« Apparemment, on est pas dans la résidence principale de cette famille mafieuse, seulement dans la secondaire… Le chef… Non, le second… Il ne viendra que dans trois ou quatre heures environs… En attendant, ils comptent nous parquer dans une cave et commencer notre… notre ‘’dressage’’… »
La conversation télépathique était vraiment curieuse, et Carol avait toujours le réflexe de regarder Nina quand elle lui parlait... Mais elle ne lui parlait pas vraiment, en réalité. Elle se contentait de communiquer mentalement. Ses pouvoirs étaient très psychiques, et Carol les regroupa en trois : lire les pensées des gens, créer un champ de force défensif ou offensif, et possibilité de modifier son poids lors d’une chute, afin de la ralentir. Ça faisait une belle panoplie. Miss Marvel était plutôt bien tombée, mais, face à une tripotée de Russes, elle comprit qu’il allait surtout falloir compter sur elle.
Allait-elle attendre que le second arrive ? Ou attaquer immédiatement ? Carol décida d’opter pour l’attente. Si elle pouvait attraper un gros poisson, ce serait une manière de rehausser le bilan de sa journée, pour le moment exécrable. D’un autre côté, elle ne tenait pas à se faire violer pour ça. Le van s’était arrêté, et on ne tarda pas à les sortir, se moquant d’elles. Leurs armes étaient sans effet sur elle, et Carol serra à nouveau les poings. On les fit avancer dans ce qui ressembler à une maison traditionnelle japonaise. En soi, ce n’était pas impossible. Les Petrovski étaient installés ici depuis un siècle, depuis la Première Guerre Mondiale et l’installation du communisme dans l’ancien Empire russe. Les ancêtres des Petrovski étaient des notables russes qui avaient senti le vent tourner. Ils avaient vu la révolte hurler dans les usines, la Russie étant profondément ébranlée par une crise économique que la guerre n’aidait pas. Ils avaient hésité entre aller aux États-Unis ou au Japon, et avaient opté pour le Japon, où ils avaient un partenaire commercial. Les Petrovski s’étaient implantés à Seikusu, formant progressivement une conclave russe regroupant tous les émigrés fuyant Staline et les soviets. Comme les Siciliens protégeant les communautés italiennes lors de la colonisation du continent américain, les Russes avaient protégé les leurs, devenant petit à petit une mafia, qui, avec l’effondrement du bloc soviétique, avait retrouvé dans la Russie démantelée d’Eltsine de nouveaux points de repaires. Ils avaient profité de la débandade russe pour visiter les bases militaires désuètes, avec un stock d’armement à ne plus savoir qu’en faire. La rumeur disait que les Petrovski avaient rappelé du territoire russe un militaire pour les aider à prendre le pouvoir sur Seikusu. Depuis qu’il était là, les attentats se multipliaient avec une efficacité redoutable, amenant les différents clans de Yakuzas à se quereller entre eux, certains pensant avoir été trahis par d’autres.
En soi, cette histoire ne concernait nullement le SHIELD, relevant de la simple autorité policière, mais, dans la mesure où les criminels connaissaient l’existence des Portails, et effectuaient un trafic transplanétaire, le SHIELD était forcé d’intervenir. Si la police était irritée de voir des gaijins se mêler à leurs enquêtes, quand la situation était tendue, ils étaient généralement bien contents de voir des super-héros intervenir. Néanmoins, dans l’ensemble, il arrivait que les scènes soient tendues, surtout en cas d’opération conjointe.
Elle suivit les deux hommes au sous-sol, et serra les poings en constatant que cette maison, en apparence calme et innocente, dissimulait une prison souterraine servant à dresser de futurs esclaves. Il n’y avait que des femmes, nues, humiliées, battues, violées, qu’on envoyait ensuite dans des clubs de strip-tease ou dans des bordels miteux. On les shootait à mort, ce qui faisait que certaines femmes étaient complètement inertes, l’esprit ravagé par la drogue. Elle vit même des Terranides, et comprit que les Petrovski aussi jouaient sur Terra et sur Terre. Dans un sens, c’était une bonne nouvelle, car aucun avocat ne pourrait soulever un quelconque problème juridique si jamais Carol leur cassait la gueule... Et elle n’allait pas s’en priver.
Elle n’entendit même pas le Russe se moquer d’elle, et ne réagit que quand on lui découpa ses vêtements à l’aide d’un long couteau tranchant.
« Heu… Carol ? Si tu as un plan, c’est le moment ou jamais de le mettre à exécution, j’le sens vraiment mal, là… »
Carol ferma les yeux.
*Salopards...*
Elle les entendait rire. L’un d’eux saisit un fouet, et le leva en l’air, visant Carol.
« On va commencer par toi, chienne d’Américaine ! À quatre pattes, qu’on te traite comme une... »
Le fouet fila vers le dos Carol, mais elle tendit alors sa main. Les Russes, qui observaient ses fesses, relevèrent la tête en voyant que la main de Carol, non contente de ne pas saigner, avait attrapé le bout du fouet.
« Mais que... ?! »
Le Russe, surpris, essaya de tirer, mais il n’y avait rien à faire. Le fouet semblait pris comme dans un étau, tandis que Carol continuait à leur tourner le dos.
« Mais... Putain, mais c’est quoi ce délire ?! »
Le Russe avait beau tirer, le fouet semblait comme bloqué.
« Vous préférez que je vous casse quoi en premier ? »
Elle relâcha le fouet, et se retourna. Les traits de son visage étaient déformés par la rage. Plusieurs Russes sortirent leurs pistolets.
« On va te dresser, tu vas voir !
- À terre !
- Elle a bloqué mon fouet ! »
Carol s’avança lentement, tentant de conserver son calme. Un Russe tira visant l’épaule gauche de Carol. Son épaule recula sous l’effet de l’impact, mais la balle s’écrabouilla contre sa peau. Carol passa alors à l’attaque. Elle s’envola rapidement, et sa main frappa le torse d’un Russe, le propulsant contre un mur. Son poing alla ensuite se loger dans l’estomac d’un second, et elle ne frappa un troisième du revers de la main, lui déboîtant la mâchoire. Celui avec le fouet n’en croyait pas ses yeux, et reculait. Il tenta de baragouiner quelque chose, mais Carol le frappa à hauteur du nez, entendant un délicieux craquement quand son nez se brisa. Il s’envola également, et défonça une porte en bois, s’étalant dans une chambre.
Deux autres Russes débarquèrent au fond du couloir. Carol leva alors la main, et se concentra. Toutes les lampes se mirent à grésiller, tandis que Carol happait l’énergie électrique environnante. Les ampoules s’éteignirent brutalement, tandis qu’une boule lumineuse se formait entre les doigts serrés de Carol.
« Merde, une panne de courant !
- Tuez cette salope !
- Je ne vous pardonnerais jamais... » grogna Carol.
L’un de ses pouvoirs, probablement le principal, consistait à attraper n’importe quelle source d’énergie pour la redistribuer. Ce pouvoir marchait aussi sur les sources magiques, mais réagissait alors de manière particulière. Elle envoya une boule d’énergie vers les deux Russes, les soufflant. Ils s’écroulèrent sur le sol, inertes, pas morts, mais sonnés pour un bon moment. Carol regarda autour d’elle, tandis que la lumière revenait, le générateur n’étant pas épuisé, et trouva son sac à main, que les Russes avaient emmené. Mis à part son portefeuilles, il comprenait surtout, roulée en boule, son costume. Sans rien dire, elle l’ouvrit, et commença à l’enfiler, sous les yeux de Nina.
*Je ne peux décemment pas me battre à poil...*
Elle avait tapé dans la fourmilière. En hauteur, on entendait les mafieux s’activer. Il y avait sûrement des caméras de sécurité. Si elle avait une forte résistance, elle n’avait pas non plus celle de Supergirl. Le coup de pistolet lui avait fait mal, mais, s’ils utilisaient des armes automatiques, elle avait intérêt à se montrer plus prudente.
« Je vais m’occuper d’eux. Essaie de trouver un portable pour appeler la police. L’une de ces filles sait peut-être où on se trouve... »
Il était, autrement, toujours possible d’obtenir cette information en lisant dans l’esprit des gardes, mais Carol n’y avait pas pensé. La télépathie était encore un domaine qu’elle ne comprenait pas bien, et sa rage était intense. Tout ce dont elle avait envie, en ce moment, c’était de les massacrer.