu’un rentrer sans rien savoir d’elle. Tout en s’avançant dans le palier de la porte, Mélinda s’inclina à son tour.
«
Je m’appelle Mélinda Warren... C’est un plaisir de te rencontrer, Tsukuda. »
La femme alla s’asseoir sur son lit, et Mélinda contempla le désordre, ainsi que la faible luminosité ambiante, cette odeur de renfermé... Et le matou qui alla rejoindre sa propriétaire. Un bref regard circulaire, puis elle s’avança, essayant de savoir comment amener la conversation. Elle s’humecta les lèvres, et, fort heureusement, Tsukuda aborda directement sa «
maladie ».
«
Oui... Enfin, nous n’en sommes pas encore sûrs, alors je viens pour faire quelques examens complémentaires. »
Avec sa robe, Mélinda n’avait clairement pas le look d’une infirmière, mais, sans, laisser le temps à Tsukuda de se poser cette question, elle enchaîna rapidement :
«
Est-ce que la lumière du soleil vous agresse de manière particulière depuis votre... Maladie ? Et... Hum... Est-ce que vous avez faim ? Enfin, je veux dire... Est-ce que, même malgré le fait de manger, vous continuez encore à avoir faim ? »
La question pouvait paraître absurde... Mais elle ne l’était pas quand on était un vampire.