La culture musicale de Miya était, incroyablement, très peu riche. Elle aimait se contenter de ses coups de coeurs entendus à la radio, des curiosités trouvées sur un CD à la pochette attrayante. Son répertoire, pourtant, était incroyablement riche, et elle s'en rendit compte tandis qu'elle donnait de la voix dans cet opéra. Elle voulait tout donner. Pour ce simple plaisir égoïste de s'aimer un peu plus, d'aimer ce qu'elle faisait. Bon sang, pour une fois qu'elle pouvait évoluer sur une grande scène. Ce n'étaient pourtant pas les propositions qui avaient manquées. Mais... Si Miya était simple, ça se saurait, non ?
Alors elle chantait, à pleins poumons, de toute sa puissance vocale. Elle ne se rendit pas compte des changements subtils dans la lumière : elle se contentait de la chaleur des projecteurs. Mais soudain, alors qu'elle entamait une balade qu'elle affectionnait particulièrement, une voix la rejoignit. Celle de Miya s'éteignit, progressivement. Soudain, la lumière semblait l'agresser, et l'empêcha de voir qui osait l'interrompre. Et l'homme apparut, masqué. A mesure qu'il approchait, Miya recula. Intimidée, d'une certaine façon, oui. Mais lui ne s'arrêta pas de chanter... Comment devait-elle le prendre ? Comme un défi, ou une invitation à un duo ? Les yeux légèrement plissés, elle tenta de voir le visage derrière le masque - en vain. Elle devait se contenter de cette voix qui la faisait vibrer.
En fait, jamais Miya n'avait pris le temps d'écouter quelqu'un d'autre qu'elle. Ou plutôt, elle n'avait jamais réellement apprécié d'autres voix. Il y avait quelque chose d'incroyable dans le timbre de ce fantôme sorti de nul part. Puis finalement, la timidité - d'une certaine façon - finit par laisser place à une incroyable envie de chanter, en choeur, avec quelqu'un. Quelque chose qu'elle n'avait encore jamais fait. Modérément, sa voix prit petit à petit de la puissance.
La demi déesse ne le quittait pas des yeux, intriguée. Par la présence de cet homme, par son masque. Il continuait d'avancer, d'un pas modéré, et Miya finit par faire un pas de côté, puis un autre. C'est une étrange danse qui commença : elle s'approchait, fuyait, lui tournait autour. Elle cherchait visiblement, déjà, à percer le mystère qui entourait Erik.
Mais, parce que Miya est égale à elle même, elle se refusait d'être celle qui abandonnerait le chant la première. La curiosité était un vilain défaut qu'elle laissait volontiers aux autres.