Entretien avec un vampire… [PV]

Entretien avec un vampire...

Le quartier de la Toussaint est un quartier malfamé d'une grande métropole nippone. Composé de ruelles sombres et d'impasses, ce quartier est un terrain de chasse idéal pour une bande de vampire. Ce quartier est aussi un endroit idéal pour un clan vampire en quête d’un abri et d’un endroit sur pour stocker des proies fraiches et humaines. Avec sa forte densité de population, la ville nippone demeure un terrain de chasse idéal pour un vampire, un vivier de gorges fraiches et de délicieux nectar sanguin…De plus, les pauvres humaines errant dans ce quartier malfamé sont des proies de choix et leurs disparitions n'attirent pas vraiment l'attention. A chaque disparition, les autorités de la ville pensent pour une fugue ou un viol...mais pas à un clan vampire en chasse. D'ailleurs, il faut être suicidaire pour se rendre, de nuit, dans un tel quartier et même fou pour se rendre dans un tel quartier alors qu'on porte une jupe...

Néanmoins, tous chasseur doit disposer d'un endroit pour stocker ses proies. Les vampires aiment conserver leurs proies vivantes dans un endroit sur, ils ont ainsi tous le plaisir de torturer, de jouer avec leurs victimes, avec leurs gibiers. Dans ce quartier de la Toussaint, Une bâtisse détonne...Son architecture étant bien différente des autres bâtiments, des barres d'immeubles et des entrepôts abandonnés depuis longtemps. Au fond d'une petite impasse, un drôle de bâtiment se dresse...Il s’agit d’un vieux manoir en ruine, branlant, menaçant de s’effondrer, fait en pierre sombre. Une demeure de type victorienne dans une ville japonaise, il faut avouer que c'est étrange...Non ?

C’est un lieu insalubre, une forte couche de poussière recouvre les fenêtres encore intactes tandis que la porte d’entrée est absente. Bien sur, aucune personne saine d’esprit n’oserait entrer dans une bâtisse aussi vieille, un bâtiment qui peut, en un instant, s’écrouler sur vous. Donc, tout naturellement, le clan vampire des Aelias s’est approprié ce manoir vétuste. Pour le clan, l’endroit n’est pas vraiment un manoir luxueux pour vivre, plutôt un petit pavillon de chasse comme le château de Versailles à l’époque de Louis XIII, bien avant les aménagements de son fils, le roi-soleil. Les vampires s’en servent comme tanières et prisons pour les humains capturés lors de virées nocturnes. L’intérieur du manoir est en totale contradiction avec l’extérieur…Parqué ciré, papier peint, tapisseries, tableaux de maitres, bien meublé mais un peu sombre, quelques bougies seulement pour éclairer. La porte étant absente, on y entre aisément, on passe alors un petit vestibule avant d’accéder à un grand salon. Un escalier non loin mène à la cave, c'est-à-dire la chambre à coucher d’un vampire. Le salon est une vaste pièce, avec deux grands canapés sortis d’une époque révolue, une large cheminée en brique, quelques tableaux, un bureau et un nécessaire pour fumeur avec un râtelier à pipes.

Bien que ce manoir ne soit qu’une des nombreuses résidences secondaires du clan, le seigneur du clan des Aelias apprécie particulièrement le charme de cette bâtisse. Il n’est donc pas rare de le voir dans le manoir, assis dans le salon sur un vieux fauteuil, fumant un vieux cigare, tirant une bouffée de fumée sur une vieille pipe ou encore en train de boire un verre de sang, le tout avec de la musique classique, Mozart, en fond sonore…Justement cette nuit là, le seigneur vampire est présent et sans garde du corps. Après tout, Seffer Aelias est un nécromancien, il peut invoquer ses propres gardes. Tranquillement assis sur un vieux fauteuil, il médite. Et parfois, on l'entend déclamer des vers ou des passages de pièce de théâtre.

- Tout homme peut s'égarer...

Faust, acte I, scéne I. Faust de Goethe, une œuvre adoré par le vampire. Néanmoins, ses sens exceptionnels vampirique indiquent la présence d’un intrus dans sa demeure. Étrangement, le comte ne réagit pas et demeure assis, serein et sur de lui. Si un intrus est présent dans sa demeure, cet intrus viendra à lui, pas à la peine d'aller le chercher.

   L'ennui nous pousse à beaucoup de choses. Ou est-ce simplement de l'extravagance ? Impossible à dire. Toutefois, on peut inclure la folie dans l'extravagance. L'audace, la volonté de préserver cette image si particulière que nous nous sommes donné... C'est un phénomène bien étrange qui ne touche qu'une partie minime de la population. Parmi les victimes de cette manie se trouvait Adelheid. Elle n'était pas vraiment folle. Juste quelque peu différente. Il faut aussi ajouter qu'en plus de vivre dans l'insouciance la plus totale qu'elle est aussi très autonome. À vouloir se débrouiller seule sans grande force, notre faiblesse attire souvent des ennuis.

   À l'origine la scandinave n'était sortie que pour s'acheter un paquet de cigarette. Le ciel dégagé était tacheté d'une multitude de points blancs sous ce fond noir, laissant une totale liberté à la clarté lunaire qui éclairait d'un mince filet de lumière les rues les plus sombres. Les plus grandes rues étaient toujours éclairées par ces dispositifs que l'homme aime tant, les réverbères. Adelheid trouvait cette invention d'un fort mauvais goût tout comme elle trouvait cette lumière jaunâtre hideuse. Il  n'y avait qu'elle pour faire attention à ce genre de détail. Les rues étaient plutôt vide, c'était étrange. Le peu de personnes de sortie étaient plutôt légèrement habillées, l'été caressant de son souffle tiède nos peaux à nu. Paradoxalement, dans ce triste cortège, Adelheid devait être la plus habillée. Elle n'avait pas opté pour la discrétion cette nuit : un bustier rouge serrant sa taille de lacets noirs, faisant ressortir sa poitrine et ses hanches de manière à faire pâlir toutes les japonaises du coin. Avec ceci elle portait une jupe de ce même rouge rubis, en taffetas ( http://img11.hostingpics.net/pics/912928antoinettered1.jpg ). Frig vénérait cette couleur. Le rouge. Une couleur bien mystérieuse pouvait représenter tout et n'importe quoi. L'amour, la passion, la provocation, le sang, la folie. Pour faire plus habillée, la jeune femme portait des gants noirs en satin lui arrivant au dessus des coudes ainsi qu'un bande de dentelle noire autour de son cou, finement attaché par une ficelle rouge. Ses cheveux quasiment blanc volaient dans l'air chaud, quelques mèches tombant sur ses épaules d'albâtre découverte.

   N'ayant pu s'acheter ce qu'elle voulait, Frig renonça de trouver une autre échoppe ouverte et fit demi-tour, dépitée. Marchant lentement dans les grands axes, elle finit par s'arrêter devant une ruelle qui paraissait comme un potentiel raccourci. Pourquoi ne pas en user ? Quelques secondes de réflexion convainquirent la norvégienne, sitôt elle s'enfonça dans cette ruelle. En ce lieu il n'y avait aucune lumière artificielle, seule la lune éclairait son chemin. Ne faisant pas trop attention à son parcours, Adelheid finit par arriver dans un étrange cul-de-sac. Au fond de celui-ci se trouvait un étrange bâtiment qui attira fortement son attention. C'était une sorte de manoir européen, ressemblant à ceux du XIXe siècle, une de ses périodes favorites de l'histoire. L'endroit, délabré, semblait inhabité. La jeune femme ne se fit pas prier, elle pénétra dans cette antre.

   L'intérieur était sombre, mais en aucun cas déplaisant. Sur le parquet résonnaient les talons de la jeune femme, en un doux rythme qui berçait doucement le calme du vestibule. Adelheid laissait attarder son regard sur chaque détail, comme émerveillée de pouvoir visiter enfin une telle bâtisse. Mais le faible éclairage produit par les bougies firent accélérer son rythme cardiaque. L'endroit devait donc être « habité ». Cependant la curiosité attisée par la beauté des lieux força la scandinave à continuer son exploration. Une douce mélodie atteint ses oreilles. Du Mozart. Étant une amatrice de musique classique, elle ne pouvait pas se tromper. Comme attirée par l'air, Frig s'avança dans la pièce pour arriver à l'entrée d'une autre qui semblait être le salon. En un bref coup d'œil elle remarqua que la pièce était occupée par une personne. Son cœur battait la chamade, la peur la tétanisant. Vu le manque de discrétion dont elle avait fait preuve, l'hôte de ces lieux avait du déjà la remarqué. Comment réagir ? Elle tenta de se dissimuler derrière le mur, laissant sa tête dépasser de l'angle de celui-ci pour observer la pièce. C'était plus fort qu'elle.

Une personne trop curieuse était présente dans le manoir délabré, pavillon de chasse d'un clan de vampire. Il fallait avoir une case en moins dans la tête pour entrer dans une telle bâtisse. Un humain lambda n’oserait guère entrer dans une ruine, menaçant de s’effondrer sur lui. Un curieux peut être…attiré par l’apparence du manoir. Il fallait avouer que la présence d'un manoir d'architecture victorienne dans une banlieue traditionnelle nippone, cela clochait et pouvait attirer l'attention. Ou tout simplement, un cambrioleur désirant récupérer les quelques choses restantes dans ce manoir en ruine et en tirer un bon prix auprès d'un receleur...En tout cas, l’odorat développé du vampire indiquait une chose sur. L’intrus était une femme. Hmm...Seffer Aelias n’avait pas encore pris de gorgée de sang aujourd’hui. Il allait pouvoir rattraper cette petite erreur. Néanmoins, il n’allait pas se précipiter sur l’intrus comme un frustre. Bigre non ! Il était quand même une personne éduquée et un aristocrate en plus, il avait des manières.

Pendant quelques secondes, il ne fit rien…Aelias se contenta de quitter le fauteuil où il était assis auparavant. Il s’étira, s’approcha de cette chaine hifi humaine et abaissa un peu le son de la musique, du Mozart. Ironiquement, l’être démoniaque n’a pas choisi un morceau anodin du compositeur germanique. Non, il a opté pour Exsultate, jubilate…Un morceau composé par Mozart, alors âgé de 17 ans pour un prince-évêque. Un morceau qui parle des âmes bienheureuses…Une musique lente et grave, rendant hommage à la vierge. Ironique pour une créature sans âme et condamné par le seigneur à la damnation éternelle. Il s’approche ensuite du feu de la cheminée, l’observe et regagne tranquillement son fauteuil, il se love bien dedans. Maintenant qu’il est confortablement assis, le seigneur vampire Seffer Aelias peut accueillir son hôte imprévu.

- Je vous en prie, mademoiselle...Sortez de votre tanière, je ne pense guère que vous êtes une voleuses…Sinon, vous vous serez montrez bien plus discrète.

Un voleur n’aurait pas fait autant de bruit, c’était certain…mais dans tous les cas, le vampire l’aurait entendu et senti. Seffer jouait un peu sur l’amabilité. Comme tous les prédateurs, il aimait jouer avec ses proies.

- Et je suis certain que vous avez une explication valable pour justifier votre présence dans mon manoir. Montrez-vous et racontez-moi votre histoire.

Dit-il d’une voix calme et posé. Le vampire se leva, de nouveau, se dirigea vers une commode et en sortit une bouteille de vin et une carafe, ainsi que deux verres. Il déboucha la bouteille, un vieux vin rouge millésimé et en versa un peu dans les deux verres.

- Je ne vous ferai aucun mal…

Pour l’instant.

   Cet endroit était donc bel et bien habité. Cela signifiait que Frig s'était bien fourrée dans un sacré pétrin, comme d'habitude. Étrangement, en partie à cause de son habituelle malchance, elle n'était pas étonnée. Tout peut arriver. Absolument tout.

   Lorsqu'elle aperçu l'inconnu se lever sans lui accorder un regard, elle crut qu'elle allait défaillir. Tremblante, Adelheid se cacha un peu plus derrière ce bout de mur, son dernier rempart qui n'allait être d'aucune utilité. Elle espérait vraiment qu'il ne l'ait pas aperçu, peut-être que sa précédente phrase n'était qu'une phrase parmi tant d'autres... Hélas, la jeune femme dû renoncer à cette hypothèse lorsque le vampire baissa le volume de la chaine hi-fi. Si elle n'était pas là, jamais il n'aurait bougé, mais cela dit opter pour ce morceau de Mozart lui paraissait un peu étrange. Non, cela ne définissait pas la peur en elle, ni l'ambiance actuelle du lieu. Mais peut-être que cette douce voix de soprano qui commençait à s'élever dans la pièce représentait sa façon d'être en ce moment même ? Difficile à dire.

   Elle le regardait faire comme si de rien n'était. Justement, cela ni fit qu'empirer les choses pour elle. Pouvant presque sentir ses mains devenir moites dans ses gants de satin, ses doigts s'accrochèrent à ce bout de mur comme si un vent ravageur dévastait l'endroit et qu'elle ne souhaitait pas s'envoler, ce qui est tout à fait compréhensible. L'inconnu reprit sa place, dans son fauteuil. Oh non, il ne l'avait pas oublié, loin de là. Justement au moment où la scandinave fit un pas en arrière annonçant son départ, l'inconnu lui adressa ces quelques paroles sonnant son arrêt de mort. Impuissante face à ce contexte pour le moins insolite, Adelheid dût s'approcher. Ses pas étaient lents mais gracieux et chacune de ses avancées étaient ponctuées par le bruit du talon sur le plancher. Elle s'approchait, lentement, tout en gardant une certaine distance de sécurité. Frig venait de se dévoiler sous (presque) son plus beau jour (ou soir).

   Le vampire vint donc lui demander la raison de sa venue ici. N'ayant pas vraiment le choix, la norvégienne choisit de raconter la vérité, aussi stupide soit-elle. Ses lèvres aussi rouge que son habit s'animèrent en de douces paroles aux « r » roulés et aux consonance chantantes.

- Je... Je cherchais un raccourci pour rentrer chez moi, mais je me suis perdue... En tentant en vain de retrouver mon chemin, j'ai aperçu cet endroit... J'étais assez troublée. Il est plutôt curieux, et surtout paradoxal de trouver un tel lieu dans une telle ville. Je pensais que ce manoir était inhabité...

   L'excuse, bien que vraie, sonnait mal dans sa bouche. La peur en était la cause. L'homme se leva derechef, allant chercher de quoi « fêter » cette rencontre. Une bouteille de vin et deux verres. À moins qu'il soit schizophrène ou qu'il se soit trompé, c'était une invitation à rester. Afin de ne pas paraître impolie, Frig devait résilier toutes ses idées de fuite. Continuant de s'approcher avec méfiance, elle ne put retenir de plates excuses, bien que les dernières paroles du vampire lui glacèrent le sang.

- Je m'excuse de mon impolitesse. Je n'aurais pas dû venir... C'était tout à fait déplacé de ma part.

   Elle leva la tête en direction de l'inconnu, attendant une quelconque réponse, et surtout espérant quelques paroles rassurantes.

Une personne ordinaire aurait surement détalé, filé hâtivement vers la sortie du manoir. Néanmoins, cette personne là ne semblait pas totalement ordinaire ou pas totalement saine d’esprit. Ou tout simplement, était elle paralysée par la peur, un sentiment si apprécié par le vampire. D’ailleurs, ce dernier, appréciant jouer avec ses proies, ne s’était pas jeter dessus directement. Non, il préférait le faire avec élégance…approcher et connaitre sa future victime avant de frapper. En plus, le seigneur vampire Seffer Aelias était dans une situation un peu particulière ce soir…Il cherchait un « calice », c'est-à-dire une bien jolie innocente qui pourrait lui fournir un peu de sang et plus…de façon permanente et régulière.

Cependant, le duc ne s’attendait pas à être surpris. En effet, une bien mignonne brebis émergea de sa cachette. La proie se dévoila sous un plus beau jour…L’intrus était une jeune nymphe à la pâleur nordique, copie conforme d’une divinité scandinave comme Freyja. Une taille de guêpe, une peau d’albâtre, des lèvres pulpeuses rouge sang. Elle portait un fin bustier rouge et des gants rouges…Une tenue d’une époque révolue. Décidément, une divinité bien malveillante avait dut se pencher au dessus de la tête de Seffer, on venait d’exaucer un de ses vœux, on venait de lui fournir une proie de qualité, voir même une épouse (pas consentante bien sur…).

Elle murmura quelques excuses…Sa voix, une voix chantante…Non, elle ne pouvait pas être japonaise. Etant immortel, Seffer avait pas mal roulé sa bosse et il avait écumé les quatre mers. Non, cette douce bergère devait plutôt venir d’un pays nordique…même si l’être nocturne ne savait pas si elle venait de Norvège ou de Suède. En tout cas, cela lui changeait des vulgaires proies habituelles aux yeux bridés. Il leva délicatement la main gauche pour interrompre la jeune femme.

- Déplacé…certes. La curiosité est un bien vilain défaut et je me doute que vos parents, vous ont surement appris cet enseignement. Mais bon, comment ne pas être attiré par une telle demeure…vous n’êtes pas la première et ne serez pas la dernière.

Dit-il d’une voix calme, sereine et posé. Une voix étrange qui paraissait grave, froide et tout droit sorti d’un caveau.

- Excuse acceptée. Nous sommes des êtres civilisés après tout, pas des animaux (Seffer afficha un sourire narquois)…Nous pouvons discuter. Et vous devez surement avoir le gosier en feu…

Le noble vampire marqua une pause et indiqua rapidement les deux verres de vin avec sa main gauche. Les flutes étaient en cristal et contenait un délicieux nectar, un vin rouge millésimé et ancien, ramené de France à l'époque de la Restauration par le vampire.

- Je vous pries d'accepter un verre. Il n'est pas question qu'un aristocrate de mon rang se comporte mal en présence d'une si charmante jeune femme...La galanterie est un art. Vous verres, vous m'en direz des nouvelles.

( HJ : Désolé pour le retard.)

- Aucun soucis -

   Aux premières paroles, la jeune femme se sentait mal. Elle s'attendait dessuite à des reproches, choses qu'elle déteste au plus haut point. D'ailleurs elle aurait bien voulu répondre à cet inconnu que justement non, ses parents ne lui ont jamais appris que la curiosité est un vilain défaut. À vrai dire, ils ne lui ont rien appris du tout de la vie. Adelheid s'est toujours débrouillée seule et cela ne l'a pas toujours réussi. La preuve en cet instant même, elle ne savait pas encore qu'elle était tombée dans un sombre piège. Cependant les dernières paroles qu'il prononça la rassura brièvement puis elle y réfléchit quelques instants... Elle n'était pas la première à être venue ici... Et elle ne serait pas la dernière ? Quelque chose sonnait mal. C'était un peu trop inquiétant... Sans parler du ton qu'employait l'inconnu.

   Frig déglutit avec difficulté. La bouche sèche, il était impensable qu'elle puisse réussir à prononcer un mot dans cet état. Finalement, l'homme ressemblant fort à un aristocrate, ou même à un noble accepta ses excuses. Ce fut un poids de moins sur sa conscience beaucoup trop torturée. Par simple mesure de politesse, la norvégienne répondit faiblement au sourire du vampire en étirant ses lèvres dans un autre mince sourire. Bien sûr elle ne savait pas si cette réaction de la part de son hôte était ironique ou non, elle était beaucoup trop insouciante pour ça. Et maintenant, le vampire l'invita à partager un verre en sa compagnie. À ce stade des évènements, la scandiblonde ne pouvait rien refuser ! Sous ce simple et délicat compliment de sa part, elle ne put empêcher ses joues de rosir très légèrement.

- Mmh... Eh bien... Je vous en remercie.

   Déclara-t-elle calmement.

   Ainsi donc elle saisit l'un des verres, verres qui paraissaient d'une grande fragilité. Ne sachant trop où se mettre, Adelheid se contenta de s'assoir sur l'un des canapés d'un style s'accordant fort bien avec la décoration intérieure. Droite comme un i à cause du bustier, elle posa sa main gauche ses genoux tandis que son autre main portait le verre en dessous de ses narines pour qu'elle puisse flairer le bouquet du vin. Le fumet avait une odeur fascinante, contrairement aux vins que la norvégienne avait déjà goûté, par-ci par-là. Elle n'était pas une professionnelle en la matière mais elle était à même de reconnaître la bonne valeur de cette boisson. Un véritable alcoolique aurait bu sans réfléchir et sans même profiter de cet arôme. Non au contraire, même si son penchant pour l'alcool était assez fort, elle savait choisir ses bouteilles, malgré son bien jeune âge. La robe quant à elle était brillante, d'une magnifique couleur pourpre. Une si jolie couleur, mais ne battant pas le rouge que la scandinave affectionnait tant. Maintenant elle porta le verre à ses lèvres pour en goûter une petite gorgée. Ce vin était définitivement charmeur, c'était le cas de le dire. Même divin.

- Je ne peux que vous féliciter pour le choix de cette bouteille.

   Annonça-t-elle, son sourire s'étirant. Malgré ce qu'elle laissait paraître, Frig était encore effrayée par la situation. Elle se dit que si elle agissait docilement, rien de mal ne pourrait lui arriver. Puis peut-être qu'elle s'inquiétait pour rien, aussi. À eux deux ils avaient presque l'air de riches nobles reposant dans l'une de leur résidence secondaire. C'était l'ironie du sort.

Cette norvégienne avait tout de la petite brebis égarée et innocente…Et un air de ressemblance avec le personnage tout aussi innocent d’un conte de Charles Perrault. Une silhouette fine, gracieuse, élégante, des lèvres pulpeuses rouges, un bustier couleur pourpre…Il ne me manquait plus que le pot de beurre pour la mère grand et le chaperon rouge sur la tête. Cependant, comme une brebis égarée et le personnage du Chaperon rouge de Perrault, la jeune femme s’était jetée droit dans un piège, directement dans la gueule du loup. Le grand méchant loup étant, pour le moment, un seigneur vampire machiavélique et assez pervers, il faut l’avouer…Et bien entendu, il ne désirait pas simplement avoir sa gorgée de sang, nan, il désirait un peu plus…le saligaud !

D’ailleurs, bien que lové dans un confortable fauteuil, son regard ne cessait de relooker le corps avantageux de cette jeune et nouvelle proie, d’analyser l’intruse et de s’arrêter sur toutes les parties de son corps. Néanmoins, l’attitude de la jeune femme montrait clairement qu’elle n’était pas totalement dupe…Assez naïve certes pour se jeter dans un piège, pour entrer par effraction dans une maison, trouver le propriétaire et croire ne pas avoir une correction…Mais assez intelligente pour remarquer que la situation était, quand même un peu louche. Bon en même temps, un vieux salon raffiné et luxueux dans une maison en ruine, une demeure victorienne dans une banlieue traditionnelle japonaise…La situation était plus que louche. En effet, la jeune femme semblait un peu hésitante, la bouche pâteuse, sur le quai vive, surveillant un peu et surement prête à fuir à la moindre entourloupe. Cependant, Seffer Aelias aimait ce petit jeu de chasse et il allait tout faire pour endormir les soupçons de sa proie…avant de passer à l’attaque.

Maintenant, elle était assise dans un fauteuil et tenait un verre de vin dans une main. Il fallait avouer que cette dame avait de la prestance et une certaine manière de se tenir et de se comporter. Connaisseuse en vin peut être ? En effet, elle avait délicatement senti le fumet du vin. Non, elle ne s’était pas contenté de le vider d’un coup comme une alcoolique notoire…Non, elle prenait le temps de déguster le nectar. Seffer apporta délicatement le verre près de ses lèvres, en respira les odeurs puis tout aussi délicatement, il trempa ses lèvres dans le vin et en but une gorgée…Cependant, tout ceci n’était bien sur qu’une mascarade. Le vampire était un être mort, il ne ressentait aucun sens, ni l’odeur ni le gout. Il n’éprouvait pas le plaisir du palet et ne distinguait pas les magnifiques nuances et subtilités de ce vin millésimé. Un vin venu d’une époque révolue…

- Je ne peux que vous féliciter pour le choix de cette bouteille.

Le vampire sourit, posa délicatement le verre sur une table d’appoint et répondit.

- Merci, il est vrai que ce vin est une vrai merveille…Ma famille dispose d’une bonne cave et d’une bonne connaissance des producteurs européens…Vous devez bien sur savoir que les vins de ce pays…ne sont pas…comment dire…buvables…

Il marqua une pause.

- Les vins nippons…Des piquettes. Conclut-il tranquillement.

Seffer Aelias se leva.

- Je parle vin, nectar et autres piquettes. Mais j'en oublie les bonnes manières...Je ne me suis pas présenté. Duc Seffer Aelias, troisième du nom, votre humble serviteur, demoiselle.

Il tendit une de ses mains à la peau fine, aussi pâle que l'albâtre et glacée, vers la jeune femme.

   Au moins, ils étaient deux à s'intéresser à ce qu'il y a de beau et raffiné dans ce bas monde. Hélas, les fautes de goûts sont trop souvent au menu du jour à notre époque ! Heureusement qu'il reste quelques personnes sur cette terre pour montrer le bon exemple. Sinon, que deviendrons-nous ! Les yeux de la scandinave guettait le moindre signe indiquant un danger. Tout cela était trop... bien ? Trouver une aussi belle bâtisse, ne pas se faire chasser à coups de pieds dans le derrière, se voir même offrir un verre... Oui, c'était plaisant. Même trop, c'est ça qui laissait toujours planer le doute... Discrètement Adelheid observait son hôte imiter son geste et goûter à son tour ce liquide pourpre avant de poser son verre sur la table près d'eux. Le sourire du vampire laissa perplexe la jeune femme. Était-ce rassurant ? Était-ce effrayant ? Entre les deux, dirons-nous. En tout cas il restait toujours une aura de mystère qui pesait inconditionnellement dans cette pièce, refermant le piège sur la jeune nordique aux mœurs bien trop naïfs.

   À priori, cet homme venait d'une famille aisée. Non, c'était même évident. Ses manières, ses gestes, ses paroles tous mûrement choisis en fonction de la situation... Son éducation semblait remonter à plus d'un siècle, facilement. On pouvait dire la même chose de Frig, bien que sa docilité et sa patience lui enseignèrent bien des valeurs comme la courtoisie et la politesse assez rapidement. Son éducation, en public, était quasiment irréprochable, malgré son manque de retenue, qui, comme dans des situations similaires à celle qu'elle vit présentement, pourrait lui attirer bien des ennuies.

   Lichant une seconde fois son verre, la jeune norvégienne fit de même et posa son verre sur cette petite table avant de se tourner vers l'inconnu à peine rencontré. Ainsi donc ils en vinrent aux présentations et ce fut avec surprise que Frig apprit que son hôte était de lignée noble. Non pas que ça l'étonnait, c'était surtout l'importance du rang. Les ducs sont les nobles juste en-dessous de la lignée royale dans la hiérarchie, ça a quand même de quoi imposer le respect. Adelheid écarquilla des yeux. Comment une personne aussi haut placée pouvait la recueillir de la sorte, sans même prendre la peine de la chasser des lieux ? La scandinave posa sa main sur celle du Duc avec une délicatesse exemplaire.

- Enchantée, mon Duc.

   Dit-elle avec calme et bienséance. Sa voix se faisait douce, comme son regard, le tout avec naturel. Si ses bras étaient découverts sur le moment, les deux personnages pouvaient facilement faire un concours de celui ou celle qui a la peau la plus pâle. Seffer étant un mort, il avait un avantage considérable bien que Frig puisse rivaliser dans cette matière. Même si ses gants noirs de satin couvraient ses mains, elle pouvait sentir un certain froid se dégageant de la peau du noble. Étrangement la jeune femme n'y prêta pas grande attention, et ce fut maintenant à son tour de se présenter.

- Je me nomme Adelheid Wilhelmina Friedrich.

   Malgré ses coutumes et sa gestuelle, elle n'avait pas vraiment de rang de noblesse attitré bien qu'en ce moment même elle aurait voulut avoir un quelconque rang afin de moins paraître tâche devant une personne aussi haute placée qu'est le Duc Seffer Aelias.

         La peau neigeuse de la jeune femme, sa voix aux accents si particulier, sa blondeur digne d’une déesse du panthéon nordique, sa tenue extravagante….et maintenant, son nom… Adelheid Wilhelmina Friedrich…Les doutes de Seffer Aelias étaient avérées, cette innocente était bien loin d’être japonaise, elle était même bien loin de son pays natal. L’aristocrate se doutait qu’elle devait être soit norvégienne soit suédoise. Néanmoins, malgré sa qualité d’immortel et son coté voyageur, écumeur des sept mers, il hésitait encore un peu…Norvégienne ou suédoise ? On peut être un suceur de sang certes mais aussi être curieux…non ? Les présentations faites, le vampire se dirigea vers une petite table d’appoint et repris son verre de vin, il dégusta une petite gorgée de ce nectar millésimé. Même si il ne pouvait pas en ressentir le gout, cette boisson n’était qu’un passe-temps noble, une manière d’occuper le temps avant de se remplir le gosier d’un nectar tout aussi rouge mais bien plus consistant…Le sang de son invité.

- Norvégienne ? Se risqua-t-il.

Par curiosité, il se renseignait sur cette jeune femme, se renseignant aussi sur sa proie. L’immortel était plutôt du genre à aimer connaitre les caractéristiques de sa nourriture : origine, tendresse de la viande, peau, formes, sang, etc. C’est un peu comme les humains…Dans une boucherie, le client peut demander les origines de sa viande. Dans les cantines des écoles, l’origine de la viande est inscrite. Tous le monde aiment bien savoir ce qu’il a dans son assiette….C’est une réaction normal, non ? Les yeux du vampire se pose sur le physique avantageux de sa partenaire, les formes sont agréables, la peau est douce….Le fait que cette Adelheid ne soit pas japonaise est un avantage…Seffer a une envie d’exotisme. Plantant régulièrement ses crocs dans des gorges nippones, il a une petite envie de changement. Et il faut avouer que le suceur de sang conserve encore quelques restes de son ancienne et révolue humanité, notamment le plaisir de la chair, le plaisir aussi de regarder une jolie femme…et il est certain qu’il a bien envie de profiter un peu de cette charmante étrangère.

- Disons qu’un tel nom n’est pas courant dans cette péninsule….C’est plutôt du genre Okinawa, Aika, etc. Donc une nordique dans un tel pays, c’est comme cette demeure dans une banlieue traditionnelle japonaise…Ca attise la curiosité.

Et cela excite aussi…Le seigneur vampire but une autre gorgée de vin. Hésitant un peu sur son comportement, il décida de prolonger le jeu. Histoire que la chasse soit plus amusante. De plus, un aristocrate ne pouvait pas se jeter vulgairement sur sa proie. Le vampire opta pour une approche subtile… Adelheid Wilhelmina Friedrich était assis sur un large canapé. Seffer Aelias décida alors de s’asseoir sur le même canapé, juste à coté de la jeune femme. Une chose qu’il fit sans aucune gêne….Décidément, ce Seffer était un drôle de phénomène.

- Notamment la mienne...

Il marqua une pause.

- En plus, pour une fois que je rencontre une personne venant d’aussi loin que moi, cela me plait. J’ai grandit à Londres et vécut ensuite, une grande partie de ma vie à Paris….avant d’immigrer dans cette nation de mangeur de sushi…

Il but une autre gorgée de vin.

- Et entre étranger, il faut se soutenir….Trinquons.

Il dirigea son verre vers la nordique.

- A votre curiosité déplacée….

Dit il avec ironie.

   Pour une fois, la jeune femme fut épatée par le sens de déduction de son interlocuteur. Rare était ceux qui réussissaient à deviner ses origines, se trompant souvent d'un millier de kilomètres vers le sud, en pleine terre allemande. D'ailleurs, cela la vexait énormément, sûrement cela était dû à son sens du patriotisme assez important, comme chez la plupart des scandinaves, les quatre nationalités confondues.

- Exactement.

   Dit-elle avec l'un de ses plus beaux sourires, celui qui vous dévoile une enfant naïve et sotte et pourtant si distinguée. En matière de distinction et d'étrangeté, les deux personnages pouvaient encore faire un concours.

   Maintenant, Adelheid oubliait qu'elle doutait, il y a quelques instants. Elle ne se souciait pas de ce qui pourrait lui arriver, oh non pas du tout. Pour le moment elle était trop occupée à faire la conversation avec un noble qu'elle venait juste de rencontrer dans le plus grand des hasards. C'est fort distrayant, croyez-moi ! Oui, juste assez pour négliger le fait que l'on se trouve en territoire inconnu... En tout cas, c'était sûr qu'il est rare de rencontrer des étrangers venant d'Europe du Nord dans une simple ville nippone, comme il est rare pour les chercheurs d'or de trouver de vraies pépites dans les cours d'eau. Néanmoins, s'ils cherchent toujours, c'est qu'ils ont déjà trouvé de quoi en valant la peine dans leur vie. Une raison pour continuer à chercher, bien que ça n'est pas le premier conseil que l'on donnerait à un vampire...

   Le Duc vint s'assoir près de la jeune femme, sur le même canapé. Frig déglutit avec difficulté. La distance, sans doute, avait de quoi la gêner un peu. Mais au moins elle pouvait mieux voir son interlocuteur tout aussi étranger qu'elle sur cette grande île nommée Japon. Pourtant, dans ce cadre victorien, ils n'avaient rien d'exotique, au contraire ! On aurait dit que l'endroit a été bâti pour eux spécialement pour cette rencontre. Plutôt étrange, il faut l'admettre. Adelheid observait l'aristocrate de son regard d'obsidienne. Il avait l'air jeune pour être aussi haut placé, faut dire. Néanmoins elle ne pouvait nier qu'il dégageait une certaine prestance, et même une certaine beauté sous ses traits dénués de toute chaleur. Sans parler de sa silhouette imposante... Elle n'avait pas trop intérêt à se montrer impertinente, à moins de vouloir terminer en... Non, un homme de ce rang là sait toujours garder les bonnes manières peu importe la situation. Enfin, normalement.

   Délicatement la norvégienne chercha son verre de la main et but une autre gorgée de ce liquide luxueux, sans quitter le regard de Seffer Aelias. Décidément, ça n'était pas tous les jours que l'on rencontrait un noble de la sorte ! Les deux jeunes gens levèrent leur verre et trinquèrent amicalement avant de reprendre une énième lichée de leur verre.

- Oui, il faut se soutenir...

   Acquiesça Frig avec ce même sourire innocent. Cependant une question lui brûlait les lèvres depuis quelques minutes maintenant. Cela semblait totalement déplacé de demander ce genre de choses, hélas, elle ne put retenir ces quelques paroles :

- Dites-moi, que fait donc une personne de votre statut en ces lieux ? Cela m'intrigue énormément. Il y a tellement d'endroit sur Terre, pourquoi celui-ci ?

   Ceci dit elle posa derechef son verre, plaçant ses mains actuellement libres sur ses genoux, toujours tournée vers Seffer.

Norvégienne…Le vampire était donc dans le juste ! Pour une fois qu’il ne se trompait pas. Mais au fin de compte, une fois sa curiosité satisfaite, cette information, ce petit détail, n’avait plus forcément d’importance pour l’aristocrate vampire. Ce dernier trempa, une nouvelle fois, ses lèvres dans le verre de vin, histoire de tromper une autre soif…une soif de sang. Adleheid avait eut un de ses sourires…un sourire niais mais au combien charmant pour n’importe quel être vivant. Il était certain que le jeu de séduction, d’approche, du suceur de sang marchait parfaitement. Il semblait comme avoir réussi à endormir les soupçons de sa proie…pour un moment. Elle finirait bien par se douter de quelque chose et surtout, elle finirait bien par poser des questions gênantes. Et d’ailleurs, ces dernières tombèrent sur le tapis assez rapidement.

Jouer avec sa proie était un délice, un plaisir auquel se prêtaient, dans la nature, tous les prédateurs. Les félins et surtout le chat étaient les plus sadiques…Ils prenaient un certain temps pour chasser une souris et jouer avec elle avant de la tuer…parfois, ils jouaient même avec le cadavre et ne le mangeaient que quelques temps après. Le vampire se livrait à un jeu similaire…Il apprenait à connaitre sa proie, à se faire apprécier, à se faire aimer…alors qu’ironiquement, il ne désirait que mettre fin à la vie de sa victime. Connaitre sa vie…puis mettre fin à cette même vie. Ironique, non ? L’esprit de Seffer Aelias partait un peu dans des divagations…Il ne fallait pas qu’il s’éloigne trop de son sujet principal…Adelheid Wilhelmina Friedrich. Les yeux du suceur de sang ne quittèrent pas un instant sa proie. Le manque de sang se faisait sentir dans le corps du démon nocturne. Et en plus, cette proie était bien trop ravissante pour qu’il détourne le regard. Il ne désirait pas qu’elle détale…Il était prêt à bondir à tout instant. Au moment où Seffer désirait entamer son approche, la question gênante arriva dans la conversation…Comme un cheveu sur la soupe. Ah ! Les étrangères, elles avaient quand même plus de mordant que les japonaises, plus résistantes, cherchant les failles de leurs interlocuteurs. Un esprit, une ruse…un avantage de plus.

- Dites-moi, que fait donc une personne de votre statut en ces lieux ? Cela m'intrigue énormément. Il y a tellement d'endroit sur Terre, pourquoi celui-ci ?

Question pertinente ! Comment répondre…sans se trahir. La vérité était déconcertante…Pourquoi ce lieu ? Pourquoi cette ville japonaise et non des villes plus raffinés comme Paris, Londres, Berlin, etc. Simplement car les métropoles japonaises sont si peuplées…une densité de population forte. Le vampire n’avait qu’a se pencher pour ramasser des proies fraiches en quantité. Mais aussi car le clan du vampire résidait dans cette ville et encore le portail magique…Oui, le portail magique permettant au seigneur vampire du clan Aelias de passer de dimension magique en dimension magique…de la Terre à Terra. Bien entendu, Seffer n’allait pas fournir une telle réponse. Et comme un habile menteur, il proposa cette réponse :

- Il est certain que j’aurais aimé rester dans ma ville natale, Londres…Rester auprès des miens ou encore dans ma demeure secondaire en France…Un petit mais au combien splendide château dans la région de la Loire…Avec un certain cachet et mes vignes…

Il marqua une pause.

- Néanmoins, certains membres de ma haute dynastie ont eut l’idée folle de venir dans ce pays…Hélas, vous voyer comment le pays est bien différents de nos nations du vieux continent…Les pauvres se sont rapidement trouvés égarés. Je suis donc venu les chercher, les ramener à la mère patrie et les ramener sur le bon chemin….

Un peu la vérité en quelque sorte…A l’origine, le vampire appartenait à un clan de vampire européen, britannique pour être plus précis. Quelques un des siens étaient venu se perdre dans cette péninsule ; il était venu,  sur ordre de son maitre, au Japon pour les punir et les faire revenir…mais au fin de compte, il était resté et avait pris la tête d’un clan vampire.

- Et au final, je ne peux vous expliquer pourquoi…Je suis resté. L’exotisme surement….Il indiqua rapidement le salon d’un geste de la main…Cependant, on oublie jamais son pays, sa nation et sa culture totalement…Donc, je me suis fait bâtir cette demeure d’inspiration victorienne….histoire de me rappeler le vieux manoir familial dans le Kent, en Angleterre.

Il but une autre gorgée de vin puis posa son verre sur une table.

- Et vous, mademoiselle ? Pourquoi avoir quitté votre pays si lointain et être venus ici ? Bien entendu, je comprendrais que vous ne daignez me répondre…Cette question est fort indiscrète.

Pendant ce temps et sans aucune discrétion, Seffer Aelias se rapprocha délicatement de la jeune femme, encore un peu plus près…encore un peu plus près, encore un petit espace et il serait tout, tout près d’elle…Avec une main libre, il effleura rapidement les jambes de la norvégienne…puis remit sa main en place, sur ses genoux…Un peu comme si il n’avait pas fait exprès. Une manœuvre qui avait juste le but de montrer à l’innocente qu’il n’était pas loin…

   Comme elle savait bien que c'était déplacé, malheureusement sa curiosité, encore une fois, poussa Adelheid a demandé ce qui ne lui regardait pas. Pourtant Seffer Aelias ne daigna lui répondre, au contraire, il lui fournit une réponse des plus possibles. La jeune femme buvait ses paroles comme le plus délicieux des vins, comme le vin qu'il lui avait présenté ce soir. Après tout, même si elle ne le connaissait pas, elle n'avait aucune raison de ne pas le croire. La curiosité est un vilain défaut, comme l'est la naïveté, que l'on oublie souvent de mentionner. De plus, ces deux traits de caractère ne font pas bon ménage chez les jeunes filles comme Frig. La preuve en cet instant même.

   Encore un étranger qui voulait rester dans son pays natal. Eh bien, ces deux jeunes gens avaient beaucoup de points communs ! Adelheid pensait comprendre ce qu'il ressentait à l'idée qu'il se trouve loin de chez lui, tout en restant impressionnée par le distinction de ses propos. Oui, elle avait vraiment affaire avec un homme issue d'une longue lignée remontant aux débuts de la noblesse. Cela attisa la curiosité de la jeune femme envers son interlocuteur. Elle n'était pas intéressée par l'argent, elle en avait déjà assez. C'était juste le fait de parler à une personne aux manières distinguée, présentant cette élégance raffinée et naturelle dans ses moindres gestes. Quelle aubaine ! À la première pause que le vampire marqua, Frig hocha affirmativement la tête sans le quitter du regard. Trop attentive à ses paroles elle ne faisait pas encore attention à la distance qui les séparait encore, distance qui se trouvait réduite petit à petit. Mais elle ne comprenait toujours pas ce  que ses membres de sa famille venait faire ici. Cette question, elle se la garde, elle avait déjà été beaucoup trop indiscrète pour ce soir. La scandinave écoutait toujours le Duc, toujours aussi innocemment. L'innocence... Comme c'est beau.

   Ainsi donc Seffer vint demander à son invitée comment elle s'était retrouvée sur cette île surpeuplée. Là, Adelheid n'allait pas se défiler sur cette question, puisqu'elle venait de la poser il y a quelques instants. Cependant elle baissa son regard furtivement, là où son hôte l'avait touché. Ce fut à ce moment qu'elle se rendit vraiment compte de la proximité entre eux-deux. Le rouge lui monta aux joues. Ah, fichue réaction spontanée... La voilà encore plus gênée !

- Oh non, je viens juste de vous poser la même question, il serait donc juste que j'y réponde à mon tour !

   Affirma-t-elle la voix légèrement tremblante.

- Mes parents sont des médecins en quête de nouveau et de voyage. Bien que je ne les vois jamais, j'ai été obligée de les suivre jusqu'ici... Cela ne m'a pas vraiment enchanté, je dois dire... Voilà, c'est aussi simple que ça.

   La jeune femme dévia le regard afin de ne plus remarquer son interlocuteur ni la faible distance qui les séparait à présent, malgré le faible sourire qui animait son visage de porcelaine en cet instant. Selon ses dires, on pouvait supposer qu'elle était encore jeune, cela se voyait à son visage, certes, mais son corps répondaient plus aux normes européennes que japonaises, donc il se voyait plus développé que celui des adolescentes locales. Toutefois, Adelheid se sentait stupide par ce qu'elle venait d'avancer. Au contraire, son histoire n'avait rien d'aussi originale que celle du Duc Seffer Aelias, et elle n'était pas issue des origines les plus nobles.

    L’innocence est un sentiment si propre à l’espèce humaine, un sentiment qui va souvent de pair avec l’espoir et la croyance d’un monde meilleur. La jeunesse de cette norvégienne ne fait qu’accroitre cette innocence chez elle…Et pourtant, ce sentiment est misérable, pitoyable. Un vampire est un être terre à terre, qui doit se nourrir pour survivre, il ne fait aucune pitié et si il cherche à connaitre sa proie…C’est seulement pour être sur de réussir sa chasse. D’ailleurs, le petit jeu d’approche de Seffer Aelias est une réussite. Tranquillement, l’aristocrate se rapproche d’Adelheid, ne laissant qu’un étroit espace entre leurs deux corps…et surtout entre la gorge alléchante de cette étrangère et les crocs du noble suceur de sang. Le prédateur prend tout son temps, ne gâchant pas les choses, profitant de chaque secondes écoulées et de chaque absence de réaction de la jeune femme pour oser encore un peu plus…D’ailleurs, cette dernière commet l’imprudence extrême de laisser Aelias s’approcher d’elle. Elle boit littéralement ses paroles, elle le laisse approcher et semble même l’admirer…Elle semble sous l’influence du seigneur mort vivant…ce qui est une très mauvaise idée…Cela n’annonce qu’une chose : la mort ou l’heure du repas.

Pire, quand la main de Seffer Aelias effleura les douces jambes d’Adelheid Wilhelma Friedrich, celle-ci détourna le regard tout en rougissant légèrement, une mauvaise idée qui aurait put lui couter incroyablement chère. En effet, le prédateur aurait put profiter de cet instant pour se jeter sur la pauvre femme, planter ses crocs dans la gorge de la jeune femme, abuser d’elle, prendre son innocence et la laisser pour morte dans ce magnifique salon victorien, dans ce canapé moelleux d’une époque ancienne et révolue. Seffer aurait put…mais il s’abstint d’un tel acte. Un acte indigne d’un noble mais surtout, il n’avait pas encore si soif que cela. Le suceur de sang pouvait attendre encore quelques instants avant de se nourrir… Profitant du fait que la jeune femme avait le visage ailleurs, le vampire s’approcha encore une fois un peu plus de sa partenaire. Puis, il se lova encore plus dans le canapé et écouta le discours d’Adelheid.

- Mes parents sont des médecins en quête de nouveau et de voyage. Bien que je ne les vois jamais, j'ai été obligée de les suivre jusqu'ici... Cela ne m'a pas vraiment enchanté, je dois dire... Voilà, c'est aussi simple que ça.

Bien que n’étant pas issus d’une haute lignée et ayant une histoire bien différente de l’aristocrate, les deux personnes partageaient de nombreux points communs….Tous les deux n’avaient pas voulus venir dans ce pays, tous les deux s’étaient installés dans cette péninsule suite à des obligations familiales…Ah ! La famille ! On choisit ses amis mais pas ses parents ! Parent….En pensant aux parents de la jeune femme, ce père qui était médecin, Seffer se dit alors que cette proie devait quand même être assez jeune. Malgré son physique, elle semblait être une jeune femme aux portes de la majorité…Hmm…Le vampire se disait qu’elle devait avoir dans les dix-sept dix-huit ans…

- Rien n’est véritablement simple, mademoiselle…La famille est quelque chose de sacrée, une chose qui nous pousses à faire des choses…parfois contraires à notre volonté.

Il se leva, prit la bouteille et resservit un verre à la norvégienne.

- Buvez, cela vous fera du bien…Un bon vin millésimé ne peut faire de mal, il ne peut que réchauffer l’âme…tant qu’on le boit avec modération.

Il se rassit alors et s’approcha encore plus près de la jeune femme, une de ses mains vint se poser alors sur une jambe de la norvégienne.

- Mais dites-moi…si cela n’est pas indiscret…Vous ne vous plaisez pas du tout dans ce pays ? Après le déplaisir du départ…vous avez surement dut trouver des petites choses plaisants dans la brave nation des samouraïs ?

Il regarda rapidement une horloge mural, la nuit avançait quand même vite...La main du duc ne s’arrêta pas là et commença alors à remonter doucement le long des cuisses de l’étrangère.

- Une si charmante jeune femme comme vous…Vous devez avoir un, comment dire, compagnon ? Ou pour faire plus jeune, branché…Un petit ami….

Le vampire n’était plus qu’a quelques mètres d’Adelheid.

- Je suis désolé….ma question doit être trop indiscrète…

   Chaque parole du Duc semblait mûrement réfléchie, peinte de cette sagesse que l'on acquiert au fils des décennies. Malgré son apparence, il était manifestement plus vieux qu'il ne le paraissait, ou alors son éducation a été des plus complète et formelle qu'il soit. Adelheid penchait pour les deux solutions, ce qui était tout aussi possible. Néanmoins demander son âge à un inconnu est tout à fait déplacé et malpoli, c'est pourquoi elle fit une croix sur cette alternative. N'ayant aucune réflexion décente à faire sur le moment, la jeune femme décida de laisser Seffer choisir vers où mènerait leur conversation.

   Frig, toujours quasiment immobile, observa le vampire remplir à nouveau son verre. Elle aurait pu en profiter pour s'enfuir et mettre un terme à cette étrange mascarade qui s'installait petit à petit. Sauf que, trop aveugle, elle ne remarquait rien. Absolument rien. Bien sûr qu'elle verrait bien que quelque chose cloche au fur et à mesure que la soirée avance. Sauf que là, il sera trop tard. Ou juste. La scandinave reprit une gorgée de son verre, avec une petite pensée mélancolique. Qu'est-ce qu'elle voulait rentrer chez elle, revoir son mauvais temps quotidien, ce froid, ces forêts... Pour l'instant c'était tout bonnement impossible. Son regard se fit vide quelques instants, les pensées un peu au large. Brusquement l'esprit de la norvégienne refit surface, alors que son hôte venait juste de poser sa main sur sa cuisse. Ses yeux s'écarquillèrent. Était-ce un signe de compassion, ou beaucoup plus ? Pour le moment elle n'osa pas reculer dessuite, au cas où cela n'était qu'un signe de compassion, juste de la gentillesse pure. Cette pensée fit découler de nombreux films dans la tête de la jeune femme qui commença à s'imaginer les pires scénarios. Meurtre, viol, kidnapping... Non, ça n'existe que dans les films, bon sang ! Enfin... Oui... Quoique... Peut-être que finalement...

   Pour le moment le Duc paraissait trop attentionné pour lui vouloir du mal, alors qu'elle lui répondait avec doute :

- P-pas vraiment...

   Son regard d'encre se baissa à nouveau sur la main de son hôte, celle-ci remontant significativement le long de sa jambe. Comme c'était embarrassant pour elle... Adelheid rougit de plus belle, sans parler de ce poids dans son ventre, signe sempiternel d'un grand stress. La question qu'on venait juste de lui poser était des plus significatives ! Hélas pour elle, elle avait toujours la fâcheuse habitude de sous-estimer le poids des choses.

- Oh n-non non... Ne vous excusez- pas !

   Déclara-t-elle non sans dissimuler son embarras. La jeune femme regretta bien vite ses paroles néanmoins. Maintenant, elle était contrainte de lui répondre.

- Hum... N-non je n'ai p-pas de compagnon...

   Encore une fois elle regretta ses dires, pensant qu'elle aurait mieux fait de dire l'inverse. Sauf que ses paroles sortirent trop vite. La scandinave pinça les lèvres. Non, là la situation devenait des plus dérangeantes. Elle posa son verre la table avant de jeter un coup d'œil à l'horloge qu'elle venait tout juste de remarquer. D'ailleurs, il était tard. Un peu trop. C'était l'heure de se congédier. Frig se leva du canapé, se débarrassant ainsi du contact de Seffer. Élégamment elle lui fit sa plus belle révérence avant de lui adresser ces dernières paroles, les joues toujours empourprées :

- Je m'excuse d'avoir abusé de votre gentillesse, mais je vous remercie pour votre accueil. Il est tard, je dois rentrer. Passez une bonne soirée.

   Sur ce, elle tourna les talons et se dirigea vers la sortie de la pièce avec une lenteur mêlant le gêne et l'appréhension de la réaction du Duc.

     Mince….La douce attention du vampire ou plutôt sa petite tentative gentillette d’approche ne fonctionnait pas si bien que cela finalement. En effet, l’immortel aurait bien aimé vouloir jusqu’ou il aurait put monter sa main sur les jambes de la norvégienne, il aurait apprécié de la remonter délicatement entre les deux jambes de cette dernière…et voir ensuite son innocence partir…Seffer Aelias était certes  un aristocrate, bien éduquée  et buveur de sang, mais il était indéniable qu’il possédait un esprit dès plus pervers et sadique. Or, le prédateur voyait clairement que la jeune femme n’était plus si à l’aise que cela.  Bon, Adelhedi allait surement, maintenant, tenter de fuir et quitter cet endroit, ce manoir victorien en ruine, son salon coquet, elle allait surement tenter de sortir de ce  traquenard. D’ailleurs, les paroles hésitantes de cette étrangères étaient dès plus révélatrices…il y a encore quelques secondes, elle admirait son hôte et buvait ses paroles. Maintenant, elle ne désirait plus que détaler à toute vitesse avant que le piège se referme sur elle !

- Hum... N-non je n'ai p-pas de compagnon...

Pas de compagnon…Cela surprenait un peu le suceur de sang. Comment une jeune femme si ravissante et naïve faisait pour ne pas avoir de compagnon. Mais bon, ce soir, le seigneur des morts vivants se chargerait d’être son compagnon…pour la nuit…Il lui ferait le plaisir de jouer le rôle du mari…un mari un peu violent surement…avant qu’il endosse le rôle de boucher.  Comme prévu, Adelheid Wilhelma Friedrich trouva une manière de se défiler et de quitter cet endroit. L’heure…En consultant sa montre gousset, le duc ne put que constater l’heure tardive. Il ne pouvait pas attendre plus…Il ne pouvait ni se permettre d’attendre que l’astre solaire se lève, ni se permettre de laisser s’enfuir sa proie…Une proie si alléchante. En plus, elle n’était pas japonaise…Le vampire ne croiserait pas demain une proie si exotique. En plus, cela lui changerait tellement des japonaises.

- Je m'excuse d'avoir abusé de votre gentillesse, mais je vous remercie pour votre accueil. Il est tard, je dois rentrer. Passez une bonne soirée.

Elle lui fit une révérence…Seffer se leva à son tour et tenta de la retenir.

-  Je vous en prie, Mademoiselle…Rester encore un peu, quelques minutes. Il est rare que j’ai de la compagnie, surtout une compagnie si agréable.

Dit-il.

- Vous n’avez même pas fini votre verre  de vin…

Mais la norvégienne avait déjà tourné les talons et se dirigeait maintenant vers la sortie de ce vieux manoir délabré. Malheureusement pour elle, Adelheid avançait trop lentement…Conscient qu’il allait perdre sa proie et son déjeuner, plutôt diner, le prédateur nocturne décida de révéler sa véritable nature…Un petit pouvoir…Juste un petit pouvoir…Les sens et capacités d’un vampire sont supérieurs aux humains. Le vampire ne l’avait pas oublié. Un suceur de sang était fort mais il était aussi rapide…Et avant que la jeune femme n’eut le temps de s’approcher de la sortie…Le vampire était déjà sur elle. Seffer Aelias aurait put alors la mordre…et tout se serait arrêté là. Mais il en décida autrement…Il saisit la jeune femme par la taille, une autre main empoignant fermement les cheveux de la norvégienne. Ensuite, il ramena tranquillement la jeune femme vers le canapé et usant de sa force, il la poussa dedans.  Qu’est ce que pouvait faire une jeune fille de 17 ans face à un seigneur vampire âgé de plusieurs siècles. Seffer dit alors, d’une voix calme et posée, comme si rien ne s’était passé.

- Demeurez avec moi encore quelques temps, je vous en prie…

Il marqua une pause.

- J’en conviens, mon comportement est indigne d’un gentilhomme…mais je me suis attaché à vous…Je ne voudrais pas vous voir partir si vite.

Il sourit alors, assez pour que la jeune femme remarque les deux canines…et comprenne la véritable nature du propriétaire de ce manoir.

- Je vous invite pour le diner…Dit il avec ironie.

Il marqua une autre pause.

- Et plus…

Le sous entendu était clair.

- Ne m’obligez pas à user de violence, miss Friedrich. Conclut t'il.