« Miss Warren ! Ne devriez-vous pas être en cours ? »
En entendant ce reproche, Mélinda tourna la tête vers l’homme qui l’avait invectivé. Une sucette dans la bouche, elle lisait tranquillement un livre sur un banc de l’une des nombreuses cours du lycée de Seikusu. Elle fit tourner sa sucette dans sa bouche en voyant le surveillant se rapprocher d’elle.
« Il est 11h30 ! insista-t-il. Vous devriez aller en cours tout de suite !
- Je finissais mon chapitre… » plaida la jeune vampire.
Bras croisés, le surveillant se planta devant elle, et elle continua tranquillement à lire, avant de relever la tête vers lui, retirant brièvement sa sucette à la fraise de ses belles lèvres.
« Vous me faites de l’ombre… Vous pourriez vous pousser un peu ? »
Le surveillant serra les poings, et attrapa sèchement son livre, le refermant tout aussi sèchement.
« Ça suffit ! Ton carnet de liaison ! Je vais t’exclure pour la semaine ! Tu dois apprendre à respecter tes… »
Le surveillant ne put achever ce qu’il avait à dire. Mélinda leva rapidement son pied, l’envoyant heurter les joyeuses du surveillant. Sa remontrance se termina dans un petit glapissement, et Mélinda récupéra son livre, avant de gifler avec toute sa force de vampire le brave homme, l’envoyant s’écrouler sur le sol. De quel droit avait-il osé lui voler son livre ? Elle le regarda gémir sur le sol, puis rangea son livre, afin de suçoter à nouveau sa sucette. Retournant dans le lycée, elle se dirigea vers la salle où elle était supposée suivre un cours d’histoire-géographie, et ouvrit la porte sans se donner la peine de frapper, la refermant sèchement. Un rapide coup d’œil sur la classe lui permit de constater que celle-ci était complètement amorphe. Elle vit des regards intéressés de la part de quelques lycéens, mais essentiellement des regards courroucés, jaloux, ou envieux. Il faut bien dire que Mélinda menait la vie dure à bien des lycéens de Seikusu, et elle savait pertinemment que certains la surnommaient généralement la « belle petite pute », le genre de beauté fatale à ne jamais approcher, et sur laquelle bien des rumeurs circulaient. La plupart étaient exacts. Les autres, en-deçà de la réalité.
« Bon, tu as 30 minutes de retard, j'espère pour toi que tu as une bonne raison.[/b] », lâcha la prof, une vieille chouette.
La seule prof que Mélinda respectait un tant soit peu était Hitomi. Mme Martin ne lui évoquait rien, et une bonne demi-douzaine de répliques fusèrent dans l’esprit espiègle de Mélinda, qui voyait généralement le lycée comme un lieu de détente, loin des problèmes budgétaires que posait la gestion du harem d’Ashnard.
*Je devais sucer le sang d’un lycéen, et ce fut plus long que prévu. Je peux vous montrer, si vous voulez ?
J’étais à une fin d’orgie animée, et mes partenaires avaient une soif insatiable. Il paraît que je suis très éprouvante au lit. Vous voulez un exemple ?
Je n’avais pas envie de me faire chier à votre cours de merde, et passer une demie-heure à écouter vos conneries, c’est déjà trop pour moi.
Je devais aller voir ma pauvre petite Maman, grièvement malade, et, si j’ai du, avec d’immenses regrets, arriver en retard, c’est parce que ma maman avait besoin de moi.*
Mélinda finit par répondre rapidement.
« J’ai fait la grasse matinée, répliqua-t-elle simplement.
- Allez va t'asseoir à côté d'Hiruko, finit par soupirer Mme Martin, avant de poursuivre. Pendant l'heure qui suit vous allez pouvoir bavarder car vous avez un exposé à faire ensemble. Il t'expliquera les motifs de l'exposé. »
Un exposé ? Était-ce une sinistre blague ? Elle haussa les épaules, et avança d’une démarche sensuelle, lente, entre les bancs. Elle se permit de flirter légèrement avec un voisin, caressant sa joue.
« Toi et moi, on fera ensemble un exposé bientôt, glissa-t-elle en souriant.
- Oh ouais…
- Miss Warren ! Je ne le répéterai pas ! Asseyez-vous maintenant ! »
Soupirant, Mélinda alla s’installer à côté d’Hiruko, lui offrant un ravissant sourire, tandis que ce dernier se mit à lui parler.
« Voilà, il faut faire un exposé sur le monde de 1945 à nos jours. Tu connais un peu le sujet? Moi, j'en connais un petit sur le rayon, je pense qu'il faudra qu'on se documente à la bibliothèque.
- Toi, tu sais comment parler aux filles… » railla Mélinda, avant de bâiller.
Un exposé ? Quelle farce ! Elle avait bien vu Hiruko regarder sa poitrine, le mettant mal à l’aise, ce qui l’avait naturellement fait sourire. Mélinda n’était pas sans ignorer qu’elle était belle, au point de déstabiliser n’importe qui, et même un petit intello comme Hiruko. Le fait qu’il soit dans les premiers rangs illustrait en effet qu’il devait être du genre bosseur. Elle ne tarda pas à ouvrir son cahier, tandis que la professeur parlait.
« Vous devrez faire un compte-rendu de plusieurs pages, avec un plan détaillé. Oui, Miss Kazanagaka ?
- Pouvons-nous vous rendre l’exposé sous forme informatique ?
- Oui, Miss Kazanagaka. L’exposé est à me remettre au plus tard dans un mois, et devra comprendre un plan détaillé. Vous pouvez y inclure des images, alors inutile de me poser cette question. »
Mélinda n’écoutait déjà plus, et pianotait sur son portable, envoyant des SMS à l’un des étudiants de la classe.
« J’ai envie de toi, petite folle <3 ! avait-il écrit.
Pour me baiser =) ? avait-elle répondu.
A ton avis ? »
Lui, il savait parler aux femmes… Elle continuait à envoyer des SMS, jusqu’à ce qu’une forme apparaisse devant elle. Levant la tête, Mélinda vit sa prof’, furieuse.
« Votre carnet de correspondance, Miss Warren ! »
Soupirant, cette dernière alla le chercher. La main de la prof’ s’empara alors de son portable.
« Et je confisque ceci jusqu’à la fin du cours… », poursuivit-elle.
Mélinda fronça les sourcils, et un sourire innocent se dessina sur ses lèvres.
« Très bien… Tenez… fit-elle en lui offrant son carnet.
- Vous aurez droit à une heure de retenue et à un avertissement disciplinaire, Miss Warren ! Je ne tolère pas qu’on perturbe ainsi mon cours ! »
Bla-bla-bla… Mélinda ne l’écoutait plus, alors que la prof’ s’asseyait derrière son bureau, et reprenait son cours.
« Veuillez ouvrir votre manuel à la page 85. Miss Warren ? Où se trouve votre manuel ?
- Si je vous disais où il est, vous ne me croiriez pas…
- Suivez avec votre camarade… Et vous me ferez le plaisir de lire le discours de Kennedy. »
Mélinda en profita donc pour se rapprocher d’Hiruko, posant une main sur son manuel, à proximité de celle du jeune homme.
« Tu as le droit de regarder ma poitrine, si tu veux, sussurra-t-elle, avant de parler à haute voix, se raclant la gorge. Il y a beaucoup de gens dans le monde qui ne comprennent pas ou qui prétendent ne pas comprendre quelle est la grande différence entre le monde libre et le monde communiste… »
Sur le coup, Mélinda se tut. L’une de ses mains était sous la table, et caressait l’une des jambes d’Hiruko.
« Et bien, Miss Warren ? Veuillez poursuivre !
- Je n’en vois pas l’intérêt, je connais la différence.
- Là n’est pas la question, Miss Warren !
- Ben si… Pourquoi s’embêter à lire le reste du discours, si je peux vous fournir la réponse ? »
La prof soupira.
« Vous viendrez me voir à la fin du cours. Miss Kazanagaka, veuillez poursuivre. »
Tandis que cette dernière poursuivait, Mélinda se mit à siffloter, se dandinant légèrement sur sa chaise, avant de parler à Hiruko.
« Passe-moi ton portable » ordonna-t-elle subitement.