ADAMANTE
Quand les nouvelles de l’émeute avaient fusé au palais d’Ivoire, la Garde civile s’était déplacée rapidement. Depuis les balcons du château, Elena et Adamante avaient vu des flammes au loin, et de la fumée en train de s’envoler. Les deux femmes avaient immédiatement compris qu’il s’agissait de l’abattoir, et Adamante avait fermement ordonné à Elena, malgré les contestations de cette dernière, de ne pas y aller. La Reine devait rester en sécurité. Elena avait protesté, et Adamante s’était ensuite téléportée, arrivant sur une place, près de l’abattoir, où elle avait entendu des hurlements. Les émeutiers fuyaient, et la garde affrontait d’horribles monstres, de terrifiants hommes-porcs qui s’infiltraient dans les maisons, et tuaient leurs occupants. Ces derniers, de simples citoyens effrayés, couraient dans la ville, cherchant à fuir. Il y avait des cadavres qui gisaient sur le sol, des blessés, des chariots renversés, des portes fracturées, des hurlements, des pleurs, des larmes...
C’était un cauchemar. Un homme-porc lui avait sauté dessus depuis un toit, et elle l’avait senti approcher. Elle avait envoyé une onde de choc, une puissante onde qui avait repoussé le colosse, l’envoyant à travers le mur d’une piteuse maison. Le monstre s’était écrasé sur une table en bois, avant de rouler sur le sol, terminant sa course dans un meuble. Adamante avait ordonné aux citoyens de la place de se réfugier vers le plus proche fort. La garde locale était complètement désemparée, mais la magicienne savait que Langley arrivait, avec ses puissants chevaliers. La magicienne avait hésité entre rester sur la place, ou se rapprocher de l’abattoir, qui était l’épicentre de ce cauchemar. Des réfugiés lui avaient dit qu’ils avaient tenté de détruire l’abattoir, et que des démons en étaient sortis, jaillissant de l’abattoir, mais aussi de rues proches, depuis des bouches d’égouts et les caves de maisons abandonnées, en provoquant de longs sifflements sonores, puis des projections de fumée. Adamante avait alors décidé de se rapprocher de l’abattoir, remontant le long de la rue, soignant les blessés, envoyant ses puissants sorts sur les hommes-porcs, jusqu’à atteindre l’abattoir.
Un bâtiment brûlait fort, formant une longue torchère enflammée qui s’envolait dans le ciel. Il y avait de nombreux émeutiers morts, et plusieurs hommes-porcs qui dévoraient leurs cadavres. Elle avait trouvé un blessé, qui lui avait expliqué qu’il avait vu plusieurs monstres faire des prisonniers, s’enfonçant dans les profondeurs de l’abattoir. Un autre lui avait dit que d’autres étaient dans l’église, et Adamante s’y était rendue, en pensant y trouver des réfugiés... Pour se retrouver face à de multiples hommes-porcs, et face à un prêtre devenu fou. Avec horreur, elle avait compris que le récit du Zerrikanien était intégralement vrai. Mandus était devenu fou après avoir été dans la jungle de Zerrikania, et Lamb l’aidait, devenu également fou. Ses sorts magiques avaient repoussé les hommes-porcs, et la puissante magie de la Mélisaine perturba celle de Lamb, provoquant sa mort. Un homme-porc le tua, puis bondit à nouveau vers Adamante, qui utilisa une nouvelle onde de choc. L’homme-porc s’envola par cette puissante magie, et traversa un vitrail, s’écrasant au milieu des tombes du cimetière de l’église. Aux pieds d’Adamante, Clayton tremblait sur place, médusé.
«
Sortez d’ici, Monsieur Shaw ! Réfugiez-vous au plus proche fort, et attendez la venue des renforts ! »
D’autres hommes-porcs se rapprochèrent, et la magie élémentaire jaillit à travers les doigts d’Adamante, des arcs électriques fusant le long de ses ongles proprement manucurés pour rôtir la fourrure des monstres, qui poussèrent des couinements de douleur, les éclairs provoquant des lueurs éblouissantes.
«
ALLEZ ! Dépêchez-vous !! » intima Adamante après avoir lancé ses éclairs.
Hochant lentement la tête, Clayton se retourna, et se mit à courir à bride abattue. Adamante ne voulait pas d’un civil à côté d’elle. Pour vaincre ces monstres, elle allait devoir utiliser toute sa magie. Celui qu’elle avait balancé dans le cimetière revenait déjà à l’assaut. Ils avançaient rapidement, et ils étaient très costauds. Serrant les dents, Adamante les voyait courir vers elle, avançant à quatre pattes. Ses yeux devinrent alors lumineux, et elle s’absorba pleinement dans le courant de la magie, se mettant à léviter. Une boule électrique jaillit hors de son corps, Adamante fermant les yeux pour se concentrer, se recroquevillant en position fœtale.
Quand elle les rouvrit, une véritable tempête se mit à déferler dans l’église, soufflant les hommes-porcs, explosant les vitraux, et renversant les bancs, comme si une tornade furieuse était en train de se déchaîner à l’intérieur, balançant des cristaux de glace et des arcs électriques à foison.
Elle n’était pas la magicienne personnelle de la Reine pour rien.
OSWALD MANDUS
Il y avait forcément une puissance qui les dirigeait. Il y avait forcément un maître d’œuvre. Les hommes-porcs étaient des décérébrés. Les souvenirs affluaient progressivement, après la lecture de ces documents. Les hommes-porcs étaient tous conçus pour être des soldates serviles et obéissants. Quelqu’un avait lancé l’attaque, quelqu’un était en train de leur donner des ordres pour envahir Nexus... Et Oswald savait pertinemment de qui il s’agissait.
Le
Professeur. Il était ici, dans le Cœur, contrôlant ces monstres depuis son trône. Qui était-il ? Oswald avait beau essayer de se rappeler, l’identité de ce sinistre personnage n’arrivait toujours pas à percer. Il continuait à être une ombre, indiscernable, immobile, invisible, meurtrière et dangereuse. Le véritable ennemi était tapi ici, et il ne voulait pas qu’on l’arrête maintenant. Suivant Shad, Oswald se retrouvait rapidement dans la salle à manger. Il n’y avait pas d’autres options pour rejoindre le Cœur. Ils étaient déjà techniquement au centre de la Machine. Les plats dégageaient une odeur écœurante et pestilentielle. Oswald cligna plusieurs fois des yeux, en marchant vers une porte, au fond de la salle à manger. Cette dernière comprenait une mezzanine avec deux escaliers en bois, à droite et à gauche, permettant d’y aller. Cependant, il savait qu’il fallait emprunter cette porte-là. Il s’avançait tranquillement, et entendit soudain des grognements. Un homme-porc jaillit alors de la mezzanine, bondissant depuis la balustrade... Où il fut accueilli par une boule de feu lancée par Shad. L’impact repoussa le monstre, qui s’étala lourdement sur le sol, mais se releva rapidement, furieux, rapidement rejoint par d’autres monstres, qui dévalèrent la mezzanine. Si ce n’est leur long museau de porc, et leurs oreilles triangulaires, ils auraient presque ressemblé à des Lycans. Marchant à quatre pattes, ils grognaient furieusement, encerclant les trois fugitifs.
«
Il reste encore une arrière-garde..., grinça Jacques.
-
Vous vous attendiez à rentrer comme dans un moulin ? »
Oswald se surprit à sortir cette phrase. Il était encore capable de faire de l’humour... Alors que leur situation était totalement désespérée. Oswald réfléchit rapidement, et trouva alors une idée. Sa main s’abattit sur l’épaule de Shad, afin de capter son attention.
«
Leur nourriture ! Brûlez la table, vite !! »
Ce n’étaient que des porcs, après tout, des êtres perpétuellement affamés. Lorsque la table prit feu, emportant leurs plats, les hommes-porcs poussèrent des hurlements, et Oswald en profita. Il s’avança rapidement vers la porte close, mais continuait à boiter. Jacques, lui, allait bien mieux, rétabli par l’Hirondelle, et fut le premier à atteindre la lourde porte en fer. Il abaissa la poignée, et poussa la porte, qui s’ouvrit dans un grincement. Oswald se rapprochait rapidement... Quand un homme-porc resté en retrait atterrit juste devant lui, le séparant de Shad. Son cœur manqua défaillir. Il brandit sa canne, et l’homme-porc l’attrapa entre ses doigts, la brisant, puis le gifla avec son autre main. Le coup, d’une puissance phénoménale, souleva Mandus comme un fétu de paille, et l’envoya lourdement s’écraser sur le sol.
Sonné, couché sur le sol, son regard se porta vers Shad et Jacques. Les autres hommes-porcs se rapprochaient également.
«
Fuyez ! leur hurla-t-il.
Fuyez, pauvres fous ! »
Un homme-porc courait droit vers eux, et la dernière chose qu’Oswald vit fut Jacques refermant rapidement la lourde porte, contre laquelle le museau de l’homme-porc s’écrasa. Oswald rampait maladroitement en arrière, ses mains cherchant quelque chose, n’importe quoi.
«
Mandus..., rigola alors une voix sardonique venant de la mezzanine.
Enfin nous nous retrouvons. »
Effrayé, Oswald le vit s’approcher. Il marchait le long de la mezzanine, portant un élégant costume de soiré,e et un masque d’homme-porc.
Le Professeur.