La neko ratée regarda Mélinda emporter leurs anciennes affaires, non sans un petit pincement au cœur. Et un peu de crainte, aussi. Si elles voulaient s'échapper plus tard, ça serait difficile de passer inaperçu dans de tels accoutrements... mais après tout, s'enfuir à poil était une option envisageable.
En attendant, la brune se fit sortir de ses réflexions par son amie qui faisait voleter joyeusement sa robe. Chako adorait les belles toilettes, ce n'était pas nouveau. Elle avait toujours été plus tournée vers les "choses de filles" que sa camarade. Celle-ci la taquina, la poussant du coude, ce qui montrait sa bonne humeur à elle aussi.
« Chochotte, va... »
La chienne gloussa pour toute réponse, ses mains fines rassemblées devant son visage d'ange.
Entre-temps, la vampire était revenue, et s'autorisa un petit contact avec la dominante du duo, qui ne la repoussa pas. Elle était plus calme qu'auparavant, et ne voulait pas s'énerver au cas où les choses tournent mal.
« Pour répondre à ta question, Anko, ce ne sont pas des chats que je garde chez moi... Disons que j’aime être entourée de belles femmes, et que la misère me révolte. Je vous offre l’hospitalité, et il n’y a pas de piège. Si tu veux retrouver tes haillons, et manger du pain ranci dans une poubelle, tu peux le faire. Je t’offre une chambre, des repas chauds tous les jours, et autant de beaux vêtements comme ceux que tu as... Pense-y : de la viande rôtie, de la bonne viande rouge, chaude, saignante, juteuse, qui ne demande qu’à se faire couper... Tout ça, je te le donne. En retour, je n’exige que votre amour, et votre fidélité. Rien de plus, riend e moins. Voilà le marché, Anko... Pour toi et pour ta sœur, Chako. »
L'offre était alléchante, en tout sens et en tout points. Ça n'était pas Chako qui allait dire le contraire : elle tenait moins bien le choc contre l'appétit que son amante, qui était pourtant d'une constitution plus fragile qu'elle... mais le mental jouait beaucoup dans toutes ces choses-là.
Si elle avait été seule, la blonde aurait probablement donné son accord. Là, tout de suite. Mais Anko considérait la part sombre d'un tel marché, et n'hésita pas à en faire part à Mélinda :
« -Premièrement, ça n'est pas ma sœur, précisa-elle, un index griffu levé. Deuxièmement, je crois que, comme tous les bourges qui vivent sur ces terres, vous sous-estimez vraiment l'intelligence des pauvres...
Anko dégagea son épaule de l'emprise amicale de Mélinda, sans être vive, juste en secouant doucement. Elle s'éloigna d'un pas.
- C'est pas parce qu'on vit dans la rue qu'on est des abruties, vous savez. Moi aussi, je sais négocier, ajouta-elle, un sourire aux lèvres. Alors...
Chako considérait son amie, ne comprenant pas grand-chose au deal.
- Rajoutez la promenade dans votre petite liste, demanda la brune, et laissez-nous un peu de temps pour nous décider. Mettons... deux, trois jours ? Après, nous aviserons. Vous nous ferez signer un contrat s'il y a... parce que, bizarrement, on sait écrire. Ah, et il va falloir nous certifier que vous ne nous toucherez pas.
Sansplus d'explications, la brune fit un rapide croche-pied à sa copine qui, dans un jappement de surprise, s'étala sur le sol. Les pieds dans la robe, elle n'eut pas le temps de se relever que Anko lui saisissait une cheville, et montrait à Mélinda une impressionnante ecchymose, au moins de la taille d'un poing d'homme, qui ornait l'intérieur de la cuisse blanche. La marque datait de quelques jours, quand elles avaient subi une agression sur la place du marché, en essayant de voler une miche de pain.
- J'ai la même dans le dos, précisa la chatte, impassible. Et je ne veux plus voir ça. Ni sur moi, ni sur elle. C'est compris ?
Les derniers mots furent prononcés dans un feulement.