April Rain (William)

       Bien sûr que Tori n'avait pas eu le temps de lui poser des « problèmes » sinon la pauvre femme ne serait pas en train de lui sourire. Quelle catastrophe si la fille Bertinelli-Ochinose avait été violée et maltraitée par l'un de ses hommes! La mort de Tori était préventive et … distrayante. Dolan avait droit de vie ou de mort sur ses sujets. Voilà un constat qui n'allait pas améliorer son égo déjà sur-dimensionné.

       -Simple prévention ma chère, glissa-t-il.

       D'un point de vue extérieur, William ne semblait pas noter toutes les remarques coquines plus ou moins explicites que lui lançait Hana. Il restait de marbre et ne semblait même pas les relever. Mais dans son for intérieur, ces tentatives de séduction faisaient toutes mouche. Hana avait du charme et elle était magnifique mais ça l'avocat y était habitué. Ce qui mettait un peu de piment était qu'elle est la fille d'un parrain de la mafia. Un statut qui la rend théoriquement inaccessible et très dangereuse. Alors quand cette fille lui fait clairement du rentre-dedans, cela avait le don de l'émoustiller un peu. Mais Dolan est un homme d'affaire froid et sans scrupules, il ne se laisse pas impunément séduire par une fillette. C'est du moins ce qu'il tentait de se persuader.

       « Les bouledogues » n'avaient pas bougés et n'avaient eu aucune réaction face aux propos de la demoiselles. William enleva ses lunettes et posa ses mires d'un vert étincelant sur la jeune fille qui s'était un peu trop enhardie à son goût. Avait-il l'air d'un serveur? L'endroit où elle se trouvait avait-elle l'air d'une maison de thé? Même si l'avocat n'appréciait pas du tout le ton de la Bertinelli, il essaya de ne pas le montrer. De plus, il était curieux de savoir comment elle s'y prendrait pour le renvoyer de force sur terra car la meilleure façon serait de le liquider et de jeter ses restes à travers un portail. William se doutait que cette éventualité avait dû effleurer l'esprit de la charmante demoiselle.

       -Personne n'est au courant pour votre... déguisement. Aussi j'en déduis que personne ne sait que vous êtes venu chez moi, à part bien sûr si vous avez une sorte de « Nestor » qui repasse votre costume et qui lustre votre arbalète, comme confident. Dans le cas contraire, je pourrais vous éliminez sans que personne ne le sache et me débarrasser du problème que vous représentez. Un bon plan je trouve...

       Il se fendit d'un sourire cynique  pour conclure son monologue et sortit son téléphone portable de sa poche. Après un bref moment d'hésitation où il feignit de prendre une décision, il lança le portable vers Hana.

Hana sourit en réceptionnant le téléphone entre ses mains.

- Il est vrai que personne n'est au courant de mon jeu nocturne... Et non, je n'ai pas d'Alfred en qui j'ai suffisamment confiance pour lui permettre de toucher à mon matériel ; comme on dit, on n'est jamais mieux servi que par soi-même, n'est-ce pas ? Mais si je n'ai prévenu personne, Dante remarquera que je ne suis pas rentrée de la nuit. Et vous n'avez pas envie que les Bertinelli ou les Ochinose se mettent à ma recherche, mh ?

Elle haussa les sourcils sans se départir de son sourire, ni quitter le regard vert de William, et elle composa le numéro d'un de ses cousins, le seul qui décrocherait en voyant un numéro inconnu...

- Hey, bambola ! Content que tu me rappelles, j'avais perdu ton...
- Sergio, arrête ton numéro, c'est Rachele.

Il y eut un silence suivit d'un "ah" déçu qui agrandit le sourire de la jeune fille.

- Dis à Dante que je rentrerai plus tard, et que tout va bien.

Elle ne quittait pas William des yeux, et parlait japonais pour qu'il ne croit pas qu'elle dirait où elle est. Pourtant, de l'autre côté, le dénommé Sergio continua à parler, en italien, lui, sur le fait qu'elle n'avait qu'à appeler elle-même sur la ligne de Dante, qu'il n'était pas son domestique, et à force, Hana s'emporta à son tour en italien, baragouinant en faisant de grands gestes avant de raccrocher alors qu'on entendait encore le jeune homme râler à l'autre bout du fil. Elle lança à nouveau le téléphone à William.

- Vous savez, William, vous n'êtes pas le premier à me menacer de mort. Et vous voulez savoir ? Si je n'en ai pas peur, je ne vais pas non plus me laisser faire. Et tout comme je n'aimerai pas devoir changer d'avocat (battement de cils discret) je ne voudrai pas que vous ayez à engager de nouveaux gorilles.

Hana entendit dans sa tête Dante lui reprocher de trop parler, ce qui la fit rire tout doucement.

- Dante me dit souvent que j'ai hérité du pire défaut de ma mère : l'honnêteté. Et j'aimerai que vous en fassiez autant à votre tour. Puisque vous voulez vous débarrasser de moi, j'espère que vous n'utiliserez pas la magie.

Sans que quoi que ce soit dans son attitude l'ait trahie, Huntress fit une roulade avant, et donne un coup avec ses deux pieds dans la mâchoire du premier garde du corps, dont la puissance était accrue par les semelles compensées de ses bottes. Au lieu de se relever comme n'importe qui aurait pu le prévoir, elle se rétracta, au sol, au contraire, et bondit pour mettre un coup de coude dans la gorge du second garde du corps qui avait sorti son arme. Une torsion du poignet, elle le fit passer par-dessus son épaule, pour l'envoyer là où elle était quelques secondes auparavant. Elle recula d'un pas et fit face à William avec un petit sourire triomphant.

- Alors, Maître Dolan ? Allez-vous me conseiller l'un de vos confrères pour prendre votre suite ou bien... Trouver l'argument miracle qui m'obligera à vous tolérer en ce monde qui n'est pas le votre ?

       L’honnêteté ? C’est un concept qui n’a rien à voir avec Dolan. Hana se faisait des illusions si elle croyait sincèrement qu’il n’allait pas utiliser la magie contre elle. Certes, il la déteste mais c’est grisant d’obliger ce qu’on déteste à nous servir. D’un autre côté, s’attaquer à une pauvre femme sans défense avec un objet magique est le comble de la lâcheté… Et bla et bla et bla. La lâcheté, encore un mot qui ne veut rien dire. Pour Dolan il n’y a que des objectifs et différents moyens de les atteindre. La difficulté étant de choisir le meilleur moyen.

       Soudain Huntress bondit sans crier gare. Dolan se figea et avant qu’il ait eu le temps de réagir, tout était fini. Ses hommes étaient à terre et ne bougeaient plus. Hana le regardait avec un sourire plein d’orgueil. Cette fois, cette petite peste avait dépassée les bornes. Il était vain de la détacher et d’essayer de trouver une solution pacifique au problème. Il aurait dû la liquider et la balancer dans la mer avec du plomb dans l’estomac. Les Ochinose et les Bertinelli n’auraient jamais soupçonnés William car il n’a aucune raison de la tuer.

       Dolan ne prit pas la peine de soutenir le regard de la jeune fille. Calmement, il fourra la main dans sa poche et enfila une nouvelle fois l’anneau à son doigt. Il sortit sa main et pianota sur son genoux d’un air concentré. Ca ne se voyait pas qu’il était très désappointé car son expression était toujours aussi glaciale. En ce moment, il n’avait qu’une envie. C’était d’envoyer cette fillette malpolie chez un dresseur comme le Don et la récupérer quand elle aura apprise les bonnes manières. Mais William le savait, cet état de colère n’allait pas durer. La rage fait commettre des erreurs.

       -Un argument, répéta-t-il en faisant mine de réfléchir. Et bien, soit. Je n’ai qu’à "tendre la main" pour vous neutraliser et vous envoyer en maison de correction. J'ai horreur qu'on… casse du si bon matériel – fit-il en désignant ses gorilles affalés sur le sol – et j'ai horreur qu'on abuse de ma bonté. Si je vous ai libéré c'est parce que je croyais que ces liens n'étaient plus nécessaires. Vraiment vous me brisez le cœur.

       William se fendit d'un mince sourire. L'humour était le meilleur moyen pour se libérer de la tension d'un moment difficile. Mais son sourire s'évanouit très vite pour faire place à une expression clairement menaçante, tout comme sa voix.

       -Maintenant jeune fille, nous allons remonter à mon bureau et nous allons… discuter. – il se leva et tendit sa main dépourvue de bijou vers Huntress - C'est mon dernier prix Hana. Si vous ne vous comportez pas comme une dame, je n'ai pas à agir en gentleman.

       William avait vu ce que cette femme avait fait de ses deux gardes du corps. Et bien que la main qui porte l'anneau était le long de son corps, elle était tendue, prête à réagir au moindre geste d'hostilité.

Et la gamine roule des yeux pendant le sermon de William. On dirait une ado en pleine crise quand elle lui dit :

- Ca va ! Ils font juste un gros dodo. (elle tiraille la joue d'un gorille qui gémit.) Vous voyez ! Je voulais juste vous montrer que sans la magie, vous ne pouviez rien contre moi. Loin de moi l'idée de vous briser le coeur, mon cher William, ou d'abuser de votre bonté.

Elle prend la main qu'il lui tend, mais passe son bras sous celui du juriste.

- Vous voulez que je me comporte comme une dame ? Soit. (Elle se penche à son oreille et murmure) Mais je croyais que vous préfériez les filles de mafieux...

Hana se laisse entraîner jusqu'à l'ascenseur, accrochée au bras de l'avocat, et se garde de faire de nouvelles allusions pseudo-érotiques - sur la nécessité d'enlever son costume d'héroïne pour qu'elle soit à nouveau Hana Bertinelli, par exemple. William veut une dame ? Parfait. Elle saura se tenir. Mais au moindre geste de la main "armée" de l'avocat, elle est prête à bondir pour l'éviter - en espérant qu'elle en ait le temps...

A l'heure qu'il est, son cousin Sergio a sans doute complètement oublié qu'elle l'avait appelé. Vers 11h30, Dante demandera à tout le monde où est Hana. 11h45, coup de fil exceptionnel au clan Ochinose. 12h, si aucune nouvelle, Dante n'hésitera pas à tuer pour retrouver sa "nièce". Mais ça n'ira pas jusque là, puisque Sergio, entre deux parts de pizzas, dira qu'elle l'a appelé, que tout allait bien. Dante vérifiera le numéro, constatera sans doute que c'est celui de l'avocat, et... Hana se verra passer à tabac, s'il le faut, pour que l'italien sache ce qu'elle a été faire là-bas. Mais pour l'instant, la jeune fille ne pense à rien de tout ça. Tout ce qui compte, c'est de s'en sortir avec le moins de dommages possibles, tant physiques que relationnels.

Car Hana serait réellement désolée de perdre le cabinet Dolan. Chacune des parties peut payer tous les millions nécessaires à la corruption d'untel, à la falsification de telle preuve, et tout ceci n'entrainerait qu'une longue et ennuyeuse affaire sans fin. Hana leva les yeux pour regarder William à côté d'elle : il fallait reconnaître à l'avocat qu'il était un homme plutôt charmant, le genre d'homme qu'Hana aimait bien, au fond. Droit, corruptible à souhait, ordonné - très important pour une fille atteinte de TOC comme ceux de la Bertinelli - et surtout... Il dressait la magie de Terra. Cette saloperie contre laquelle Huntress ne pouvait lutter, qui fichait une belle pagaille... Elle soupira, sourit et regarda à nouveau devant elle. Au-delà de leur relation famille mafieuse / avocat, ou actuellement, justicière / méchant trafiquant de terranides, Hana se dit qu'ils pourraient faire une belle équipe. Mais ne rêvons pas : chaque chose en son temps. Pour l'instant, il fallait que la jeune fille lutte pour ne pas l'assommer et le renvoyer sur Terra. Chaque chose et chaque personne à sa place, oui ; le cas Dolan était bien plus épineux, car il était absolument indispensable à la jeune fille sur Terre...

       La Bertinelli semblait être redevenue raisonnable. Elle était un peu fofolle mais pas bien méchante. Si elle n'avait que ça… Mais en plus elle est imprévisible et dangereuse. Devait-il considérer que l'avoir à son bras était un bon pas vers une sorte de réconciliation? Ou bien allait-elle encore lui sauter dessus?
       Il l'emmena donc jusqu'à l'ascenseur, gardant sa main armée dans la poche pour éviter que les "employés" qu'il croisait ne se retrouvent foudroyés. Employés qui ne prêtait même pas attention à la jeune Bertinelli accoutrée comme une héroine de comics – Ils en avaient vu d'autres -. Après un sas de sécurité, le couple arriva au fameux ascenseur qui les projeta plus de 150 mètres au-dessus du sol.

       Comme à son habitude, William se pinça le nez et souffla pour rétablir la pression dans ses oreilles. Le couple sortit du compartiment de l'ascenseur et les portes se refermèrent derrière eux. Une fois fermé, il était impossible de savoir qu'un ascenseur était dissimulé. Un vrai repère à la James Bond. Ou bien une Batcave, pensa William en lorgnant le costume d'Hana. Ils arrivèrent finalement jusqu'à l'antichambre du bureau de Dolan, fief de sa secrétaire, Niji Saori - de 8h à 17h30 en tout cas - . Cette dernière reçue William avec un sourire éclatant comme une petite fille apercevant le marchand de glace. Elle se leva de son bureau et salua le couple. Ses magnifiques cheveux noirs glissèrent pendant l'opération et elle dut s'en occuper tout en affichant une mine inquiète.

       -Je me demandais où vous étiez monsieur Dolan, fit-elle avec une pointe d'inquiétude. J'ai fait venir le vitrier qui à réparé votre fenêtre. Que s'est-il passé?

       -Disons que j'avais une amie très pressée de venir me présenter ses respects, répondit l'avocat en jetant un coup d'œil amusé à la Bertinelli.

       Saori comprit immédiatement que l'amie en question était la jeune fille en costume qui l'accompagnait mais elle ne fit aucun commentaire et se contenta d'hausser un sourcil. D'une petite pression sur le bras d'Hana, William lui fit comprendre que les présentations étaient terminées et ils entrèrent dans le bureau.
       Le juriste lâcha enfin le bras de la jeune fille et tritura ses dossiers de façon à les remettre dans la disposition où ils étaient avant que la tornade Huntress ne chamboule tout.

        -C'est une noble croisade que de renvoyer les terranides sur leur plan d'origine, déclara-t-il tout en rangeant ses affaires. Cependant, j'aimerais que vous m'oubliez à l'avenir. Je serais amené à travailler pour vous un jour ou l'autre Hana. Mais ça me sera difficile d'être votre ami si vous vous montrez hostile. – Il cessa alors de toucher à ses dossiers et la fixa avec un air grave -. Cet incident se reproduira-t-il?

Hana se laisse guider et ne pipera mot jusqu'au bureau de l'avocat. Elle s'assoit en face de lui, le regarde mettre de l'ordre dans ses dossiers... Et elle ne peut s'empêcher, à chaque fois, de passer derrière lui pour remettre correctement une feuille de légèrement de travers, d'aligner correctement les dossiers en décalage. Elle ne devrait pas le faire, mais elle n'arrive pas à se contrôler... De peur de s'attirer à nouveau les foudres du juriste, Hana finit par se lever et se dirige vers la fenêtre, tournant le dos à Dolan.

- Je ne dirai pas que c'est une "Noble croisade". Je déteste le désordre, Maître Dolan. (Elle regarde par-dessus son épaule pour croiser leurs regards, et a un léger sourire.) Mais vous avez déjà du vous en rendre compte.

Elle n'évoque pas l'attrait irrésistible du don de William... Le jeu est fini, et ce serait sans doute dommage de pourrir cette nouvelle relation précaire... Ses yeux se tournent à nouveau vers la vue qu'elle a de la ville. Et Hana pense seulement au chemin du retour, qu'elle rentrera chez elle en plein jour vêtue de son costume nocturne. "La poisse !!" Elle fait volte face, et retire sa cape et son masque, qu'elle pose sur le dossier de la chaise qu'elle occupait quelques secondes auparavant.

- Je pourrai fermer les yeux sur vos origines... Car oui, vous m'êtes trop précieux en tant qu'avocat. Mais pourriez-vous me promettre d'arrêter votre trafic ? Si vous n'allez pas chercher ces esclaves pour votre compte, vous devez les vendre... Et là-dessus, je ne peux pas fermer les yeux, Dolan-san. Dites-moi ce qui leur arrive chez leurs maîtres terriens...

Hana roule des yeux et se rassoit, croise les jambes - et elle lutte pour ne pas aligner correctement quelques feuilles de travers, même si elle ne les quitte pas des yeux.

- Je n'ai aucune pitié pour ces esclaves. Mais morts ou vifs, qu'ils fassent leur boulot ou non, qu'ils soient libres ou sincèrement amoureux, leur place est sur Terra.

       Le commerce de terranide était on ne peut plus lucratif. Les clients de Dolan se séparaient en deux catégories : Les milliardaires dépravés et les instituts médicaux. Que ce soit pour l'un ou pour l'autre, William ne vendait que très peu de ses marchandises. Tout d'abord parce que ce trafic n'était qu'un extra et que ça ne doit pas devenir chronophage. La deuxième raison est que ce qui prenait le plus de temps était de trouver des clients fiables qui ne permettraient pas de laisser s'échapper ses terranides ou d'en révéler l'existence. C'était là, la partie la plus difficile de son travail. Mais William arrivait à s'en sortir grâce à son carnet d'adresse bien rempli.
       Cependant, ce petit commerce avait pris de l'ampleur et la mafia avait maintenant un pied dans son entreprise. En effet, c'est elle qui fournissait à William les gros bras dont il avait besoin pour des problèmes évident de… "manutention". Ce qui voulait dire qu'il ne pouvait pas cessez son commerce du jour au lendemain et surtout pas parce qu'une maniaque du rangement le lui avait demandée avec un grand sourire. Et même au-delà de ça, il était hors de question d'arrêter, car c'est ce commerce qui à fait passer William de riche à extrêmement riche. La nuance était faible mais non négligeable.

       -Mais bien sûr, répondit-il avec un sourire ironique. Je vais de ce pas arrêter ces odieux trafics. Quand à ce que font mes clients avec les terranides ça ne regarde qu'eux, tant qu'ils ne montrent pas ces abominations à la face du monde.

       La colère montait doucement à la tête de l'avocat. C'était un sentiment qu'il n'éprouvait que très rarement et la plupart du temps, il feignait d'être en colère sans jamais l'être vraiment. Cette fille l'exaspérait. Elle l'avait attachée sur une chaise, détruit sa baie vitrée, libérée ses esclaves, assommée ses hommes de mains, semée la pagaille dans sa journée, fait perdre du temps et de l'argent. Bien que Dolan soit quelqu'un de très calme le fait qu'elle lui demande de mettre fin à ses activités était la goutte qui faisait déborder le vase. Sale petite peste !

       -Je ne vous demande pas d'arrêter de vendre de la drogue parce que ça me donne de l'urticaire, que je sache? Fit-il en gardant son sang froid. Donc vous allez me laisser en paix, ou sinon… - William s'interrompit un doigt levé, faisant mine de réfléchir – Je dis tout à votre oncle et je ne plaisante pas.

        Ce n'était pas très loyale mais au diable les convenances. William essaya de trouver une menace plus efficace mais c'était la seule qui l'attaquait directement. Et puis, il n'était pas assez fou pour menacer son clan.

Huntress pouffa avant d'éclater d'un rire incontrôlable. Jamais elle n'aurait eu connaissance de ce trafic si elle n'avait pas surpris William sur Terra - le seul fait de savoir qu'il s'arrangeait pour que ses acheteurs gardent jalousement leurs terranides allait seulement lui compliquer la tâche, mais au moins, elle savait ce qu'elle ferait de ses prochaines nuits. William avait l'air de ne pas vouloir dénoncer ses clients très, bien. Huntress finirait bien par les trouver.

Mais ce qui faisait rire la jeune fille aux larmes, c'était la menace de l'avocat. Ses origines italiennes faisaient de son rire un bruit fort et insupportable, et bien sûr agaçant. Après des secondes qui auraient pu paraitre une éternité au juriste, Hana retira ses gants pour chasser les larmes de ses yeux. Enfin, son rire se calme, et elle sit entre deux hoquets :

- Je suis désolée, William, ce n'est pas un rire de dame, mais...

Huntress pouffa une dernière fois, réussit à se calmer. Elle essuie une dernière fois ses yeux. Hana inspire profondément, mais un sourire joue toujours sur ses lèvres.

- Je suis vraiment navrée, Maître Dolan. C'était juste... Trop drôle ! Vous voulez rapporter à Dante que celle qui protège ses dealers la nuit et se débarrasse de la concurrence n'est autre que sa nièce ?

C'était le point de vue de la jeune fille ; en réalité, Dante attendait de voir quand la mystérieuse justicière allait commencer à s'attaquer à ses dealers. Il essayait de la faire chercher pour lui fournir un pot-de-vin, mais Hana s'amusait à éviter les "faux dealers".

- Je ne m'attendais pas à ce que vous cessiez votre trafic, bien sûr... Mais je préfère maintenant vous prévenir que vos clients risquent d'être mécontents quand ils s'apercevront que leur nouveau jouet a disparu. Quant à vous...

Ah ! Elle voulait le garder, son avocat du diable. Bien sûr, qu'il lui était indispensable. Mais à présent, c'est comme s'il avait "terranide" tatoué sur le front. Très gênant. Cela perturbait tant la pauvre Hana et ses TOC qu'elle pianotait ses jambes croisées de ses doigts fins. Sa cuisse dénudée frémissait à chaque coup, et Hana finit par détourner le regard.

- Je ne sais pas quoi faire de vous. Il faudrait que je ne vous revois plus et même que je vous oublie, ce qui est impossible... Ou que vous n'avez pas intérêt à rendre possible avec une quelconque magie.

       William grinça des dents tandis que la nuisance sonore, incarné par le rire de la jeune fille, lui vrillait les tympans. Décidément, elle était insupportable jusqu'au bout des ongles. Il inspira puis expira profondément pour se libérer de toute la tension qui s'accumulait, essayant tant bien que mal de se convaincre que lui tordre le cou était une très mauvaise idée. Si seulement elle n'était la fille adorée d'un puissant mafieux... Hana incarnait les limites de son pouvoir. Il n'était pas assez puissant pour la tuer. Il fallait se faire une raison.

       -Ne me prenez pas pour un imbécile, intervint-il d'un air exaspéré. J'ai cru comprendre que vous ne vouliez pas qu'on découvre votre identité. D'où ce masque – Il désigna d'un geste méprisant l'objet posé sur la chaise -. Et je ne pense pas que votre "oncle" approuve ce que vous faites en ce moment.

       Il s'approcha d'Hana et s'arrêta devant ses jambes croisées. Puis, lentement il suivit son regard et avisa les dossiers qu'il venait de ranger. D'un air irrité, il poursuivit malgré tout.

       -Quand à mes clients. Faites ce qui vous chante, je ne fais pas de service après vente.

       Soudain William l'observa comme s'il la voyait pour la première fois. Il n'y avait pas du tout de quoi s'énerver finalement. Cette fille était tout simplement givrée. C'est vrai on y pense pas forcement mais c'est une théorie qui explique le costume, ses divers tocs et sa facultés quasi innée à énerver Dolan. Ce constat rendait les choses plus simple, et c'était sans doute la vérité en plus. Mais qu'a-t-il fait pour mériter ça?

       -A propos, vous allez rentrer chez vous dans cet accoutrement? demanda-t-il en pointant le costume moulant sortit tout droit d'un comics. Si c'est le cas, j'aimerais vous accompagner pour voir ça.

       Il la gratifia d'un sourire insolent et la contourna pour fouiller dans son bureau. Il ouvrit un de ses tiroirs à l'aide d'une clé et y laissa tomber l'anneau de saphir. Il sortit la petit arbalète d'Huntress et referma ensuite le tiroir. Il l'observa avec un intérêt très relatif, la tenant à bout de bras comme s'il s'agissait d'un sac poubelle, puis la tendit à Huntress.

      -Cette... chose vous appartient il me semble.

      Dolan supposait que c'était cette arme qui l'avait neutralisée lors de l'effraction.

Dolan n'avait pas tort sur un point - en fait, plusieurs, même. Hana ne voulait pas qu'on sache qu'elle jouait les héroïnes la nuit... Et elle ne voulait pas non plus voler à travers la ville au bout de son grappin en plein jour, ou faire appeler sa moto jusqu'ici... On voyait bien le problème dans les comics, déjà : quand la populace savait qu'un super héros veillait sur eux, tous les prétextes étaient bons pour les appeler. Huntress ne voulait pas d'un Bat-signal ; elle se prétendait libre de toute contrainte, et elle ne voulait jouer que quand bon lui semblait. Nul doute que Dante, s'il allait être "rassuré" de savoir que c'était sa nièce qui jouait les justicières qui fait tomber la concurrence, renforcerait davantage la sécurité autour de sa chambre pour l'empêcher de sortir en lui servant le magnifique discours où reviendrait souvent la phrase magique "mais tu es si précieuse, Rachele, et j'ai juré de veiller sur toi".

Bref, Hana eut une petite moue boudeuse, et elle paraissait presque adorable. Et c'est donc une gamine heureuse qu'elle reprend son arbalète. Elle l'observe sous toutes les coutures pour vérifier que son jouet préféré n'a pas été abîmé, et satisfaite, elle sourit à William.

- Merci, Maître Dolan ! (Elle raccroche son arbalète dans son dos.) Pourrai-je aussi récupérer mon Magnum, il m'est précieux...

Elle se cale dans son siège, autant qu'elle le peut avec son arme dans le dos, et croise les jambes dans l'autre sens. Elle sourit à l'avocat, mais prend un air de chaton malheureux.

- Je pensais que vous m'éviteriez le retour chez moi dans cette tenue... Ce serait trop vous demander d'envoyer un de vos larbins m'acheter une tenue et un sac, au centre commercial ? S'il vous plaît ? On mettra la facture de vêtements sur vos honoraires...

Elle fait un faux numéro de charme, sourire en coin et battements rapides de cils. Un homme comme Dolan doit aimer les grandes femmes, pas les gamines capricieuses dans son genre. Mais Hana n'est pas là pour le charmer : elle doit juste rentrer chez elle, il est l'heure de déjeuner et elle a sauté le petit déjeuner... Son ventre gargouille mélodieusement.

       Des vêtements maintenant... Elle avait fracassé sa fenêtre, détruit sa journée, et commis toute une liste de choses que provoqueraient une nouvelle bouffée de colère à l'avocat s'il commençait à les énumérer... Et en plus elle voulait qu'il fasse du shopping. Mais qu'elle se démerde, bon sang. Malgré tout, William n'était encore assez énervé pour oublier qu'il s'agissait d'une femme. Le gentleman lui lança un regard blasé et craqua sans complexe devant son air de chien battu.

       -Quelle merveilleuse idée! Ironisa-t-il. Le temps que je vous habille vous pourrez vous adonner à votre occupation favorite: me casser les pieds.

       Sans cesser de grommeler pour lui-même il s'assit sur le coin de son bureau en noyer et se racla la gorge pour chasser toute ironie dans sa voix. Il attrapa le combiné et composa un numéro en tapant sur les touches un peu plus fort qu'elles ne le mériteraient. Puis, avisant qu'il avait oublier un petit détail, il masqua le micro avec sa main et se retourna vers la jeune fille.

       -Votre taille mademoiselle? Fit-il dans une imitation convenable du larbin de bonne famille.

       Une fois pourvu de cette précieuse information, il aboya quelques ordres dans le combiné puis après avoir entendu un "bien monsieur Dolan" à moitié étouffé, il coupa l'appareil. Puis, d'un coup de rein, il descendit de son bureau et s'accroupit une nouvelle fois devant ses tiroirs. Il farfouilla un peu plus longtemps que prévu puis lança un regard intrigué à Hana.

       -Vous êtes sûre d'avoir emporté votre magnum?

(j'ai honte du délai et de la médiocre qualité de mes posts u___u désolée)

Hana offrit un sourire mi amusé, mi charmeur, avant de donner sa taille à William : normalement, elle faisait faire ses vêtements sur mesure - le problème du métissage, qui fait qu'elle n'a ni la taille de base japonaise, ni la taille standard européenne, mais quelque chose juste entre les deux ! Pourtant, elle n'allait pas énerver le juriste davantage. Même Hana voyait quand il ne fallait pas pousser davantage le bouchon. Elle se permit pourtant une dernière réflexion, une fois qu'il eut raccroché et disparut derrière son bureau :

- L'avantage, si vous voulez me mettre ces nouveaux vêtements, c'est qu'il faudra m'aider à enlever mon...

Pourtant, son sourire et toutes pensées coquines la quittèrent à la question de William. Si elle était jusqu'à présent un peu avachie sur son siège, elle se redressa d'un coup de rein, portant la main au porte ceinture vide. C'était une belle arme, que Hana aimait particulièrement, et une série limitée, la rendant toujours plus précieuse et rare.

- L'un de vos gorilles à du se dire que ce n'était pas un jouet pour une gamine comme moi. Je suppose que l'un d'eux l'a gardé pour lui.

Et ça, Hana ne l'aimait pas du tout. Pourtant, elle savait qu'il valait mieux qu'elle n'exige plus rien de de William, sous peine de vraiment trop l'énerver. Elle haussa donc les épaules, malgré un contentement plutôt évident, surtout du au 'désordre' que cela créait, et sourit au juriste :

- Ne vous inquiétez donc pas pour cela. Je le retrouverai bien toute seule. Je ne voudrais pas davantage vous "casser les pieds", cher ami.

Son ventre se manifeste une nouvelle fois, et elle jure en italien à voix basse - sisi, à voix basse, c'est si rare qu'il faut le noter. Les larbins de l'avocat mettent un temps incroyable à revenir, ils auraient besoin d'un sérieux coup de fouet, si ça ne tenait qu'à la Bertinelli !

- Une fois que j'aurai enfilé une tenue un peu plus passe-partout, pourrai-je vous inviter à déjeuner, Maître Dolan ?