Lirielle avait glissé la clé dans la serrure avec une certaine impatience. L’appartement qu’elle découvrit était spacieux, joliment décoré, typique du Japon. Une douce odeur d’encens se dégageait de la pièce principale. Ses parents ne lui avaient plus rien offert depuis qu’elle leur avait avoué son pouvoir, sans doute une manière inconsciente de la punir de leurs faire vivre un tel calvaire.
Quoiqu’il en soit, sur conseil de son psychiatre ses parents avait fait ce qu’il fallait pour lui changer les idées, lui donner les moyens de s’amuser et de se rendre compte que “le monde réel” regorgeait de bons côtés, se suffisait à lui même. Oui, la jeune femme ne devait plus aller chercher ailleurs ce qui se trouvait ici. La blonde avait promis de ne pas emporter un seul livre, de ne peut pas s’en procurer un sur place et avait choisi sa destination. De toute façon, comment en trouverait elle un écrit en français ? Heureusement ses parents ignoraient qu’elle parlait et lisait un peu la langue nipponne. Mais au final cela ne changeait rien, car caché dans la doublure de son sac soigneusement recousus, se trouvait un roman. Lirielle y songea alors qu’elle ouvrait un peu plus les stores. C’était devenu une addiction. Elle avait cet espoir secret de peut être pouvoir retourner un jour auprès de ceux qu’elle avait rencontré. Il n’était pas rare qu’elle relise deux, trois fois le même ouvrage, qu’elle pleure un amant que la vie lui interdisait de retrouver, ne ce serait ce que le temps d’une étreinte…
Finalement la blonde au visage de poupée parfaite délaissa son sac et sur une musique terriblement agaçante finit par danser et chanter en petite tenue, tout en préparant des nouilles instantanées acheté sur le chemin. Si la vision de ce corps jeune et généreux en aurait excité plus d’un, sa voix en revanche aurait surement eu le pouvoir d’en tue tout autant. Elle était rarement seul, ses parents tenant à la surveiller, encore et encore et elle avait envie de faire des milliards de choses, même stupide. Peut être qu’elle n’avait effectivement pas besoin de ce roman.
Une fois rassasié, Lirielle se pencha sur le journal du jour quelques minutes, en particulier sur l'article en première page. Elle ne comprenait pas tout, mais elle trouva la femme policier marquante, peut être parce qu'elle était aussi blonde qu'elle. Elle était jolie en tout cas, bien qu'elle ne souriait pas. On pouvait comprendre, vu l'affaire auquel le journal faisait référence. La jeune femme se changea, une robe simple blanche et des escarpins noirs assortis au long sautoir de la même couleur qui ornait son cou. Elle était épuisé par le voyage mais trop excitée pour dormir. Lirielle passa une main dans ses cheveux, secoua ses boucles blondes et quitta l’appartement en chantonnant. Elle avait des réflexes, des attitudes un peu naïve ou stupide, se retrouver dans un environnement si neuf, si dépaysant lui donnait l’impression d’être un autre...monde, invincible, et filer dans les ruelles étroites et douteuses ne mettait pas ses sens en alerte.
La nuit était tombée il y a peu mais la quartier qu’elle s’était choisis était animé et la jeune femme croisait de nombreuses personnes, plus ou moins fréquentables. Elle s’était éloigné, en effet, sans trop réfléchir parce qu’elle se savait un sens de l’orientation qui ne lui faisait jamais défaut, mais ses pas l’avaient conduit là ou Lirielle n’aurait jamais dû aller. C’était le repaire auto proclamé d’un gang, un coin que d’autres convoitaient, non moins dangereux. Elle ne comprenait pas à la perfection les mots prononcés dans la ruelle voisine mais elle en saisissait le principal. Il n’y avait plus de brouhaha, de bourdonnement en fond sonore à présent, juste leurs voix, juste le bruits de ses hauts talons sur le béton.
-C’est elle Yato. C’est cette pute qui a donné l’adresse du chef.
-Mourir pour un rail de coke c’est con ma belle hein ?
-Non, non, vous faites erreur, ce n’est pas moi qui…
Premier bruit sourds, quelque chose de dur contre quelque chose de mou. Lirielle n’avait pas réfléchit, elle s’était précipité dans la ruelle en hurlant, dans sa propre langue, par réflèxe.
-Non arrêtez !!! Laissez-là tranquille ou….
Puis soudain le choc. Là à l’entrée de la ruelle face à six hommes, barres de fer, battes de baseball, la blonde venait de réaliser qu’elle n’était pas dans un livre, ailleurs. Dans cette réalité elle pouvait mourir, elle allait mourir. Non, elle ne pouvait se faire tuer là, avec cette jolie jeune femme qui hurlait, la jambe brisé à la barre à mine dans une ruelle éclairé par un réverbère défaillant. C’était ridicule. Après tout ce qu’elle avait vécu toutes ses morts épiques, c’était hors de question. Le coeur battant à tout rompre, tremblante, Lirielle, pour la première fois avait abandonné, la dernière chose qu’elle vit, avant de faire demi tour vu le crâne de la jeune japonaise qui éclatait sous l’impact, juste avant elle avait croisé un regard froid sur un visage tatoué. Celui du tueur, qui serait peut être le sien si elle ne se hâtait pas.
Derrière elle, les homme hurlaient, les battes de bois glissaient sur les grilles de fers, le sol. La jeune femme se tordit la cheville quand son talon cassa. Lirielle abandonna sa seconde chaussure et se mit à courir pour de bon, ne ralentissant pas malgré la douleur. Elle courait, à droite, à gauche, elle gagnait du terrain, les voix se faisaient moins fortes mais la jeune femme perdu dans un pays inconnu n’avait pas la moindre idée d'où elle allait.
Au détour d’une énième rue qui ressemblait trop à la précédente, Lirielle heurta quelqu’un de pleins fouet, tombant sur le trottoir dans un bruit. Relevant le nez, elle ouvrit de grand yeux étonnés. La blonde se mit à sourire malgré sa pâleur, ses mains tremblante. Là, toujours sur les fesses, la robe à demi relevée, Lirielle sourit.
- Je vous reconnais ! J’ai lu un article...Vous...Vous êtes la Sergent, vous êtes de la police, n’est ce pas ? C’est vous ? Il faut que vous m’aidiez.
Lirielle se retourna, fixant la ruelle par laquelle elle venait de débouler.
- Ils...Ils vont me tuer s’ils m’attrapent. J’ai..
Quelle galère de manquer autant de souffle, de devoir chercher ses mots dans un moment ou il fallait plutôt gagner du temps...
- J’ai vu, enfin j’ai assisté à un meurtre, ils...Ils lui ont explosés le crâne c’était horrible, je vous en prie aidez-moi.
Ses yeux bleus se posèrent, implorant, sur cette femme pleine d’assurance qui lui faisait face.