Dire qu’elle était impatiente était bien en dessous de la vérité. Des semaines qu’elle cherchait l’endroit parfait pour une séance photo. Un petit coin de verdure, suffisamment isolé, baigné par une lumière naturelle, qui saurait mettre son regard en valeur et sublimer ses traits… Enfin, pas seulement. Ne soyons pas hypocrites. Emi n’avait pas passé des heures à scroller sur les réseaux et les sites touristiques pour de simples clichés ordinaires. Ce qu’elle voulait, c’était captiver, que chaque regard posé sur elle se perde sur ses formes généreuses, sur la courbe de ses lèvres mutines, sur ce maillot de bain ridiculement minuscule qu’elle avait choisi spécialement pour l’occasion.
Après tout, ces photos, Emi comptait bien les vendre à prix d’or.
Certains abonnés se feraient un plaisir de payer pour chaque image, pendus à ses posts. Suspendus à ce mélange d’innocence et de provocation qu’elle usait savamment, qu’elle savait parfaitement doser, et ce, depuis de nombreuses années.
Ainsi, notre jeune modèle avait déniché le genre d’endroit où chaque feuille, chaque rayon de soleil, chaque grain de sable ne pourrait que conspirer pour rendre sa présence hypnotique. Et bien sûr, à cette heure-ci, Emi était seule au monde. Pas d’âme qui vive à l’horizon. Cette petite crique sauvage, nichée entre deux falaises immenses, offrait un décor à la fois intime et spectaculaire, parfait pour transformer une simple séance photo en un véritable spectacle de séduction. Plus encore, la plage valait bien toutes les cartes postales des Caraïbes : eau cristalline, sable fin et lumière dorée, elle avait presque l’impression d’être en vacances, alors qu’elle passerait cette après-midi à poser pour son appareil photo. Un travail de longue halène, n’est-ce pas ?
Qui pourrait croire une telle chose ?
Dans un sourire léger, un soupir de soulagement au bord des lèvres, Emi ne tarda pas à déposer ses affaires dans le sable, son sac à dos aussi lourd qu’un demi-tonne. Pour accéder à ce recoin, elle avait marché des heures, escaladant des sentiers escarpés et contournant des rochers glissants, sous un soleil de plomb. Heureusement, Emi était sportive, habituée à de nombreuses séances d’entraînement épuisantes – marche, course, musculation. Ainsi, cette escapade ne lui avait presque rien coûté, peut-être quelques muscles endoloris par l’effort, mais rien qui ne puisse être compensé par le plaisir anticipé de la séance. Le jeu en valait clairement la chandelle.
Mais pour l’heure, il lui fallait préparer son matériel, afin qu’elle puisse commencer son shooting photo. D’un geste marqué par l’habitude, appareil photo et autres accessoires furent sortis de son sac, réglés, réajustés, vérifiés avec une précision quasi obsessionnelle. Chaque objectif avait été soigneusement choisi, chaque filtre positionné, et le trépied installé sur le sable pour garantir la stabilité parfaite. Emi passa ses doigts sur les boutons et les molettes, testant la lumière, l’ombre et les angles, anticipant déjà les clichés les plus flatteurs. Elle savait ce qui fonctionnait. Elle n’était plus une débutante, à présent, bien au contraire.
Un dernier coup d’œil autour d’elle : le soleil effleurait l’eau d’un éclat doré, le vent jouait doucement avec les branches des arbres un peu plus loin. Par-fait. Passant une main sur sa nuque pour replacer une mèche de cheveux rebelle, Emi finit par retirer sa petite robe de sport, légère, parfaite pour plusieurs heures de randonnée. Toutefois, à cet instant, elle n’en avait plus besoin. Elle saurait la retrouver plus tard, à son départ. Nue au milieu de nulle part, ses pieds plongés dans le sable chaud, et pas le moins du monde embarrassée par une quelconque pudeur malvenue, Emi sortit plusieurs maillots de bain de son sac. Uhm, lequel porter ? Le rouge, ou peut-être le noir ? Une ou deux pièces ? Et pourquoi pas tous, chacun leur tour ? Elle avait suffisamment de temps devant elle pour en changer.
Savourant la sensation du soleil sur sa peau, elle enfila son maillot de bain ridiculement minimaliste, ajustant les bretelles et tirant légèrement sur le tissu pour qu’il épouse parfaitement son corps. Rouge vif, ultra-mince et très échancré, son trikini dévoilait presque tout, soulignant ses hanches, son ventre plat et sa poitrine volumineuse. Il conservait juste ce qu’il fallait de tissu pour éveiller la curiosité, laissant l’imagination de ses abonnés vagabonder là où le tissu s’arrêtait. Et nul doute qu’ils avaient l’esprit fertile, pas vrai ? Elle pouvait le confirmer, au regard de tous les commentaires laissés sur ses publications, récentes comme anciennes.
Fin prête, Emi ne se fit pas prier – voilà qu’elle se plaçait devant l’objectif, une petite télécommande à la main, pour déclencher l’appareil photo à distance. Indispensable lorsqu’elle était seule. Un sourire espiègle étira ses lèvres, avant qu’elle ne s’abandonne à plusieurs poses spontanées : une main sur la hanche, assise ou allongée dans le sable, accroupie, un bras levé au-dessus de la tête, penchée en avant, ou bien, son dos cambré, ses fesses légèrement relevées. Par la même occasion, ses doigts jouèrent avec le tissu de son maillot de bain, tirant sur l'élasthanne pour dévoiler sa poitrine, ou au contraire, épouser parfaitement la forme de ses lèvres intimes. Bien qu’en réalité, la culotte du maillot était si échancrée qu’on pourrait presque douter de sa présence.
Toutefois, la brunette finit par se lasser de ces simples poses, et d’un coup d’œil vers la mer, un sourire malicieux étira ses lèvres. Pourquoi ne pas mêler l’utile à l’agréable ? L’eau scintillait sous le soleil, invitante et certainement rafraîchissante. La chaleur était si lourde qu’elle transpirait légèrement, chaque goutte perlant sur sa peau hâlée. Sans hésiter, Emi se leva, récupéra son appareil photo, heureusement étanche, et s’avança vers le rivage, sentant le sable chaud glisser sous ses pieds. Bien qu’elle ne savait pas nager, ou très peu, elle ne s’inquiétait pas outre mesure. Après tout, elle ne comptait pas trop s’éloigner du rivage. L’idée était simplement de prendre de nouvelles photos dans l’eau, de profiter de l’humidité de son maillot pour prendre de nouveaux clichés, bien plus suggestifs et audacieux.
Cette séance serait parfaite. Et ferait un carton.