Que de la comm'... [Luo Tianyi] — Terminé

Des vacances. Lorsque son père lui avait annoncé la nécessité d'une telle chose, Ike avait eu du mal à le croire. Était-ce un de ces énièmes malaises d'après-concert qui avait fait craindre au vieux producteur une dégradation de la santé de sa poule aux œufs d'or ? C'était peu probable. D'aussi loin que le chanteur s'en souvenait, il n'avait jamais été très vaillant après une représentation. Vomir, en particulier, était pour son corps comme la façon d'évacuer le stress. Du reste, il ne se sentait pas fatigué le moins du monde... Il aurait volontiers enchaîné sur une seconde tournée.

Il ne savait comment il devait prendre la chose, mais était par expérience méfiant envers son propre père. Celui-ci était tout autant un complice dans certains moments qu'un terrible producteur dans d'autres. Ike le soupçonnait au moins de vouloir l'éloigner des milieux underground qu'il fréquentait parfois. Il ne pouvait pas tellement lui en vouloir. Mais il ne savait pas davantage comment il allait vivre ce brutal changement, de l'activité intense des concerts à la décompression d'un repos lascif.

C'était donc perplexe qu'il avait pris un avion pour Valence : une région très touristique de l'Espagne. Il commençait tout juste à être connu, là-bas. Aussi, il ne parlait pas du tout espagnol. Une fois sur place, un chauffeur l'avait dans une petite ville non-loin, sur les bords de la méditerranée, jusqu'à sa résidence de vacances.

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Du bout des doigts, Ike jouait à retourner les galets qui peuplaient le fond d'un ruisseau d'eau design, coulant à l'intérieur même de la maison. Le chanteur était dans une certaine mesure habitué au luxe... mais il n'avait jamais eu l'occasion d'en profiter ainsi. Tout dans la demeure, destinée à être louée par une clientèle très fortunée, frôlait l’indécence. Si la demeure n'était pas particulièrement vaste, chacune de ses pièces offrait un confort particulier.

Celle dans laquelle il se trouvait faisait office de salon et de véranda. Elle présentait trois murs de verre et de portes coulissantes, largement ouvert sur l'extérieur. Un peu partout étaient surélevés des rigoles d'eau tiède, qui chutaient dans des petits bassins artificiels en un glouglou constant mais agréable. La luminosité de l'installation était remarquable.

La pièce était prolongée par un patio, qui abritait une piscine en deux compartiments, pavé tout autour d'une mosaïque crème. Le jardin : gazon vert et plantes tropicales type palmier, était couvert des regards des voisins par de très hauts murs en bois brun.

Ike, lui, était en maillot de bain, tee-shirt, sur un transat confortable. Il semblait pensif, ce qui n'était pas son habitude. Des pas, en provenance de l'intérieur de la résidence, s'approchaient. Sans même se retourner le chanteur lança :

– Ah, JK ? Mets un peu de musique s'teup. Je m'ennuie grave. Dis, y'a quoi de cool à faire à Valence ?
– Tu t'ennuies ? J'apporte des bonnes nouvelles, alors.
– Mon vieux est mort, on rentre au Japon ?
– Mauvais goût, gamin. Non. Mais la locataire de l'autre chambre arrive dans cinq minutes.
– Hein ?

Le chanteur avait fait un quart de tour vers son agent, se redressant en position assise. Il sembla soudain réaliser quelque-chose d'important.

– Attend, mais, qu'est-ce que tu fous à Valence ? T'es mon agent, pas mon frère. T'es pas supposé prendre tes putains de vacances avec moi.
– Je suis pas en vacances. D'ailleurs toi non-plus. T'as eu ton week-end, maintenant au boulot.
– Q... quoi ? C'est qui ? LA locataire ? Pourquoi on me dit jamais RIEN ?

Ike avait l'air furieux... mais JK le connaissait assez bien pour savoir que c'était là davantage sa façon d'exprimer son intérêt pour la situation. Il ouvrit les bras.

– Tu vas passer la prochaine semaine avec une artiste japonaise.
– C'est un plan comm' foireux ? Non. Je veux pas. Merde. T'entends ? M.E.R.D.E.
– Trop tard, elle est à la porte.
– Alors c'est moi qui me casse.
– Sois pas con gamin. Elle est musicienne aussi. Vous allez bien vous entendre. Et puis regarde.

L'agent sorti de la poche de son costume une seule page A4, en couleurs. C'était la première page d'un magazine qui disait « I|<3 prépare un EP avec Luo Tianyi ». La maquette était encore vide de toute photo.

– Qu'est-ce que c'est que ça ? fit Ike en arrachant des mains de son agent le document.
– La Une de SHOXX de demain.
– Tu te fous de ma gueule ?
– Non. Il manque les photos, d'ailleurs, tu vois. Couverture et double-page centrale. Plus peut-être quelques autres dans le corps de l'article.
– Sérieux...

Ike se frotta les yeux. Secouant la tête, il agita dans les airs un index menaçant, pointant son agent, avant de relâcher son bras.

– Toi je... je... ok... Je mets un pantalon ?

Un bruit de porte électrique s'ouvrant se fit entendre non-loin.

– OK... Trop tard. Bon euh. JK. Euh... Casse toi. Je veux plus te voir, file.

Avec un soupir, Ike se redressa. Il portait un tee-shirt blanc sans manche où figuraient sur la poitrine des ronds fluo mêlés les uns aux autres, et un maillot de bain style short, vert vif. Il n'était pas coiffé, pas de gel, ce qui faisait tomber sans ordre ses cheveux roses et blond pêle-mêle sur son visage, lui en masquant la moitié. Terminant ses jambes nues et glabres, à ses pieds, des sandales.

La maison elle-même n'était pas fermée (elle ne l'était qu'en hiver, quand personne ne venait la louer), mais la clôture extérieure avait une ouverture coulissante via un code d'entrée. C'était celle-ci qui venait de s'ouvrir. L'air intrigué, Ike s'avança vers le portail, en contournant par l'extérieur de l'habitation.

L'entrée était accompagnée d'un court sentier de galets blancs, cheminant à travers l'herbe. On pouvait apercevoir un coin de la piscine, bien que la majorité du bassin soit caché par le large bâtiment blanc et vitré. La verdure tropicale était maîtrisée et accueillante, et le soleil filtrait abondamment à travers les feuillages.

– Ambiance –

Des vacances ! Voilà qui était le pied, pour elle qui passait son temps sur scène à danser et chanter. Bha, oui, à force l’usure et la fatigue l’emportaient et son rythme de vie n’aidait en rien. Entre les concerts en vrai, ceux en virtuel, les sorties à des conventions pour attirer les foules... Il restait peu de temps pour se reposer, hormis un peu, la nuit et parfois la matinée. Aussi à l’annonce de vacance elle avait sauté sur l’occasion, la plage, le soleil, une piscine privée, tout était plein de promesses. Aussi elle n’avait pas mis plus d’une journée à préparer ses affaires pour le départ, le voyage serait long tout de même... L’Espagne, elle ignorait tout de ce pays, et même du continent où il repose. Ce serait un bon moyen de l’éloigner des paparazzis et autres fans acharnés qu’elle se coltine parfois. Arrivée là-bas elle se perdit rapidement, heureusement sa manager veillait au grain et ne comptait pas la perdre de vue avant son arrivée à la demeure de vacances. D’autant plus qu’elle lui avait bloqué ses accès en ligne pour éviter de la voir faire des spectacles plus ou moins cochons via internet... Ça devait être des vacances et elle avait insisté sur ce point, pourtant elle ne lui avait pas permis d’enlever son masque.

C’est donc mitigée qu’elle fut déposée un lundi à l’entrée du domaine, la demeure n’avait rien d’un somptueux palais, mais au moins ça serait un autre paysage que celui surpeuplé des villes japonaises. Aussi elle prit en main la plus petite des valises tandis que la manager et un homme de main portaient déjà le reste à l’intérieur. On lui avait assuré qu’elle aurait sa propre chambre, aussi en plus de son petit sac elle enfila en bandoulière sa guitare dans le dos et se mit en marche. Longs cheveux teints en bleu océan profond, presque mauve cela dit, des gants longs qui ne couvrent pas ses mains, une tenue de scène sexy à la jupe courte et un seul bas côté droit. Elle s’approcha donc de l’entrée un peu timide, ses affaires étaient déjà là, elle se stoppa un moment hésitant puis doucement ouvrit la porte pour pénétrer l’endroit. Les joues un peu roses l’idole chinoise aux yeux émeraude fit quelques pas, sans pour autant vraiment entrer. Sa tenue de scène lui laissait les épaules et le haut du dos nu, de même sa poitrine affichait un faible décolleté très ravissant, mais entrecoupé par les bretelles de sa tenue attachée à son collier au coup.

L’idole avança encore un peu, entendant parler au loin dans la demeure, elle se dirigea instinctivement vers les voix, mais se stoppa quand cela semblait hausser le ton. Était-elle malvenue ici ? L’autre artiste avait été prévenu non ? Elle était au courant du minimum pour sa part, elle venait ici enregistrer un EP avec artiste à la mode, et mignon qui plus est. Bon évidemment son nom sonnait un peu spécial «Ike» non ? Une peu comme «vas-y» en japonais, mais pourquoi pas non plus comme «Iku» ? Je viens en japonais, elle n’était pas certaine de savoir comment s’y prendre avec lui. En tout cas si la manager lui avait dit de garder la façade c’est certainement qu’il ne sait rien d’elle, alors il faudra faire attention. Enfin la manager entra à son tour faisant encore sonner le bruit de la porte, elle rassura l’idole avant de lui dire que tout est en ordre et elle va régler les détails avec l’autre manager. Elle peut donc aller rencontrer l’autre gars ! Mais quand elle arriva sur place, personne dans la maison, elle croisa un homme qui la salua, mais rien de plus.

Qu’elle idée aussi de sa part d’être si timide, elle vit l’autre homme partir et en profita pour faire le tour se demandant si l’autre artiste était déjà sur place. Sortant son téléphone, elle grogna rapidement

- Bordel, Marisa m’a bien niqué...

Son téléphone avait été échangé avec un autre identique, mais sans son abonnement internet dessus et sans ses contacts... Il était donc ici pour se reposer et bosser sur cette chanson avec un parfait inconnu, trouvant des magazines, elle les feuilleta, évidemment il y avait anguille sous roche. Un magazine populaire, une photo pas encore remplie, et un SMS de sa manager lui disaient que le photographe serait là d’ici quelques heures pour la Une.

- Bon, j’ai plus qu’a trouvé l’autre gars, Iku... Ike... Iko ? Je hais les noms japonais...

Grogna-t-elle avant de voir une ombre passer à l’extérieur de la maison, un paparazzi ? Déjà ?! Ça semblait pourtant hautement improbable, aussi elle décida de l’ignorer et préféra aller vers la cuisine pour prendre un bon verre d’eau avec du citron bien frais.

- Puis c’est quoi ce pays pourri aussi, fait au moins quarante à l’ombre ?

Pourtant il y avait de la climatisation, mais rien à faire elle avait chaud, elle soupira et prit des glaçons en plus avant d’aller s’installer dans le divan pour finalement y finir couchée et endormie récupérant du décalage horaire. Cela dit elle ne dormait que d’un oeil, l’habitude de dormir peu faisait d’elle une vraie sentinelle, toujours parée à partir quelque part. Aussi quand elle entendit des pas dans la pièce elle ouvrit les yeux et se redressa sans un bruit assis sur le fauteuil.

- IK shì nǐ ma ?

Avant de se rendre compte qu’elle avait parlé en chinois et se reprit alors en japonais :

- C’est toi IK ?

Dit-elle timidement les joues un peu roses se rendant compte qu’il était plutôt beau gosse, même si dans sa tête ça sonnait plutôt : «Il va me prendre la vedette ce blondinet-là !». Son visage et ses pensées n’étaient pas du tout en accord, une jeune fille timide de l’extérieur, fragile, douce, avec une voix enivrante, mais à l’intérieur il hurlait pour que ce ne soit qu’une blague.

En se retrouvant devant l'entrée, Ike réalisa qu'il avait été doublé par sa visiteuse, et que par une manœuvre malhabile, il se trouvait à présent derrière elle. Il aurait voulu, volontairement, le faire qu'il n'aurait peut-être pas réussi. Cette maison était décidément trop grande. La nouvelle locataire s’engouffra aussitôt dans les pièces intérieures de la demeure... il renonça alors à l'accueillir immédiatement. La chose avait au moins un bon côté : il avait maintenant tout loisir de s'habiller correctement pour se présenter.

Aussi, discrètement, il monta un escalier légèrement torsadé qui courait le long d'une baie vitrée intérieure. La chambre qu'il avait choisie se trouvait à l'étage. Il ne mettait pas la barre trop haut : il garda le même tee-shirt, mais enfila un pantacourt gris et noir par-dessus son maillot de bain. L'habit lui serrait bien les hanches, mais était un peu plus ample ensuite. Il en profita également pour se coiffer sommairement, se lissant les cheveux sur le côté dans une tentative de leur donner un aspect légèrement moins désordonné et touffu. Le look restait très « vacances ».

Il redescendit ensuite, évoluant à pas de loup dans la maison. À l'évidence, JK était parti, mais il n'était pas trop sûr d'être seul dans la résidence. Écartant de la main un rideau qui marquait la césure entre un corridor et une pièce de détente, le chanteur aperçu un petit être lové dans un divan. La vision n'était assurément pas désagréable, même si la jeune fille faisait très jeune. C'était la mode, dans la J-Pop, il fallait croire. Lui-même avait fait une partie de son personnage sur son aspect très juvénile ; en particulier à ses débuts où il était le plus jeune membre de son groupe.

La chanteuse semblait bien dormir, et Ike n'osa pas pénétrer dans la pièce. Après tout, il était encore très tôt, et le voyage depuis le Japon avait dû être long. Il pouvait bien la laisser dormir quelques heures. Il sortit son téléphone portable, et à travers les rideaux, zoomant, prit une photo de la jeune fille endormie, adorablement blottie contre le confort d'un divan. Voilà qui allait l'occuper pendant quelques minutes.

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Ike ne se trouvait décidément pas très bon au billard. Même lorsqu'il y jouait seul, et contre lui-même, il avait la lucidité de se trouver à la traîne. Les boules ne voulaient simplement pas rentrer... Mais au moins l'activité l'avait diverti quelques temps...

…juste après avoir posté la photo de Luo sur son fil twitter, avec le commentaire « J'ai bien reçu mon nouvel instrument. @luo_tianyl Il se repose dans le salon. Cute non ? ». Son père l'avait bien dressé après tout... il était presque incapable de ne pas entrer dans les jeux de communication qu'on lui proposait. S'auto-paparizier, de plus, évitait parfois quelques désagréments...

Le chanteur regarda l'heure sur son téléphone. Si il en croyait les instructions que lui avait laissées JR, maquilleurs et photographes devaient arriver dans une trentaine de minutes. Il était temps de réveiller la Belle au bois dormant.

Sans plus amortir ses pas, il revint dans la pièce où la jeune fille sommeillait toujours. Toutefois, le simple fait de pénétrer dans le salon la fit se redresser. Ce fut même elle qui engagea la conversation. Levant une main en l'air, Ike la rassura.

– Ouais, c'est moi.

Il se disait qu'une telle question devait être un peu liée au stress... sans parler du fait qu'elle avait commencé en chinois. En toute objectivité, il était difficile de le confondre avec un autre. Il se reconnaissait – et hélas était reconnu – à des kilomètres. Les cheveux fluorescents, les boucles d'oreilles et les habits assortis, ça n'aidait pas vraiment à passer incognito.

– Bien dormi ?

L'adolescent s'assit nonchalamment sur un fauteuil en face du sien. Il attrapa de la main une télécommande qui traînait sur une table basse. D'un doigt, il appuya sur un bouton, et sélectionna à l'écran une chanson. Un morceau de Luo, un des derniers, fut aussitôt diffusé dans toute la pièce.

– Celui-ci j'aime bien.

Il avait écouté toute la majeure partie de la discographie de Luo pendant qu'elle dormait. Sous ses airs peu sérieux, il était en réalité un travailleur acharné. Mais avec un sourire, il baissa rapidement le volume de la musique, pour qu'elle ne constitue plus qu'un tapis sonore.

– On devrait p'têtre pas parler devoirs tout de suite ? On a une semaine pour enregistrer trois ou quatre songs. Tranquille, hu.

Il croisa les jambes.

– J'avoue que je te connaissais surtout de nom avant ce matin, mais aime bien ton univers. T'es très mignonne, aussi.

Il lui jeta un regard en coin. Elle avait un peu rosie lorsqu'il était entré. Qu'est-ce que ça aurait été s'il s'était présenté à elle en maillot ? Lui-même n'était pas aussi à l'aise qu'il aimait à le montrer avec les filles. Entre les groupies qui toléraient n'importe quoi et les personnes plus réservées à son sujet, il ne savait jamais trop comment se comporter. Mais après tout, un compliment ne pouvait pas faire de mal. Il écarta les bras, levant la tête vers le ciel. Mais il ne la laissa pas le mot gentil flotter trop longtemps.

– Enfin, t'as ton style quoi. Tu viens de Chine ? Le photographe va se régaler, j'suis sûr, fit-il, sur un air faussement blasé.

Hypnotisée, elle le suivait du regard presque choqué par son physique, il n’était pas repoussant loin de là, mais au contraire, trop attirant. Que ce soit les couleurs, l’asymétrie des cheveux, l’air mal habillé aussi, un peu de tout, tout avait moyen d’être discuté. Elle le regarda donc affirmer qu’il était lui-même, puis lui demander si elle avait bien dormi. Elle hocha la tête pour sa question et le regarda se poser sur un fauteuil en face d’elle. Le voilà qui jouait déjà avec la musique dans la pièce, tout ça pour mettre un morceau qu’elle connaissait bien, un classique qui plus est, «zenbonzakura», qu’elle avait interprété en chinois alors que c’était à l’origine une chanson japonaise. Mais bon, cela faisait partie d’une stratégie pour indiquer qu’elle n’oubliait pas ses origines même si elle vit au Japon et qu’elle peut bien mélanger les deux sans aucune difficulté si l’envie lui prend. Bref, elle cessa de rosir en le fixant maintenant qu’il parlait un peu plus, il proposait de ne pas parler de boulot dès maintenant, il pensait qu’elle était là pour quoi au juste ? Se reposer ? Visiblement lui aussi devait vouloir se reposer, elle hocha la tête doucement, les chansons étaient de toute façon déjà écrites non ? Alors il suffisait de les interpréter ensemble et pouf le disque sera enregistré dans la foulée.

- S’il faut on peut prolonger le séjour à deux semaines m’a dit ma manager.

Précisa-t-elle, peut-être que lui l’ignorait en fait ? Enfin pour elle le plus tôt semblait rester le mieux, elle observa son regard en coin, pourquoi un tel regard ? Intriguée elle pencha la tête de coté, elle n’était pas vraiment gênée d’être seule avec lui pour le moment. Une autre casson d’elle se fit alors entendre «Reminiscence of the Red Lotus» directement pris d’un de ses best of chinois. Était-il un fan ? Ou alors juste une sorte de maniaque qui veut tout savoir de l’autre avant de bosser avec lui ? En tout cas elle rougit un peu en réalisant ce qu’il avait dit, il faut dire que sans son geste des bras elle aurait presque oublié sa phrase d’avant, mais maintenant elle comprenait mieux sa gêne.

- C’est gentil, t’es plutôt beau gosse aussi faut dire.

Dit-elle embarrassé, tout du moins en apparence pour jouer son rôle, car en vrai il se demandait bien pourquoi diable il retournait le compliment, sauf s’il le pensait vraiment ? C’est vrai que son apparence mise à part il a une belle tête pour poser dans les magazines de mode. Enfin il parla du photographe et elle hocha la tête

- Ha oui, vrai, ils vont vouloir qu’on pose ensemble et tout...

Puis son téléphone vibra, un tweet venait d’arriver avec une photo d’elle et des commentaires jaloux en chinois...

- En parlant de la chine, j’ai déjà plus de cinq-cents retweet qui veulent la mort de la personne ayant pris une photo de moi sur ce canapé, des jalous...

Elle sourit amusée et lui montra les tweets sur son téléphone, même si elle n’avait plus ses accès pour le streaming elle pouvait encore communiquer un minimum, ce serait louche qu’elle disparaisse des réseaux du jour au lendemain.

- Tu crois qu’ils veulent qu’on joue le petit couple heureux ? Moi, ça ne me gêne pas personnellement, à titre professionnel bien entendu, pour nos carrières, le buzz tout ça...

Lâchant la télécommande, Ike sourit malicieusement. Il était assez impressionné par la réactivité de la jeune femme. Malgré ses airs timides, elle ne se laissait pas facilement déstabiliser, et ne perdait pas de vue ses priorités...

– Les bons réflexes, jamais déconnectée. Mon père t'aimerait bien, je crois.

Il loucha sur le téléphone qu'on lui montrait, mais détourna rapidement les yeux. Il remonta vers le visage de la chanteuse, croisant son regard bleu clair, et eut un éclat de rire.

– …mais j'lis pas le chinois, par contre.

Sur cette réflexion il se leva de son fauteuil. Il ne tenait pas en place, mais c'était une habitude. Tournant le dos à la jeune femme, il fit à présent semblant d'être plongé dans la contemplation d'une lampe de table, dont l'abat jour cylindrique était finement découpé d'arabesques.

– À titre professionnel ? Mhh... je suppose...

Avait-il vraiment besoin de ça ? Son père lui aurait répondu par l'affirmative, mais lui-même n'en était pas sûr. Évidemment, ça allait faire parler, mais enfin... il aurait pu refuser, sans doute. Cependant, il n'en avait présentement simplement pas envie. Sur un ton sombre il commenta :

– Alors on joue des characters ? On fait que de la comm' ? On est des acteurs H24 hein ? Des objets médiatiques. Du gibier pour paparazzis. Notre vie c'est une grande pièce de théâtre. Nos sentiments, du fake, du buzz, putain ! Rien de vrai !

Il montait en ton, s'énervant progressivement. Mais il se retourna et afficha un grand sourire tout à fait détendu. Il s'esclaffa.

– Ouais, ça me va. Plus si affinité, hein ?

Il lui tendit la main.

– Enchanté de te rencontrer. Ike Gregory St. Cloud. Mais appelle moi Ike. Ou... non ! Appelle moi sweety, my love ou mmh... poussin ? Ça sera plus crédible, plaisanta-t'il.

Ike s'éloigna de quelques pas, s'avançant vers la baie vitrée. De là on pouvait voir le grand bassin et son eau bleu clair.

– Faut voir ce que le photographe veut, mais des photos dans la piscine, ça serait pourrait-être cool. T'as apporté un maillot ? Sinon plus sérieux, y'a un studio d'enregistrement à l'étage.

Priorités ? Non juste son travail et les apparences avant le reste, quant à la photo d’elle sur le net ce n’était pas bien grave. Après tout elle avait déjà posé dans des tenues plus légères que ça sur des couvertures de magazines... faut bien faire rentrer l’argent comme on dit, et avec son corps à elle c’est plutôt facile parfois. Enfin leurs yeux bleus se croisèrent, elle n’avait pas encore remarqué son bleu clair, si beau, si brillant, tout chez lui brillait après tout. Enfin vu qu’il ne savait pas lire elle sembla perturbée, puis sourit amusée, c’est vrai qu’il ne devait pas savoir lire cette langue. Il se leva et elle le regarda encore faire, le voilà qui semblait ne plus vouloir croiser son regard, surtout pour parler de la relation de couple, donc ça le mettait mal à l’aise. Elle l’observa longuement, sans bouger pour le moment. Puis vint sa drôle de réflexion, sans doute n’imaginait-il pas à cet instant la portée de ses paroles, elle le regarda de plus en plus perturbée... Il n’était pas dans un personnage depuis le début, lui ? Fallait s’y attendre, mais même, ça la perturbait beaucoup d’entendre cela de sa bouche. Bien sûr que rien n’était vrai, et visiblement pour lui ça posait un souci, un gros souci vu l’énervement qu’il semblait en ressentir.

- Ne me dis pas que t’as déjà craqué sur moi ?

Dit-elle amusée et souriante, elle prit sa main et la serra donc tranquillement hochant la tête au plus et si affinité ! Puis elle écouta la suite avant de lâcher sa main. Elle sourit un peu et puis le suivit doucement vers la baie vitrée, observant la piscine, à son tour elle répondit :

- Oh, Darling, tu veux déjà me voir dévêtue ? Hmm, mon coeur n’est pas encore prêt, kyuuuu !

Dit-elle en tournant sur elle-même comme une toupie faisant se soulever un peu sa jupe déjà courte ? Heureusement elle portait un short sous la jupe pour cacher sa culotte !

- J’ai mon maillot oui, mais on verra bien ce qu’il en dira, t’as déjà fait des photos érotiques, toi ?

Demanda-t-elle plus sérieuse, après tout elle l’avait déjà fait, mais lui ? Il était craquant non ? Alors on avait certainement dû vouloir en faire avec son petit corps tout mignon. Enfin elle fit route vers l’étage en sautillant :

- Studio, studio, où es-tu mon petit ?

Dit-elle tout en empruntant les escaliers pour aller voir le petit studio de l’étage et en faire le tour pour jauger le matériel, d’ailleurs elle en profita pour voir le reste de l’étage et nota alors à son attention quand elle le croisa :

- La douche ce sera chacun notre tour, je prends le premier tour, dame d’abord d’accord ?

Elle sourit et lui fit un clin d’oeil avant de foncer vers le petit studio et lui demander s’il savait quand arriverait le photographe. Il n’est pas en retard d’ailleurs ?

Ike regarda Luo tourner sur elle-même, avec au visage un air soudain tendre et un peu ému. Il trouvait le geste charmant. Elle était vraiment charmante dans sa totalité. Il semblait ne le réaliser pleinement qu'à présent. Repoussant une vague d'attendrissement, un sourire s’inscrivit de nouveau sur son visage.

– Un type a vendu une photo volée, juste moi et mes fesses, environ 100 000$. Mais ça compte pas j'suppose.

La véritable histoire, qu'il gardait pour lui, était qu'il avait perdu cette photo à un jeu de hasard, dans un boîte, très tard dans la nuit. En vérité il ne s'en souvenait pas très bien, ni de la soirée, ni du jeu, ni de l'individu : c'était avec le groupe, pour fêter leur victoire à Top!Pop! et il n'avait pas bu que de l'eau. Depuis qu'un des membres du groupe était mort d'overdose, il avait des nuits un peu moins agitées.

– Toi oui ? C'chaud d'être une fille dans l'industrie de la musique, lança-t'il en montant les escaliers à sa suite.

L'étage était un peu plus petit que le rez-de-chaussez, mais tout de même. Outre les trois chambres (Ike en avait déjà investi une), l'une des salles était un petit studio deux pièces classique, conçu dans les plans de la maison. L'endroit était remarquablement insonorisé. À l'intérieur, négligemment posée, l'une des guitares électriques de Ike était déjà branchée à une sortie. Dans l'autre pièce une rangée de tables de mixage permettaient des captures en temps réel. Enfin, il y avait des toilettes et une salle de bain.

– Y'a une autre salle de bain au rez-de-chaussé, indiqua Ike. C'plus grand même. À côté du jacuzzi.

Regardant Luo batifoler, le chanteur croisa les bras. D'habitude c'était lui qui courrait partout, et que les autres avaient du mal à suivre. Il était absolument ravi que, pour une fois, le dynamisme vienne de quelqu'un d'autre. Son ton reflétait son enthousiasme.

– Le staff arrive dans... max 15 minutes maintenant. Si tu veux prendre une douche, you should get up !

Chaud d’être une fille dans la musique ? Rhoo, s’il savait la vérité ! Mais oui, préserver son image de jeune et innocente jeune femme n’est pas chose aisée. Veiller aux apparences même dans son cas est un vrai travail, hors de question de trainer dans des bars louches, de boire de trop... Pleins de choses en gros pour ne pas finit sur internet ou à la une de tous les journaux du lendemain. Elle hocha donc la tête à sa remarque, car finalement c’était pertinent. Mais elle n’avait pas vraiment envie de trop en parler pour le moment préférant continuer à déambuler dans la maison. D’ailleurs elle nota maintenant la guitare de l’autre garçon et souriante elle vit aussi la sienne qu’on avait déjà montée durant un moment d’inattention. Elle nota la présence de l’autre salle de bain et sourit un eu, voilà qui résolvait pas mal de soucis pour tous deux. Après tout, cohabiter entre membres de sexes différents, ce n’était pas si simple. Surtout à leur âge non ? D’ailleurs il annonça l’arrivée du staff dans un quart d’heure, elle se figeait alors comme si elle venait de réaliser une chose importante.

- Ahh, j’vais être en retard, retarde, retarde ! File, je vais prendre ma douche moi !

Puis elle fronda vers sa valise en bas, glissant sur la rampe avec agilité avant de remonter les marches rapidement et s’enfermer seule dans la salle de bain. Heureusement l’idole était habituée à se maquiller, se travestir aussi, elle le faisait depuis des années à présent. Aussi elle prit une bonne douche, se manucura, se parfuma, se prépara tout comme il faut avant de sécher ses cheveux bleus et revenir en bas alors que l’équipe était déjà là. Saluant les travailleurs, elle retrouva le jeune homme et attendit les instructions pour les photos, elle avait aussi descendu un petit sac avec son maillot et paréo pour mieux cacher les choses... Mais ils n’allaient pas forcément faire des photos en maillot si ?

- Iku, t’es prêt ? Monsieur, on commence par quoi ?

Ike avait également choisi de prendre une douche rapide. Il savait que le travail de la coiffeuse serait plus facile et plus agréable si elle s'appliquait sur cheveux mouillés. Contrairement à Luo, il n'était plus vraiment habitués à se coiffer et à se maquiller seul. Habitué des plateaux de télé et de cinéma peuplés de professionnels de l'esthétique, il s'en remit à la femme qui accompagnait le photographe.

Lorsque Luo redescendit, il était encore assis sur une chaise, la coiffeuse apportant une dernière touche à son brushing. Immédiatement il faisait plus sophistiqué, sans surtout perdre de sa jeunesse. Au contraire, le rafraîchissement de sa coupe le faisait paraître un peu plus juvénile encore. Il agita la main pour saluer à la chanteuse :

– T'es pas mal comme ça.
– Ouiii, tou es ma-gni-fique ma chérie, olàlà.

Celui qui venait de s'exprimer avec une voix très maniérée était photographe, et il s'appelait Miguel.

– Ye me presente chiquita, ye souis photographe, et ye m'appelle Miguel !

Il attrapa aussitôt la main de Luo, s'inclinant pour déposer un baiser sur ses doigts. C'était un homme très grand, peut-être deux mètres, et plutôt maigre. Il avait sur la tête un bob, de grosses lunettes rondes, et portait une race de chemise à fleurs qu'Ike pensait depuis longtemps disparue.

Alors qu'il avait le dos tourné, le chanteur en profita pour faire une grimace à Luo, qui semblait dire « oui, on dirait bien un personnage de mexicain sorti d'une mauvaise série Z, mais il est photographe et il s'appelle Miguel ; mais bon Dieu sortez moi de là ».

– Alors aujourd'houi oune seance de fotografías con el señor Ike. Alooors... Déshabillez vous ! Enlevez tous vos vêtements. Jajaja. Ye plaisante bien soûr. Pas tout de souite. Margeriiita ! Mi cámara !

La coiffeuse quitta Ike pour aller chercher un gros appareil photo, qu'elle cala avec pugnacité dans les mains du photographe. Celui-ci ne tenait pas en place.

– Ye voudrais quelques fotografías dans le salon, natural ! Pouis dehors bajo el sol et enfin, la piscina !
– Et le studio, en train de faire de la musique p'têtre ?
– Jajajaja tou entends ça Margerita, el chico veut m'apprendre mon travail. Ce que veut la gente c'est voir vos cuerpos. Elle s'en fiche de la musica ! Luo ma chérie, assis toi dans le sofa là-bas, Ike va se poser joouste à côté.

Ainsi l’autre avait fait venir sa propre équipe, une femme pour lui faire les cheveux, s’était si mignon de voir un jeune garçon comme lui devant se faire assister. En même temps elle le comprenait, et si elle avait été dans une autre situation elle aurait sans aucun doute aussi préféré se faire pouponner. Enfin elle sourit au compliment du jeune homme et rencontra l’homme chargé de faire les photos, elle lui serra la main trouvant sa poigne bien puissante. Puis elle tiqua à son nouveau petit nom c’était pas le nom de la dame aux bananes dans la publicité ? Si c’était un truc du genre, une noire avec une coiffure remplie de banane... Elle ne dit donc rien de plus et puis elle laissa le baiser se poser un peu surprise par la façon de faire. Elle était si petite face,  elle... Enfin elle vit le regard de l’autre gars et tenta de se calmer doucement. L’homme annonça ce qu’il voulait, et la réaction fut rapide, il fut fusillé du regard par la jeune femme qui n’aimait pas du tout ce genre de blague cochonne. Il avait beau préciser que c’était une plaisanterie ça ne passait clairement pas. Et puis c’était vraiment la peine de les traiter de saucisses maintenant ?

Enfin la caméra fut apportée, un modèle antique, vraiment démodé pour le coup, mais bon ça avait son charme également. Elle écouta encore l’homme et finalement alla vers le sofa pour s’y asseoir de façon très formelle pour le moment. Puis elle regarda l’autre gars et l’invita à prendre place à côté d’elle avant d’entendre l’autre pervers leur dire de se coller un peu plus. Ce qu’elle fit sans aucun mal collant un peu le jeune homme et attendit la suite des instructions tout en entendant déjà l’appareil prendre ses photos ! Et l’homme semblait de plus en plus ravi de les voir collés dans un sofa. Aussi elle lui murmura :

- Hmm, jouons un peu le jeu, plus vite il a ce qu’il veut, plus vite on est tranquilles.

Puis elle entendit l’homme demander au jeune homme de montrer qu’ils sont ensemble et pourquoi pas lui faire un baiser dans le cou, quoi qu’ils puissent s’embrasser aussi s’ils sont pros, ça ne le dérange pas du tout.

Ike n'était pas tout à fait à l'aise vis à vis de l'excentrique photographe. Normalement, les gens qui travaillaient avec lui étaient à ses petits soins, soucieux de ne pas lui déplaire et de ne pas trop le brusquer. C'est qu'au Japon, on avait conscience de sa notoriété. Mais l'espagnol, avec son japonais rudimentaire, ne devait en avoir qu'une vague idée. Cela mettait l'adolescent un peu en colère. Toutefois il s’exécuta.

Il avait choisi pour le photoshoot une veste légère noire striée de bandes blanches réfléchissantes, sur un débardeur bleu. Il avait remplacé son pantacourt par un jean slim légèrement plus habillé, et avait laissé tomber les sandales, restant pieds nus. À son cou, son habituel médaillon rose vif « peace and love » avait retrouvé sa place. Ses cheveux étaient parfaitement coiffés cette fois, travaillés savamment, maintenu dégradés en hauteur par une bonne dose de gel.

En revanche, le chanteur était quand même moins intimidé par la jeune femme. Ils avaient discuté suffisamment pour qu'il sente qu'une complicité était en train de se tisser entre eux, et cela lui faisait du bien. Après tout, ils étaient à peu près dans la même situation. Aussi n'eut-il pas trop de difficulté à s’asseoir sur l'accoudoir du sofa, d'abord pensif, ils faisaient couple en pleine réflexion, un peu chacun de leur côté. Le photographe mitraillait déjà, mais il ne tarda pas à donner des directives.

– Plous près señor ! Colle toi à elle ! Vous êtes sensouelles ! Des parangons ! Parangones de creatividad ! De la creatividad muy sensual !

Ses instructions n'étaient pas toujours très claires, mais leur répétition et leur vitesse, combiné aux « clics » sans interruption de l'appareil, donnait à la séance un rythme qui ne laissait pas une seconde pour réfléchir. C'était sans doute l'objectif de Miguel, d'ailleurs.

Sans trop de pudeur, Ike obéit aux injonctions et passa sa main autour des épaules de Luo. Ils étaient à présents assez à l'étroit dans le sofa. Miguel s’adressa à la chanteuse :

– Allonge toi un poco ! Y Ike ! Mas sensual chico ! Place ta main sur son cuerpo !

Doucement, Ike fit descendre les doigts de sa main libre le long du bras de Luo. La pose aurait pu être davantage sensuelle, si le photographe n'avait pas continué à invectiver. Il ne se priva pas cependant d'apprécier la douceur de la peau de la jeune femme.

– Plous bas ! Plous haut ! Venga ! Regardez vous ! Venga ! Un beso dans le cou !

Les yeux dans les yeux de la chanteuse, Ike ne put s'empêcher de sourire. La situation était vraiment déroutante. Il se détacha à regret du beau regard pour filer poser ses lèvres à l'orée de son cou, touchant à peine l'épiderme. Le chanteur ne put s'empêcher de laisser échapper un éclat de rire, aussitôt remarqué par le photographe.

– Bien l'amousement chico ! Eres lindos ! Pero on est pas là pour rigoler n'est-ce pas. Hace el conquistador ! Mas sensual !
– Hey putain, Miguel, tu veux quoi, que je la pelotte ?
– No impaciente chico, plous tard. Il faut être patient avec les señoras. Vale ! Vous n'êtes pas assez sensuales ici. Ces fotografías n'iront nulle part ! Cambiamos, cambiamos. On change !

Le photographe était particulier en effet, mais pour la jeune femme ce n’était pas la personne la plus bizarre qu’elle ait croisée dans sa vie. Elle le regarda encore un moment quand il était en train des prends en photos, puis elle fixa le jeune homme attendant des instructions pour eux deux. Les ordres fusèrent alors, plus près, coller à elle, plus sensuellement et ainsi de suite. Elle l’approcha donc, collée parfois à lui, puis lui passa les mains autour du coup comme pour un câlin, qu’elle lui fit finalement. Le photographe semblait adorer en tout cas, enfin ils finirent à l’étroit dans le canapé, presque l’un contre l’autre, finalement elle sentit la caresse et rosit un poil, ça devenait quand même gênant non ? En tout cas ça la fit sourire, car avec le fou qui ne cessait de faire changer hauteur la main ça perdait tout son coté naturel et mignon d’avant. Enfin elle vit son sourire, puis elle sentit les lèvres dans son cou et le laissa faire, mimant celle qui aimait vraiment cela. Enfin le type en rajouta, encore et encore, mais elle ne parlait pas sa langue donc elle ne comprit que la moitié.

- Heu... OK je vais me changer...

Répondit-elle alors que le photographe lui faisait signe de filer d’ici, d’ailleurs il se déplaçait avec son matériel cette fois vers l’une des chambres, et pas celle du garçon cette fois, non une des chambres libres, car la jeune fille n’en avait pas encore choisi. Aussi dans la salle de bain elle se prépara, l’homme la voulait plus légère encore, mais pas en tenue de scène... Heureusement qu’elle avait de la réserve pour le reste et enfila donc un short court, mais pas moulant en jeans, elle laissa volontairement le haut ouvert pour faire plus détendue, le tout ne tenait que par la ceinture à présent. Puis pour le haut elle n’opta pour un t-shirt court, mais pas moulant non plus, et peu de décolletés. Seul son nombril était bel et bien visible lui, son petit ventre plat avec d’ailleurs.

- Me revoilà !

Le photographe semblait plus que ravi, elle et ses deux mèches ultras longues tombant sur son corps assez plat, un t-shirt blanc, un soutif gris dessous à peine visible, un short jeans bleu court et une culotte grise dont le bord était visible. Elle sourit encore et aux instructions monta sur le lit s’y posant à genoux. Elle fit quelques photos seules avec lui tandis que le garçon pouvait regarder, il lui fit prendre des poses plus ou moins attirantes, puis invita le garçon à la rejoindre prétextant que la suite serait des photos plus sensuelles...

En assistant avec Miguel à la série de photos seules de Luo, Ike comprit vaguement pourquoi un tel métier pouvait rendre aussi fou que leur photographe l'était. Il était terriblement difficile de rester de marbre face à une jeune femme aussi belle qui se contorsionnait selon ses désirs. S'il était assez difficile de savoir à quoi pensait Miguel – il semblait de toute façon en permanence dans un état d'excitation – décrypter Ike était un peu plus facile. L'émotion se lisait sur son visage, sur sa lèvre inférieure, qu'il mordit légèrement lorsqu'on lui ordonna de prendre part.

– C'est sexy le lit quand même ?
– Si. Muy sensual.
– OK...

Il avait retiré sa veste, n'ayant plus qu'un débardeur laissant voir ses épaules et la blancheur de ses bras nus. Se posant finalement à côté d'elle sur le matelas, le chanteur attendit qu'on lui donne quelques instructions. Mais Miguel resta muet plusieurs secondes, avant de s'exaspérer :

– Eh bien chico ! Qu'est-ce que tou attends ? Vous êtes in love, enlève lui son tee-shirt !

L'adolescent, assis sur le rebord du lit, tourna la tête vers Luo en cherchant son approbation, sourcils levés, air perplexe. Au moindre signe de refus il refuserait de suivre les instruction. Miguel avait recommencé à prendre des photos. Sans doute trouvait-il le jeu de regard très apte à faire de bonnes photos. À moins que ce ne soit pour presser un peu plus les choses, en réinstaurant le même rythme que quelques minutes avant. Comme pris par le temps, agité, il ne comptait pas s'arrêter là. Il les poussait à abandonner leur pudeur. Dans de telles conditions, Ike avait du mal à penser.

– Chica, déshabille le aussi, et retire cette estúpido soutien-gorge ! Topless tous les deux ! Sensual !

Elle l’écouta parler de truc sexy, un lit sexy ? La fille dessus elle pouvait l’entendre, mais un lit... sans doute ne comprenait-elle pas tout à se sujet, mais elle le laissa approcher encore un peu, l’un à côté de l’autre. Enfin l’homme donna ses ordres, elle hocha la tête au début, mais rapidement rosie se disant que ce n’était pas possible, elle hésitait donc et l’homme lu idiot enfin de faire pareil, retirer les habits du garçon, voilà qui était plus ou moins dans ses cordes. Elle se pencha un peu sur lui, puis le poussa sur le matelas sans aucun souci prenant la main pour le moment. Après tout il voulait juste des photos qui attisent la foule, qui allument le feu, rien de plus. Aussi c’est ce qu’elle joua, la demoiselle qui sait quoi faire, les mains sur le t-shirt du garçon elle le fit remonter et finalement le lui enleva totalement. Enfin elle resta rose et lui mit les mains sur le sien, comme pour le guider et remontrera vec lui son propre t-shirt. Heureusement pour elle son soutien-gorge n’avait rien de sexy, un modèle simple, une bande large à deux bretelles. De quoi cacher parfaitement sa fausse poitrine, enfin cela dévoilé elle fixa le photographe avec un air mauvais, fâché, très fâchée même.

- Vous avez ce que vous voulez non ? Car je n’irai pas plus loin !

Elle continua un moment de prendre des pauses avec le garçon lui murmurant :

- Va falloir se débarrasser de lui, et de ses photos avant que ça nous fasse une mauvaise pub...

Elle avait dit cela en faisant semblant de lui bisouner le cou, puis elle se redressa à califourchon sur lui comme demandé, mais avant de l’embrasser comme demandé par le photographe elle soupira longuement. Et ne le fit pas attendant que le garçon la supporte sur le coup, il était temps de se débarrasser de ce type, non ? Elle se dégagea d’ailleurs du garçon pour lui donner le champ libre au besoin.

Le cœur d'Ike battait à toute allure alors que les mains de la demoiselle remontaient son tee-shirt. Il avait l'habitude de se retrouver torse-nu face à un public, se dévêtant de temps en temps en concert... mais dans un lit, sous l’œil d'un photographe douteux immortalisant chacun de leurs gestes... C'était un peu différent. Plus excitant, pour lui ; peut-être que cela venait d'une tendance exhibitionniste qu'il soupçonnait un peu chez sa propre personne.

Au moins c'était la chanteuse qui prenait les initiatives... il se surprit à trouver que ce n'était pas désagréable, et surtout, il n'avait pas à craindre de la brusquer. Presque timidement, ce qui ne lui ressemblait guère, il se laissa guider jusqu'à retirer le tee-shirt de sa compagne simulée. Il ne put s'empêcher de passer les mains dans son dos, lui caressant doucement l'épiderme du bout des doigts, sans toutefois ne rien faire qui puisse être mal interprété. À vrai dire, il se retenait de la serrer contre lui.

Miguel, lui, paraissait ravi, malgré le refus de la jeune fille d'enlever son soutien-gorge. Il se faisait d'ailleurs plus silencieux. Peut-être avait-il compris le message.

– Muy bien muchachos, apprécia-t-il simplement.

C'est ce moment que choisit Luo pour glisser à l'oreille du chanteur quelques paroles inquiètes. Ike était un peu soucieux lui-même, mais il se voulait rassurant et plein de confiance. Il faisait en sorte de paraître maître de la situation...

– T'inquiète, mon vieux filtre tout, chuchota-t-il.

Peut-être lui n'avait-il tout simplement pas envie d'arrêter... De toute façon, le différentiel de carrure excluait tout affrontement physique avec le photographe. Même si Ike pouvait se montrer redoutablement hargneux et rapide, Miguel faisait 30 cm de plus, et probablement un peu moins du double de son poids.

Se redressant en position assise, il voulut lui enserrer doucement les épaules pour l'embrasser, mais il fut interrompu.

– Ooh, pas trop rapido, amigo ! fit l'espagnol, qui avait pourtant commandité le geste.

Ike se retourna vers lui, un air d'incompréhension au visage. Il commençait à vraiment détester ce type : à le chauffer de façon indécente et à le couper lorsqu'il était bouillant.

– Si. Tou es a point. Comme un bon steak ! Tu vois ? Pero, la chica elle n'est pas couite. Il est temps de rédouire la températoure. Il frappa dans ses mains, imitant un geste de flamenco. Maillots ! Es el tiempo para la piscina !

Non sans regret, le chanteur s'écarta de la couche. Son sous-vêtement était déjà le maillot vert vif qu'il comptait porter : il avait été prévoyant. Il serait sans doute donc prêt bien avant la jeune femme. Laissant Luo rejoindre la salle de bain pour se préparer, il descendit avec Miguel à l'étage inférieur.

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Lorsque Luo arriva à la piscine, Miguel avait déjà dû faire une bonne centaine de clichés. Ike n'était pas encore vraiment mouillé : il avait essentiellement posé en maillot sur un transat, puis simplement les jambes ballantes, au bord de l'eau.

Vêtu de son seul maillot vert, plus aucun vêtement ne cachait son physique partagé entre vigueur (ses muscles abdominaux en l'absence de graisse, étaient particulièrement dessinés) et de fragilité (ses côtes formaient des sillons précis dès qu'il inspirait). Il se dépensait certainement beaucoup trop pour ce qu'il avalait, et bien souvent, ce qu'il avalait ne restait pas dans son estomac. Pour autant, l'activité physique intense ne laissait pas que des marques désagréables à l’œil. On avait à la fois l'impression d'avoir affaire à un athlète, et de pouvoir le briser par maladresse.

Le photographe fit signe à la chanteuse de rester un peu à l'écart. C'était au tour de Ike de faire quelques captures solo. Il ne s'en accommodait pas trop mal. Bientôt, on lui ordonna de plonger, et il réalisa alors l'utilité du gel fixant waterproof utilisé par la coiffeuse. Trempé, l'eau tiède faisait ressortir les quelques reliefs de son corps, et donnait à sa peau une jolie couleur pêche claire.

Enfin, il se hissa jusqu'à un transat gonflable bleu-translucide qui dérivait à la surface.

– Venga, va rejoindre ton prince sur son îlot chica, lui indiqua Miguel.