Intimidé, le peintre ? Peut-être un peu. Ce n'est pas tous les jours que l'on croise la route d'une divinité, et de pouvoir la peindre en plus. Un instant son regard se défila, pendant qu'il écoutait l'incarnation lui parler. Il opinait docilement du chef pendant qu'elle vantait sa chance. Il n'allait pas le remettre en cause, il se sentait comme tel. Et lorsqu'il vit que l'apparition lorgnait sur son entrejambe, il fut même un peu gêné, et se mit à rougir. Ca ne l'aida en rien, car au contraire il banda d'autant plus fort. Elle lui faisait un effet fou, et il ne pouvait rien faire pour le cacher.
Bien ...
Une simple réponse quand au choix de Shlylayll sur l'endroit où poser. La couche était un endroit comme un autre, du moment qu'elle s'y sentait bien, c'était le principal. Son paiement ... Son esprit divaguait d'une phrase à l'autre, les hormones en ébullition l'empêchaient de penser correctement. Mais la dernière phrase de l'entité le ramena brutalement sur terre. Laisser qui ? Eux ? Lui ? Elle ? En une demi seconde, il avait compris : il allait se retrouver seul avec l'entité. Il n'avait pas du tout prévu cela ! La foule des fidèles le rassurait en quelque sorte, et l'idée de se retrouver seul à seul avec elle ... Il ne pouvait trancher à savoir si c'était une bonne ou une mauvaise chose pour lui. Toujours silencieux, mais la démarche un peu mécanique, il retourna vers son chevalet afin de se replacer derrière ce dernier, pendant qu'elle prenait place.
Certains modèles avaient besoin de l'aide du peintre pour choisir une pose, savoir comment se mettre en valeur. Il était clair que cette femme n'en avait pas du tout besoin. Après tout, venant d'une entité comme celle-ci, ça n'avait rien d'étonnant. Kelsier se concentra plutôt sur sa palette, y déposant un peu de gouache. Relevant la tête, il la voyait prendre position, s'installer comme elle le souhaitait et ... Le fixer intensément. Mais curieusement, derrière sa toile, il n'était plus aussi intimidé. Quand elle eut fixé sa pose, il la jaugea, et posa sa palette. En quelques pas, il vint à elle, et après une hésitation, il effleura de sa main l'un des genoux de l'entité.
Si vous permettez ... Là, comme ça.
Il lui faisait écarter à peine plus les jambes, se gardant bien de regarder entre de peur de ne pas pouvoir en ressortir. Demi tour, il rejoignait déjà sa toile, en reprenant la parole.
La lumière sera mieux répartie sur votre jambe comme ça.
C'était un point de vue purement esthétique qu'il donnait. Au lieu de reprendre sa palette, il choisit un crayon à papier, et se mit à l'oeuvre. Le crayon courrait sur la toile dans un petit chuintement, et le regard du peintre allait de la toile au modèle sans discontinuer. Une ou deux minutes après peut-être, il ajouta à l'intention de Shlylayll.
Je fais un dessin préalable, car avec la position choisie, vous ne tiendrez peut-être pas deux heures. Une fois l'esquisse réalisée vous pourrez poser le bras.
Elle remarquera surement qu'il est bien plus sûr de lui derrière sa toile. Entièrement à son travail et à son oeuvre, il ne se posait plus de question. Une dizaine de minutes plus tard, il lui fit signe qu'elle pouvait baisser le bras si elle le souhaitait. Rester ainsi le bras tendu n'était pas des plus agréables, pour sûr. Il mit à profit ce moment pour passer du crayon au pinceau. Mélangeant les peintures, il commençait à faire les premières teintes, et donna les premiers coups sur la toile. Le plus long commençait, retranscrire chaque couleur avec le bon mélange, les jeux d'ombre et la réalité de l'entité. De quoi l'occuper deux bonnes heures, mais avec un modèle pareil, nul besoin de se plaindre car c'était un délice que de la fixer si longtemps.