Qui je suis ? Non non non non non non non ! Vous ne posez pas la bonne question ! La bonne question, c'est CE QUE JE SUIS et pas qui je suis. Voilà qui occupera vraiment votre intérêt. Ah, je suis pressé de voir le dégoût sur votre visage ! Ne mentez pas, vous allez être dégoûtés. Ce qui est contre-nature écœure facilement les humains eeeeeeeeeeet il se trouve que je suis la définition même de cette notion. Quoi ? Vous n'êtes pas tous humains, par ici ? Bah ! Vous serez p'têt un peu moins dégoûtés, les autres. Mais parlons, parlons ! Si c'est que vous voulez, je n'm'en plaindrai pas. Les chats de gouttières et les rats d’égout savent écouter mais ne répondent pas souvent, bien qu'ils constituent mon auditoire le plus régulier et ma seule compagnie.
Je vous en prie, prenez un siège en terrasse, je vous offre un ver !
<Il vous fait vous asseoir sur un vieux sac poubelle plein à craquer, duquel montent des relents fétides. En même temps, rien d'étonnant : la petite ruelle étroite dans laquelle vous vous trouvez empeste déjà sévèrement l'urine, le moisi et les vieux déchets macérés. D'ailleurs, il y a même un petit relent merdeux qui vous chatouille les narines. Face à vous, l'homme vous imite et s'installe le plus confortablement dans ce tas de poubelles amassé là, remuant du cul pour se creuser une place comme d'autres le feraient dans un coussin épais. La grève des éboueurs fait son bonheur. Comme promis, il vous tend un vieux gobelet en plastique dans le fond duquel gigote une larve grasse. Proprement écœurant, et le sourire tout en dents gâtées que votre interlocuteur vous offre n'est pas pour vous aider à vous sentir mieux.>
Putain, ne faites pas cette tête là ! Si le Roi Lion peut se taper des limaces avec le sourire plutôt que le gros porc bien gras, vous pouvez bien croquer là-dedans ! Hakuna matata, bordel de merde. <Il joint le geste à la parole et lève son ver à votre santé avant de croquer dedans. La larve explose en une sorte de gélatine épaisse qui lui coule sur les lèvres avant qu'il ne l'essuie sur la manche de sa veste de costume élimée.> Nomnomnomnom... J'dichais quoich ? <Il avale, puis rôte. Satisfait, il s'étale dans les poubelles comme un sultan dans un canapé de coussins.> Ah, ouais. Ce que je suis. Ou ce que je ne suis pas ! Déjà, je n'suis pas Batman ! Nana na na naaaaaaaaa ! En fait, je n'suis même pas vivant. Comment on dit ? Un Zombie, voilà. Je suis un foutu cadavre qui marche tout seul alors que son corps n'est plus irrigué en sang et que son cerveau est cliniquement mort. Ma peau est grise comme un jour sans soleil et ce que j'avais de muscle a fondu depuis un moment. J'SUIS PLUS SEC QU'UN CRACKERS PUTAIN. Bon, j'ai une grosse bite, au moins. Je vous jure que c'est vrai, je l'ai volé au cadavre d'un acteur du X et je me la suis cousue. D'accord d'accord d'accord, c'pas facile de bander quand on a un réseau sanguin aussi plat que l'électroencéphalogramme qu'une poitrine de gamine de 5 ans, mais y'a toujours moyen d's'arranger.
...
J'digresse, là, non ? GRAIIIIIIIIIIIIIISSE !
Un zombie. Sec comme les bandelettes de Toutankhamon et plus mort que ta vieille tante. Le truc cool, c'est que depuis le temps je ne pue plus trop; les fluides corporels et les organes ont foutu l'camp depuis un moment et je me contente de faire la momie. Ouais, j'suis gaulé pas trop mal quand même, hein ? J'ai pas dis que j'étais un zombie ordinaire, PUTAIN ! J'suis spécial. Ridé, fripé, aussi recousu qu'un accidenté de la route mais gaulé comme les minets musclés qui secouent ta nana pendant que je te tiens la jambe. Tu veux savoir pourquoi ? Moi aussi. T'sais, tout n'est pas rose comme l'intérieur d'une chatte quand même; j'fais peur aux gamins et comme mon système nerveux est plus flingué qu'un chicanos en pleine guerre des gangs, ma coordination tête-corps ne marche plus très bien. Mes yeux apprécient parfois mal les distances, autant te dire que c'est galère pour aller peloter un bon gros nichon. J'ADORE LES GROS NICHONS POURTANT PUTAIN. Mébon, c'est comme ça. Ca me file une démarche à la con aussi, on dirait Jackson dans Thriller sauf qu'à la fin je bouffe la meuf. Attends copain, j'essaie de compenser quand même ! ON EST PAS DES BETES BORDEL ON A DES SENTIMENTS NOUS LES SACS D'ENGRAIS MOUVANTS ! Quand je peux, je m'habille un peu bien. Genre correct, avec des fringues plus fraîches que mon haleine. J'pue sévère de la gueule, hein ? Ahaha. Bon. Merde. Putain.
Des fringues. C'que j'trouve dans les poubelles, tu vois le genre ? Ben ouais, mon empire c'est le déchet ! T'imagine pas le gâchis qu'font les vivants d'trucs bien utiles. C'est cool, d'fouiller les ordures. On y trouve de la bouffe, des habits, de vieilles putes camées à baiser -hé, faut bien se vider un peu et elles ne risquent pas d'protester !
<Le petit doigt enfoncé dans l'oreille, il remue avant de faire une boule de ce qui en sort et de la balancer sur une canette vide, qui tinte légèrement à l'impact.>
WOUHOU, FIVE POINTS ! Le tir de cérumen c'est réservé à l'élite. De quoi ? Je devrai pas pouvoir tirer si j'suis mal coordonné ? C'pas faux. P'têt que je t'ai raconté une paire de salades ou que j't'ai pas tout dit ? Bah. Donc.
Je suis un zombie.
Je peux me coudre des parties d'autres gens.
Je suis gaulé comme le mec qui baise probablement ta femme dans ton dos mais j'suis normalement tout sec.
Je baise comme je peux.
Ah, ouaisouaisouaisouais ! Je mange des vivants, aussi. T'sais, d'un point de vue purement nutritionnel, j'peux manger n'importe quoi. Seulement voilà, vous autres les vivants vous dégagez une sorte d'énergie dorée de laquelle j'me goinfre comme un pervers d'une jeune chatte fraîche, tu vois l'genre ? Tout c'qui est vivant en dégage et plus c'est grand plus y'en a à bouffer ! Les morts dégagent une énergie similaire, mais noire. Et à chier parterre tellement c'est dégueu. Brefouille, c'est de ça dont j'me nourris, en fait. Mais j'dis jamais non à un bon steak, tu peux me croire ! Tu me cernes un peu plus, avec tout ça ? Non ? Tant pis. Tu sais ce qu'il y a à savoir. Ce que je suis, comme promis. Maintenant qu'on est là, le cul trempé dans des restes gras et malodorants, je vais te dire QUI je suis.
<Il se râcle profondément la gorge avant de réajuster inutilement la veste de costume qui lui sert de haut, passée sur un pull à col cheminé troué et sale. Une main dans sa chevelure mi-longue, le non-vivant pose son regard rougeâtre sur vous avant de sourire. Ses lèvres sont perclues de petites fentes et vous remarquez qu'une de ses canines est plus effilée et longue que l'autre et qu'elle dépasse, même quand il a la bouche fermée. Vraiment, ce type à une bonne gueule aux traits presque séduisants mais n'inspire pas la confiance.>
Tout ce que je sais, c'est qu'un jour je me suis réveillé et que j'étais mort. Blam. Ca fait un choc, de n'plus avoir de pouls ou de souffle, au départ. Je ne sais pas trop ce qui s'est passé, mais j'étais étendu dans une pièce qui ressemblait à une chambre d'hôtel. Sur le lit d'à côté, une bonne femme. Et VRAIMENT bonne copain, le genre que tu baiseras jamais vu ta gueule. Ultra-baisable donc, mais saignée à blanc. Les draps du lit étaient gorgés de sang, à tel point qu'ils en avaient goutté parterre. La bonne femme était à poil, positionnée comme le Christ. Sauf que Jésus, il n'avait pas un trou dans le ventre et les intestins entièrement déroulés, tu vois ? Glauque. Beuuuuuh. Et pourtant, y'avait dans ce tableau quelque chose d'excitant. Sexuellement et moralement. Cette envie morbide de regarder l'irregardable, comme quand tu es gosse et que tu te caches les yeux devant une scène "pour les grands" qui te file les chocottes mais devant laquelle tu ne peux pas t'empêcher d'ouvrir un doigt. Pour voir quand même. Je le sais maintenant, mais cette fille n'était pas morte depuis très longtemps : son énergie n'était pas complètement noire, mais encore un peu dorée. Sur le moment, j'ai pas réussi à bander en la matant. Mais j'ai eu faim, très faim. Quand j'ai quitté la chambre d'hôtel, j'avais grignoté sur elle tout ce qui me plaisait. Jamais bouffé une chatte de cette façon jusque là !
Je me suis pas trop marré à l'époque, d'avoir boulotté des morceaux de cette fille. Quand je me suis barré de la piaule comme un rat d'une poubelle dans laquelle on file un coup de pied, j'avais honte mais j'étais parfaitement repus. J'venais sûrement de mourir, mon corps ne répondait pas trop mal. Assez pour me tailler fissa après avoir fouillé mes poches et la chambre. Pas de papiers, rien sur mon identité. Et j'avais beau m'creuser la caboche, j'y trouvais rien qui puisse m'expliquer qui j'étais et ce que je pouvais bien foutre là. J'ai erré un temps, profitant de mon apparence encore humaine pour me faufiler parmi les vivants. En c'temps là, je m'inondais de parfum pour cacher l'odeur de décomposition et je me nourrissais surtout de rats et d'ce genre de merde. T'sé, ça a pas trop changé, ça ! J'me suis embarqué dans un train comme un vieux clando et j'ai été surpris par un contrôle de flic. Un pauvre gars qui vérifiait le wagon de marchandises dans lequel je me cachais. Il est passé et j'avais la dalle... J'lui ai sauté à la gorge et j'l'ai bouffé. Un putain de festin, qui m'a fait comprendre que j'adorai la bidoche humaine et cette énergie dorée qui en émanait, un festin qui m'a fait accepter ce que j'étais devenu. Adieu parfums capiteux et maquillage grossier pour avoir l'air normal; bonjour puanteur et dégaine de mort-vivant ! Ce n'était pas si mal, d'être moi. Déjà parce que j'étais purement immortel, ironiquement.
Tu m'crois pas ? Mec, putain ! Je suis un mort immortel, vu que je suis presque vivant. Tu peux pas m'tuer. Me brûler, me noyer, m'électrocuter, me faire écouter du Justin Bieber, me décapiter, me démembrer, m'asperger d'acide, me faire baiser ta mère : rien ne peut me détruire de façon définitive. C'comme ça : ma vieille carcasse revient toujours, d'une façon ou d'une autre. Même la magie ou l'exorcisme, c'est tout du bidon en ce qui me concerne ! Je peux me recoudre des morceaux pas à moi pour me refaire un corps, ou je reviens. Comme ça, paf ! Comme la petite gaule inopinée dans le métro, tu saisis le concept ? Je reviens tou-jours, always ! Dans un charnier, une morgue, des catacombes, un cimetière... Mais je reviens.
Ah, ouais. Bien pour la transition, le cimetière. C'est là que je me suis réfugié et que je continue à crécher, quand je ne pionce pas dans une benne à ordure -fais pas cette gueule là, c'est un peu comme si toi tu avais ton plumard à côté du frigo. Cimetière, donc. Je me suis mis à vivre dans les caveaux ou dans la terre fraîchement creusée et à entendre des voix. DES PUTAINS DE VOIX DANS MA TÊTE ! Comme une Jeanne d'Arc à la con. M'a fallu du temps pour piger que c'étaient celles des autres morts. Tu y crois, toi ? Les morts parlent. Et beaucoup, bordel de chatte. Ils continuent d'exister, pour certains, sous la forme d'un "réseau" de pensée qu'on appelle le Sidh, le monde des morts celte, j'crois. Bref, j'peux parler avec n'importe quel trépassé qui se trouve connecté au Sidh. Grâce à ça, j'ai aussi découvert que les tombes étaient pour moi des portes qui me permettaient de voyager d'un point A à un point B. Comment ? Pourquoi ? J'en savais foutre rien. Pratique quand même, non ? J'ai passé du temps dans les cimetières à tester tout ça copain, tu peux me croire. J'ai commencé à bouffer des traînards pleurnicheurs qui chialaient sur des tombes pour m'entretenir, comme j'ai découvert dans le même temps que le monde existait pour plein d'autres créatures. Des vampires, des monstres, des démons, des super-héros et je n'sais quel autre genre de connerie... Ce qui m'faisait me demander ce que j'étais, moi. Un putain d'mort désseché, simplement ? Qui avait bien put me faire ça, et pourquoi ? Au fil de mes pérégrinations, j'essayais de comprendre tout en m'appropriant mon corps et mes capacités. Aucun mort n'pouvait me répondre. Jusqu'à ce que je croise une présence presque comme la mienne dans le Sidh.
Il disait s'appeler Mael Og Mac. Un druide à la con. Pas comme dans World of Warcraft, BORDEL MAIS ARRÊTE DE PENSER DES CONNERIES, mais comme chez les celtes. Un esprit qui pouvait prendre possession des cadavres pour exister, t'vois ? Ce fils de pute ne m'expliqua pas tellement d'trucs, en fait. Juste que je n'étais pas un mort comme les autres et que j'allais devoir comprendre pourquoi tout seul. Il m'expliqua comme faire comme lui; prendre le contrôle mental d'un autre corps. Juste pour les morts récents et pour un temps limité, dans mon cas. Pas mal. Utile. J'ai pu me toucher les seins en devenant une nana morte pour un temps. Pis c'fils de pute de Mael m'invita à me diriger au Japon. Ouaiiiiiis, chez ces putains d'bridés ! Le druide me fila le nom d'une ville en particulier, Seikusu, me disant que quelques clés s'trouvaient sûrement là-bas. Enfin ici, puisqu'on y est. Alors me v'là !
T'as pas appris grand-chose, hein ? T'inquiète, moi pareil. Mais je viens d'arriver, je suis sorti d'une tombe d'un cimetière occidental y'a moins d'une journée. Laisse moi le temps d'apprécier les sushis et les p'tits nichons tout plats !
<Le non-vivant attrape un rat qui passe par là et lui arrache la tête d'un coup de dent. C'est peut-être le moment pour vous de partir, mais ce n'est pas évident : quand il vous a attrapé, il vous a sectionné la plupart des tendons qui auraient été utiles pour sauver votre peau. A vrai dire, vous êtes plutôt dans la merde. Ca n'a plus d'importance, pas vrai ? Vous pensez bien à crier, mais cet enfoiré de mort a déjà bouffé votre langue. En fait, vous êtes entrain d'agoniser. Désolé pour vous. Le zombie se lève en sifflotant, sortant un vieux couteau de boucher de derrière son dos. Il était probablement passé dans sa ceinture et voilà qu'il passe sous votre gorge, lentement. Vous sentez le fil acéré vous ouvrir presque délicatement la peau. Bah... Quelle importance ?>
Je vais te bouffer, maintenant. Je parle, je parle... Mais j'crève de faim. Je vais la jouer Hannibal Lecter, mon vieux. Tu sais, la scène du cerveau avec la bouteille de Chianti. Comme ça, je vais récupérer deux-trois trucs de ta cervelle. Sans rancune, vieux. Tu sais, je suis pas toujours comme ça. J'sais me t'nir et je suis même plutôt sympa la plupart du temps. Aaaaaah... C'est juste que les voyages, ça me creuse toujours un peu. Allez mon gars, on se reverra de l'autre côté. Enfin, s'tu y passes.
HAN ! Attends, meurs pas encore !
Je t'ai pas donné mon nom, putain ! On va encore dire que j'suis mal élevé !
Moi, c'est Gary.
