Hegeria ne serait pas présente. Miranda avait profité de ces dernières semaines pour régler également le problème de la veuve encombrante. Publiquement, Hegeria s’était retirée après l’annonce du cancer de sa femme, et, aux yeux des médias, la femme de Jenny s’était retirée avec elle dans une maison médicalisée sur une île tekhane. Il pouvait être troublant, pour Jenny, de voir que sa femme n’était pas là, mais c’était conforme à la vision de Miranda. Comme elle l’avait à maintes occasions répété à Jenny, elle ne comptait pas lancer la dernière phrase de son plan avant d’être sûre que tout se déroule exactement comme prévu. Or, Hegeria était, depuis le début, une donnée de l’équation, une inconnue dont elle s’était occupée... À sa manière. Inutile d’en dire plus à Jenny, Miranda s’était juste contentée de lui dire que sa femme allait bien. Jenny avait pu profiter d’Hegeria ces derniers jours,, et c’était bien là tout ce que Miranda pouvait leur offrir.
Maintenant, il n’était plus possible de reculer. Jenny était dans une chambre d’hôpital, au sein du Laboratoire Dufausse. D’ici quelques minutes, les infirmières viendraient la chercher, et la prépareraient à l’extraction cérébrale. Une opération très complexe, qui nécessitait bien que Miranda se rapproche, et veuille sur elle. Les deux femmes s’embrassèrent encore, et, avant que Miranda ne s’éclipse, Jenny lui fit une ultime demande... Qui ne manqua pas d’arracher sur ses lèvres un léger sourire.
«
Je vois... Le baiser d’une petite Princesse pour la réveiller de ses cauchemars, hein ? Je devrais pouvoir faire ça, oui... »
La PDG l’embrassa une ultime fois, puis la porte s’ouvrit sur deux infirmières. Miranda salua une dernière fois Jenny, puis fila, et rejoignit la salle de contrôle. Les infirmières embarquèrent Jenny sur une civière, et firent rapidement une perfusion, puis rejoignirent la salle centrale. Jenny se retrouva devant l’appareil qu’elle avait vu il y a quelques semaines. Linda était là, le corps immergé dans une cuve, flottant dans un liquide translucide verdâtre ressemblant à du formol. Kaldwin était là, menant l’opération.
«
Déshabillez-là, et mettez-là dans le caisson ! »
Un produit anesthésiant commençait à circuler dans les veines de la femme. Elle se retrouva ensuite portée sur une surface moelleuse, dans un sarcophage de verre : une cuve. Des diodes s’allumèrent à l’intérieur, et Kaldwin glissa ses mains gainées de latex à l’intérieur, attrapant une sorte de gros casque qu’elle posa sur la tête de la femme.
«
Détendez-vous, Madame, détendez-vous... »
Mais il n’était pas sûr que Jenny soit en mesure de l’entendre. Le casque se posa sur son visage, et des ventouses se posèrent sur son crâne. Plusieurs voyants clignotèrent, et Kaldwin releva la tête en regardant la salle de contrôle. Laure, la Directrice de l’Institut Dufausse, leva le pouce pour signaler que tout se passait bien. À côté d’elle, Miranda voyait une série d’écrans avec des diagrammes, des graphiques. Dans un premier temps, Laure commença par régler les électroencéphalogrammes de Linda et Jenny sur une même fréquence, puis la machine s’enclencha ensuite. Des lampes s’allumèrent dessus, et un bourdonnement se fit entendre.
La porte s’était refermée sur la cuve de Jenny, et celle-ci était désormais endormie. Un liquide verdâtre jaillit dans la cuve, la recouvrant totalement.
«
Les relevés sont positifs... Leur rythme cardiaque se stabilise. -
La consommation électrique de l’installation est stable, aucun problème à signaler. »
Miranda observait la scène silencieusement. Il fallait attendre que les deux esprits se synchronisent, ce qui prit bien un bon quart d’heure.
«
Bon... Vérifiez l’état des générateurs, on va commencer le transfert. »
Miranda acquiesça doucement, puis lança la procédure, en donnant son mot de passe sur un ordinateur, avec un scanner rétinien et digital. Plusieurs lampes s’éteignirent ensuite... Et le transfert commença.
Il allait durer des heures. Miranda en avait profité pour se changer, afin d’accueillir au mieux Linda à son réveil.
Elle portait ainsi
une robe rouge en latex avec une longue paire de gants noirs moulants et des collants en latex, également noirs.
Tout ce qu’il fallait, maintenant, c’est espérer que le transfert se déroule sans anicroche...