Célébration du Centenaire de l’Union Tsariste
Place Rao
Raostadt«
Depuis des éons, Camarades, depuis que l’Homme est l’Homme, il a toujours tourné son regard vers les étoiles. Il s’est toujours demandé ce qu’était ce champ étoilé qui apparaît la nuit, et qui fleurit dans le ciel. La réponse à nos questions et à nos fantasmes nous a été définitivement apportée lorsque les Dieux sont venus sur Terre. »
Elle était arrivée quand l’
ogive avait été découverte en Sibérie, alors que, à cette époque, l’Union Soviétique tremblait sur place. L’envahisseur allemand assiégeait depuis plusieurs mois Stalingrad, la ville symbole du Petit père des peuples. On avait appelé l’appareil «
ogive », car, au début, les Soviétiques avaient pensé à une nouvelle arme allemande, amenant l’état-major russe à craindre une invasion nazie depuis les hauteurs de la Sibérie. Il n’en avait rien été, et il s’était avéré que l’ogive n’en était pas une, mais était un vaisseau spatial. Elle avait été déplacée dans une base souterraine, et, quand les Soviétiques avaient enfin réussi à l’ouvrir, ils avaient vu deux corps.
Celui d’une jeune fille, et d’un enfant plus petit. Ils avaient tenté d’écarter la fille, mais, en la repoussant, elle avait frappé un soldat, l’envoyant voler sur plusieurs mètres. Les balles avaient alors fusé sur les deux, et ils avaient constaté le prodige :
elles rebondissaient sur eux. Cet exploit était remonté jusqu’aux oreilles de Staline, et les deux prodiges avaient été emmenés.
Ils étaient un miracle divin, et Staline, qui tenait à son pouvoir bien plus qu’à ses principes, avait décidé de les diviniser. L’Union était fondée sur les préceptes de Karl Marx, sur la détestation de la religion, car elle était vue comme un moyen de malmener les masses, de les amener à se taire, et servait juste à soutenir une caste aristocratique décadente s’imposant sur les masses. Elle était l’opium du peuple, selon la formule usitée, mais eux... Eux deux, ils étaient vraiment miraculeux. Des forces terrifiantes de la Nature. La preuve que des êtres divins existaient.
Elle, elle était plus vieille que lui. Elle avait donc pris part à la guerre en étant très jeune, car ils avaient vite appris leur langue. Pour la convaincre, Staline l’avait envoyé à Stalingrad, voir la misère dans laquelle les nazis avaient plongé la population. Il lui avait dit qu’il existait plusieurs fléaux dans ce monde : le fascisme, mais aussi le capitalisme. Très intelligents, ils apprenaient vite, et elle participa rapidement à l’effort de guerre. Elle avait beau être jeune, sa capacité à stopper les balles, et ses coups de poings dévastateurs lui permirent d’inverser le cours de la bataille. La propagande soviétique s’amplifia autour du prodige, rrenforçant l’ardeur des soldats communistes.
On la vit ainsi se promener à Stalingrad, dans les rues, les balles des tireurs d’élite nazis s’écrabouillant contre sa peau, l’amenant ensuite à les massacrer. On la vit ensuite à Koursk, où elle défia à mains nues les chars allemands. Ensuite, ce fut la débandade. Les Américains avaient débarqué en Italie, mais, le temps qu’ils viennent à bout de Mussolini, les Soviétiques étaient déjà à Berlin. Rien ne pouvait arrêter la Prodige, dont les pouvoirs s’amplifièrent. On la vit ainsi cracher du laser avec ses yeux, et même se mettre à voler.
En seulement quelques mois, le temps qu’elle apprenne ses pouvoirs, Supergirl réussit à terrasser le Troisième Reich. Elle détruisit le Parlement allemand, et arrêta Hitler, empêchant ce dernier de se suicider. Toute l’Europe fut conquise sous l’Union, et ce ne fut que le début de la Grande Révolution, qui devait amener, par la suite, l’Union à s’imposer dans le monde entier.
Ce passé glorieux, Vassili Zelencheko était en train de le tenir. L’homme assurait la fonction de Grand Chancelier de l’Union, et, depuis l’immense Place Rao, jadis appelée «
Place Rouge », il commémorait les multiples exploits des Tsars.
«
Rappelons-nous la glorieuse victoire contre les chiens capitalistes américains ! La bataille glorieuse de la Baie de New York... »
Tandis que le Chancelier continuait à parler, loin, très loin, là-haut dans le ciel, Kara dansait sur le corps de Kal. Étant des Dieux, ils ne vivaient pas en compagnie des hommes, mais dans une station spatiale, qu’ils avaient pu construire grâce à la technologie de leurs ancêtres, l’
Eagle’s Nest. Dans cette vaste station, d’où ils pouvaient voir le monde entier, ils étaient dans une immense chambre, avec un lit énorme, tellement rembourré qu’il était entouré par un petit perron. C’était un très grand lit, pensé pour supporter les assauts des deux Tsars.
«
Hhmmm... »
Un écran plat géant diffusait les images du discours de Zelencheko, qui avait lieu avant le leur. Les Dieux devaient bien savoir se faire désirer.
«
Ka... Kara, hmmm... »
Ses mains se posèrent sur son corps, sur son costume, et il soupira encore. Il savait qu’elle n’aimait pas trop ce costume, qui lui rappelait son passé, mais elle le mettait pour lui, dans leurs moments privés. Il l’aimait bien, car, avec la minijupe, il pouvait directement la pénétrer. Cependant, en public, elle ne le portait jamais, car il lui rappelait leur passé... Et leur père.
À cette époque, Kal avait également grandi, et avait fini par aider sa sœur. Les deux étaient inséparables. Toute l’Europe était sous l’autorité de l’Union, mais les Occidentaux avaient la bombe atomique avec eux, et disposaient encore, en Europe, d’une poche de résistance : l’Angleterre. L’Angleterre, qui estimait être toujours en guerre. Quand il était avéré que les Anglais finançaient des mouvements rebelles dans les récentes colonies de l’Union, la guerre avait éclaté là-bas. Et Kal y avait participé.
Il avait toujours aimé voir sa sœur se battre. Elle était une véritable furie. Ensemble, ils étaient devenus, d’après les Américains, les «
Red Daughters of Russia ». Staline avait doté Kara d’un
costume officiel, et, ensemble, ils avaient grandi, oscillant entre les champs de bataille et les bunkers. Staline les considérait comme ses propres enfants, et Kal avait pu constater que Kara l’aimait beaucoup.
Après la chute de l’Angleterre, qui n’avait duré que quelques jours, ils avaient attaqué la plupart des flottes américaines situées dans le Pacifique et dans l’Atlantique, et avaient repris le Japon, colonie américaine. Les Américains avaient alors menacé de déployer leur arsenal atomique.
Pendant ce temps, Kal, lui, s’était interrogé. D’où venaient-ils ? Pourquoi étaient-ils si puissants ? Des questions qui n’obtenaient aucune réponse de la part de son « père », tandis que, progressivement, leur influence croissait. Ils étaient appréciés de tous : les soldats, les ouvriers, les mineurs, les fermiers... Les Fils de l’Union étaient des exploits vivants.
Cependant, Kal avait fini par retrouver leur vaisseau. Il avait des contacts au sein de l’armée, et ils ‘était rendu dans une base secrète, en Sibérie, où il avait vu, outre le vaisseau, de nombreuses recherches. C’est ainsi qu’il avait appris qu’il venait de Krypton, une planète qui avait été détruite il y a des éons, et que lui et Kara en étaient les seuls survivants, les descendants de la puissante famille des El. Lui était le fils direct de Jor-El, et elle, Kara, du frère de Jor-El. Il apprit ainsi qu’ils auraient normalement dû atterrir au Pôle Nord, mais qu’ils avaient, au lieu de ça, atterri en Sibérie, à cause d’un champ d’astéroïdes dans le système solaire qui avait légèrement perturbé le vol du vaisseau.
Toutes ces informations permirent ainsi à Kal de se rendre au Pôle Nord, où il trouva des installations soviétiques, ainsi qu’une base extraterrestre enfouie sous la glace, la
Forteresse de Solitude. Kal parvint à l’ouvrir grâce à son ADN, et la Forteresse sortit du sol. Les Soviétiques présents tentèrent alors de le repousser, et utilisèrent sur lui un instrument verdâtre inconnu, qui affaiblit énormément Superman.
«
...Ils sont les Tsars de l’Union, nos sauveurs bienaimés, qui nous ont apporté l’espoir et la foi en un nouvel avenir radieux ! Ils ont poussé le communisme à son paroxysme, et ont pacifié le monde ! »
Kal continuait à soupirer, sous le corps de Kara. Ils faisaient l’amour depuis plusieurs heures. Les deux Dieux vivants n’avaient jamais pu trouver le moindre plaisir sexuel auprès des amants traditionnels de Terre, qui mouraient en leur faisant l’amour. Kal broyait à chaque fois ses amantes en les serrant dans ses bras au moment de l’orgasme, ce qui avait toujours excité Kara. Là, si Vassili parlait, c’était tout simplement parce qu’ils faisaient l’amour entre eux.
Kara dansait sur sa verge, s’empalant dessus, et lui soupirait, grognait, glissant ses mains sous la minijupe pour masser directement ses fesses.
«
Ouiii... »
En Antarctique, Kal avait appris que Staline était jaloux de la popularité des deux Fils, et qu’il avait donc cherché un moyen de les supprimer. Il avait finalement trouvé quelque chose, en fouillant certains astéroïdes qui s’étaient écrasés en même temps que le vaisseau. Ils avaient pour particularité d’être de lueur verte, et les examens scientifiques menés sur eux avaient permis d’apprendre qu’ils ne venaient pas de ce système, mais de Krypton. La
kryptonite, ainsi qu’on appela ces rochers, était mortel pour Kal et Kara. En effet, ils tenaient leur faculté exceptionnelle des radiations solaires. Or, ces radiations avaient modifié leur corps, créant une sorte d’allergie pathologique à la kryptonite.
Kal fut donc enfermé avec de la kryptonite, tandis que els Soviétiques vinrent explorer la Forteresse. Cependant, alors qu’il commençait à mourir, Kara sentit son pouls cardiaque s’affaiblir, car les deux Kryptoniens étaient très proches, l’un de l’autre. Elle était venue, et ses yeux avaient pulvérisé la cellule, vaporisant la kryptonite sur place. Ils avaient tué sur place tous ceux qui se trouvaient là, et, en explorant la Forteresse, avaient appris qui ils étaient vraiment.
Ils avaient appris que Krypton avait été détruit par les Kryptoniens, et qu’ils avaient été envoyés sur Terre pour y mener une nouvelle vie. La Forteresse était une structure kryptonienne construite il y a des millénaires par les Kryptoniens, précisément afin de servir de refuges. Elle abritait des bases de données gigantesques sur Krypton, sa technologie, ses coutumes, sa religion... Kal et Kara avaient vu tout ça, et avaient compris qu’ils étaient seuls, et que Staline les avait trahis. Kara ne pouvait pas le nier, car, dans les bases environnantes, ils avaient trouvé des directives signées par Staline.
Kara avait été plus affectée que lui, car elle avait de bons souvenirs, de ces fois où ils faisaient du poney ensemble, où il lui offrait des glaces... Kal, lui, n’avait pas bénéficié de cette affection, car il était alors trop jeune. Dans la Forteresse, ils avaient fait l’amour pour la première fois.
«
Hhmmmm... !! »
Son corps se banda, et il se vida alors en elle, balançant son sperme dans son corps, le lit craquant doucement. Un magnifique orgasme, qui afflua dans le corps de la femme. Kal se redressa alors lentement, maintenant le corps de Kara contre lui, l’embrassant tendrement.
«
Je t’aime, Kara... »
Après l’épisode de la Forteresse, ils avaient décidé de se débarrasser de Staline, en faisant exploser son palais, et en mettant ça sur le compte des Américains. L’explosion avait eu lieu alors qu’ils étaient dedans, et avaient fourni toutes les excuses dont ils avaient besoin. Kara avait changé de costume, et, ensemble, ils avaient détruit les États-Unis.
L’Union était devenue universelle, et le monde n’avait plus jamais été le même. Poursuivant les idéaux de l’Union, ils avaient annihilé toutes les anciennes religions, et tous les anciens cultes, afin d’installer le culte de Krypton, celui du Dieu solaire Rao. Ils avaient détruit énormément de statues et de monuments, afin qu’ils soient à leur effigie. Pendant des années, ils avaient dû se battre, faisant face à de nombreuses révoltes, qu’ils avaient sévèrement réprimé, tout en utilisant la technologie kryptonienne pour améliorer le monde. Les bidonvilles avaient disparu, tout comme les guerres et les conflits armés. Un monde fondé sur l’autorité et sur Rao avait vu le jour.
La Grande Mosquée Sheikh Zayed, les lieux saints de Jérusalem, la cathédrale Notre-Dame, les basiliques, les temples et les sanctuaires... Tout avait été détruit, et, à la place, les temples de Rao s’étaient dressées dans le ciel,
comme à New York.
«
Il est temps d’y aller, Kara... »
Kal l’embrassa une dernière fois, tout en enfilant son costume, et laissa la Tsarine en faire de même.
Le brave Vassili avait l’air désespéré, ne sachant plus quoi dire.
Moscou avait été renommé «
Raostadt », et était devenu la capitale du monde, abritant la superstructure de Krypton : le
Grand Temple de Rao.
Au pied de chaque Temple, il y avait une sorte de grande pyramide, pour les fidèles. Seuls ceux ayant le statut de «
Raoïstes » pouvaient rejoindre les parties surélevées. Ces structures étaient devenues les uniques autorités légales de l’Union.
Volant dans le ciel, Kal et Kara approchèrent, et les hurlements fusèrent. Il y avait des dizaines de milliers de gens. Raostadt était une immense ville, une cité religieuse, où de nombreux quartiers avaient été rasés pour construire la gigantesque Place-Rao. Kal se posa sur l’estrade, au centre, en compagnie de la Tsarine, et, après une longue clameur, commença à parler :
«
Camarades ! Camarades de la fière et puissante Union de Rao ! Comme le Camarade Zelencheko vous l’a expliqué, aujourd’hui, vous goûtez à la joie d’un monde en paix ! Vous goûtez à la joie d’un monde plus sûr, un monde où nul n’exploite désormais son prochain. Un monde où nul ne tue son prochain au nom de fausses idoles et de croyances superstitieuses infondées. Un monde fondé sur la paix, la sécurité, et la raison. »
Il y eut de multiples acclamations, et il reprit ensuite :
«
Depuis des millénaires, Rao vous regardait, et vous observait. C’est en vos heures les plus sombres que Rao a décidé de nous envoyer vous guider. Jésus, Allah, Yahvé... Ces fausses idoles reposent sur l’époque où Rao était venu voir ce monde, et son message a été exploité, utilisé et perverti par les anciennes forces dirigeantes corrompues, afin d’oblitérer la masse, et de pouvoir l’asservir. Rao est revenu vous libérer, et nous en sommes les incarnations ! -
RAO ! RAO ! RAO ! RAO ! RAO ! »
Kal hocha lentement la tête.
«
La foi et l’autorité sont les maîtres mots d’une vie sereine et épanouie. D’une vie égalitaire ! Pour autant... Pour autant, les vieilles lubies ont la vie dure. »
Un écran géant se tenait derrière eux, et l’image du Tsar et de la Tsarine changea, montrant autre chose. On y vit les collines de Rio de Janeiro. La statue du Christ rédempteur avait été détruite, remplacée par une statue géante de Supergirl. Une statue à qui la tête avait été arrachée, et où on avait taggué, sur le corps, des expressions insultants : «
MORT À L’UNION ! ». Kal se tut pendant plusieurs minutes, laissant le soin au peuple de siffler ces images.
«
Depuis des années, les régions sudaméricaines se révoltent contre nous. Nous avons été plus que tolérants avec eux. Quand nous avons vaincu les Américains, leurs dirigeants se sont enfuis là-bas, et, depuis là, continuent à lever la population contre nous. Une population qui, par son refus de coopérer, est entièrement coupable ! »
Rio de Janeiro avait déjà été sur la sellette quand un Raoïste avait été tué. Le gouverneur local avait convaincu les Tsars de retrouver les coupables, mais avait échoué. Soit il était corrompu, soit il était d’une incompétence flagrante.
Kal se tut alors, et tendit la main vers Kara, lui parlant alors à voix basse :
«
À toi, mon amour. »