«
Oui, nous sommes en retard par rapport aux autres camps... -
Je n’aime pas ça. On dit que cette forêt est hantée... Qu’il y a des monstres qu’il ne faut pas réveiller... -
Superstition de bonnes femmes ! répliqua le contremaître.
Tout ce qui compte, c’est de suivre les plans. »
Filant le long du sol, de discrets tentacules verdâtres se dissimulaient sous les feuilles, et étaient tous reliés à une clairière assez éloignée, où, dans un grand bulbe végétal, Ivy, assise en tailleur, communiait avec la Nature. Elle avait quitté le lac pour rejoindre la lisière de la forêt, et avait formé un bulbe végétal, avec lequel elle s’était rapprochée davantage de la forêt, sa plante s’enfonçant dans le sol. Grâce à ses tentacules, elle écoutait les conversations des bûcherons et des contremaîtres, et elle comprit qu’il y avait un vaste projet d’abattage concernant la forêt d’Eriendor. De ce qu’elle avait compris, une guilde nexusienne se dissimulait derrière ce projet, et la guilde avait embauché beaucoup d’ouvriers et de bûcherons, tout en créant une dizaine de scieries à différents endroits dans un angle de la forêt, dans le but de découper les arbres. Des montagnes de rondins s’entassaient, et des milliers de bûcherons découpaient les arbres, protégés par des mercenaires, des mages-guerriers, ou par des mercenaires vaporéens ou tekhans. Une vaste opération, impressionnante, qui illustrait la richesse de ceux derrière ça... Mais pourquoi s’attaquer à cette forêt ? Pamela avait rapidement compris que ce n’était pas pour le bois. Nexus avait quantité d’autres forêts, et la cité-État ne souffrait guère de pénurie en matière de bois.
Les différents villages locaux avaient été assujettis à l’autorité des mercenaires, ce que Pamela put voir en se rapprochant de l’un de ces villages. Le Maire local n’avait pas pu faire grand-chose contre cette armée privée, et les différents greniers locaux étaient utilisés pour entretenir les mercenaires et les bûcherons, avec quelques viols réguliers sur les paysannes, et des décapitations sommaires sur les villageois tentant de les renverser, ou d’avertir la Garde nexusienne.
«
Allez, allez, coupez, coupez ! »
Pamela ne pouvait pas obtenir grand-chose d’autre que des sons grâce à ses tentacules, et elle finit par sortir de son cocon, puis se rapprocha. Elle fila entre les arbres, et arriva sur une plateforme surélevée lui permettant de voir le village. Le camp avait été installé à proximité, avec de multiples scieries, et une palissade en bois. Ivy pouvait les attaquer... Mais elle doutait de ses chances de succès. Son contrôle sur la Nature était fort, mais cette forêt était effectivement très ancienne... Et Pamela avait senti des forces ancestrales à l’intérieur, des forces qui lui semblaient
presque être plus dangereuses que ces hommes cupides et avides. Autrement dit, elle ne voulait pas aller de Charybde en Scylla en attirant sur elle les véritables maîtres de cette forêt.
*
Il y avait des elfes jadis dans cette forêt... Et ils ont fui. J’ignore ce qui les a fait partir, mais quelque chose me dit que ça ne devait pas être ces quelques villages reculés...*
Eriendor était un endroit chargé de contes et de légendes... Et, si Pamela savait que les légendes étaient souvent fantasmagoriques, elle savait aussi qu’elles avaient toujours un fond de vérité. Oui, il y avait quelque chose dans cette forêt, et, si Pamela avait su ne pas se faire remarquer, elle était convaincue que ces agresseurs, eux, cherchaient précisément cette chose. Pamela se laissa donc descendre, et rejoignit une partie du village, près d’une petite ferme locale.
Des poules s’égayaient joyeusement dans une cour, et elle vit aussi un potager, avec des carottes, des choux, des tomates. Quelques enfants jouaient dehors, dans la rue, et elle se rendit vers la ferme, avant d’entendre du bruit sur sa gauche. Elle s’avança prudemment, toute nue, avec sa peau verte et sa longue chevelure de feu. Une écurie... Plusieurs chevaux s’ébrouaient, et un garçon d’écurie, bâti comme un catcheur américain, mais avec de vrais muscles, et non de la gonflette, était en train de soulever des bottes de foin depuis la grange pour les poser dans l’écurie. L’homme était en sueur, avec de belles aisselles sous ses bras, et une chemise avec une redingote totalement couverte de sueur et de transpiration.
*
Un pur autochtone...*
Soit quelqu’un avec qui elle pourrait se renseigner. Pamela le laissa rentrer dans l’écurie, puis se dépêcha d’aller dans la grange, et se dissimula au milieu du foin. L’homme ne tardait pas à revenir, et elle put noter qu’il portait de gros gants en cuir. Le foin se trouvait en hauteur, et il grimpa sur une échelle en bois, avant de pousser la botte de foin, et de la faire tomber sur le sol. Il redescendit ensuite pesamment l’échelle... Puis la porte d’entrée se ferma toute seule, le faisant sursauter.
«
Qui... Qui va là ?! »
Pamela sortit alors lentement de l’ombre, et l’homme sursauta... Avant d’écarquiller les yeux et de toiser la femme des pieds à la tête, son regard insistant sur ses seins lourds. En souriant lentement, Pamela s’approcha de lui, et posa une main sur sa joue, soufflant contre ses lèvres, insufflant son terrible poison envoûtant.
«
De méchants hommes attaquent ma forêt... Fais-tu partie des méchants hommes, jeune homme ? »
Les yeux écarquillés, avec le sexe qui déformait son pantalon, c’était comme si un chat avait avalé la langue de l’homme. Il répondit en déglutissant, secouant négativement la tête, et Pamela sourit... Puis l’embrassa, pressant son corps contre le sien, enfonçant ses seins dans son torse... Puis elle le poussa, et l’homme tomba au sol, ahuri et incrédule, se demandant probablement s’il n’était pas en train de rêver. Ivy se plaça alors au-dessus de lui, jambes écartées.
«
Qui sont les monstres dormant dans cette forêt ? Qui sont ces gens ? Je suis sûre que tu as des informations à me communiquer, jeune garçon... Et je suis prête à payer le prix nécessaire pour obtenir ce que je veux... »
Un tentacule jaillit de l’un de ses doigts, et se glissa sous le pantalon de l’homme, venant s’enrouler gracieusement autour de son sexe, avant de presser, et de tirer dessus, faisant soupirer l’homme.
Il allait parler.
Pendant ce temps, près du camp de bûcheron, plusieurs cavaliers ne tardèrent pas à arriver, et allèrent voir le Maître de ce camp :
Tommen.
«
Le camp de Creekstone a été attaqué ! »
Tommen esquissa un sourire ravi. Enfin ! Après plus d’une semaine à découper du bois et à chasser les biches, les forces surnaturelles d’Eriendor se manifestaient ! L’homme, assis sur la terrasse de sa maison, montée sur pilotis, se releva, et satisfait, récupéra le fusil de chasse qu’il avait récupéré auprès d’un contrebandier tekhan, arborant sur son torse un redoutable talisman magique, en forme d’
attrape-rêves.
«
Messieurs...-Dames... Au camp de Creekstone ! hurla Tommen.
Allons botter les culs de ces forces ancestrales ! »