Une Ambition pour un Roi. [PV Mordret]

« Ce doit être terrible pour vous. » lança une petite voix fluette qui appartenait à Madame Oxwald, la femme d’un grand propriétaire foncier du pays. C’était une grosse femme, bien rondelette à la peau blanche, suante toujours - même son parfum ne pouvait cacher cette odeur de transpiration que Gaia haïssait. Ses petits yeux bleus étaient enfoncés dans leurs orbites et ses lèvres bien trop grosses pendaient. Son mari manquait assurément de goût, mais Cette dame était l’une des héritière d’une riche famille noble du royaume, l’épouser c’était faire fortune.

« Au contraire, il ne doit rien y avoir de plus honorable qu’un mari au combat. » réfuta une voix beaucoup plus aigue. C’était Madame Galaad qui parlait là, une femme qui au contraire de Madame Oxwald était bien trop maigre et bien trop grande. Son visage était allongé et pointu, et ses grands yeux globuleux étaient toujours humides, prêts à pleurer. Sa peau, trop rouge, pelait souvent.

Toutes deux avaient été invité, comme d’habitude par mondanité, dans le château du Roi d’Ashnard, où en l’absence de son mari, Gaia se retrouvait obliger de coucher. Elles avaient leurs magnifiques robes luxueuses qui puaient l’argent sale et le sang versé pour les broder. Gaia était sans doute la plus jeune des trois, du moins physiquement. Bien qu’elle n’abordait pas leur grâce aristocratique, elle était d’une beauté plus féroce et sauvage. Toutes deux étaient blondes platines, leurs cheveux virant presque au blanc. Madame Poppée, elle, avait les cheveux couleur miel foncé, jolis et soyeux, non pas gras ou sec. Elle portait un simple corset, dévoilant sa généreuse poitrine, que l’on pouvait deviner aisément car elle débordait un peu du décolleté. Et pour bas, elle avait opté pour une petite jupe à froufrous, se parant de porte jarretelles pour agrémenter le tout.

« En fait, vous vous trompez Mesdames. Je suis plus libre, quand mon mari est en campagne. » répondit-elle d’une voix provocante en portant sa flûte de champagne aux lèvres qui s’étiraient dans un rictus malsain.

L’une et l’autre firent semblant d’être ravies et de cacher leur indignation. Le général Poppée, demi-frère du Roi, membre de la noble famille qui gouvernait ce pays d’une main de fer était jeune, beau et fort. Seulement, elle le trouvait peu ambitieux. Elle aurait aimé le voir à la place de l’Empereur, car notre belle Gaia n’aspirait qu’à la tête du royaume.

Et bien vite, le sujet dériva.

« Hum…il parait.. » commença Madame Galaad, «  que l’absence d’héritiers mâles affaiblit le pouvoir du roi. »

« Pourtant, » rétorqua Madame Oxwald en faisant une grimace qui enlaidit encore plus « Avec la cargaison de maîtresse qu’il renouvelle chaque année…il devrait bien y avoir un enfant quelque part. »

Gaia fronça les sourcils et jeta son verre par-dessus son épaule pour qu’il se fracasse contre le mur de derrière , laissant des coulées de champagne sur la belle tapisserie. Les deux pestes portèrent donc, avec étonnement et peur, leur attention sur elle. L’ancienne esclave était très mal appréciée par la noblesse du pays, étant entrée dans leur domaine par un mariage que beaucoup jugent illégitime. Et l’héritier mâle, était n sujet qui intéressait autant Gaia, mais qui la contrariait énormément.

« Ce seraient des bâtards très chères. » sourit-elle comme si elle n’avait jamais cassé son verre par colère. « jamais ils ne pourront prétendre à la gouvernance du pays. Notre bien-aimé roi, fait bien de les ignorer. Toute cette marmaille…me dégoûte profondément…autant que leur…pauvre mère. »

Gaia était certainement cruelle dans ses propres. Ca ne la dérangeait pas plus que cela. Elle s’excusa alors que les deux femmes étaient bouche-bée et sortit du grand salon de luxe pour tenter de trouver l’empereur. Voici depuis deux jours qu’elle était seule au château, sans son mari pour la surveiller - un mari d’ailleurs bien jaloux et possessif, elle devait absolument en profiter pour gagner les faveurs du roi et passer le plus de temps possible avec lui.

Elle arriva donc en salle du trône, espérant l'y trouver.

Aujourd'hui avait encore eu lieu une de ces bien ennuyeuses réunions. Le Roi avait lui même organisé cela, mais uniquement par l'appui de ses ministres. C'était bien les seules personnes que Mordret pouvait encore écouter, d'habitude ne faisant qu'à sa tête. Mais pour une fois, il avait su entendre raison, a un de ces rares moment où le roi était conciliant.

Ne prenant alors même pas part à la fête, il avait préféré passer son temps à hurler sur l'émissaire d'un de ses propres villages, qui comme d'habitude venaient mendier un retrait des troupes militaires en leur sein et plus de vivres... A son entrée, Gaïa put entendre une puissante voix, qui ne semblait pas d'origine humaine.

" SORTEZ IMMÉDIATEMENT D'ICI, OU JE VOUS OFFRE EN PÂTURE AUX CRÉATURES DES LANDES ! J'EN AI PLUS QU'ASSEZ DE VOS JÉRÉMIADES, CONTINUEZ ET JE DONNERAI CARTE BLANCHE A TOUTES LES ACTIONS DE LA GARDE OPÉRATIONELLE ! "

Aussitôt, un émissaire sortit en courant à toute vitesse, bousculant Gaïa. Assis sur son trône, le Roi se massait son bien vieux front. Gérer un royaume n'était jamais simple... Il leva alors les yeux. Pour une fois, ce n'était ni un émissaire, ni un mendiant, ni un pauvre sot perdu, mais plutôt l'épouse de son demi-frère. Un pauvre sot qui ne réfléchissait que jusqu'où il devait réfléchir, en accord avec son rôle. Quelqu'un de parfait pour être manipulé aisément et faire office de Général au roi d'Ashnard...

" Tiens, tiens... Pour une fois que je reçois charmante compagnie... "

Il se mit alors à sourire, et resta assis à son trône, son menton dans sa main, accoudé au siège. Il fixait Poppée d'une lueur salace.

" Qu'est ce qui vous amène ?... "

Gaia ne put s’empêcher de se trouver gêner par l’emportement de son roi. Elle eut néanmoins un sourire en coin en voyant la personne responsable d’une telle colère détaler. Elle ne se formalisa pas quand le pauvre paysan la bouscula au passage. Elle aurait tout loisir de retrouver son nom et son village pour se venger plus tard. Pour l’instant, son attention était fixée sur le roi.

Le roi qui était une personne admirable, un homme qui la fascinait, gonflé de pouvoir et de puissance. Exactement ce qui l’attirait. Se voyant être le centre d’attention du roi, elle s’inclina respectueusement pour le saluer. Après tout, n’était-il pas le souverain tout puissant de ce royaume et elle n’aspirait pas à lui résister niveau autorité.

« Bonjour Votre Grâce, » sourit-elle avec malice alors qu’elle se rapprocha de lui, féline et souple loin de la grâce ennuyante des diverses courtisanes. Face au Trône, où il se trouvait, elle se prit la peine de répondre, détestant les quelques trois mètres ainsi que les quatre marches qui les séparaient.

« Je venais prendre de vos nouvelles. Je vous ai bien peu vu ces derniers mois. »

Elle passa un index sur ses lèvres et en suçota légèrement le bout, feignant d’être nerveuse et claqua sa langue contre son palais pour continuer.

« Je m’ennuyais également des piètres compagnies que m’impose mon mari en son absence. »

Gaia espérait ne pas trop en faire non plus, mais il était important de lui faire comprendre qu’elle ne prenait pas du tout plaisir à être en ménage avec un homme tel que le général. Si seulement il pouvait mourir au front, ça l’arrangerait. Elle était tellement garce quand elle le voulait, mais après tout, elle ne faisait que se venger de ce que la vie lui avait fait endurer. Elle qui avait toujours porté une haine profonde aux dirigeants du royaume se voyait maintenant prétendre à leur faveur. N’avait-elle pas prédit la mort d’un de ces empereurs trop orgueilleux.

Elle grimaça à ce souvenir peur ragoûtant et retrouva une expression souriante.

Oui, cette personne était une compagne beaucoup plus intéressante que les autres "femmes" qui venaient au château, avides d'être l'élue du seigneur d'Ashnard. Mais ses attributs qui n'étaient pas de ce monde étaient un bien grand rempart contre leurs projets.

Jusqu'ici, une seule avait su acquérir une place "un peu spéciale". Cette femme, qui, sans la moindre peur ou gêne, s'approchait de lui tel un chat. Peu de gens osaient et d'ailleurs pouvaient approcher Mordret de cette façon. Elle était une des rares à bénéficier de ce privilège, qui d'ailleurs faisait jalouser bien du monde. Mordret l'avait laissée simplement parce qu'elle était comme lui: elle n'avait pas peur. Quoi de plus ennuyant qu'un peuple qui manque de tomber en syncope à votre simple vue ?...

Fixant toujours en face de lui, le seigneur d'Ashnard croisa les bras, s'enfoncant dans son trône, étendant ses jambes couvertes de plaques d'armure de bataille.

" Ah, oui... Les convives de cette réunion ne vous plaisent-ils pas ? "

Il ricana.

" Prendre de mes nouvelles... Ou plutôt tenter d'égayer une journée ennuyeuse ? Je m'en pose la question. Mais aujourd'hui, je ne suis pas d'humeur. Dites moi quel est votre arrière-pensée. Je sais bien que vous ne venez pas ici sans but. "

Gaia fronça les sourcils un court instant sans répondre à la question rhétorique du Seigneur. Elle préféra garder un humble et hypocrite silence pour l’instant. Égayer une journée ennuyeuse ? Elle sursauta, faussement outrée, et feignit un air surpris et innocent :

« Mon Seigneur...je vous prie, ne penser à pas à de telles choses. Je vous suis dévouée, si ma compagnie vous déplaît je peux me retirer mais… »

Elle s’enhardit et se permit de gravir les trois marches menant au trône avant de s’agenouiller devant lui :

« Permettez-moi ces gestes mon Roi… » souffla-t-elle en posant délicatement ses mains sur un des genoux de l’empereur pour s’y appuyer avec douceur et sensualité, tout comme le faisait ses femmes très prisées dans les harems d’Orient.

Elle releva ensuite son visage vers lui, se redressant à peine sur ses genoux à elle, pour lui sourire.

« Peut-être pourrais-je détendre mon Roi et lui permettre d’être d’une humeur plus agréable… »

Gaia ne se voilait pas la face, elle prenait des risques en étant aussi familière et qu’il la repousse par colère, surtout s’il n’était pas d’humeur, était tout à fait probable. Mais elle ne démordrait pas, elle souhaitait partager la couche du Roi, être sa maîtresse, sa favorité et faire de l’ombre à toutes les autres petites courtisanes sans ambitions que celle d’enfanter pour lui et de se faire oublier. Elle pourrait lui donner tout ce qu’il désire, l’hériter qu’il souhaitait. Elle n’était pas faible, et consentait à des sacrifices tant qu’à la fin, elle aurait atteint son but peu lui importait le parcours.

Pour être Reine, elle était assez bien partie.

Car dans la psychologie de Mordret, seul la loi du plus fort existait. Le fort écrase le faible. Le prédateur mange la proie. C'était une loi élémentaire de la nature, il faut s'y plier.

Et elle ne manquait pas de cette force. Elle était une des rares folles à pouvoir être aussi familière et provocatrice, mettant sa vie en jeu pour simplement lui plaire. C'était quelque chose qui faisait sourire le roi d'Ashnard.

" En voilà une bien noble cause... "

Il mit ses mains sous son menton, accoudé a son siège.

" ... Alors, ma foi, pourquoi pas. Après tout j'en aurai bien besoin, j'ai passé une pénible journée. Votre présence serait un réconfort pour mon esprit. "

...Et son corps, naturellement.

Gaia passa distraitement sa main sur l’armure de son roi, prenant soin de caresser le métal de ses doigts comme si elle effleurait la peau de l’homme le plus puissant du pays et rien qu’à cette pensée, elle avait des frissons d’excitation qui dressait la peau de son échine en légère chair de poule.

« Alors…votre Majesté, je suis à vous.. . »

Ou presque, contrairement à beaucoup de femmes dans ce palais, elle n’aimait pas forcément être dominer et adorait prendre les devants. Avec ses amants de toute manière, c’était ainsi. Fort caractère sûrement mais en tout cas, elle devait trouver un juste milieu : de quoi ne pas paraître insolente aux yeux du Roi. Lui promettre sa personne était déjà pas si mal.

Elle se redressa un peu sur ses genoux à elle et passa lentement contre les jambes, écartées du roi pour se glissa conter lui tel un reptile, ondulant légèrement. Sa main n’avait pas quitter la cuisse du grand personnage et son visage arriva à son cou dévoilé de toute protection. Gaia laissa son souffle parcourir un instant la peau du roi avant de légèrement grimacer et de baisser ses yeux vers sa propre cuisse à moitié nue.

Elle venait de se couper un peu avec l’une des plaques de l’armure de Mordret. Elle observa son sang humain perler sur sa peau ambrée et finit par sourire.

« Permettez-moi de dire que vous êtes un homme dangereux Sire… »

Gaia passa sa main sur sa petite blessure et récolta un peu de son sang sur son index qu’elle porta à sa propre bouche pour y goûter.

« Et j’aime ça.. »

Pour ne pas paraître insolente, elle pourra repasser mais c’était plus fort qu’elle. Le jeu de la provocation, elle en connaissait les règles par cœur.