Le pauvre Lenz essayait de recouvrer la vue, mais avec cette saleté d’éclipse qui lui avait arraché la rétine rien n’était moins évident… Il se frottait les yeux, comme si ça pouvait changer quelque chose, et grommelait quelque chose d’incompréhensible à propos du Soleil qui pouvait être un vrai connard quand il s’y mettait, etc., etc. Mais bon, une éclipse solaire, c’est dangereux, tout le monde sait qu’il ne faut jamais les regarder directement.
Une voix l’interrompit dans ses pensées. Vlad Aurion… Il avait entendu parler de lui, mais il ne s’attendait pas à le rencontrer. Et encore moins à l’affronter ! Lenz se mit immédiatement au garde-à-vous et s’inclina bien bas, sa lance plantée dans le sol aussi droit que lui-même.
-C’est un honneur, Seigneur Aurion. Mon nom est Lenz. Et…
Il se redressa et regarda dans les yeux celui qui allait être son adversaire, mortellement sérieux.
-Ne vous fiez pas aux apparences, je ne suis pas si jeune que ça.
De fait, comment affirmer que Lenz était jeune, alors qu’il avait passé un siècle au-delà de l’atmosphère pour repousser les menaces extérieures à la planète ? Non, il n’était vraiment pas jeune, mais il était inexpérimenté.
Le dieu eut alors des paroles pour le moins troublantes. Sa proposition était intéressante, surtout pour Lenz qui ne savait pas si bien se battre que ça. Il détendit un peu sa position le temps de réfléchir.
-Ma foi, l’idée est assez séduisante, je l'admets. Mais je ne sais pas si c’est dans les règles.
Cela dit, est-ce que c’était vraiment important ? Il y avait des règles, certes, mais il avait en face de lui un dieu, et les dieux avaient pour tradition depuis des temps immémoriaux de modifier leurs propres règles, non ? En tout cas c’est ce qu’il avait cru comprendre.
-Remarquez, si c’est vraiment interdit les organisateurs de ce drôle de tournoi nous le diront d’une façon ou d’une autre !
Il laissa tomber sa naginata et sa lame de poing et s’étira, sans quitter Vlad Aurion des yeux. Mais du coin de l’œil, il apercevait quelques têtes curieuses qui passaient par les fenêtres des bâtiments pour observer les deux drôles de gusses dans la cour…
-Je vous écoute. De quelle façon voulez-vous que nous nous affrontions ?
S’il y avait moyen de gagner sans combattre, il n’allait certainement pas se faire prier ! Et puis bon, gagner c’était bien, mais gagner avec panache, c’était encore plus gratifiant.
Un peu plus loin derrière le dieu, une porte s’ouvrit. En sortit une fille d’une quinzaine d’années, mais à la poitrine exagérément développée pour son âge. Elle regardait les combattants avec les yeux brillants d’adoration. Brillants…au sens propre.
-Euh… C’est normal, la fille derrière vous ? Déjà, c’est censé être une arène, elle a rien à faire là, mais en plus elle est…bizarre.
Lenz commençait à se demander si on ne s’était pas un peu foutu de sa gueule. Voire beaucoup. Dans quoi s’était-il engagé cette fois ?