Minuit. Et toujours personne. Face à la chapelle, le petit parc était bien calme. Normal à cette heure me direz vous. Sur le banc public en meilleur état, le vampire attend, le regard perdu dans un livre. Un lecteur noctambule, à la lueur des lampadaires ? Sa vision nocturne lui permettait de lire même sans le lampadaire, c'est dire. Jusqu'ici, personne ne l'avait embêté, et il espérait que cela reste le cas, hormis si elle débarquait.
Elle, c'était une demoiselle croisée quelques nuits plus tôt. Le genre de donzelle aux courbes qui ne laissaient point indifférents les hommes qui la croisaient. Même lui en tant que vampire l'avait trouvé à son goût. Mais plus que l'attrait physique, c'était la tenue de l'inconnue qui lui avait tapé dans l'oeil. En adepte des transformations corporelles, il manipulait la peau à souhait, et pouvait la rendre extrêmement dure, d'une couleur étonnante ou bien très souple. C'était l'impression donné par la tenue de la jeune femme. Bien sûr, la technologie faisait des merveilles, mais il se demandait s'il n'y avait pas là dessous un peu de son art, fait par un autre vampire. Ou bien s'il ne pouvait pas apprendre de cela, voir trouver un partenariat avec elle.
Il ne lui avait pas fallu longtemps pour voir où elle vivait, et laisser devant sa porte un papier, aux premières heures de la nuit. "Lundi soir, minuit, face à la chapelle des deniers". Court et concis, mais également mystérieux. Il ne pouvait se permettre de donner des détails ou des indices. Et si elle ne venait pas ? Il finirait par aller chez elle. Mais en l'état, elle savait que la personne ayant déposée le papier savait où elle vivait. Un point à ne pas négliger.
Attiré par toutes sortes de connaissances, Valian voyait cette entrevue provoquée sous plusieurs auspices : il pouvait marchander la connaissance, s'allier avec la porteuse, voir prendre du bon temps avec. Ou carrément les trois. Un soupir franchit ses lèvres dans le froid quelque peu mordant du soir. Il n'avait pas de problème de température, pourtant il arborait un manteau à col haut, ainsi que des gants. Toujours se faire passer pour un humain, toujours. D'ailleurs, il n'envisageait pas pour l'instant de se présenter sous sa véritable nature si la jeune femme débarquait.
Un craquement le sortit de sa rêverie. Il pouvait paraître absorbé, mais il n'en était rien, il ne lisait pas vraiment. Fausse alerte, un groupe de plusieurs jeunes franchit la placette, en direction de la rue opposée, laissant en suivant l'étendue calme comme auparavant. Minuit vingt. Elle ne viendrait pas, c'était presque certains. Il se leva du banc, époussetant son manteau et s'apprêtant à partir. Tant pis, il n'avait pas eu le flair qu'il croyait pour la convaincre. Sous le passage d'un banc de nuages, la lune fut voilée l'espace d'un instant, rendant la place d'autant plus sombre. Il se détourna, prêt à partir.