Ruinés. Plus un sous. Pauvres. Misérables. Nous n'avons plus rien. Les jeux d'argent et l'alcool avaient eut raison de mon paternel qui venait de nous condamner, ma mère et moi. Nous avions tout. Le luxe, l'argent, le confort, les amis... Et tout nous avait brutalement été arraché. Au revoir ma superbe chambre de 30m2, au revoir ma Porshe 911 turbo, au revoir mon splendide dressing sur mesure... Même Kronk, mon mastiff tibétain de 80 kgs nous a été enlevé. Que pouvions-nous faire ? Toutes nos économies envolées, nous n'avions eu d'autres choix que celui de quitter notre propriété pour aller s'installer dans un appartement minable.
Dès lors, la vie n'avait plus rien à voir avec celle que nous avions dans le Passé. Mon père se noyait dans l'alcool tandis que ma mère, autrefois si fière et si noble, se retrouvait à travailler dans un bar médiocre en tant que serveuse. Elle qui avait pour habitude de vivre dans le luxe depuis sa naissance ne supportait pas sa nouvelle condition. Nous n'avions aucun moyen d'y remédier... Du moins, c'est ce que je pensais.
Un soir comme les autres, ma mère rentrait du travail après une rude journée. Je constatai avec stupeur que son mal être habituel n'était plus. Elle souriait... Chose extrêmement rare depuis que nous étions sans le sous. Ce soir là, elle vint vers moi, me répétant sans cesse à quel point elle m'aimait, qu'elle était désolée, qu'elle avait fait ce choix pour le bien de la famille... Je ne comprenais pas. Avait-elle démissionné ? Elle me caressait les cheveux, glissant ses doigts frêles et abîmés par le travail dans ma chevelure dorée.
- Tout va bien se passer, ma chérie. Il m'a promis qu'il ne te ferais aucun mal... m'avait-elle susurré d'une voix tremblante.
Choquée, je l'avais vivement repoussée et interrogée pour comprendre ce qu'elle avait fait. Puis, lorsque je vis une masse énorme et menaçante se dresser dans l'ombre, je compris bien vite qu'elle m'avait trahie. Mon cœur s'était emballée et la peur m'avait complètement noué l'estomac. Elle m'avait vendue. Moi, sa propre fille...
- Je... Je ne supportais plus de vivre ainsi... Ton père et moi nous... nous avons besoin d'un nouveau départ... tu comprends... ?
Le visage déformé par le dégoût, je la fixai avec dédain. Comment avait-elle pu me faire ça ? J'avais tenté de fuir. De quitter cette vie misérable, ces parents immondes, cet appartement en ruines.. Mais le démon auquel ils m'avaient vendu m'avait bien vite rattrapée. Je lui appartenais. Corps et âmes. Et j'étais condamnée à passer le reste de ma vie à ses côtés, en Enfer.
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J'ouvre lentement les yeux, luttant contre le mal de crâne qui m'assaille. Un soupir de soulagement s’échappe de mes lèvres entrouvertes tandis que je réalise que toute cette histoire n'était qu'un affreux cauchemar. Je ne peux retenir un sourire, ravie de constater que tout va bien. Après tout, ma mère n'aurait jamais pu faire une chose pareille ! Pourtant, je reviens peu à peu à moi et réalise avec effroi que je ne suis pas chez moi. Le lit dans lequel je me trouve est particulièrement moelleux et confortable. Les draps sont doux, épais et dégagent une délicieuse odeur de propre. Mes iris fouillent la pièce du regard et je hoquette de surprise devant la beauté de cette chambre. Cet endroit respire le luxe et pendant un bref instant, j'ai l'impression de me sentir chez moi. Mon vrai chez moi. Mais je ne suis pas chez moi. Et je ne sais même pas où je suis...
Paniquée, je m'empresse de quitter ce lit douillet pour déposer mes petons sur le sol glacé. Le contact de celui-ci me fait frissonner et je peux sentir les poils de mes bras se redresser. J'avance de quelques pas et... m'arrête. Je ne peux plus avancer. Ma tête pivote pour que je puisse regarder derrière moi et je remarque que je suis attachée. Une lourde chaîne en acier relie mon petit poignet au lit à baldaquin. Instinctivement, je tire dessus comme une forcenée et essaie de me libérer, en vain. C'est alors que je commence sincèrement à paniquer tandis que mon corps fragile se met à trembler. Haletante, je souffle bruyamment et continue de lutter contre la chaîne de toutes mes forces, sans y parvenir. Non non non non... NON ! Ce n'était pas un rêve ! Cette connasse m'a vraiment vendue ! La douleur me fait serrer les dents et je m'empresse de battre des cils pour chasser ces larmes qui me brouillent la vue. Je vais mourir... Je vais mourir !
Mes jambes flageolent et je m'écroule sur le sol devant cette évidence. Me voilà prise au piège, attachée dans cet endroit qui m'est inconnu . Je suis épuisée et mes nerfs sont sur le point de lâcher. Pourtant, je m'aide de mes pieds pour prendre appuie sur le lit et continue de tirer, ignorant les larmes qui coulent le long de mes joues et la douleur qui me meurtrit le poignet. Je ne veux pas mourir.