" La nostalgie est un poison. "
Ces mots, Elynie les ressentait au plus profond de sa chair alors qu'elle foulait d'un pas lents les restes d'une maison en ruine. Elle tenait ce propos de son frère, Kin'Dareb, dont la puissante présence se tenait pour l'instant en hauteur, alerte et vigilant, tandis que la prêtresse d'écailles foulait lentement un lieu qu'elle avait quittée depuis trois longues années. Pourtant, elle n'était pas revenue par nostalgie. Durant leurs pérégrinations, elle et son frère avaient rencontrés de biens nombreux voyageurs, certains fort peu courtois, d'autres autrement plus cordiaux, tant et si bien que la jeune femme avait appris bien des rumeurs. On lui avait notamment dit que l'ancien royaume dont elle était originaire avait certes perdu toute forme de direction, de vie, d'importance, mais qu'il y avait encore maintenant d'anciens citoyens qui y retournaient dans l'espoir d'y trouver un peu de ce qu'ils avaient put goûter à l'âge d'or du Royaume de Sylvandell. En toute honnêteté, Elynie savait que les dragons d'Or avaient quittés ces terres, que la famille royale avait été enterrée... Alors que pouvaient-ils espérés, ces pauvres hères, à venir ainsi parcourir les ruines de ce royaume ?
C'est là qu'elle avait compris qu'il pouvait s'agir d'elle. Malgré tout, sa ressemblance avec la défunte princesse, le fait qu'elle soit accompagnée par un dragon aux écailles argentées, il y avait là pas mal de chances pour que des concitoyens aient eut vent de son existence, de sa survie même, et qu'ainsi ils se soient mis en route dans l'espoir de la rencontrer à nouveau. Aussi, c'était avec sur le coeur son devoir de prêtresse qu'elle avait fait le chemin retour, en direction des ruines de son pays natal. Kin l'avait ainsi mise en garde, mais elle n'avait pas franchement désir de l'écouter, simplement de s'assurer que personne ne se trouvait encore à attendre son potentiel retour au milieux de ruines. Sylvandell était morte, c'était un fait, personne ne devait à nouveau en parcourir les décombres. Si elle y allait, ce n'était pas pour se faire adorer, chose que devait craindre sa puissante famille. Non, Elynie s'y dirigeait avec pour objectif d'ordonner à tout ceux qu'elle rencontrerait de quitter cet endroit, de laisser mourir ce morceau du passé, pour enfin aller de l'avant vers une nouvelle vie plus saine.
Voilà pourquoi elle grimpait sur les différents murs effondrés de la cité, qu'elle se glissait entre les décombres, qu'elle repoussait certains débris pour se créer un chemin au milieu de nuages de poussières et de cendres. Cela faisait déjà deux jours qu'elle sillonnait les environs de la cité royale, s'affairant à suivre la moindre trace de vie qu'elle pouvait déceler... Mais pour l'instant, aucune forme d'existence n'avait rencontré son chemin. Les villages étaient vides, les forêts n'abritaient plus aucunes formes de vie, les routes et chemins de terres s'éteignaient doucement sous une végétation vive, parfois si dense qu'elle en devenait infranchissable. Oui, ce royaume avait perdu toute forme de civilisation, ne resta alors qu'une destination pour la jeune femme, un lieu qu'elle se devait malgré tout de vérifier avant de quitter ce pays, définitivement pour le coup : la capitale. Même pour elle, l'idée de devoir à nouveau parcourir les gravats de la cité où elle avait grandie l'inquiétait. Elle pressentait la détresse qu'elle y ressentirait, la peine qui serait sienne de voir son passé ressurgir au milieu des ruines.
Sans son devoir, elle n'aurait jamais fait le choix d'y retourner. Pourtant, elle ne put qu'envoyer un ultime message télépathique à son frère de couvée avant de s'enfoncer au coeur du royaume, en direction de l'imposante cité montagnarde.
" Kin, je vais y aller.
- Ce sera sans moi. Je n'ai aucunes raisons de perdre mon temps au dessus de morceaux de pierre dénués de sens.
- Je le sais. Je reviens dans deux jours, n'ai crainte. "
*
* *
Il lui fut difficile de retenir ses larmes. Son foyer, l'église d'argent, n'avait même plus de forme : Quelques maigres pierres seulement laissaient entrevoir qu'il y avait eut, un jour, l'existence d'un mur à cet endroit là, d'une colonne à celui-ci, ainsi que d'un clocher, tout au fond. Les escaliers menant au nid de Kin étaient ensevelies sous les débris, tandis que ce qui avait été sa propre chambre n'avait même pas encore une forme, un simple trou causé par elle ne savait quel puissance magique se trouvant à la place de celle-ci. Elynie s'en détourna avec le coeur rongé de douleur. Son frère avait raison, la nostalgie était effectivement un poison. Ce qu'il ne lui avait pas dis, c'est qu'elle l'avait déjà dans ses veines sans même le savoir. Qu'aussi bonne et juste était sa mission, cela ne la protégeait pas pour autant du malheur que de voir sa patrie réduite en lambeau. Mais elle n'avait pas le choix. Elle dû raffermir son emprise sur ses émotions, ravaler les sanglots qui voulaient s'échapper de sa gorge, et reprit son exploration.
Proche de l'église d'argent se trouvait le coeur de la foi de feu Sylvandell. Si il était désormais certain que la chapelle de la foi d'argent avait été réduite en miette, Elynie voyait déjà qu'il n'en avait pas été de même avec le temple de l'Omni-prêtre. Le lieu trônait encore assez fièrement au milieu des ruines. D'ailleurs, quand elle s'en approcha, ce ne fut pas sans remarquer que si plusieurs flèches se trouvaient encore dressées fièrement vers les cieux, ce n'était pour autant pas sans que les murs de cette bâtisse n'ait subit les mêmes affronts que le reste de la capitale : Un trou béant en avait ouvert le flanc Ouest, comme si un gallion en avait rencontré la façade et s'était échoué dessus à pleine vitesse. L'idée même ne manqua pas de faire trembler la fausse elfe, mais elle préféra éclipser ce genre de fantaisie de son esprit par des éléments de réflexions bien plus concrets : sa mission. Si elle ne croisait pas d'anciens Sylvandins par ici, il ne lui resterait bien que le palais pour espérer trouver des fugitifs. Si ce n'était pas le cas... Alors elle se remettrait en route, avec le baume au coeur de savoir que nul n'errait encore en ces lieux.
Pourtant ... Quelque chose allait bien rapidement la calmer dans son espoir de repartir rapidement des lieux. C'est quand elle approcha de l'enceinte de l'église, qu'elle entama de gravir le tas de débris qui s'échappait de l'ouverture béante produit par quelques terrible sortilège, qu'elle perçut un son étrange, anormal : Une respiration. Cela lui prit quelques secondes pour s'en assurer, mais oui, elle entendait bien le râle difficile et poussif d'une personne exténué, sûrement poussé à l'extrême de son énergie et de ses forces. Elle ne se précipita pas, après tout il aurait été stupide que dans un élan d'empressement elle se blesse en glissant sur un débris instable. En revanche, elle finit son ascension à un rythme mesuré, et une fois en haut de l'amas de pierres et de bois calciné, elle observa l'intérieur de la bâtisse. La respiration qu'elle percevait se répercutait sur les murs de l'église, l'empêchant d'avoir une appréciation solide de sa provenance, mais son regard fit le travail à la place de son ouïe. Elle vit au fond cette figure altière, en partie adossée à l'autel de la chapelle, peinant visiblement pour rester conscient.
La prudence invitait à ne pas s'approcher ainsi d'un homme blessé au milieu de ruines abandonnées depuis plusieurs années. Elynie y préféra la bienveillance de l'église d'argent, descendant de son perchoir d'un pas prudent tout en élevant la voix pour se faire entendre, annonçant son arrivée au soldat qui se trouvait là.
"
Ces lieux n'ont ni prêtre, ni guérisseur depuis des lunes. S'y réfugier est une folie. "
Une pierre glisse sous son pas, et la voilà qui se jette de côtés pour se coller aux gravats, afin de ralentir sa chute comme elle peut. Deux mètres de glissade douloureuse s'ensuivent, mais elle atteint par chance le sol inégal de l'église, non sans louper un battement de coeur. Dieu que ses vêtements manquaient de praticité dans ce genre de situation. Elle se redresse doucement, observe l'homme d'âge mûr depuis sa position. Il est blessé, c'est une évidence, mais il se trouve tant et tant recroquevillé sur lui-même qu'elle ne parvient pas à observer où se trouvent ses plaies. Par contre, elle ne peux que constater que l'homme ne semble guère provenir de Sylvandell, autant dans sa tenue militaire, aucunement commune avec les équipements sylvandins, mais aussi dans les traits durs et battus de son visage. Elle fit un premier pas en sa direction, s'exprimant calmement.
"
D'où venez-vous ? Que faites-vous donc perdu au milieu de ces ruines ? "