Après donc avoir expliqué l’urgence de sa requête auprès de la belle brune tenancière de l’établissement, Topaze attendit patiemment son verdict, priant tous les dieux et saints possibles pour que cela soit possible, alors qu’elle n’était pas croyante pour un sous. Et comment l’aurait-elle pu, vue la vie qu’elle menait et la famille qu’elle avait ? C’était une tuerie à toute croyance son existence, rien d'autre qu’une belle pièce de théâtre, ni plus ni moins. Il était évident pour elle d’être totalement athée, mais elle gardait cela secret, tout comme sa vraie identité, car ses croyances religieuses ou non faisaient partie d’elle, et non de Tobias.
Quoique, cela dépendait aussi des jours et de son humeur. Aujourd’hui, elle était mitigée, ne sachant plus si une quelconque force existait ou non dans l’univers, ne demandant que ça à son existence quelque part, histoire de se sortir du merdier dans lequel elle se trouvait, autant celui depuis ses 14 printemps que celui-là : cette soirée thé dansant pour rencontrer ses prétendantes. Mais la belle blanchette fut sortie autant de ses songes que de ses prières perdues, en entendant la belle Céleste s'adressait à elle armée d’un beau sourire, sûrement amusée de sa requête peu banale. Mais pas que ! Elle sentit la dame quelque peu prudente sur la fin de ses mots, voire légèrement agacée de manière subtile. C’est donc sans attendre que la jeune noble dans son costume de parfait héritier mâle vint prendre la parole d’un ton rassurant, venant lever doucement ses mains en l’air pour dissiper tout malentendu.
« N’ayez craintes, Dame Albane, je n’ai jamais dit une telle chose. Ô grand jamais, je ne considérerais vos muses comme des bêtes de foire, je vous en fait le serment Ma Dame. »
Une main posée sur le cœur, tandis que l’autre restait en l’air, la jeune noble déchue inclina légèrement la tête, venant par ce geste appuyer ses propos d’un geste symbolique lié au serment. Après cela, Topaze se redressa et vint reposer ses mains sur ses jambes, son regard doré plongé dans celui tout aussi doré de la belle tenancière derrière le bureau, reprenant la parole avec un ton qui se voulait toujours rassurant.
« Concernant l’animation, cela serait ce que je vous ai dit : servir le thé, pouvoir mener une conversation, accompagner des damoiselles à la danse… Dans les grandes lignes, ce ne serait ni plus ni moins cela. J’ai besoin de quelqu’un qui sache exceller dans ces arts, tout en se fondant parfaitement à la noblesse par ses manières, son aura, sa beauté, son éloquence… Et j’ai grand espoir, que vous pourriez peut-être m’aider à trouver cette perle rare, Ma Dame. »
Et alors que la petite tête blanche regarda avec attention Céleste réfléchir, priant de nouveau tous les dieux et les saints possibles et inimaginables, c’est la peur au ventre, mais sans le montrer, qu’elle attendait patiemment une réponse de la belle ténébreuse. Et là, ô miracle ! La grande dame de ces lieux vint lui avouer qu’elle avait bien une muse qui pourrait faire l’affaire, le tout armée d’un petit sourire en coin qui manifestait son amusement. Topaze n’eut point le temps de dire quoique ce soit, entendant l’énigmatique brunette appeler ensuite la jolie jeune femme qui l’avait amener jusqu’ici, l’ordonnant avec tendresse d’aller chercher un certain « Le Tempéré ». Cela devait être le nom de la muse en question, oui, et cela devait avoir un lien avec sa façon d’être se disait-elle.
Mais la demoiselle aux prunelles dorées fut rapidement sortie de ses songes, entendant la belle brune face à elle bien installée dans son fauteuil, venant lui demander quelques explications sur les raisons de cet urgentissime besoin d’aide pour un événement de ce genre, événement qui normalement est préparé longtemp en avance tel un concerto. Et alors que la sublime ténébreuse se leva avec élégance, voguant préparer des boissons chaudes, Topaze se mit à prendre la parole, gardant toujours un ton sûr d’elle mais doux.
« En effet, vous avez entièrement raison Dame Albane. Pour être honnête avec vous, si je puis me le permettre, cette soirée est déjà préparée depuis des mois. Et, en réalité, il n’y a pas vraiment besoin d’une personne supplémentaire pour l’animation ou quoique ce soit d’autres. Mais… »
Le ton de la noble déchue se fit plus grave et sérieux, son regard laissant entrevoir un brin de douleur dissipé au fond de ses prunelles qui tremblaient à peine, alors qu’elle regarda ses mains sur ses genoux, telle une personne en plein aveu.
« C’est moi qui ait besoin d’une personne supplémentaire, afin de créer une faille imprévue dans cette soirée parfaitement orchestrée. Pour ce faire, j’ai besoin de quelqu’un d’assez particulier comme vous l’avez compris, qui sera capable de distraire et d’attirer l’attention sur lui, volant même la vedette aux autres animateurs de la soirée. Mais pas seulement. »
Elle ferma les yeux un instant en inspirant et expirant discrètement et gracieusement, entendant d’une oreille la maîtresse des lieux continuait à s’affairer à la préparation des boissons, pouvant en humer le délicat parfum dans l’air tel un encens apaisant son âme, la faisait reprendre la parole avec calme et douceur, tout en étant plus sérieuse que jamais en rouvrant les yeux.
« Il est plus que vital qu’il me vole également l’attention ce soir, afin de protéger ces pauvres jeunes femmes qui ne savent pas dans quoi elles vont tomber, si l’une d’elle à le malheur de jeter son dévolu sur moi. Pour leur sécurité à toutes, il est primordial qu’aucune d’elles n'arrive à rentrer dans ma famille. Elles n’ont aucunes idées de ce qui les attend ni de ce qui risqueraient de leur arriver, si la malchance de devenir ma femme venait à les frapper. Il y a des choses de ma famille qui ne vaut mieux pas qu’une seule d’entre elles découvrent, au risque de se voir plus que sacrifier son existence Ma dame. »
C’était quelque chose de compliqué à expliquer, la noble demoiselle le savait bien. Mais, elle se devait par tous les moyen de faire comprendre à cette femme qui pouvait lui apporter son aide, tous les dangers que pouvaient encourir ses prétendantes en allant plus loin que cette soirée ce soir. Bien entendu, elle ne pouvait pas vraiment lui dire les dangers que cela était, les traumastiques possibles et la descente en enfer que cela risquait d’être pour sa future femme, non. Car si elle faisait cela, c’était aussi lui dire qui elle était vraiment, dévoilait toute cette mascarade qu’elle était obliger de faire depuis des années, venant donc dévoiler le complot et mensonge gigantesque de ses parents qui leur feraient perdre leur place dans la noblesse, risquant par ailleurs la peine de mort par l’insulte de la couronne, sans parler de l’affront fait à l’église en orchestrant un faux enterrement, et plus encore, autant de la part de sa famille que de ceux qui ont participés à toute cette superchérie depuis des années. Enfin, ceux qui étaient encore en vie aujourd’hui. Non, il valait mieux ne pas en dire plus, du moins pour le moment, laissant juste comprendre l’importance de sa requête auprès de la protectrice des muses, et à quel point son aide était des plus primordiales à ses yeux.
Donc, après cette bombe dévoilée, Topaze se vit offrir du café par la magnifique Céleste, pouvant avoir même la chance d’entendre une note d’humour de sa part, ce qui ne manqua pas de lui arracher un franc sourire amusé ainsi qu’un doux rire. Mais, ce moment fort amusant fut vite interrompu, venant à entendre quelqu’un à la porte du bureau, suivi d’une voix grave, celle d’un homme vraisemblablement, à laquelle la tenancière des lieux donna l’autorisation d’entrer. Et là, un bel homme pénétra dans la pièce, fort séduisant, pour ne pas dire magnifique. Puis, quelle élégance, divinement bien habillé, semblant bien bâti et musclé, plutôt grand, de magnifiques cheveux bruns et des yeux bleus totalement hypnotisant. Puis sa voix… Oui, la belle demoiselle à la longue chevelure de neige devait reconnaître que c’était là un homme des plus exquis qu’elle n’ait été donné de rencontrer dans sa vie, même un homme qui réussit à captiver son regard alors que, jusque là, elle ne faisait pas plus attention que cela.
Et alors qu’un rapide échange se fit entre Céleste et Le Tempéré, Topaze cessa de regarder ce bien séduisant invité, son regard passant de l’un à l’autre durant leur conversation, si on pouvait appeler cela ainsi. Puis, la belle brune invita la blanchette à prendre la parole, afin qu’elle puisse mieux présenter le travail demandé au potentiel intéressé. Répondant premièrement par un hochement de tête, la noble demoiselle reporta son attention vers le beau brun, venant le saluer respectueusement par un mouvement de tête, avant de venir prendre la parole.
« Bien le bonjour Le Tempéré. Veuillez accepter mes excuses de vous avoir fait venir si urgentement, je vous suis très reconnaissant de votre présence, merci infiniment. Voilà, j’aurais besoin de vos services pour ce soir, afin d’animer un thé soirée dansant qui aura lieu à la demeure des De Ambre. Pour l’animation, je ne vous demanderais rien de dégradant, je vous le promets. J’aurais besoin que vous puissiez participer à quelques animations, dans lesquelles vous pourrez démontrer vos compétences dans l’art du thé, l’art de la conversation et l’art de danser si besoin. Cela ne sera pas forcément la chose la plus amusante à faire j’en conviens, mais, il n’y aura rien de dégradant à faire, je vous l’assure. La seule chose que je vous demanderais dans tout cela, c’est autant de vous fondre dans la masse des nobles que d’en ressortir pour attirer les regards. Cela peut paraître paradoxal, mais c’est vital pour le bon déroulement de la soirée. Est-ce que cela vous paraît envisageable ? »
Après ses premières et longues explications, Topaze vint décroiser ses jambes pour les recroiser dans l'autre sens, venant à poser ses mains sur l’un de ses genoux, l’une par-dessus l’autre, tout en regardant attentivement le bel homme debout face à elle. Elle ne savait pas si elle devait rajouter la partie délicate de sa raison à cette requête si urgente de faire appel à ses services, mais, elle se disait que soit la belle ténébreuse lui demanderait d’en parler ou alors, peut-être qu’elle en parlerait elle-même, selon si cela était essentielle ou non aux explications de la petite tête blanche.