Ayant fini les cours plutôt tard, la nuit s'était déjà bien établie lorsque je finis par franchir le portail du lycée. C'était le début d'une fraiche soirée d'hiver...
J'avais hâte de rentrer chez moi, me reposer sur mon sofa moelleux qui n'attendait que mon popotin, à doucement m'abrutir devant des émissions de télé ou des clips musicaux. Que l'on aimait l'école ou pas, passer neuf heures assise sur une chaise n'en restait pas moins assommant, et je me sentais complètement vidée. J'avais besoin de recharger mes batteries.
Je n'habitais pas très loin du lycée, le trajet à pieds ne durait même pas dix minutes, longeant la grande avenue pendant les trois-quart du chemin, suivi d'une bifurcation entre les bâtiments, où je devais suivre une ruelle pour enfin pénétrer au coeur du lotissement, un ensemble d'appartements et de studio loués par des étudiants, mais aussi par des adultes, salariés ou en attente d'emploi. Dans l'ensemble, mes voisins étaient plutôt sympa, et l'ambiance y était agréable. Ce qui n'aurait pas du être une raison pour me penser à l'abri d'un mauvais tour...
Passant devant une boulangerie, je m'achetais un croissant afin de calmer les grondements impatient de mon estomac, et pénétrais ensuite dans la ruelle située un peu plus loin, quittant la sécurité de l'avenue fréquenté pour celle toute relative d'une voie étroite et mal éclairée. Malgré l'ambiance certes peu rassurante, je ne me sentais pas vraiment en danger, j'étais insouciante en quelque sorte. Qu'est ce qu'il pouvait bien m'arriver, après tout ? Je n'étais qu'une lycéenne sans histoire, et j'empruntais ce chemin presque tout les jours, il n'y avait pas de raison pour qu'il m'arrive quelque chose d'extraordinaire, en particulier aujourd'hui. C'est si facile de se croire invincible, de penser que les malheurs n'arrivent qu'aux autres, ou bien seulement à la télé, suivant une trame savamment orchestrée. Le destin est pourtant un être capricieux, et nul ne peut savoir ce qu'il nous réservera.
Tandis que je mâchais une bouchée de mon croissant, j'entendis non loin de là des hommes discuter entre eux. Curieuse, je voulais savoir de quoi est-ce qu'ils pouvaient bien parler, et me rapprochais d'eux, assez discrètement tout de même pour ne pas me faire repérer. Je me collais contre la pierre froide du mur, près de l'angle qui nous séparait. J'aurais pu me décaler un petit peu, et tenter d'y jeter un oeil, afin de voir à quoi ils pouvaient ressembler, mais cela aurait été un peu trop risqué.
* Bien... Combien ?
* Ce sera 500 000 par tête.
* Yeros, pas Yens.
* Bien sûr...
Oh mon dieu..., pensais-je. Je n'en croyais pas mes oreilles... 500.000 Euro !? Cela faisait... cela faisait... cela faisait quasiment 50 millions de Yen ! Et par tête ? J'avais peur de comprendre... ou plutôt peur de ce que je venais de comprendre. Ces hommes étaient en train de commanditer un assassinat ? Je commençais à paniquer, à beaucoup paniquer même. Je devais m'en aller d'ici au plus vite, avant qu'ils ne découvrent qu'une intruse les a espionné ! Je n'avais certes pas vu qui ils étaient, ni ne savaient de qui ils parlaient, mais c'était le genre de détails dont ces personnes là se fichaient royalement. Je reculais doucement, m'éloignant du lieu de cette funeste discussion, tentant de faire le moins de bruit possible...
* CLING !*
Zut ! Mon talon venait de taper le coin d'une poubelle, provoquant un tintement qui raisonna aux alentours. Croire que j'étais passée inaperçue était insensée maintenant, la discrétion n'était plus de mise. Je devais FUIR ! Faisant demi tour, je détalais aussi rapidement que je pouvais, c'est à dire pas très vite, vu mon faible niveau d'athlétisme... Je ne pourrais pas le semer, mon studio se trouvait trop loin d'ici pour espérer le rejoindre avant qu'ils ne me mettent la main dessus. Mon dieu, mais dans quel pétrin est-ce que je venais de me fourrer...
Je n'avais pas d'autre choix que de me cacher, en espérant passer inaperçue... là par exemple, entre ces deux bennes à ordure. On faisait quand même largement mieux en terme de cachette, mais c'était la seule solution que j'avais sous la main... Je m'accroupis donc ici, derrière un sac poubelle qui ne parvenait pas à me cacher, entre les deux parois métalliques des bennes dont il exhalait une odeur répugnante... Enfin, c'était bien le dernier de mes soucis, j'espérais juste qu'ils ne me trouveront pas... si ce n'était pas déjà fait ? Sous l'effet de la panique, je n'avais pas pris la peine de regarder derrière moi... En fait, il était même possible que personne ne m'ait poursuivie ! Mais c'était un espoir auquel il ne valait mieux pas s'accrocher... Mes pensées se bousculaient dans ma tête, les battements de mon cœur s'affolaient, j'étais terrifiée...