Doutz’ ramenait cela au sexe... Car c’était la seule chose qu’ils aient vécu ça ensemble. Pour elle, soit Alex’ la manipulait, soit il n’avait pas autant la tête qu’elle sur les épaules. Ils n’avaient fait que coucher ensemble, et, pour Doutz’, elle était respectée dans la logique « clients », se refusant dès le début à voir en autre chose qu’Alex’ une autre poule à plumer pour les bons soins de Reto. Une sorte de pacte implicite qui convenait très bien aux autres hommes avec qui elle avait couché, car, ce qu’ils redoutaient surtout, c’était que leur conquête d’un soir ne s’attache à eux, afin de bouleverser leur petit train-train. Malheureusement, Alex’ était célibataire, et n’avait visiblement plus envie d’y rester. Est-ce qu’il tentait d’allumer Doutz’ parce qu’il le pensait vraiment, ou parce qu’il avait en horreur le célibat, et qu’il voyait en elle un bon moyen de s’occuper le soir ? Doutzen avait beau se dire romantique et rêveuse, vivre avec un homme comme Reto, c’était apprendre à être réaliste, et à savoir contenir ses ardeurs. En un sens, elle était encore pire qu’une prostituée, car, avec la prostituée, on était sûr de ne pas se faire entuber. Elle, elle était un vicieux petit Chaperon rouge, et Alex’ voulait s’entacher à elle. Non seulement c’était incompréhensible, car Doutz’ n’arrivait pas à comprendre ce qu’il pouvait lui trouver d’autre en-dehors de ses performances sexuelles, mais c’était aussi risqué, car, en faisant ça, il entrerait davantage dans le jeu de manipulations instillé par Reto.
Elle n’avait aucune réponse tranchée à donner. Elle ne pouvait pas dire « Non » car, si elle avait une entrée, et que Reto avait encore besoin de sa poule, il pourrait s’énerver... Et elle ne pouvait non plus dire « Oui ». Elle était déstabilisée, et Alex insistait, se rapprochant à nouveau d’elle, posant ses mains sur ses épaules, l’amenant à croiser à nouveau son regard. En d’autres circonstances, elle aurait pu émettre des doutes sur les capacités d’Alex à séduire les femmes. Entamer son discours avec un « J’ai couché avec un nombre important de femmes » n’était clairement pas la bonne approche... Mais Doutz’ n’allait pas lui reprocher sa maladresse, et ce d’autant plus qu’il y aurait eu, là-dedans, un brin de mauvaise foi et d’hypocrisie. Elle-même avait couché avec un nombre « important » d’hommes... Sûrement moins qu’Alex, mais assez pour avoir un doute sur leur nombre.
« Essayer... »
Ce fut tout ce qu’elle arriva à murmurer. Alex l’embrassa à nouveau, et Doutz’ soupira. Sa bouche s’entrouvrit, et elle sentit la langue de l’homme filer dans la sienne, s’enfoncer dans sa cavité, dans son antre, allant chercher son propre appendice lingual pour un doux ballet. La main de Doutz’ se crispa sur ses cheveux, une autre sur ses épaules, et elle répondit à son baiser, soupirant et gémissant... De l’amour, vraiment ? Elle avait plutôt l’impression de voir une émanation hormonale intense, mais il était si facile de confondre les deux, si facile de se tromper, si facile de croire qu’un désir sexuel fort était une forme d’amour... Mais ce n’était qu’une lune de fiel, le plus terrible des poisons, car le plus exquis... Ou peut-être devenait-elle trop cynique. Quoi qu’il en soit, tout en l’embrassant, sa serviette se défit, probablement à cause du contact avec le corps de l’homme, et, alors que le baiser se prolongeait, cette dernière finit par tomber, glissant le long de son corps pour s’étaler à ses pieds. Doutz’ était à nouveau toute nue, ses cuisses se frottant contre la verge de l’homme.
Elle n’était pas dupe... Il y avait forcément quelque chose qui puisse expliquer l’attrait d’Alex envers sa personne, et sin espèce d’acharnement sexuel... Doutzen devait avoir un corps et une attitude sexuelle qui, en tout point, correspondait à ses fantasmes inconscients. C’était une autre hypothèse possible, préférable à celle, plus froide, du Don Juan continuant à jouer son rôle, mais, faute de savoir lire dans les pensées des autres, la jeune blonde ne pouvait que broder.
Le baiser dura donc un certain temps, jusqu’à ce qu’il se termine. Le regard légèrement perdu dans le vague, Doutz’ se mordilla les lèvres, et hocha la tête.
« Essayer, ça, je veux bien... Ta compagnie reste agréable, Alex... Très agréable, même... »
Trop agréable, en fait... Mais, en disant cela, elle devait sans aucun doute aussi parler d’elle-même. À force de l’envoyer sur le terrain, Reto avait fini par la rendre « trop » douée. Maintenant, ses proies devenaient amoureuses d’elle, amenant Doutz’ à se demander, avec horreur, quand elle changerait... À partir de quand cesserait-elle d’être un petit Chaperon rouge pour devenir une Veuve noire ? Plus elle multipliait les amants, et plus elle s’en rapprochait...