Rinako la terrible, Rinako la redoutable Celkhane, la puissante magicienne qui avait attaqué toute seule un camp de mercenaires surentraînés, qui défiait des hordes de Formiens, s’était effacée. Il ne restait plus qu’une délicieuse jeune fille qui était terriblement angoissée, et, pour des raisons incompréhensibles pour Nika, gênée de ce qu’elle faisait. La soldate avait laissé la place à une adolescente qui était devenue femme trop vite, à une femme à qui on avait appris de tuer, et non de vivre, à qui on avait appris d’arracher la vie, et de l’honorer. L’Annexien en Nika souriait devant cette ironie, devant ces femmes qui, tout en dénonçant la barbarie supposée des Formiens, étaient formées à tuer. Nika, elle, trouvait cela assez triste, mais elle n’était pas une militaire. Et, l’un dans l’autre, les deux facettes de la personnalité éclatée de Killer se retrouvaient en un point précis : une chose physique, tangible, matérielle ; Rinako avait un très beau fessier.
Avec un plaisir pervers, Nika malaxait ses fesses sans hésitation, sentant la Celkhane trembler contre son corps, près de son cou.
*Rassure-là, réconforte-là, elle n’est qu’une adolescente qui se masque derrière sa magie dévastatrice. Aide-là à comprendre qu’il n’y a là rien d’inquiétant, rien de dangereux, et que ce qu’elle vit ici est tout simplement formidable.
Profite-en ! Savoure ce corps délicieux, ce corps tremblant ! C’est en toi qu’elle a confiance, c’est sur toi que les espoirs de cette meurtrière reposent ! Rappelle-toi sa colère, sa rage, sa fureur, sa puissance. N’est-ce pas merveilleux, cette sensation ? Ce sentiment de contrôle ? Laisse-toi absorber, et profite-en !*
Deux impulsions contradictoires, chacune stimulées par les gènes de l’Annexien qui se promenaient dans son corps. Mais Nika n’était pas une mauvaise personne, et, tout en ayant une main bien posée sur le postérieur de Rinako, elle leva l’autre. Dans le schéma-type du couple de lesbiennes, Nika aurait probablement été la femme dominante, celle qui dirigeait le ménage, et protégeait la partenaire. Ce revirement de personnalité chez Rinako, s’il pouvait se comprendre, n’en était pas moins perturbant... Il surprit un peu Nika. Tout en elle transpirait la nervosité. Que ce soit ses joues chaudes, son corps qui tremblait, ses muscles tendus, ses soupirs, ses frémissements, les hésitations dans sa voix, la manière dont ses doigts gantés avançaient...
...Et le pouvoir, Nika, effectivement, le ressentait. Il n’y avait là rien de plus gratifiant que de faire l’amour avec une vierge, de l’éduquer, de la former, de la marquer à vie. Elle eut un éclair de lucidité dans le plaisir qu’elle ressentit. Yeux clos tandis que Rinako se promenait sur son postérieur, elle comprit tout le plaisir pervers qu’un détraqué sexuel, un violeur, devait ressentir en prenant une vierge, en la violant, tout le plaisir, cette sensation de puissance et de supériorité. Nika aussi le ressentait. Elle était sqa première fois ! Elle pouvait lui offrir une prestation que Rinako n’oublierait jamais, une performance qui la poursuivrait à chaque fois qu’elle se coucherait la nuit, et que des rêves chauds viendraient la poursuivre, à chaque fois que, profitant d’une permission, elle s’offrait des caresses solitaires dans sa chambre, en vérifiant scrupuleusement que la porte était fermée à double tour.
*Il est curieux, tu ne crois pas, que les humains se sentent aussi gênés pour une chose aussi naturelle et délicieuse ? Comme si, quelque part, dans les profondeurs de votre inconscient, vous vous refusiez à éprouver du plaisir, vous vous refusiez à accepter cette part d’animalité qui habite en chacun de vous... N’est-ce pas là la plus belle preuve que vous vous refusez d’être heureux ?*
Les pensées et les désirs de l’Annexien se mêlaient avec les siens, les embellissant, les modifiant, les pervertissant. Une mémoire fantôme, des souvenirs qui n’étaient pas les siens... Elle frémit et se reprit quand Rinako remua sous son corps, veillant à s’écarter d’elle.
« Excuse-moi » se justifia-t-elle.
Sortant brièvement de ses pensées, Nika la regarda se redresser, et ôter sa broche. Elle fronça les sourcils. Cette broche avait-elle une signification particulière ? S’étant retournée, la Celkhane avait sorti sa broche, et veillait à la mettre sous le sac de couchage, à l’abri, bien dissimulée. Encore une fois, la voix goguenarde et sceptique dans sa tête parla.
*Elle se croit forte, mais, comme tous les Terriens, ce n’est qu’un mensonge. Le sens-tu ? Le comprends-tu enfin ? Pourquoi nous vous traitons comme des animaux ? Pourquoi nous ne vous apprécions pas ? Vous vous prenez pour des seigneurs, mais vous n’êtes que des serfs. Votre existence toute entière est un masque, un écran de fumée. Regarde-là, regarde-là donc ! Oui, admire-là ! Elle tue pour se réfugier. Sa broche lui rappelle sans doute un être cher. Si tu savais réfléchir, tu pourrais la sentir penser, sentir son esprit, pareil à un volcan en éruption. Elle a honte. Honte de ce qu’elle fait. Vous, les humains, êtes tellement amusants ! Éprouvera-t-elle la même honte quand elle tuera des Formiens ? Quand elle massacrera les siens ?*
Fermant les yeux, Nika s’était relevée, et se glissa dans le dos de Rinako, glissant ses mains à hauteur de son ventre, les rejoignant près de son nombril. Sa tête se plaqua contre sa nuque, son nez glissant sur ses cheveux, avant qu’elle ne parle d’une voix calme et tendre :
« Tu as le droit d’être nerveuse, Rinako... »
Elle l’avait d’autant plus que ça excitait encore plus Nika, mais elle ne comptait pas le dire.
« Mais tu n’as pas le droit d’avoir honte, ma belle. Crois-moi, il n’existe rien de plus beau au monde que ce que nous allons faire. »
Nika l’embrassa sur l’épaule, et poursuivit, tout en caressant ses cotes.
*Détruire vous est plus facile que construire, tuer est plus facile que d’enfanter. Vos liens sont lents à se construire, mais sont si faciles à se couper... Vous vous rechignez à montrer les belles choses de la vie, mais vous n’hésitez pas à montrer la mort en direct, à en faire un grand show multimédia. Ne le comprends-tu donc pas ? Vous n’êtes pas des héros. Vous êtes les émissaires du chaos, des agents de destruction parfaits et accomplis.*
Elle l’embrassa à nouveau, glissant sur sa joue, et retourna lentement Rinako. Un sourire attendrissant sur les lèvres, Nika s’absorbait dans sa tâche, afin de faire taire la voix, la voix qui continuait à la narguer, à la provoquer. Elle caressa sa joue, se mordillant les lèvres, puis glissa l’une de ses mains dans celle de Rinako, la soulevant, afin de la maintenir, ses doigts se glissant entre les siens.
« Si ta mère nous regarde, je pense qu’elle serait beaucoup plus heureuse de savoir que sa fille prend du bon temps, plutôt que de la savoir entre la vie et la mort contre des légions de Formiens. N’aie pas peur, Rinako... Et ne te juge pas, ne pense à rien... N’envisage pas le lendemain, ce que les autres diront, ne pense qu’à toi et à moi, car il n’y a que nous deux qui importe... »
Elle s’approcha un peu plus, et l’embrassa à nouveau, puis retourna la prendre dans ses bras. Nika retourna ensuite s’allonger lentement, avec Rinako dans les bras. Elle lui caressait avec douceur le dos, tout en continuant à l’embrasser, entrecoupant ses brefs baisers de soupirs. La Celkhane dans les bras, Nika la relâcha, et la laissa s’allonger à côté d’elle. Son regard plongé dans le sien, Killer parla sur un ton un peu plus bas :
« A toi d’agir, maintenant, Rinako. Mon corps est tien. Caresse-le. Embrasse-le. Chéris-le, et laisse-toi porter par le courant. »