Santa Claus, ainsi qu’on appelait communément le Père Noël, avait tout décidé dans sa tête, au grand dam de ses lutins laponiens, et, alors qu’il approchait de la maison de cette belle et jeune mère de famille, l’un de ses lutins se matérialisa à côté de lui, arrachant un grognement désapprobateur aux lèvres du vieil homme, qui tenait encore à la main une bouteille de rhum.
« Chef, voyons ! Ce n’est pas sérieux, vous ne pouvez tout de même pas annuler la distribution des cadeaux !
- Qu’est-ce tu branles là, toi ? Je vous avais pas donné votre journée, à vous, les lutins ?
- On a discuté entre nous, Chef, et on est tous d’accord pour dire que refuser aux enfants… Enfin quoi, ils ont bien droit à un peu de réconfort, Chef !
- Et moi ? Moi, j’y ai pas droit, à du réconfort, dis ? Tous les jours de Décembre, je vois des gugusses qui plagient mon image pour faire des photos débiles avec des morveux gras et puants ! Et, toutes les nuits de Noël, je me gèle le cul à aller apporter des cadeaux à des enfants qui en ont rien à secouer de moi, et m’oublient au bout d’un mois ! »
Les lutins savaient que le Père Noël faisait ce que, communément, on pouvait appeler une « crise identitaire ». Les humains n’avaient plus la valeur des cadeaux. En un sens, leur chef avait raison. Ils voyaient maintenant Noël comme une fête consumériste, et estimaient qu’ils avaient droit aux cadeaux, alors que les cadeaux étaient une récompense pour leurs efforts scolaires. Mais, de là à annuler Noël… Pour les lutins, c’était difficile à encaisser. Ils avaient fait tout ce qui était en leur pouvoir pour rendre le sourire à leur chef, comme l’organisation de chorales, de défilés, de chansons, de chocolats, mais lui avait préféré un abonnement aux plus importants magazines érotiques du monde, et avait utilisé les fûts magiques de son atelier pour fabriquer de l’alcool.
Maintenant, Santa Claus allait sauver Noël à sa manière, et, pour le dire simplement, ce lutin commençait à le faire chier.
« Écoute, c’est pas compliqué. J’en ai marre de tout donner, et de rien recevoir en retour. Tu comprends ça, tête de hareng ? Alors, soit tu me fous la paix, et tu me laisses faire ça à ma sauce, soit tu pointes au chômage demain, et tu iras casser le cul d’une autre figure mythologique avec ta voix de crécerelle. »
Et, sur ce, Santa Claus claqua des doigts, et téléporta le lutin en Transylvanie, puis considéra à nouveau la maison de la jeune femme. Il savait qu’elle passait Noël seule, et était aussi belle que désœuvrée. Un mariage merdique, l’amenant à se consacrer sur son fils, qui souffrait de l’absence de son père, et croyait fermement au Père Noël, et refusait, lui aussi, de croire que la tournée magique du Père Noël n’aurait pas lieu ce soir.
La jeune femme était vraiment belle, et c’était pour ça que Santa Claus l’avait choisi. Pourquoi elle, et pourquoi pas une ? Parce qu’il avait bien fallu choisir !
Il attendit encore un peu, puis hocha la tête.
*Bon… C’est parti, comme dans tes vertes années, mon vieux ! Voyons voir jusqu’à quel point ces humains idiots veulent tant préserver la magie de Noël…*
Sarah Milleni était dans son salon, avec une cheminée qui crépitait dans son dos… Et, alors qu’elle continuait à regarder la télévision, des flammes crépitèrent brusquement, ainsi qu’un bruit fort, comme si des bûches étaient en train de s’écrouler. Lorsqu’elle se retourna, ce fut pour voir une silhouette massive émerger dans les flammes, ses pieds s’enfonçant au milieu des bouts de bois, répandant des cendres tout autour, puis une main osseuse et épaisse se posa sur le rebord de la cheminée.
Un corps massif en sortit brusquement, renversant plusieurs bûches. Aucune flamme ne se situait sur son corps, et il se dépêcha de remettre les bûches dans l’âtre de la cheminée, tout en pestant copieusement.
« Putain d’enculés de bûches… Toujours à me faire chier, avec ces cendres à la con… »
Tournant son dos à Sarah, elle pouvait voir que l’homme portait un énorme baluchon rouge dans son dos, et rangea les bûches, puis les cendres sur le sol disparurent. Il se redressa finalement, et se retourna pour de bon, observant la jeune femme, tenant d’une main son baluchon… Et tenant de l’autre un épais cigare, qu’il enfouissait dans sa bouche.
« HO-HO-HO ! s’exclama-t-il soudain. Ben quoi, chérie, tu ne me reconnais pas ? Je suis Santa Claus… Le Père Noël, le mec qui vend du Coca-Cola, distribue des cadeaux à tous les enfants du monde entier, et toutes ces… *BURRRPP !*… Conneries ! »
Il venait de roter, probablement à cause du mélange de rhum et de vodka qu’il avait avalé. Il s’avança alors, et observa brièvement le grand sapin brillant, avec un petit mot devant, écrit par le fils de Sarah, un poème à l’intention du Père Noël, qui tendit sa main vers le petit mot, et grogna.
« Ton marmot sait pas écrire, ma chérie… Mais bon, c’est pas pire que les gâteaux pourris et les jus d’orange tièdes que les autres morveux me laissent en permanence… Bon, t’as compris, non ? Je suis le Père Noël ! Alors, arrête de me regarder comme un merlan frit, ou je me cascade ! Si tu crois que c’est facile de glisser mon gros ventre dans vos conduits de cheminée à la con… Alors, fais-moi plaisir, poulette… *BUUUAAARRRPP !!*… Sors-moi ta plus bouteille de vin, et offre-moi un verre ! »
Et, sur ce, Santa Claus alla s’asseoir sur son fauteuil, et attrapa sa télécommande, et, tandis que la jeune femme filait vers la cuisine, il appuya sur des boutons, et alla directement sur une chaîne pornographique très hardcore, en tirant sur son cigare, le baluchon posé sur le sol, légèrement ouvert, permettant de voir ce qu’il y avait à l’intérieur, en partie… À savoir, outre une tenue rouge très courte, un ensemble de sex toys très différents…
Le Père Noël, dans toute sa splendeur !