Oeil pour oeil, voix pour voix.

Encore une journée de cours comme les autre, aujourd'hui, pour l'étrange élève. Satori, qui a déjà une très mauvaise réputation, dans le lycée, ne parle jamais et ne participe jamais aux exercices oraux. Personne, pas même les professeurs, ne connait le son de la voix de Satori. Bien sur, cette dernière à déjà parlé par télépathie avec certains élèves, mais, la voix qui résonne dans leur tête n'est pas celle de la demoiselle.

A l'heure actuelle, c'est le cours préféré de Satori, le cours de musique et de chant. Même si la mystérieuse élève ne montre jamais ses sentiments, elle aime beaucoup écouter la voix de la prof de musique, car cette dernière semble l'apaiser, lui réchauffer le coeur. Là, elle écoute la prof chanter et écrit les paroles sur un cahier, comme le font tous les autres élèves. Mais, ayant une ouïe aussi bien développée que la vue, Satori entend les élèves raconter des conneries sur elle, ce qui ne la fait même pas esquisser un sourcil, mais au fond d'elle, c'est vraiment blessant.

Un élève, qui ne garde pas sa langue dans sa poche, commence à ouvrir sa trappe pour débiter des âneries sur Satori.

Hé ! Regarde comment elle fixe son cahier, on dirait une droguée.

- Arrête ! C'est une psychopathe, elle peut nous entendre !

- Si elle me touche, je lui pète la gueule !

Satori tourne la tête vers ces deux élèves, puis retourne à son écriture, n'ayant même pas exprimer le moindre sentiment d'ennui ou de dégout, car elle préfère tout garder pour elle.

Kasja finit le cours et le chant du même coup. Elle fit taire les élèves qui parlaient encore sur la nouvelle élève. La mouvement de dépit de leur professeur, son regard dur si différent de d'habitude, sa voix cassante qui leur ordonna de s'arrêter, tout les effrayèrent dans l'instant. Elle leur fila une heure de colle à chacun. Elle détestait qu'on parle comme ça d'une élève qui pouvait être très timide, avoir des problèmes qu'ils ne pouvaient même pas imaginer, que même elle, en tant que professeur modèle qui s'occupe de ses élèves, ne pouvait pas imaginer. Elle ne savait presque rien de cette jeune fille aussi silencieuse qu'une tombe abandonnée dans un cimetière du plus petit village fantôme de Norvège.

Kasja laissa sortir les élèves, après avoir donné quelques devoirs sur les gammes et les syncopes, de quoi bien faire raler les élèves récalcitrants qui détestaient bosser une matière qui leur semblait peu intéressante. Elle avait donné un travail de chant, aussi. Et elle voulait en parler avec Satori, qui ne semblait pas vouloir ou pouvoir parler. Elle ne pouvait pas lui en vouloir, elle n'y arrivait pas. Croiser le grand regard vide de son élève la retournait totalement, la mettait dans un état un peu trop émotif. Elle était déjà très sensible, mais cette élève la rendait encore plus émotive pour des raisons qui lui étaient encore inconnues.

Elle arrêta Satori alors qu'elle comptait sortir, avec un petit mouvement de la main qu'elle posa sur son bras. Elle lui fit signe de rester dans la salle.

"-Tu as du voir que j'ai donné un travial de chant...Je peux comprendre que tu ne puisses ou ne veuilles chanter, ou parler en général. Sais-tu jouer d'un instrument qui pourrait compenser ?"

Elle sourit doucement, montrant à Satori un papier, si jamais elle voulait s'exprimer par cela. Elle croisa de nouveau son regard, et sentit un long frisson parcourir son échine, un frisson glacé qui gêna la professeur. Elle sourit de nouveau, assise sur le bord de son bureau. C'était une jeune fille après tout, elle paraissait moins indécente assise comme cela devant Satori que devant un jeune homme.

Satori a encore du supporter les méchantes âneries des élèves. Dès qu'elle sait que le cours est fini, elle soupire de soulagement et se dirige vers la sortie de la salle de classe sans même adressé le moindre regard à qui que ce soit. Mais, la prof de musique retient Satori par le bras pour lui parler un moment. Elle l'écoute parler, avec intérêt, pour une fois, car cette prof semble comprendre que Satori ne soit vraiment pas du genre bavarde. Pour preuve, elle lui a même donné un bout de papier pour écrire ce qu'elle veut dire.

Bien évidemment, cela ne sera pas nécessaire, car, sans la moindre gêne, elle regarde fixement la prof dans les yeux pour pouvoir lui parler par télépathie, comme une sorte d'hypnose. La voix qui commence à résonner dans le cerveau de la prof n'est pas celle de Satori, c'est une voix neutre, ni d'homme, ni de femme, ni triste, ni joyeuse.

Vous avez l'air différente, professeur...Je sais jouer de quelques doux instruments, comme le violon, le piano, et la harpe, mais je doute que cela soit accepté.

Néanmoins, Satori ne peut s'empêcher de reluquer la prof dans sa position actuelle. Cette dernière semble bien lui plaire, aussi bien physiquement que mentalement, et ça, c'est rare, dans ce lycée. Malgré que ses yeux soient rivés sur le corps de la prof, le contact télépathique est toujours actif, bien que Satori n'aie rien d'autre à dire, elle se dirige à nouveau vers la sortie.

Kasja s'attendait à la voir prendre le stylo pour écrire. C'était normal, non ? Mais non. Une voix vint titiller son esprit. Une voix caverneuse, une voix robotique, inhumaine. Aucun ton chaud, aucune mélodie, aucun son humain dans cette voix. La professeur de musique sentit un long frisson parcourir son échine. Elle ferma à demi les yeux, écoutant ce que cette voix d'outre tombe avait à lui dire. Chaque parole, chaque intonation qui manquait, chaque voyelle et chaque consonne résonnaient dans le cerveau de Kasja. Le violon pouvait être très bien, si elle préférait.

Elle sentait le regard de son élève sur elle, mais ça ne la gênait pas. Par contre, que Satori veuille déjà fuir sa professeur, ça la gênait plus. Elle rattrapa de nouveau Satori par le bras, lui demandant du regard de rester. Les questions coulent dans les limbes du cerveau de la professeur. Comment elle fait ça ? Par quelle sorcellerie ? Pourquoi ? En même temps, la pauvre élève doit déjà bien subir, si d'autres élèves connaissent ce don télépathique. Elle soupira et fixa des yeux sa jolie petite élève qui paraissait si peu sûre d'elle. Elle lui sourit et passa ne main dans ses cheveux, un peu gênée.

"-Le violon, c'est très bien. Tu en joues depuis longtemps ?"

Elle essayait de trouver un sujet de conversation, elle voulait en apprendre plus sur cette élève des plus surprenante. Cette voix qui lui faisait un peu peur, la fascinait. C'était des tons totalement surprenants et qui ne pouvaient être musicalement refait. La tessiture de cette voix était des plus uniques, et ça, ça intéressait Kasja.

Satori est surprise, cette fois. Le fait que la prof la retienne ainsi deux fois de suite, ça cache quelque chose, car même les autres prof n'aimaient pas Satori à cause de sa réputation. Kasja est la seule qui accepte Satori telle qu'elle est, mais pourquoi ?

Elle continue de fixer la prof afin que la voix puisse bien résonner dans son cerveau. Puis, Satori s'assied sur une table, jambes et bras croisés, une pose plutôt aguicheuse. Bien qu'elle soit une psychopathe pour tout le monde, elle n'en reste pas moins une magnifique jeune femme avec des courbes très agréables. D'ailleurs, sa mini-jupe laisse découvert une bonne partie de ses grosses cuisses, alors qu'un des boutons en forme de coeur de sa veste d'école est retiré, ce qui laisse voir une petite partie de sa poitrine.

Assez longtemps, oui. Dois-je apporter mon violon pour le prochain cours ?

Puis elle se tourne vers deux élèves qui passent par là et lui font une remarque, sans pour autant stopper leur route.

Hé regardez ! La psychopathe parle avec la prof.

- Y parait qu'elle a même pas besoin de bouger les lèvres pour parler, elle est bizarre, cette fille, c'est un monstre !

Satori baisse la tête, ces remarques lui font de l'effet lorsqu'elles sont balancées à coté d'un prof. Elle en laisse couler quelques larmes et se dirige à nouveau vers la sortie.

La prof va me détester, maintenant qu'elle a entendu ça...

  Doit-on trouver une raison pour accepter une élève telle qu’elle vit, telle qu’elle survit, telle qu’elle peut vivre. C’était là son rôle d’enseignante, après tout : être prêt de ses élèves, essayer de les comprendre, les aider à s’intégrer, ou du moins essayer de les intégrer à la classe, le faire comprendre que si les autres ne veulent pas d’eux, ce n’est pas qu’à cause d’eux, qu’il ne faut pas qu’ils prennent sur eux la bêtise de certains jaloux. Pour Kasja, son attitude était des plus logiques, sa pauvre élève ne pouvant que subir moqueries, représailles, rires et méchancetés de la part de ses camarades qui ne la respectaient pas comme ils auraient dû. Et si les autres professeurs n’agissaient pas dans ce sens, il fallait quand même noter qu’ils étaient aussi incompétents les uns que les autres.

Mais Kasja était loin de se définir comme une professeure incompétente et avait décidé d’aider comme elle le pouvait Satori. Jeune élève qui ne la laissait pas totalement de marbre, avouons-le, aussi.  C’était une très jolie jeune fille, et elle ne comprenait vraiment pas pourquoi tout le monde se moquait d’elle de cette façon. C’était totalement méchant, sans but et simplement inutile. Cette gamine était une jolie petite fleur à la peau sans aucun doute douce qui ne voulait qu’éclore si on lui laissait assez d’espace et de gentillesse pour qu’elle grandisse encore. Kasja hocha la tête.

« -Apporte ton violon oui. Tu as des morceaux en duo ? Je voudrai bien faire un duo alto/violon avec toi, ça pourrait être intéressant, non ? Je t’accompagnerai à l’alto. »

Kasja jeta un regard des plus violents aux élèves, les fusillant de ses grands yeux rouges aux reflets légèrement sombres de colère. Qu’ils la laissent tranquille, bon sang de bonsoir ! Elle soupira, alors que Satori s’enfuyait encore. Kasja attrapa ses affaires, laissant à son élève quelques pas d’avance, le temps qu’elle ferme la porte de sa classe et la professeure la rattrapa en trottinant.

« -J’espère que je ne t’ai pas fait perdre trop de temps…Si tu as raté ton bus, je peux te ramener.. ! »

Elle sourit, voulant avoir plus de lien avec cette jeune femme des plus intrigantes. Elle espérait presque que Satori ai raté son bus...Mmm, c'était méchant, mais c'était une manière comme une autre de mieux connaître con élève.

Fatiguée et frustrée de devoir subir toutes ces moqueries et brimades, Satori marche à toute vitesse vers la sortie du lycée, bousculant quelques élèves au passage. C'est tout ce qu'ils méritent, après tout, vu comment ils se comportent avec elle. C'est alors que l'un d'eux insulte la jeune élève.

Hé! Mais fais gaffe, pauv' conne !

L'envie de lui coller un pain lui démange, mais, ça lui retomberait dessus, c'est certain. Elle se contente de continuer sa route jusqu'à ce que la prof de musique l'interpelle à nouveau.

Non, ne vous en faites pas, j'aime passe du temps avec vous, professeur.

Dit comme ça, ça peut sembler un peu bizarre, comme phrase, comme-ci Satori aurait déjà couché avec la prof et qu'elle se vanterait d'aimer cela. Elle rougit un peu en pensant à cela, l'idée que la prof pourrait avoir en ayant entendu cette réponse un peu maladroite.

Je n'ai aucun morceau en duo, j'ai toujours été toute seule. Mais il me plairait beaucoup de pouvoir jouer en duo avec vous. Et, ne vous faites pas de souci pour moi, j'habite à quelques pas du lycée, je n'ai donc pas besoin de bus.

Elle se dirige à nouveau vers la sortie, offrant un sourire à la prof, ce qui est relativement rare, chez elle, en dehors des relations sexuelles. Ce sourire n'est d'ailleurs pas si mauvais que ça, il est même très joli, à vrai dire. On pourrait croire qu'il s'agit d'un sourire charmeur, quand on la voit sourire ainsi avec sa tenue actuelle.

Bye, professeur. ~

Kasja était exaspérée par l'attitude des autres élèves face à cette petite fille des plus particulières qui semblait bien plus intelligente que les autres gamins qui ne savaient que se moquer, qu'être méchants et fier de leur fausse supériorité. La professeure hocha doucement la tête en écoutant la voix froide qui résonnait dans son cerveau. Elle aimait passer du temps avec elle ? Oh, c'était gentil, c'était sympathique, c'était assez double aussi comme parole. On pouvait le comprendre très mal, surtout une professeure comme Kasja, une femme dans son genre. Mais c'était une élève, sans doute aussi pure que tout. Hein ? Pourquoi elle pensait ça ? Parce qu'elle était comme ça,Kasja, à avoir tellement d'a priori que ... voilà. Kasja rougit sans paraitre le faire, hochant donc doucement la tête.

"-Très bien. Rentre bien, alors, on se voit à ton prochain cours de musique.."

Elle lui sourit gentiment avec un p'tit geste de la main. Elle était superbe quand elle souriait, cette petite. Elle devrait sourire beaucoup plus souvent, c'était beau, une jeune fille qui souriait, plissant ses yeux, son regard étincelant de joie. Kasja lui rendit un sourire presque maternel. Elle commençait à bien apprécier cette nouvelle venue, bien différente des autres, beaucoup plus intéressante et sympathique que tous ces jeunes imbus d'eux-même qui ne voyaient en leur professeurs que des vieux cons qui ne leur voulait que du mal. Faux, donc.