Ces énigmes étaient évidemment liées à la religion. Quoi de plus normal, quand on voulait trouver la tombe d’un Saint ? Elena et Adamante traversèrent la première pièce, avant de laisser le Namek à la peau verte les guider. Elena se rapprocha ainsi d’Adamante, qui lui fit une brève accolade ainsi qu’un sourire, comme pour la féliciter. L’espiègle conseillère royale lui murmura alors dans le creux de l’oreille :
« Je crois que je n’aurais pas du sécher tous les cours de théologie au monastère... »
Un bref sourire traversa les lèvres de la Reine. Que la Reine de Nexus puisse prendre autant de risques en explorant un tombeau abritant des pièges mortels, voilà qui aurait probablement scandalisé Jamiël, ou même Messire Langley. Rien qu’à imaginer la tête du chambellan, elle en aurait presque pouffé. Oui, oui, ce n’était pas convenant, mais c’était aussi terriblement excitant... Comme de frôler les bornes sociales, les conventions, pour faire ce qu’on avait envie de faire. La liberté... Oui, voilà ce qu’elle ressentait en explorant ce tombeau ! Certes, c’était risqué, certes, c’était dangereux, mais c’était aussi, parallèlement, grisant et excitant, car elle avait la sensation de découvrir des choses qui lui étaient inconnues. Sa logique, à peu de choses près, était en ce sens similaire à celle de cette jeune noblesse nexusienne idéaliste qui se rendait dans les auberges des bas-fonds pour fonder des associations, et pour finir par se droguer. Elle avait au moins la finesse d’avancer à visage masqué. Elena savait que ce qu’elle faisait était risquée, et, en un sens, témoignait d’une certaine irresponsabilité, mais elle n’avait que seize ans, et, quand on avait passé sa jeunesse dans un monastère, reclus, et qu’on débarquait tout d’un coup à Nexus, sans avoir jamais vraiment eu l’occasion de quitter le Palais autrement qu’avec une solide escorte, on développait une certaine attirance pour voir son peuple... Si Elena avait connu la Terre et ses produits culturels, elle se serait certainement reconnue dans la princesse Jasmine, enfermée dans un palais luxueux, et faisant le mur pour rejoindre le reste du peuple, au risque de mettre en danger la succession royale. La logique d’Elena restait fondamentalement la même.
Le trio grimpa un petit escalier qui les conduisit dans une autre pièce, avec, à gauche et à droite, des vitraux, offrant à la pièce un éclairage multicolore. Malgré l’âge et la vétusté des lieux, il y régnait une délicate odeur de sainteté. Elena s’avança d’une statue dans un coin, à gauche de la pièce, représentant un saint, et déchiffra à nouveau l’inscription, prenant son temps, se pinçant les lèvres à chaque fois qu’elle déchiffrait les inscriptions. Le Namek se chargea ensuite de résoudre l’énigme, qui consistait à s’avancer, et à se fier à la Parole du Saint.
« Cette statue... Ce n’est pas l’un des Apôtres ? » demanda Adamante.
Elena releva la tête pour voir le visage de la statue. Il était difficilement reconnaissable, en raison de l’ancienneté de la statue, mais Elena se demandait s’il ne s’agissait pas de l’un des Apôtres qui avait insisté sur la nécessité de suivre la Parole de l’Homme-Jésus, la saine voix réconfortante du Christ. Piccolo finit par arriver au bout, et les deux femmes entendirent, dans les murs, une série de déclic, et une porte au fond de l’étroite pièce s’ouvrit, s’enfonçant dans le plafond.
« Peu importe » répliqua la Reine en haussant les épaules.
Le duo suivit Piccolo dans un étroit couloir en forme d’arc-de-voûte, qui les conduisit alors devant une ancienne salle de prière...Une nef, plus précisément. Il y avait des rangées de bancs, et, au fond, un autel, ave, au milieu, une croix de l’Ordre en bois. Des bougies brûlaient comme par enchantement, et de la lumière s’échappait également de vitraux. La pièce était assez agréable, haute de plafond, et, quand le trio commença à s’avancer, le mur derrière eux se referma.
Une fumée s’éleva alors à hauteur de l’autel, une fumée blanche, et une voix, désincarnée, se mit à jaillir d’entre les murs :
« ...Et, quand Il fut face à Ses disciples, le Christ s’exprima en ces mots : ‘‘je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée’’. La religion n’est pas que foi, elle est aussi combat de tous les instants, passion de toutes les minutes. »
La fumée blanche se dispersa ensuite, mais on put entendre des mouvements et des bruits. Le long des angles de l’église, derrière les colonnes en pierre, des statues décoratives s’animèrent comme par enchantement, et s’avancèrent lourdement vers les trois intrus, portant de lourdes épées. C’était une nouvelle épreuve, et celle-ci portait désormais sur leurs aptitudes à savoir se battre.
Autant dire qu’Adamante allait devoir solidement protéger la Reine.