Sachiko n’était pas, malheureusement pour elle, la première femme qui tentait encore de nuire à Kamui. Avant elle, Lucy avait été la plus farouche rivale de l’ambitieux entrepreneur à ce niveau; elle était non seulement au courant de tout ce qu’il faisait, mais elle savait avec qui il faisait affaire et parfois, il arrivait que le Président de Meisa lui doive la perte d’un ou deux contrats de très haute importance aux mains d’un adversaire. Et le pire, c’est qu’elle connaissait la faiblesse de son patron pour les belles femmes, et sa naïveté; il lui suffisait qu’elle éclate en sanglots pour qu’il se sente terriblement mal de la soupçonner de la moindre faute, et à chaque fois, il tombait dans le panneau comme un débutant; le charme des femmes était sa plus grande lacune, et sa plus grande honte. Ce manège a même duré une bonne dizaine d’années avant que leur relation n’atteigne un certain stade où trahir Kamui devenait beaucoup trop difficile en raison de leur complicité, et la jeune femme de l’époque avait laissé tomber sa chasse aux scandales. Aujourd’hui, Lucy était la plus fidèle et farouche protectrice de la réputation de son patron, et… une des meilleures investigatrices que Kamui n’a jamais eu à son service
Devant la réticence de l’espionne, Kamui ne put s’empêcher de pousser un soupir de découragement. La trouver était facile, car il l’avait déjà fait sans même qu’elle ne se doute qu’il ne connaissait sa position, mais il était attristé de se voir aussi négligent, aussi peu méfiant, depuis qu’il habitait la Terre; le manque de danger et de spontanéité qui y régnait avait son côté positif; c’était relaxant et il n’avait pas à craindre d’être assassiné dans son sommeil, mais tout de même, ils engourdissaient sa vigilance, ce qui pouvait s’avérer fatal si un ennemi doué de quelque talent que ce soit ne se décidait à l’attaquer. Pour en revenir à la paparazzi, il ne s’attendait, bien sûr, pas à ce qu’elle se rende docilement, mais il avait, à sa grande honte, espéré qu’elle ne se complique pas l’existence et qu’il se voit forcé d’en venir à l’y contraindre.
S’assurant, pour une fois, que personne ne pouvait le voir en action mise-à-part la représentante de la famille Etsuyama, il posa son regard vers la position actuelle de la jeune femme, remarquant une petite colline couverte d’herbes hautes suffisamment élevée pour permettre un très bon point de vue sur toute la scène, et, malgré les ténèbres de l’endroit, il distingua nettement les formes de celle qui venait de le prendre sur le fait. Il ferma un moment ses yeux d’argent et fit appel à la grande réserve d’énergie qui se trouvait en lui et y puisa la force nécessaire pour dématérialiser son corps, puis le rematérialiser devant Sachiko. Elle avait dû déjà comprendre qu’il n’était pas ordinaire, ou dangereux, puisqu’elle ne s’était pas montrée, mais ce n’était pas pour autant que Kamui pouvait la laisser filer sans au moins avoir eu droit à quelques explications et, si possible, qui était celui qui voulait que la honte et le discrédit s’écrase sur sa société. Les rivaux les plus féroces étaient ceux qu’il fallait éliminer, après tout.
Profitant de l’effet de surprise que devait, en toute normalité, provoquer cette démonstration de puissance mgique et prévoyant qu’elle serait très tentée de s’enfuir à sa vue, la main de Kamui trouva son poignet et il l’emprisonna dans un étau. Il la dévisagea un moment puis il haussa un surpris étonné en voyant le visage de la jeune femme. Il abaissa de sa main libre ses lunettes de soleil pour poser son regard à nu sur elle. Depuis quand les humains ont-ils droit à des femmes d’une telle beauté? S’étonna le Maître de Meise. La jeune blonde lui était visiblement peu âgée, et à l’apogée de sa force et sa vigueur en tant qu’être humaine, avant que ses muscles et cellules ne commencent à démontrer le passage du temps. Elle était gâtée d’une poitrine si volumineuse qu’elle en semblait insolente, et d’une forme amphorique pouvant rendre jalouse n’importe quelle demoiselle qui oserait poser son regard envieux sur son corps. Une des conversations avec Lucy lui revint en mémoire, concernant une jeune femme qui servait de source de scandale à tous les magazines people qui parvenaient à s’offrir ses services. Etsuyama Sachiko. Kamui resta un moment interdit puis un léger sourire flotta sur son visage avant de disparaître; si Sachiko avait été envoyé pour soutirer des informations compromettantes, cela voulait dire que la plupart des autres avaient échoués, et en cela, il se sentait terriblement flatté.
-Il fait bien trop sombre, mademoiselle, pour qu’une jeune femme ne se promène ainsi toute seule. Et surtout une jeune femme aussi littérallement ravissante que vous, mademoiselle.
Certains pourraient croire que Kamui faisait de la drague déplacée à la jeune demoiselle, mais en toute honnêteté, c’était surtout pour conseiller la jeune femme; pour n’importe qui autre que lui, elle n’aurait pas gardé ses vêtements bien longtemps, surtout s’il possédait ses pouvoirs. Et là, elle aurait regrettée d'avoir accepté le contrat.
-Je vais vous relâcher immédiatement, Etsuyama-san, mais je dois vous demander, néanmoins, de rester calme; je n’ai aucune raison de ne pas croire en vos exploits de course à pied, mais vous ne pourriez pas m’échapper. Je veux simplement vous parler et, si possible, récupérer la pellicule de photos que vous avez prises. Je ne vous ferai aucun mal.
Pour prouver ses dires, il relâcha sa prise sur le poignet de la belle femme et écarta les mains en croix de chaque côté de son corps, pour montrer qu’il n’était pas armé et qu’il ne comptait pas lui faire du mal… quoi que venant de lui, c’était très difficile de croire qu’il ne pouvait pas lui faire du mal simplement en le désirant, mais chut, il faut garder quelques secrets pour cette rencontre! Elle était maintenant entièrement libre de ses mouvements, et donc capable de se protéger, en toute liberté.
-Est-ce vous qui me suiviez depuis mon bureau?