« (…) je n'ai pas ma caméra (…) », Camille s'était déjà mis en tête plein de choses qu'il ne saurait définir, mais il pourrait bien lui prêter sa propre caméra vidéo. Même si elle ne connaît pas l'outil, elle saura vite y retrouver ses marques. Et peut-être même que, la complicité aidant, il pourra filmer aussi son petit bonbon rose ? D'ailleurs, le dos tourné alors qu'elle regarde au dehors, elle offre à Camille une silhouette proche de la perfection, harmonieusement moulée par le latex, sans rien de trop juste avec ce qu'il faut. Oui, elle aussi, il ne sait comment, mais il veut la filmer.
« (…) partir pour un nouveau voyage », après la douche froide, c'est la tempête de neige qui s'abat. Elle va partir, peut-être vite même. Camille n'est pour elle qu'un truc comme ça, un peu comme une prostituée pour un marin qui jette l'ancre quelques jours au port. On en profite, puis on part, sans sentiment ni souvenir. Camille se demande plus encore pourquoi elle est venue vers lui, dans ce salon de thé, pour partir aussi vite après. « Peu importe, Camille, elle est là, pour le moment, saisis ta chance. Elle ne t'a pas demandé en mariage ! Alors, profite du moment ; il sera toujours temps de voir pour la suite ».
Quand elle se retourne vers lui, elle ne peut ignorer le trouble qui emplit le regard de Camille. Pas rassuré, il attend le nouveau coup de massue. « (…) love hôtel (…) futur scenario », à quoi joue-t-elle. En France, ces love hôtels sont juste des hôtels un peu moins glauques que les hôtels de passe, que les couples adultérins réservent pour quelques heures. Mais ici ? « Pourquoi a-t-elle voulu venir chez moi, alors qu'elle savait qu'elle n'avait pas sa caméra ? ». Camille refuse de penser à un traquenard, mais les questions affluent, sans réponses.
Elle mène la danse, il boit ses paroles. Il n'ose même pas la contredire, ou poser une question qui pourrait paraître saugrenue. Il ne l'arrête même pas, alors qu'elle se dirige, sans même attendre un oui de principe, vers sa salle de bains. « Oh non, elle va tout découvrir ! », Camille est en panique. Car c'est là, dans un petit meuble blanc immaculé et discret, qu'il cache cette trousse de maquillage qu'il a constituée patiemment avec la plus grande discrétion, et c'est aussi là, dans le petite penderie ajourée, qu'il a posé trois têtes, chacune surmontée d'une perruque, une rousse, une blonde, une brune. Même si sa coiffure naturelle, si claire que ses mèches virent à un gris argenté, ont déjà fait de lui une jeune femme aux cheveux courts, Camille sait combien la blonde aux longs cheveux lui a parfois amené de beaux mâles, dont beaucoup néanmoins ont fui en découvrant la réalité.
« Oui, si tu veux, c'est là... ne fais pas attention au désordre », phrase dérisoire, alors que tout ce qui pourrait le trahir, si tant est que ce soit le cas, est parfaitement rangé. Et encore cela n'est-il rien, quand lui répond une expression « (…) nous irons toutes les deux dans ma chambre (…) » qui achève de le déstabiliser. Toutes les deux ? Impossible ! Il doit avoir mal entendu. Pourtant l'expression résonne dans sa tête, affolante et tentatrice. « Tu t'es souvent rêvé femme, et parfois même avec une femme, alors ne te défiles pas ! ».
Lissandre a fermé la porte de la salle de bains. Camille est en panique totale. Il fait encore jour, c'est dangereux de sortir féminine. « Je ne suis même pas maquillé ! », il risque d'être repéré, et nul ne sait ce qui pourrait advenir. « Tu n'as pas le choix, elle va repartir en voyage ; c'est maintenant ou jamais ». Camille ne parvient pas à se concentrer, trop de choses se bousculent dans sa tête. Le body dans le panier à linge ? Déjà utilisé, donc non. La robe noire dans la penderie. Lissandre l'a vue, mais, pour ce qu'elle appelle scenario, est-ce bien ? Camille sait qu'il n'a pas encore l'aisance pour mettre ou enlever une robe. « Non, ce sera ridicule ; il faut autre chose ».
L'idée ne lui vient pas, il ne doit pas perdre de temps. Alors il enlève déjà sa tunique ample, de celles qui lui permettent de sortir sans que nul ne remarque sa poitrine en plein essor. Certes, ce sont encore de petits seins, mais les injections les feront se développer, et il se souvient qu'un amant avait déjà su exciter ses tétons très sensibles. Les mocassins, le jean, tout ça part vite dans le panier à linge aussi. Il n'a plus qu'un slip noir très échancré, aux bords de dentelle blanche, dont la coupe ne laisse aucun doute sur le soin qu'il a pris à s'épiler.
« Allez, décide-toi, elle ne va pas mettre une heure à se rafraîchir ! ». Il retourne vers la penderie, il vient d'avoir une idée, ce bustier noir très élégant, qui donne l'impression qu'il a une plus grosse poitrine qu'en vrai. « C'est décidé ; je lui plairai comme ça, j'en suis sûr », Camille pose le bustier sur le canapé. « Ah, je sais ce qui ira avec, mes Cervin », car il s'est offert juste une paire de ces bas renommés qu'il réserve aux moments exceptionnels. Il les sort d'un tiroir, caressant leur douceur. « Oh, j'ai envie de les mettre tout de suite ! ».
Il ôte aussitôt le slip, et doit admettre que toutes ces émotions ont mis son sexe dans un état de trouble. « Ca va, la porte est fermée ; elle ne peut rien voir ». Alors que les injections ont souvent pour effet secondaire de diminuer le volume du pénis, le sien a subi un début de mutation étrange, ne diminuant pas, mais faisant davantage ressortir son système veineux, surtout en érection. C'est presque comme si les injections ne faisaient pas se développer que les seins.
« Bon, arrête de réfléchir ! », Camille s'assied sur le canapé, faisant lentement remonter un bas puis l'autre sur le peau parfaitement épilée de ses jambes. « Allez, vite, la suite ! », il se lève et enfile le bustier noir, l'ajuste, le serre au mieux pour faire pigeonner. « Et avec ça, tu mets quoi ? », il faut faire vite ; Lissandre va sortir de la salle de bains, elle ne doit pas le trouver comme ça.
« Tiens, le tailleur noir, il serait très classe », la décision avance. « Ah non, la jupe est courte ; s'il y a du vent, on pourrait voir que j'ai des bas », la décision recule. « Et puis, tu te chausses comment ? Pas les cuissardes, ça fera trop vulgaire. Tiens, les escarpins noirs brillants, ça fera chic ». Camille ne maîtrise pas encore à la perfection la marche avec des talons, mais cela lui paraît plus naturel pour assortir avec... Il ne sait toujours pas avec quoi.
« Oh, mon Dieu, Lissandre est dans la salle de bains, et c'est dans la petite commode qu'il y a mes plus belles petites culottes. Je ne vais pas sortir nu sous une jupe. Vite, Camille, réfléchis ! ». Camille se tourne vers la porte de la salle de bains, comme s'il pouvait y trouver une solution, et s'aperçoit avec effroi qu'elle est entrouverte. "Oh, mon Dieu, peut-être qu'elle m'a vu ! Bon, je fais quoi maintenant ? Comme si je le savais ? ».
Mais là, la malice traverse soudain l'esprit de Camille. Tournant le dos à la porte entrouverte, se cambrant et ondulant pour offrir la vision de ses fesses nues, il regarde ses pieds bien s'ajuster aux escarpins. « Je ne sais pas si tu es là à me regarder, Lissandre, mais je suis heureux de t'offrir cela en avant-première ».