Pour un baptême du feu, c’était une sacrée danse. Aoife sentait qu’elle allait faire des cauchemars d’araignées pendant des mois. Brr, que c’était flippant ! Et, au-delà de ça, il y avait aussi ce qu’Élise avait dit. Sur le coup, Aoife n’avait pas fait le rapprochement, mais, maintenant que la tension redescendait, son cerveau lui rappelait ses manuels d’Histoire. Le Roi Cramoisi... L’Empereur Fou d’Ashnard, un tyran arachnéen qui avait dirigé l’Empire d’une main de fer il y a quelques siècles. Son règne avait été particulièrement sanglant et meurtrier, et avait gravement appauvri l’Empire, car le Roi Cramoisi avait mené de vastes excavations archéologiques, à la recherche de lubies, pour entretenir sa démence personnelle. Surtout, on disait qu’il avait transformé la capitale en un gigantesque bain de sang, envahi par ses araignées, ses goules et ses immondices. Une cruauté telle qu’elle avait amené les Impériaux à se révolter contre lui, à mener une guerre civile qui avait permis d’occire le Roi Cramoisi.
Élise parlait-elle d’un usurpateur ? Ou est-ce que le Roi mort, finalement, ne l’était pas ? Ou idolâtrait-elle une idole déchue ? Malheureusement, Aoife n’avait jamais approfondi le sujet de la Guerre Civile. Elle en avait entendu parler, bien sûr, car c’était à travers le règne brutal et sanglant du Roi Cramoisi qu’Ashnard avait bâti sa réputation de puissance maléfique et infernale.
*
Dieu, il va falloir que je me renseigne... Si le Roi Cramoisi est toujours en vie...*
Est-ce que c’était la signature d’Ashnard ? Est-ce que cette Élise était, en réalité, un agent des Impériaux ? Aoife en venait à envisager toutes les hypothèses, tan dis que les réfugiés avaient quitté les multiples couloirs pour atteindre un couloir unique, plus grand, qui faisait penser à un ancien hall nain. Gavony, de fait, avait été bâtie près de ruines naines, inexploitables, et que les humains avaient utilisé pour faire un tunnel de secours. Des torches étaient allumées le long de plusieurs colonnes, et on pouvait voir, ici et là, les poutres et les échafaudages mis pour soutenir le toit.
Aoife continuait à marcher quand Shad les avertit que les araignées d’Élise approchaient.
«
Elle nous avait accordé un sauf-conduit, ce n’est pas normal... »
Aoife vit les soldats se mettre en position, mais les araignées peinaient à approcher... Et le chevalier finit par poser sa main sur l’épaule de Shad, comme pour la retenir. Non, les araignées ne les attaquaient pas, mais... Elles
tissaient. Elles étaient en train de sceller cette zone, comme pour empêcher tout retour en arrière, ou juste pour les menacer.
«
Reprenons la marche ! Vite ! Les soldats derrière, les civils devant !! »
Étrangement, Aoife semblait avoir, suite à la mort de Kowalsky, gagné une sorte d’autorité naturelle sur les soldats. Le groupe traversa ainsi le grand hall nain, puis il y eut ensuite d’autres tunnels, et on finit enfin par rejoindre une ancienne mine, avec quelques rails sur le sol, et une lueur, au loin.
Ils arrivèrent finalement dans une grande forêt, en pleine campagne.
Il ne restait maintenant plus qu’à rejoindre La Redonnière, ce qu’ils firent dans un silence pesant.
Ce ne fut qu’au petit matin qu’ils virent le château, accessibles depuis un pont :