Voila une journée pour le moins amusante, et entre l'arrivée des lourdingues et le joyeux carnage qui s'était ensuivi, le fauve en moi avait eu sa part de sang... et de chasse, puisque j'avais fait mumuse avec le courrier que l'importun avait envoyé. J'adorais mes armes, vraiment. Bon, okay, pas autant que Jessie adorait la sienne mais bon, il n'y avait pas de comparaison possible sur ce point. J'étais habillée de manière à être le moins reconnue possible. Ma combinaison intégrale était presque entièrement fermée, ne laissant qu'une fine partie du visage visible, comprenant mes yeux et le haut de mon nez. De plus, je portais une veste longue, avec capuche, me tombant jusqu'aux pieds et cachant intégralement ma tenue pour le moins incongrue dans ce lieux presque moyenâgeux. Ah, comme la technologie Tekhane me manquait... pas autant que la présence de Jessie si je retournais à Tekhos en tout cas. Je le savais au fond de moi.
S'il y avait une chose que je ne comprenais pas au sujet de ma patronne, c'était sa tendance à toujours vouloir étaler son nom partout où elle passait, et donc à s'attirer toutes sortes d'emmerdes dont on s'amusait, plus ou moins selon les situations, à se sortir. Ce coup ci ne rata pas une fois de plus et nous entendîmes un passant reconnaitre la bandit et donc lancer les loups à notre poursuite... J'adorais ce job. La fuite fut rapide et efficace, comme devait l'être toute fuite bien organisée. Après notre première escapade bénigne, j'avais pris l'habitude de toujours prévoir un plan de fuite. Vu la tête brûlée à mes côtés...
La grille et les gardes ne posèrent aucun problème et nous nous évadâmes vers les plaines avec le sourire aux lèvres et, je le savais, du baume au coeur. Écraser des ordures était le bonheur de toute femme bien constituée. Enfin, toute femme qui se respecte. Je ne considérais même pas ces pimbêches inutiles qui ne trouvaient rien de mieux que de vivre leur vie en soumises aux désirs de leurs maris.
Je repensai à la question que m'avait posé la jeune pirate dans le bar et consentis à répondre lorsque Jessie ralentit le pas et me grilla sur le fil pour ma réponse, et poursuivit comme je m'y attendais par une demande d'intégration à notre duo de comiques... Enfin, moi je trouvais ça comique la manière dont on les faisait déguerpir, Jessie je ne savais pas. Je ralentis ma monture pour me trouver à côté d'elles et relevai ma capuche, révélant la partie faciale de mon armure qui se rétracta sans un bruit, permettant à Emma de voir pour la première fois mon visage. Ma crinière rousse, comme heureuse d'être libérée, coula et s'installa sur mes épaules, et mes yeux d'un vert d'émeraude se fixèrent dans ceux de notre invitée, comme pour essayer de voir si elle valait le coup.
C'était le cas, j'essayais d'analyser une possible prochaine recrue, et j'eus le plaisir de ne voir sur sa figure aucun signe de duplicité ou d'autre tromperie. Souriant légèrement, je rompis le silence dans lequel j'étais enfermée et déclarai :
Enchantée de te rencontrer Emma, je trouve intéressante l'idée de travailler avec toi dans un futur proche.
On pouvait dire ce qu'on voulait, je n'étais pas cruelle dans l'âme et ça se voyait à mon sourire. Je n'étais plus innocente, bien entendu, mais j'étais loin d'être au niveau de Jessie lorsqu'il s'agissait d'être froide. Et mes moments de gentillesse, je le pensais, étaient donc un peu plus agréables que ceux de ma compagne. Non que je détestais sa compagnie, bien au contraire. Il ne me restait plus qu'à voir où allait s'installer Emma dans notre bande, et le rôle qu'elle comptait prendre. Je laissais ça à la boss, j'étais une scientifique, pas dans les ressources humaines, et ma chef avait un charisme insoupçonné.