Randal éclata de rire, puis fit signe à Leny de le suivre. Il allait lui faire visiter.
« Moi, ça doit faire 3 ans que je suis là. Et comme toi, je viens de la ville. Bug, enfin Jimmy, aussi c’est un citadin, mais j’imagine que ça te surprends pas. Lui, il est dans la résistance depuis deux ans, mais ça fait à peine trois mois qu’il s’est expatrié ici. »
Le chat leva la main vers la maison de l’écureuil, perchée à plusieurs dizaines de mètres du sol. On y accédait par un escalier en colimaçon enroulé autour du tronc massif de l’arbre supportant sans mal la construction.
« Bon, puisqu’on parle de l’écureuil, c’est là-haut qu’il crèche. Il a un peu, beaucoup, réaménagé. Maintenant, c’est lui qui gère l’électricité, les com, tout ça. Alors si jamais t’as plus d’eau chaude, tu sais sur qui gueuler. »
Il continua de marcher, longeant un édifice allongé sur lequel il ne s’attarda pas pour l’instant. Le long de celui-ci, un jardin de belle taille. Hector, l’impressionnant ours qui avait conduit Randal et Leny sur le site de la mission, était là, occupé à creuser des sillons pour une nouvelle semence. Le plantigrade ne leva même pas la tête au passage des deux hybrides. Le félin désigna une cabane quelque peu isolée par rapport au reste des bâtiments. On l’apercevait à peine derrière le rideau végétal.
« Là, c’est chez Hector. T’entre pas, sous aucun prétexte, sinon tu finiras dans la soupe du soir. »
Il ne plaisantait qu’à moitié, l’ours n’était pas la personne la plus sociable qu’on puisse imaginer. Le chat poursuivit, autant son chemin que ses explications.
« Hector est notre jardinier, notre cuisinier, notre charpentier aussi. Il a un fils, David, tu le verras presque jamais, un vrai rôdeur. C’est notre chasseur. Là, les deux maisons côte à côte, celle de gauche, c’est l’infirmerie de Miss Belle, et à droite, c’est chez Lionel. C’est aussi là-bas qu’on se rassemble pour manger et pour les réunions importantes. Et là, à côté de notre pseudo hangar, c’est chez les humains que tu connais déjà, donc. »
Randal s’immobilisa et fixa les profondeurs de la forêt.
« Par là, c’est la rivière. Tu peux t’y rendre, t’y baigner même si t’as envie. On s’en prive pas. Par contre, évite de t’éloigner seule du camp de base. Ce conseil, moi, je l’ai pas suivi et j’ai eu l’air très con après. On se perd vite dans la forêt, vraiment très vite. Hector et David, eux, ils se perdent jamais, mais ils sont nés ici. On aura toujours l’air de citadin maladroit à côté d’eux. »
Randal fixa Ghost et ajouta, d’une voix qu’il aurait pu employer pour une histoire qui fait peur :
« Et puis, oui, il y a de grosses bêtes. Elles viennent pas jusque là, on a mit des répulseurs autour du camp, sans compter notre armée de caméra pour prévenir les intrusions. Mais au-delà du périmètre… c’est la nature sauvage ! »
Il s’était un peu penché, il se redressa, souriant à présent.
« Par contre, des arbres de cette taille qui tombent, ça, y’a aucun risque. Au pire, quand on a une grosse tempête, il peut y avoir des chutes de branches, mais c’est tout. De toute manière, quand y’a une grosse tempête, et qu’on s’appelle pas Hector ou David, on reste tranquille à l’intérieur à se mater un film. On capte la télé, tu sais. Mais la télé, pour la regarder, c’est soit chez Bug, soit chez Lionel. »
Retour au bâtiment allongé qui se situait presque au centre du camp. Cette fois, Randal entra. Il alluma également la lumière, révélant un dortoir. Sol, murs, plafond, meubles, tout était en bois, tout sentait le bois. Les lits étaient faits, il y en avait cinq mais seulement deux semblaient servir puisque des affaires étaient posées à leurs pieds. Sur les murs, des affiches de film avec des hybrides mis à l’honneur.
« Là, c’est mon lit. Là, c’est celui de Suzy. Elle fait partie du groupe d’intervention, elle aurait dû participer à la mission de ce matin. Suzy, c’est notre sniper. Mais elle a morflée lors de la dernière mission. Elle est à l’infirmerie. D’aillerus, ce serait sympa d’aller lui dire bonjour. Toi, t’as le choix entre ces trois derniers lits. Au fond, c’est la salle de bain. »