L'appel d'Ernest attira bien l'attention de Karen, mais pas seulement. Le garçon au tatouage de tigre ailé fut le premier à répondre, lançant à travers la salle un :
« 'tendez, je vais me le faire. »
Il avança d'un pas rapide et déterminé, et alors qu'il avançait, l'os de son avant bras grandit et ressortit de son poignet, sans pourtant paraître transpercer sa peau. L'extrémité de la protubérance, qui devait mesurer une trentaine de centimètre, était pointue.
« Je le sens pas très bien. »
D'un rapide et violent mouvement de bras, Loïc faucha le bossu sous les côtes, stoppant net sa progression et lui coupant le souffle. Le jeune homme ne s'arrêta cependant pas là, et alors que sa victime se recroquevillait sur elle-même en gémissant, il le frappa encore dans la direction opposée, matraquant son dos voûté. Le mutant fut projeté au sol, où l'attendirent plusieurs coups de talon qui ciblèrent principalement les zones molles de son corps.
« C'est bon, t'es calmé ? »
Le bossu tenta de se relever à quatre pattes pour s'enfuir, et reçu un nouveau coup qui l'étala encore. Il y avait un peu de sang sur le carrelage, mais celui-ci était rapidement emporté par l'eau qui ruisselait.
« C'est toujours un plaisir de t'aider gratuitement Eve. Et salut, Ernest Lenoir. Je te croyais toujours au trou. C'est dingue qu'ils t'aient fait sortir après tout ça. Mais t'aimes être en cage, finalement ? »
Le jeune homme laissa ramper le bossu gémissant plus loin et rétracta son arme. C'était un garçon assez commun, d'environ vingt ans, bien plus musclé que Matt. Il n'avait pas un air très gentil, mais son visage entouré de cheveux noirs était paradoxalement plutôt doux. Une barbe de quelques jours, pas encore très fournie, formait un duvet assez peu esthétique sur son menton.
Peut-être la voix et les détails de sa face rappelleraient-ils quelque-chose à Ernest ? Loïc avait brièvement fréquenté l'institut Xavier plusieurs années avant ; il avait bien grandi depuis. À l'époque, c'était un adolescent beaucoup plus chétif et très discret, et aussi presque féminin. À tous les points de vue, la testostérone avait bien fait son travail. Ils n'avaient jamais vraiment discuté ensemble, quelques entraînements communs, peut-être, mais il n'y avait pas grand-chose à se souvenir à son propos.
« Merci Loïc. Alors vous vous connaissez ? » fit-elle d'un ton égal.
Eve ne paraissait pas hostile au jeune homme ; ni à lui, ni au comportement qu'il venait d'avoir. Quant à ce qu'il venait de dire, elle ne s'en étonna pas, du moins pas sur le moment : elle avait eu peur, et elle était encore un peu absente. Elle regarda anxieusement le bossu s'éloigner.