"Ta peine est terminée. Tu peux sortir, maintenant."
L'Hécatonchire approcha l'une de ses cent mains vers le visage de Chryséis, dont les yeux vides trahissaient les souffrances qu'elle avait enduré dans le pire lieu qui soit; le tartare. Enchainée de toute part, ses mains avaient été percée par des crochets qui tiraient affreusement sur ses bras, menacant de sectionner ses mains en deux si elle résistait. Ses pieds, pour leur part, avaient été écorchées par des chaines de feu, des chaines éternellement chauffée à blanc qui lui collaient à la peau depuis une durée qui lui semblait être une parcelle d'éternité. Son corps était d'ailleurs maltraité par une très longue chaine aux maillons munis de pointes qui lui perforaient la peau dès qu'elle bougeait. C'est d'ailleurs par là que Briarée commença. Il retira lentement et très délicatement les pointes de fer qui maltraitait la peau laiteuse de la déesse de la colère, avec un respect tout à fait admirable. De ses cinquante têtes, il léchait les plaies qui couvraient le corps de la déesse, sa salive cicatrisant très rapidement les blessures encore saignante. La déesse s'était débattue comme une diablesse au début de son supplice, il y a deux ans. Elle était secouée de spasmes et elle hurlait de peur devant la douceur du monstre, qui s'en peinait mais qui n'arrêta pas pour autant son ouvrage. Il lécha longtemps les plaies, jusqu'à ce que toutes soient refermées. Quelle cruauté était celle des divins lorsqu'une d'entre eux tentait de s'élever au-dessus des autres. "Zeus ne devrait-il pas plutôt craindre la naissance du fils qui le détrônera?" S'était demandé le monstre en guérissant la petite fille du chef des dieux. Finalement, il la décrocha et s'occupa des dernières plaies avant de s'éloigner en laissant la déesse se relever toute seule. La pauvre demoiselle se traina avec difficulté. Ses caractéristiques d'immortelle n'avaient plus aucun effet dans le tartare; tu souffrais sans jamais guérir et tu ne pouvais pas te servir de la magie pour t'aider. Dans les hurlements de douleur du tartare et les cris de désespoir de ses congénères devant la grande porte à nouveau ouverte, la nouvelle adulte s'arracha enfin au monde des ténèbres pour déboucher dans le royaume des enfers. Sous un cri d'horreur, sa cousine et grande-tante Perséphone se précipita à son secours en la voyant apparaitre dans le palais des enfers, aidée de Déméter qui venait la reprendre pour la saison printanière.
Les deux déesses soulevèrent très rapidement la pauvre jeune déesse et la trainèrent très rapidement dans la chambre à coucher de la Reine des Enfers, où elles lui permirent d'occuper le grand lit duveteux. Mais à la voir se tordre ainsi, on aurait pu jurer qu'on venait de la coucher sur un lit de clous. Elle hurlait à s'en fendre les cordes vocales, mais les femmes insistèrent pour qu'elle reste allongée, usant de multiples sortilèges pour la forcer à se réaccoutumer au confort gratuit. Finalement, elle abandonna et ferma les yeux pour s'endormir. Et ce, pour mieux recommencer le lendemain matin. Les deux déesses durent prolonger leur séjour en enfer pour aider la pauvre jeune femme à se remettre de son épreuve, en l'entourant de tous les soins possibles. Dans son sommeil, la jeune femme hurlait le nom de la Reine des Dieux avec désespoir, elle lui demandait de lui pardonner, de venir l'aider, qu'elle ne recommencerait plus. Elle hurlait en fait tout ce qu'elle aurait voulu hurler pendant ces deux années enfermées dans le sombre Tartare. Lorsqu'elle eut fini de supplier, le soleil était déjà bas dans le ciel sur la terre des mortels. Une fois qu'elle sembla un peu remise, les deux demoiselles attendirent que le soleil se couche pour faire venir à elle Hélios et son char solaire. Le beau Dieu de l'astre du jour se déposa tout près des deux femmes et elles prirent place avec lui, accompagnées de la jeune déesse épuisée. Destination, l'Olympe.
L'arrivée de Chryséis chez les Dieux avait causé un grand tumulte, mais son retour n'avait rien à envier à cet antécédent. Tout le monde hurlait de frayeur en sentant la terrible énergie dont elle était porteuse. La jeune femme, pour sa part, était simplement brisée. Sa seule lueur d'espoir était Héra, dont elle avait perçu l'énergie lumineuse dans les ténèbres de son inconscience pendant tout le trajet. Son cœur battait la chamade tant il était heureux d'être près de la femme qu'il aimait, mais il se fendit au souvenir que si elle n'avait pas été Reine des Dieux, il n'aurait pas conseillé à Chryséis de surpasser tous les êtres de ce monde pour lui prouver sa valeur. Lorsqu'elle fut déposée devant l'Olympe, personne n'osa s'approcher pour venir la réclamer. Ce fut le silence total pendant plusieurs minutes avant qu'Héraclès, le fils de Zeus, ne se détache du peloton pour venir chercher sa nièce, un air de terrible colère dans le regard devant la lâcheté de ces êtres. Il enroba doucement la jeune femme de ses bras et la souleva avant de blêmir.
-Je l'emmène chez Apollon. Elle va enfanter très bientôt.
Les deux autres déesses se regardèrent avec incrédulité après avoir observé le ventre plat de la jeune femme puis fixèrent leur parent avec surprise, mais Héraclès était déjà parti en courant, Chryséis dans les bras, défonçant un passage au travers de la foule. Ce que le dieu avait senti en la jeune femme, ce n'était pas un bébé, mais le fœtus du mal qui serait très bientôt relâché. Un enfant du Tartare. La jeune femme se convulsait déjà alors que le monstre qui avait prit nid en elle commence à faire savoir qu'il voulait partir. Elle se mit à hurler de plus en plus fort en enfonçant ses ongles dans les pectoraux d'acier du demi-dieu, qui grinça des dents. Une fois arrivée chez Apollon, il ordonna que toutes les prêtresses se mobilisent pour accueillir et détruire l'entité démoniaque au moment même de sa naissance. Toutes les femmes se ruèrent au secours de la déesse, dont une sage-femme qui les guida vers une salle où la déesse pourrait donner naissance dans le calme. Puis, le travail commença. Il consuma presque totalement le reste de l'énergie de la Déesse pendant l'heure où elle donnait naissance. Lors de sa première respiration, le foetus n'était qu'un toute petite chose à peine capable d'émaner le moindre miasme démoniaque, mais Héraclès ne perdit pas de temps et leva son marteau pour l'abattre, malgré le hurlement de désespoir de Chryséis, sur cette créature difforme et il l'anéantit, tout simplement, sous les yeux effarés de la "mère". La conception et la naissance de cet être d'énergie pure n'avait pas ravi la virginité de la déesse, mais elle resta aussi secouée que si on venait d'éliminer sous ses yeux l'enfant de l'homme qu'elle aimait. Mais tout cela ne faisait partie que de sa folie.
Avec le temps, les crises s'estompèrent jusqu'à ne plus exister. La conscience de Chryséis lui revint graduellement, mais elle ne semblait pas reprendre des forces, peu importe le temps qu'elle passait, allongée, dans sa chambre. Après trois jours de jeûne et d'insomnie, la déesse semblait n'être qu'un cadavre ambulant. Elle n'avait parlé à personne depuis son retour, comme atteinte de mutisme. Elle n'en pouvait simplement plus. Mais elle avait réussi. Elle avait la puissance du Titan Typhon. Elle n'avait plus rien à craindre. elle pouvait rivaliser en puissance avec n'importe qui. Et pourtant, si cette puissance lui avait accordé une certaine joie, elle, maintenant, se sentait terriblement seule. Elle se mit alors à penser à Zeus. Lui, le plus puissant de tous, à quel point ressentait-il cette solitude? Elle se questionna un bon temps avant qu'une de ses servantes ne s'approche pour s'enquérir de ses désirs et besoin.
-J'aimerais voir ma grand-mère Héra, répondit-elle tout simplement.
Et la servante détala pour rejoindre la Déesse-Reine
[Tu peux choisir entre faire venir Chryséis ou la rejoindre, mais ne renvoie pas la servante xD Et désolé pour le post, mais la reprise est très dure.]