C'est en discutant avec le barman qu'il avait appris que des millions passaient sur la table à chaque manche, et qu'il n'irait pas loin avec les cinq millions qu'il se promenait, aussi bon joueur soit-il. Alors qu'il accusait l'information, un corps sur Terra réunissait une somme conséquente en crédits tekhans, et un autre apprêtait une esclave humaine de façon particulière: une carte spéciale, qui lui permettait de convertir les crédits en yen, et une carte de retrait. Une opération simple qui prendrait environ une demie-heure. Et pour renforcer sa crédibilité, il s'éloigna du comptoir, pas trop loin pour être entendu, et passa un appel fictif à "sa sœur".
Les trente minutes passèrent, durant lesquelles l'avant-dernier candidat arriva: un homme d'environ soixante ans,à la moustache et aux cheveux blancs comme neige, feutre et costume noir. Il s'appuyait sur une canne ouvragée et sertie, et son regard était aussi perçant que celui d'un aigle majestueux. Nathéo appréciait beaucoup ces hommes qui savaient en imposer par leur stature. Et il avait la chance d'en faire partie.
Et puis le dernier arriva, notre détective faillit esquisser une grimace. Hiro Atayoshi, un avocat suffisamment talentueux pour gagner un procès face à une avalanche de preuves compromettantes. Et surtout, un concurrent de taille pour Lord Slaver. C'était selon Théo, un homme de science et un excellent businessman. En soit, un adversaire redoutable. Il reprenait son sourire figé. L'homme venait s'adresser à lui.
"Eh bien, si ce n’est le détective Penbar… Whiskey sur glace, merci… Il y a eu un meurtre dans le casino? Ou Nexus ne vous suffit plus, vous devez venir me chourer des parts de marché à Seikusu?"
Il se sentit quelque peu insulté. Non pas qu'il était blessé par les propos d'Hiro, mais qu'il soigne si peu ses mots... Un homme de verbe comme lui était capable de piques bien plus cinglantes, selon Nathéo.
"Allons Maître Atayoshi, s'il y avait eu un meurtre dans ce casino, l'assassin se cacherait déjà dans vos jupons... Je suis ici pour me distraire, mes finances me le permettent. J'espère que vos affaires vont bon train, vu le peu de ventes que vous avez faites à Nexus cet après-midi..."
L'avantage de Nathéo à toujours été d'avoir des yeux et des oreilles partout, au sens littéral du terme. Suivre le cours du marché en Terra lui était très facile, et ce quand il n'en était pas lui-même l'origine. L'avantage d'avoir des clients influents, c'est de pouvoir créer la mode. Et depuis deux mois, la noblesse s'arrachait les terranides hermines. Ils était rares, très rares. Et Nathéo avait la chance d'en avoir un couple. Les Dames adorent avoir des enfants pour leur servir de pages ou de valets de pied.
"Bien, maintenant que tout le monde est arrivé, nous pouvons commencer… Prenez la place que nous vous avons assignée lors de votre arrivée."
Alors que Lord Slaver rejoignait sa place, une employée l'interpella, lui remettant une mallette que sa "sœur" avait laissée pour lui à la réception, et qui avait été convertie en jetons selon ses instructions. Il savait ce qu'il y avait dedans: 120 millions, à ajouter aux cinq qu'il avait déjà. Comment un détective pouvait-il posséder une telle somme? Et bien, les privés coutaient plutôt cher, et il y avait toujours l'excuse des actions en bourse. Aucun soupçon ne pesa sur lui, il montra ses jetons et s'installa.
Il fut impressionné en voyant combien Atayoshi avait à miser. 100 millions, dans une seule des mallettes? Selon ses observations, il n'y avait que deux adversaires véritables: l'avocat à lunettes, et le vieil homme à la canne. Les autres étaient sans doute doués, mais ils ne représentaient pas un vrai défi en soi.
River.
Le détective révélait ses cartes, à lui et à lui seul. Les habitudes du métier sans doute, mais il jeta un bref coup d’œil aux gorilles d'Atayoshi. Les businessman de leur calibre étaient capable de fourberies, et les avocats étaient pires. S'ils n'étaient pas là que pour veiller à la sécurité, il le saurait bien assez tôt. Les détectives... Non, les "hommes comme eux" n'allaient pas loin sans entretenir une pointe de paranoïa. Un de leurs concurrents, appelé le Don, était après tout un maître des subterfuges. Oh, la main de Nathéo? Trois de trèfle, huit de cœur. Il avait une paire de trois, youpi. La femme suivit, puis son tour vint.
"Un million, je suis."