Erwan entendit distinctement crier sa danseuse, et sortit hors de son bureau, où venait de s'allumer une cigarette. Affolée, Lily, la danseuse en question, vêtue d'un corset et de bas résilles bariolés, ôta le loup rouge qu'elle portait sur le visage. Le jeune homme put discerner, dans sa chevelure, quelques plumes folles de couleurs jaunes, rouges, vertes, qui s'agitaient en suivant ses mouvements de têtes. La belle créature venait de finir son show, et elle n'avait même pas pris le temps de se rhabiller avant de sauter sur le jeune homme, les joues rougeoyantes et les yeux grands ouverts. Elle s'agrippa comme une furie à la chemise du jeune homme, tirant dessus sans aucune délicatesse. C'est pas des manières pour s'adresser à son patron, ça ... songea t'il, presque las.
- Que se passe t'il ? demanda t'il, inquiet.
- Il y a une voleuse, quelque part, dans les alcôves installées récemment !
- Je m'en occupe ...
- On m'a déjà volé 5OO dollars, Erwan ! Je ne veux pas que ça se reproduise !
Les sourcils froncés, le jeune homme partit en direction desdites alcôves. Des voleurs, des voleuses, il en avait attrapé une bonne partie. L'argent et les bijoux des danseuses étaient de qualités, et il retrouvait facilement des tenues volées chez des concurrents. Ce genre de situation l'agaçait au plus haut point ... La cigarette coincée entre les dents, il s'approcha de ces pièces. Neuves, elles servaient à se retrouver, parfois avec des danseuses, souvent entre amis, afin de boire, loin du tapage qu'offrait le reste du club. Un bon investissement ... Les filles pouvaient y faire, si elles le souhaitaient, des prestations privées. Il jeta un oeil vers une autre danseuse, pâle et filiforme, arborant une tenue en cuir assez étrange, qui lui indiqua du bout du doigt la "cabine" dans laquelle l'inconnue s'était dissimulée. Erwan la remercia d'un signe de la main, et tira une bouffée de tabac avant d'écarter du bout des doigts le rideau, découvrant petit à petit qui se cachait derrière ce tenture pourpre.
Il arbora un fin sourire en la voyant, assise sur le divan. Et ne dit pas un moment, se contentant de l'interroger du regard ... Et presque de la déshabiller des yeux. Il retira la cigarette d'entre ses lèvres. Elle était plutôt agréable à regarder, et ne semblait pas lui vouloir de mal. Mais il ne se laissa pas amadouer, et s'avança dans la pièce, entrant avec elle, mais ne s'asseyant pas, préférant rester debout, à la regarder avec ses yeux brillants, et ce regard qui mettait mal à l'aise ... Intentionnellement. Il avait entendu, avant d'entrer, son " Chiche ou pas chiche ". Il se contenta alors de dire, simplement, avec un sourire, certes, mais un ton sec :
- Chiche.