L'homme qui lui faisait face l'écoutait avec la plus grande attention. Une attention qui n'était pas coutumière pour Amy et lui faisait monter le rouge aux joues. Elle faisait son possible pour être à la hauteur de l'attention qu'il lui portait, et s'emmêlait dans un langage châtié d'un autre âge...
Ses révélations ne semblèrent pas choquer l'antiquaire, ni constituer un frein à son embauche. Il ne la questionna pas sur les raisons de son placement, mais saisit d'emblée la nécessité de payer Amy en temps et en heure. Tout cela semblait extrêmement professionnel! Amy en était toute intimidée!
Le repas s'acheva avec leur discussion. Amy se sentait grisée et repue par toutes ces bonnes choses. Elle avait néanmoins conservé son énergie pour lui démontrer l'étendue de ses talents de jeune fille d'intérieur, et elle sauta de sa chaise quand il l'invita à nettoyer la pièce.
Elle fronça les sourcil quand il lui interdit de pénétrer la pièce adjacente dont la porte était fermée. Après cette dernière recommandation, il laissa Amy faire son travail.
La gamine resta quelques instants perplexe à regarder la porte derrière laquelle son patron avait disparu, puis celle qu'il lui était interdit de franchir.
Si Amy était naturellement curieuse, elle n'aurait rien fait qui risquait de compromettre son nouvel emploi. Elle aurait bien voullu savoir, tout de même, ce que cette pièce avait de si important. Elle haussa les épaules : de toutes façons elle était probablement fermée à clé.
Sans plus s'en préoccuper, la jeune fille passa l'heure suivante à astiquer l'endroit. Elle n'avait pas tardé à dénicher tout le matériel nécessaire dans un placard, et au bout d'une heure, la pièce reluisait de propreté, du sol au plafond. Elle noua le sac poubelle dans lequel elle avait jeté toute la poussière qu'elle avait balayée et épousseté et alla le poser dehors.
Quand elle revînt, elle posa ses mains sur ses hanches d'un air satisfait et parcourut des yeux l'endroit. Rien n'avait été oublié, Monsieur Gorian serait certainement satisfait de son travail!
Pressée de le lui faire découvrir, et un peu inquiète de l'heure tardive à laquelle elle allait rentrer chez elle, elle se dirigea vers la porte derrière laquelle son employeur avait disparu.
Elle resta un instant immobile devant, écoutant si elle l'entendait, mais aucun son ne lui parvenait de l'autre côté du panneau. Timidement, elle toqua quelques coups et attendit.
Rien ne se produisit.
Elle écouta encore, collant son oreille au bois, mais elle n'entendit toujours rien.
Un peu ennuyée, Amy décida qu'il serait inconvenant d'ouvrir, et qu'elle ferait mieux de prendre son mal en patience. Elle s'adossa alors à la table sur laquelle ils avaient dîné un peu plus tôt, et observa une nouvelle fois les objets qu'elle avait nettoyés un à un. Il lui semblait déjà les connaître tous par coeur.
Rapidement, son regard se posa sur la porte mystérieuse. Que pouvait-elle bien dissimuler? Monsieur Gorian avait-il peur qu'elle ne soit pas assez compétente pour s'en occuper? Ou bien dissimulait-elle un secret qu'il voulait lui cacher?
Avec un petit sourire, Amy se dit que ce serait une bonne chose de partager un secret avec Monsieur Gorian, cela l'inciterait certainement à ne pas se séparer d'elle de sitôt...
Mais tout de même... il lui avait interdit d'y pénétrer. S'il la surprenait à le faire, il la licencierait certainement sur le champ!
Avec hésitation, Amy retourna à la porte où elle avait toqué un peu plus tôt. De nouveau, elle y colla son oreille dans l'espoir d'entendre quelque chose, mais en vain. C'était comme s'il était parti. Peut être dormait-il?
Que devait-elle faire?
En tous cas s'il ne l'avait pas entendue frapper, il ne l'entendrait surement pas si...
Elle s'approcha comme malgré elle de la porte interdite. Jetant de fréquents regards par dessus son épaule, elle se pencha sur le trou de la serrure pour essayer de distinguer ce qu'il se trouvait derrière. Mais il faisait trop sombre pour qu'elle y voit quoi que ce soit.
Lentement, le plus silencieusement possible, elle fit jouer la poignée. Son coeur battait la chamade dans sa poitrine, et elle se maudissait intérieurement de désobéir à son nouveau patron. Mais c'était plus fort qu'elle, elle voulait juste jeter un petit coup d'oeil, rien de plus!
A sa surprise, elle découvrit que la porte n'était pas verrouillée.
Le panneau glissa sans bruits sur un sol poussiéreux plongé dans la pénombre.
La fillette plissa les yeux pour essayer de distinguer des formes et des contours, mais elle dut se résoudre à chercher à tatons sur le mur un interrupteur pour éclairer la pièce.
Ses doigts palpaient fébrilement la surface lisse du mur, quand tout à coup, une main se posa sur la sienne et la fit appuyer sur ce qu'elle cherchait.
Amy eut un sursaut et un cri. Elle allait se retourner pour voir qui était derrière elle, mais le spectacle qui s'étalait sous ses yeux était plus surprenant encore... Il lui semblait ne pas avoir assez d'yeux pour tout voir. Et son cerveau, pendant quelques secondes, refusa d'admettre ce qui se trouvait devant elle...