Dès le moment où le grimoire avait été ramassé, il avait cessé d'agir étrangement. Dans les mains de la jeune femme, il n'était plus qu'un objet inerte qui, de par son volume et son style, attirait cette fois des regards curieux pour les uns, vaguement hautains pour les autres qui estimaient que quiconque possédait un bouquin comme celui ci devait être sataniste ou quelque autre engeance détraquée.
Mais dès l'instant où il avait été ouvert sur les cuisses de la jeune femme... Il avait vaguement vibré, avant de chauffer jusqu'à atteindre le température de la peau d'un amant fiévreux. Là, il s'était débattu comme un gros félin ingrat et las de caresses avant de bondir sur le sol ! Il avait pivoté à gauche, à droite, comme si tout son corps avait été un gros crâne aux yeux curieux, avant de se mettre à lentement léviter pour décrire de longues boucles, explorant ainsi son nouvel environnement. Fouineur, l'ouvrage planait d'une pièce à l'autre, passant parfois sous une chaise, au dessus d'un meuble, tâchant de toujours rester assez loin de la jeune femme pour ne pas se laisser capturer, jouant au chat et à la souris. Lorsque la distance devenait trop courte, le grimoire produisait un claquement sec avant de se translater instantanément dans une direction aléatoire sur un mètre, le tout dans un éclatement d'étincelles d'argent.
Et puis, aussi simplement que ça, le bouquin avait semblé se lasser de son escapade et était retourné s'allonger sur le lit, en plein milieu. Il y ébroua ses pages comme le ferait un chien avec son pelage pour en chasser l'eau, se referma complètement comme pour reprendre à zéro... Et s'ouvrit lentement, tandis qu'une force invisible verrouilla tous les accès de l'appartement dans une série de claquements tout de même un peu inquiétants.
Alors, on aurait dit un film.
Ses pages diffusaient une intense lumière dorée comme si les connaissances qu'elles contenaient avaient pu être le plus fabuleux des trésor du monde entier. La luminosité s'épanouit avec douceur jusqu'à baigner tout l'appartement de la jeune femme dans une tiède quiétude.
Son introduction narrée, le grimoire feuilleta ses propre pages pour en trouver une toute particulière à exposer, commençant son récit abstrait. Avec étonnement, la jeune femme put constater que la page ainsi présentée n'était plus faite d'un simple papier jaunit, mais d'une très fine feuille de nacre sur laquelle s'enchevêtraient langoureusement une infinité de symbole compliqués, qui rayonnaient comme autant d'aurore boréales. Plus surprenant encore, lorsque Maelie fit courir ses yeux sur ce texte irréel, elle le comprit instantanément. Il ne délivrait aucun message concret, mais plutôt des émotions, des certitudes, des sons, des sensations : ce fut d'abord une brise d'apaisement qui souffla sur a peau de la lectrice, comme si le grimoire voulait la rassurer quant au fait qu'il ne lui arriverait rien de mal. Puis vint une douce onde de quiétude qui s'insinua avec délicatesse jusqu'à l'esprit de la jeune femme pour achever de la tranquilliser. En elle, la paix et la quiétude se mêlèrent à l'image de deux amants pour ne faire qu'un, devenant un doux réceptacle à la vague sensationnelle qui arrivait. Elle engloba la jeune femme, lui donnant cette impression de perdre pied pour reposer dans un univers de soie luminescente.
Et vint un premier contact, fugitif et éthéré ; celui d'une main surchauffée qui passa de la nuque de la jeune femme jusqu'au milieu de son dos, directement contre sa peau.
Un grand flash lumineux, seul le grimoire demeurait visible au centre de toute cette clarté. Il était là comme point de repère, une bouée à laquelle se raccrocher en cas de panique. Il feuilleta à nouveau ses propres pages, en dévoilant une faite de saphir souple et translucide. Toute la luminosité du monde sembla converger derrière cette fine page de pierre précieuse, bombardant toute la pièce d'une infinité de reflets bleus. Avec un tel spectacle vint une agréable sensations de fraîcheur... On se serait presque cru sous l'eau. Mais un étrange phénomène donna à Maelie l'impression de... Monter ; de s'élever vers un domaine sans plus aucune limite, un ciel bleu pâle, pur, domaine de l'imaginaire et de la pensée. La pièce de l’appartement de la jeune femme avait complètement disparue, les mur remplacé par des cieux bleus, les meubles dispersés et remplacés par de colossaux nuages.
Avec une telle vision vint la certitude que ces nuages contenaient quelque chose.
Toute la scène se déplaça, transportant Maelie dans l'un des nuages duveteux. Le grimoire tourna la page pour afficher une gigantesque feuille de rubis qui donna au ciel une chaleureuse teinte rouge-rose.
Et d'un coup, une seconde caresse à même le ventre de la jeune femme, la testant, jouant avec elle. Immédiatement après, une exquise sensation de chaleur. Puis un rideaux sembla se soulever dans le nuage, dévoilant lentement une première scène. Un homme de lumière s'y tenait, embrassant luxurieusement l'exacte copie de Maelie ! Pouf, même pas le temps de voir d'autres détaille, voilà la spectatrice éjecté de son nuage pour en visiter un autre. Ici, même chose : le ciel devint rouge passion, un rideaux se leva, et la jeune femme parvint à se voir allongée sur le dos, sa poitrine à demie-nue bombardée des baisers d'un être lumineux avec beaucoup trop de prestance, d'élégance et de malice pour n'être qu'un bête mortel.
Nouveau nuage. Un ciel plus rouge, plus chaud. L'être de lumière écartait avec une soudaine rage libidineuse les vestiges du petit haut de sa victime, plongeant son visage d'or sur deux seins nus et vulnérables, les noyant sous des caresses et baisers qui, à en juger par les délicieuses convulsions de désirs et les halètement de plaisir de l'image de Maelie, devaient être insupportablement délicieux.
Encore un autre nuage dans lequel la spectatrice malmenée arriva avec plus de force. Ici, les cieux étaient vermeilles et l'air surchauffé véhiculait une onde d'interdit, un prémisse à la luxure. Dans ce nuage ci, les contours de l'être lumineux étaient plus nets. Ses cheveux étaient longs, sont sourire concupiscent et affamé, son regard chargé de promesses d'atteindre des sommets de débauches libidineuses. Mais ici, le double de Maelie avait disparu. C'était elle même qui se retrouvait les mains posées sur un torse ferme, palpitant et fiévreux; si agréable au toucher qu'elle pouvait en attraper des fourmis dans les bras.
Un autre nuage, l'être était encore un peu plus visible. Ses traits s'affirmaient dans une aura d'improbable majesté. Ses prunelles étaient d'encre et d'or en fusion. Sa peau de porcelaine. Sa crinière d'onyx et d'argent. Et son sourire trahissait une esprit tant joueur que libidineux. Si Maelie pouvait noter autant de détail, c'était parce qu'un tel visage, si parfait, si onirique, se tenait à quelques centimètres du sien, lèvres entre-ouverte pour suggérer les prémices d'un baiser explosif.
Puis, par surprise, un contact. Franc, puissant, assuré. Une main qui semblait faite de feu s'était appuyée à plat sur le ventre de la jeune femme avant de glisser, sans perdre une seconde, droit sous son pantalon pour décrire sur un endroit on ne peut plus sensible un unique mais trop intense petit mouvement circulaire. La sensation ne dura qu'une seule malheureuse petite seconde.
Et en comparaison, tous les plaisirs qu'elle avait déjà dû ressentir avaient dû sembler bien pâles.
Un tel attouchement sembla précipiter la suite des événement. Une force irrésistible vint frapper l'esprit de Maelie pour le scinder en autant de fragment qu'elle avait d'envies et de fantasmes. Divisée mais pleinement consciente, la victime d'un tel tours vécu au travers de tous ses autres elle chacun de ses désirs. Si tel était son désir, elle voyait se jouer, là, une scène des plus torride où l'être de lumière s'ébattait furieusement en elle dans une posture qui, à n'en pas douter, devait la stimuler jusqu'au plus profond de son être. Si tel était son désir, là, elle vivait aussi cette sensation de pouvoir goûter au plus interdit des mets, long et raide, juste sur sa langue. De tells scènes se jouaient toute en même temps, piégeant la victime dans une cataclysme de sensations débridées, trop intenses pour être réelles.
Puis toutes les visions cessèrent, et l'esprit de Maelie se fit à nouveau un plutôt que fragments.
A présent, la jeune femme pouvait se sentir observée par quelque chose de terrible, de malicieux, et d'infiniment joueur. Une scène se forma devant ses sens, lentement, avec précision, dans laquelle son double affichait une nudité et un regard baissé vers le sol trahissait une profonde attitude de soumission. Une ombre recouvrit l'actrice-jumelle, et elle se mit à frissonner. Pas de peur, pas de crainte, mais d'un désir et d'une impatiences tels qu'elle semblait risquer de mourir à chaque secondes passée à attendre.
Puis une main pâle agrippa avec une insupportable lenteur sa crinière rouge, pencha sa tête en arrière, et vint narguer ses lèvres du bout de son membre tendu, avant de l'y insérer sans même demander la permission. Qui aurait demandé la permission à une telle créature aussi docile, de toute façon ?
La scène se figea, et le mâle lumineux se tourna vers la vraie Maelie qui devait ne pas en perdre une miette. Il n'accordait plus aucune attention à son jouet qui, à genoux, aspirait goulûment cette consistante friandise que son maître avait la bonté de lui offrir. L'homme -non, la créature- sourit lentement, transpirant de perversion, avant que la lumière sur sa peau ne se tarisse pour le laisser apparaître tel qu'il était : si beau, si désirable, si parfait que... Que... Qu'aucun mot n'aurait pu suffire à lui rendre justice. Chaque centimètre carré de son être exsudait la débauche, l'extase. Il était un prédateur, pour sûr. Et il avait trouvé de quoi se faire un festin.
Puis il souffla d'un timbre si musical et irréel qu'il aurait semblé être le point de départ de l'ode de la création :
- Ce pourrait être toi.
Pour que ses propos ne soient pas ambiguës, il serra plus fort dans sa main la crinière de son jouet, poussant son membre plus loin entre ses lèvres.
Et vint le noir, le vide, le froid. La vie réelle. Le livre était là, posé sagement sur le lit, encore ouvert sur une page blanche bordée de symboles qui s'agencèrent pour former, dans la langue de la jeune femme, les lignes suivantes :
- Tu n'as qu'à signer.
Et Maelie savait très bien ce qui se passerait si elle s’exécutait. Elle le savait, et elle le voulait.
N'est-ce pas, tout petit jouet ?