Liliza regardait l’horizon, assagie. A ses pieds dormait un cadavre, chaud encore, un trou énorme dans la poitrine. Ses joues à elle étaient barbouillées de sang, encore brûlant. Ce cœur était trop mielleux, pas assez acide, et aucunement amer. En d’autres termes : elle n’était pas rassasiée. Mais pour le moment, elle avait mieux à faire. Des soucis à régler.
Yndra, une amie qu’elle s’était faite dans ses plaines de Nexus, une jeune femme aux ailes de feu qui veillait sur un trésor dont personne ne connaissait l’emplacement, lui avait donnée rendez-vous ici. Elle se moquait, elle de ce trésor, elle n’aimait qu’Yndra, qu’elle trouvait sympathique et chaleureuse. Elle attendait donc, se pinçant la langue entre deux canines, que son amie vienne. Elle stagnait sur la colline qui surplombait Nexus ; un vieux volcan selon certaines légendes, ses yeux se baladant ici et là.
- Ah, te voilà !
Liliza retourna la tête. Yndra, fine et grande, les yeux cernés de khôl, la regardait. Elle était en train de refermer ses ailes enflammées – un spectacle formidable – avec précaution.
- Je voulais ne pas te féliciter, continua Yndra.
- C’est pour cela que tu te déplaces, et que tu me fais déplacer ? ricana Liliza.
- Tu n’aurais pas dû attaquer ces magiciens. Je les connais, ils vont se venger.
- Ce sont mes affaires.
- Au nom des flammes, Liliza, quand grandiras-tu ? Tu risques ta vie !
Liliza poussa un long soupir. Elle jeta un regard noir vers Yndra, l’air blasée. Elle détestait qu'on lui dise de grandir, et ça, Yndra le savais trés bien. La discussion commençait mal.
- J’avais faim, et ils possédaient une arme qui me serait utile. De plus, deux démons se cachaient parmi eux.
- Liliza …
Yndra attrapa sa main entre ses doigts fins, couverts de henné.
- Quand cesseras-tu ce massacre ?
- Tant que je vivrais, je n’aurais que cette idée en tête, Yndra.
La jeune femme se releva, et déploya ses ailes.
- Je ne t’aiderais pas, claqua t’elle.
- Je n’ai pas besoin de ton aide, rétorqua Liliza. Ni de ta pitié.
- Ce que tu interprètes ainsi n'est que « l’amitié », se défendit Yndra.
- Dans ce cas, je n’ai pas besoin de ton « amitié ».
Liliza, aussitôt, se leva et marcha d’un pas sûr vers les bas-fonds. Elle y trouverait de quoi se nourrir mieux. Elle entendit vaguement Yndra l’appeler à nouveau, mais ignora cet appel, et continua sa marche. Elle détestait ce monde, ce qu’elle était et ce qui l’entourait. Cette rencontre l’avait rendue hargneuse, et plus solitaire que jamais. Elle grogna, et claqua des doigts, nerveuse. Elle s’en moquait, de toutes ces affaires. Elle avait réussie à tuer, à manger, et à attraper cette arme qui l’aiderait à abattre des démons plus puissants que jamais.